Par le 4 novembre 2010

Le nouveau directeur artistique du Pavillon Populaire, Gilles Mora, offre aux Montpelliérains la première rétrospective française sur les travaux de Ralph Eugene Meatyard. Un plongeon dans les profondeurs du sud des États-Unis, dont l’étrangeté fascine encore.

Au départ, la Ville a fait appel à Gille Mora pour une seule exposition. «Je devais préparer une grosse expo sur un photographe américain», explique ce spécialiste de la modernité photographique américaine. Elle devait célébrer, entre autres évènements, le 50e anniversaire du jumelage entre Montpellier et Louisville. Quand l’équipe municipale lui a demandé de s’engager pleinement dans la direction artistique du Pavillon Populaire, il a accepté.

«Je n’ai jamais vu une ville aussi jeune et énergique sur le plan culturel, continue Gilles Mora. La tradition de la photo y semble bien ancrée et elle aura une place dans la programmation à venir.» Il souhaite présenter quatre expositions par an : deux montées par des commissaires étrangers et deux autres par ses soins. Pendant les quatre autres mois de l’année, le Pavillon Populaire sera ouvert aux créations montpelliéraines.

À partir de la mi-février, la galerie d’art photographique accueillera des œuvres rattachées au thème de la photographie urbaine. Alain Sayag, qui a travaillé au centre Georges Pompidou à Paris, et Monika Faber, la conservatrice en chef de la collection photographique de l’Albertina de Vienne, présenteront chacun une exposition. Mais jusqu’au 30 janvier, Ralph Eugene Meatyard, pour le Kentucky, ainsi que Clarence John Laughlin et Alex Harris, pour la Nouvelle-Orléans, occupent les murs du bâtiment.

Des photographies réalistes et improbables

Ralph E. Meatyard
Il faut s’approcher des cadres pour découvrir la complexité du travail de l’artiste. « Ralph Eugene Meatyard est né dans le Kentucky et y officiait en tant qu’opticien, raconte Gilles Mora. Le week-end, il faisait des photos qui se sont avérées être les plus importantes de la création contemporaine. » La série intitulée « The Family Album of Lycbelle Crater » est assez déroutante. Meatyard met en scène, de manière banale, ses proches. Les masques dont ils sont affublés les rendent méconnaissables… mais aussi familiers et universels.

En jouant avec l’optique de l’appareil, Meatyard arrive à capter le mouvement, donnant un effet original à ses œuvres. Il nous emmène dans un monde étrange, quasi-parallèle au nôtre. A la fois réalistes et improbables, les clichés de Meatyard entrent dans les fictions narratives que l’écrivain fantastique Ambrose Bierce appelait les « romances ». Avec ces 120 tirages originaux, Gilles Mora rend hommage à un artiste méconnu qui a pourtant influencé de nombreux photographes.

Clarence J. Laughlin

La Nouvelle-Orléans en état de catastrophe permanent

Voilà cinq ans que l’ouragan Katrina a ravagé la Nouvelle-Orléans. «Afin de célébrer à notre façon les artistes qui ont pris en images Katrina», Gilles Mora a choisi de «mettre en perspective les travaux de deux photographes attachés à cette région». Des personnages fantomatiques peuplent les cadres de Clarence John Laughlin. Avec son «œil qui ne dort jamais», selon les termes de l’artiste, il met en scène des femmes au milieu d’immeuble en ruines. Elles symbolisent un sud rayonnant qui n’est plus qu’un vague souvenir.

Alex Harris quant à lui propose une série de triptyques prise seulement six mois après la catastrophe naturelle de 2005. Les couleurs vives donnent encore plus d’agressivité aux dégâts causés par l’ouragan. Une maison sur une voiture, une statue encore debout au milieu d’un paysage dévasté. Des situations qui semblent surréalistes alors qu’elles furent le quotidien des habitants de la Nouvelle-Orléans pendant des mois.

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