La Famille de Checkpoint Charlie

Par le 14 novembre 2009

Lundi 9 Novembre 2009, 18h00. Alors que le monde a les yeux rivés porte de Brandebourg, la famille Doering, originaire de Berlin-Est, célèbre un anniversaire singulier au Checkpoint Charlie.

Aux abords de l’American sector de Checkpoint Charlie, une jeune fille demande aux passants de la prendre en photo avec sa famille, sous le panneau du plus célèbre poste-frontière berlinois.
A la nuit tombée et malgré la pluie, ils sont, enfants, parents et grands-parents, rassemblés autour du principal poste-frontière symbolisant les tensions entre les deux supergrands. Au-delà de la grande Histoire, ce lieu a été le témoin d’innombrables histoires personnelles, de sagas familiales.

C’est accompagné de deux bouteilles de Champagne, qu’ils sont venus effectuer un pèlerinage bien atypique. Sophie 20 ans, Filip 13 ans, Franck et Birgit 45 ans chacun, et les grands-parents Eva et Günter fêtent 20 ans de « liberté ». En effet, ce lieu leur évoque bien plus de souvenirs que la porte de Brandebourg.

Eva et Günter habitaient en 1961 non loin du Checkpoint. Travaillant à Berlin-Ouest, Eva se souvient de cette nuit d’Août comme si c’était hier. Elle nous raconte : «Je suis rentré chez moi et dehors, la tension était palpable. Quand je me suis réveillée le lendemain, un mur avait été construit. Je suis sortie pour partir travailler, mais on m’a interdit de passer. Je ne comprenais pas ce qu’il se passait.» Günter explicite quant à lui l’affrontement entre deux mondes antagonistes : «j’ai assisté au face-à-face des Soviétiques et des Américains le 27 Octobre 1961, les Panzers étaient en position mais ils n’ont pas bougé ce jour là.»

La famille est prolixe en anecdotes liées aux difficultés rencontrées au quotidien à cause de cette partition de Berlin. Franck explique ainsi qu’Eva, sa mère, alors atteinte d’un cancer avait obtenu un laissez-passer pour bénéficier des soins à l’Ouest. Exemple éloquent des conditions qu’il fallait remplir pour passer du « bon côté du mur ».
Car, comme le souligne Franck, si : «la thèse communiste était bonne en théorie, elle a échoué dans la pratique. On était brimé: on ne pouvait rien faire, on ne pouvait pas choisir son université, on ne pouvait pas choisir sa destination de vacances…etc»

Vingt ans, ce n’est pas seulement la durée qui s’est écoulé depuis la chute du mur, c’est aussi l’âge de Sophie. En effet, en 1989, Birgit était enceinte de sa fille. Celle-ci n’a donc pas connu Berlin-Est, mais ses parents lui ont transmis ce souvenir comme héritage : «pour moi, c’est quelque chose de lointain, mais à travers mes parents c’est un peu mon histoire qui s’est jouée.»

Son père montre fièrement le sac que sa fille porte en bandoulière: il est aux couleurs de la Freie Universität de Berlin (crée en 1948) et tant convoitée par les jeunes étudiants de l’Est qui ne pouvaient s’y rendre.

C’est donc avec une pointe d’émotion qu’ils trinquent devant cet endroit chargé de souvenirs. C’est sous le célèbre panneau « You are leaving the American sector » que ces trois générations immortalisent un anniversaire trans-générationnel qui entremêle passé et présent.

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à propos de l'auteur

Auteur : Camille Garcia

« Avec le temps va tout s’en va », disait le grand Ferré... Tout, sauf cette envie de journalisme qui me tiraille déjà depuis longtemps. Le chemin fut sinueux et peu conventionnel avant d’intégrer ce master métiers du journalisme. Cinq longues années à errer entre une première année de droit, puis un master 1 LEA Europe qui aura eut le mérite de me faire franchir les frontières du territoire français pendant deux ans. Après un passage à Liverpool chez les quatre garçons dans le vent que sont les Beatles ou une épopée andalouse chez le roi Boabdil et sa divine Alhambra de Granada, me voilà en territoire Héraultais. « L e journalisme, c’est bouché » me disait déjà à l’époque Mme François la conseillère d’orientation en troisième. « Les journalistes, tous des fouineurs » ajoutait Mr Chabrier mon cher et tendre voisin. C’est dire si journaliste est une vocation, un sacerdoce qui demande avant même de pouvoir l’exercer une grande ténacité et une grande volonté pour s’opposer aux nombreux pessimistes voire détracteurs de la profession. Et pour continuer avec la morosité ambiante, maintenant, c’est la crise de la presse, la mort des journaux, le lecteur n’achète plus, ne fait plus confiance aux journalistes... Mais alors pourquoi vouloir se lancer dans une bataille déjà perdue ? Ma réponse est simple et courte : je ne me vois pas faire autre chose et c’est une histoire de passion et de passionnés. Je crois que c’est à nous futurs journalistes de reconquérir nos lecteurs, de revaloriser l’information, de la diversifier, de la rendre originale et pluraliste en répondant aux besoins du lectorat sans oublier de susciter chez eux l’envie de s’informer, d’en savoir plus. Alors même si les journalistes précaires se ramassent à la pelle comme les feuilles mortes du grand Prévert, tant pis! Je reste convaincue qu’après l’automne vient le printemps et qu’une nouvelle génération de journalistes, la nôtre, aura sa place. Satanée optimisme quand tu nous tiens !