Poigne de fer, regard perçant, franc-parler méridional, carrure charpentée, cet ancien commercial coordonne l’organisation du marathon de Montpellier au sein du club de la ville. Détenteur d’un record de 3h au marathon et d’1h19’ au semi-marathon, cet athlète de 45 ans ambitionne de faire passer un cap à l’évènement lors de la prochaine édition en 2016.
Relancé depuis 2010 avec succès après des éditions éphémères des années 80-90 (1987, 1996, 1997), quelle est la genèse de ce projet sportif ?
Dès 2008, la Maire Hélène Mandroux, Richard Descoux (Directeur Technique National), et Bernard Amsallem (Président de la Fédération Française d’Athlétisme) souhaitaient organiser un évènement athlétique marquant sur la région. Le processus de concertation avec les clubs de la ville a abouti en 2009 à un partenariat gagnant-gagnant. Les clubs de Montpellier (Montpellier Université Club, Montpellier Athlétisme) s’engageaient à fusionner en une seule entité structurée pour concentrer les forces vives de la ville et gagner ainsi en qualité et en niveau. Il s’agissait aussi d’éviter les écueils du saupoudrage de subventions. De son côté, la ville s’engageait à doter de façon significative ce nouveau club montpelliérain qu’elle chargeait de l’organisation du marathon. Le Montpellier Athlétique Méditerranée (MAM) a donc été constitué pour répondre aux besoins de la municipalité et être notamment le porteur du projet marathon dès sa création.
Le MAM est devenu en 2012 le Montpellier Athlétique Agglomération Méditerranée (M2AM) : le passage de l’agglomération à la métropole a-t-il impacté l’organisation du marathon de Montpellier pour 2015?
En effet, il ne s’agit pas seulement d’un changement de dénomination : cela nous oblige à remanier complètement le parcours afin que celui-ci emprunte les voies de quelques communes de l’agglomération métropolitaine. Pour des raisons de timing évidentes, il a été nécessaire de repenser toute la gestion, aussi, il n’y aura pas de marathon de Montpellier en 2015. La 6ème édition se fera en 2016 sous l’égide de la métropole. 2015 sera une année de transition consacrée à la préparation du marathon métropolitain mais aussi au lancement de nouveaux projets de courses. Le M2AM a notamment programmé l’Urban Trail nocturne en mars prochain ainsi qu’un 10kms performant en octobre.
« Le marathon est une véritable vitrine »
La plupart des pôles urbains français ont maintenant leur marathon. Dans le sud de la France, Toulouse dispose du sien depuis 8 ans, Marseille depuis 6 ans, Nice-Cannes est devenu l’un des marathons les plus prestigieux, Bordeaux va lancer le sien en avril prochain. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi un tel engouement ?
Il s’agit avant tout d’une question d’image et de visibilité pour la ville organisatrice. Le marathon est une véritable vitrine. C’est un évènement sportif fédérateur qui draine un large public au profil très diversifié : du cadre à l’ouvrier, en passant par le chômeur, ou même « le baba-cool »… Cet afflux de population a des répercussions considérables pour les secteurs touristique, économique et sportif. La réalisation d’un tel projet est un objectif en termes de développement local et de politique publique.
Quel est le budget de cet évènement et comment se compose-t-il ?
Le marathon de Montpellier a un coût moyen de 300 000 € supporté pour deux tiers par le club et pour un tiers par la ville.
Il faut savoir que la ville alloue 50 000 € de subvention et que le reste est constitué par diverses prestations telles que la mise à disposition pour l’organisation : de personnels (73 policiers municipaux mobilisés), de transports en commun gratuits le jour de la course pour les coureurs et les bénévoles, de matériel (barrières notamment).
Quant à la part revenant au club, elle se compose d’une part des inscriptions (100 000 €) et d’autre part des sponsors (environ 50 000 €).
« En 2016, la 6ème édition se fera sous l’égide de la métropole »
Quelles sont les perspectives d’évolution en matière de moyens pour le marathon de Montpellier ?
Fidèle à ses engagements de campagne, Philippe Saurel a fait du marathon un des piliers fondamentaux de sa politique d’accès généralisé au sport. La course à pied est le sport populaire par excellence s’inscrivant parfaitement dans cette démarche. M. le Maire, également Président de la Communauté d’agglomération, a souhaité que le marathon devienne métropolitain. Le budget percevra en conséquence les subsides intercommunaux et passera à 450 000 € pour l’édition 2016.
Justement en contexte de crise économique, les sponsors sont-ils toujours aussi parties prenantes de tel projet ?
C’est de notoriété publique, la région de Montpellier n’est pas en bonne santé économique. Cependant, de façon générale, les grosses firmes qui nous accompagnent telles que GDF, Décathlon et Géant Casino, arrivent à s’y retrouver en termes de visibilité et de communication. En revanche, c’est plus difficile avec des partenaires régionaux qui savent pertinemment que leur visibilité n’excédera pas les trois jours de la manifestation.
« 7365 participants en 2014, chiffre qui a doublé en 3 ans »
Avec une réussite toujours croissante en matière de participation : quelles sont les retombées économiques pour la ville de Montpellier ? Ont-elles été quantifiées ?
En 2011, le service des sports de la ville a fait émerger dans une étude statistique un ratio simple : un euro investi par l’organisation en rapporte neuf aux commerçants, restaurateurs, et hôteliers. Les coureurs se déplacent rarement seuls, et viennent la plupart du temps accompagnés. Ainsi, pour un coureur, il faut compter en moyenne, deux personnes supplémentaires. Sachant, en outre, que le budget moyen (comprenant hébergement, déplacement, etc…) d’un coureur pour sa participation est de 450 à 550 €, je vous laisse faire le calcul. Le marathon est une belle opération économique.
Comment est déterminé le tracé du parcours ?
Nous privilégions avant tout les critères esthétiques et ceux tenant à la convivialité, ensuite vient la performance. Il faut que les participants puissent ramener avec eux de bons souvenirs en passant notamment dans des lieux symboliques. Quand on fait Nice-Cannes, les coureurs s’emparent de lieu prestigieux comme la Promenade des Anglais, des moments qu’ils n’oublieront pas et qui permettront de faire connaître la course. Ici bien sûr, départ et arrivée place de la Comédie. Naturellement, il faut aussi composer avec les impératifs de la ville : les travaux de voirie et d’infrastructures (tramway) qui nous obligent à remanier sans cesse le parcours d’année en année.
Réputé difficile en raison de son dénivelé, le tracé actuel ne favorise-t-il pas la découverte de la ville au détriment des performances ?
Effectivement, le parcours actuel n’est pas facile car Montpellier n’est pas une ville plate. Les chronos réalisés valent mieux sur des marathons réputés plus rapides (Berlin, Rotterdam, ou même Paris). Cependant, le passage à la métropole va nous obliger à redessiner un parcours pour 2016 empruntant les voies de communes voisines comme Peyrolles et Lattes. Ce tracé devrait gommer toutes les bosses du circuit actuel pour devenir rapide et favorable aux chasseurs de temps.
Comment se classe le marathon de Montpellier sur le plan national ? Le marathon pourrait-il accueillir les championnats de France à l’instar de son voisin toulousain en 2013 ?
Le marathon se positionne au 13ème rang national si l’on prend uniquement en compte la participation à l’épreuve reine. Sur les cinq premières éditions, la moyenne tourne autour de 980 arrivants pour les 42,195kms. Si l’on englobe la participation des relais et diverses courses annexes, notre évènement se classe au 8ème rang national avec notamment un pic de participants lors de la dernière édition culminant à 7400 coureurs. Avec 900 équipes engagées en octobre dernier, les relais abondent de manière prépondérante le contingent du peloton. Proposer de courir le marathon en relais, est devenu la formule gagnante des organisateurs de marathon. Tous les dossards relais trouvent preneurs, et nous devons en limiter le nombre tellement la demande est forte.
Cette année, trois kenyans ont survolé les débats et battu le record : comment est constitué le plateau élite ?
Notre politique en matière d’élite se limite à proposer un hébergement et à rembourser les frais de déplacement. Nous ne payons pas de prime d’engagement pour faire venir des africains. Ils viennent de leur propre chef en visant la prime offerte au vainqueur (2000 €). Lors des éditions précédentes, les kenyans avaient tout bonnement abandonné. Cette année, ils ont été non seulement au bout mais aussi réalisés un triplé inédit. Ils ont également battu le record de 2h25’20“, établi par Rachid Boulahdid en 2012, le portant à 2h23’19“.Les années précédentes, les coureurs régionaux tels Rachid Boulahdid (Agde), Sadek Bahla (Béziers) ou Habib Mosbah (Perpignan) avaient dominé les débats. Les élites permettent de dynamiser la course et de braquer un peu plus les projecteurs sur l’épreuve. Chez les filles, l’ougandaise Immaculate Chemutaï a remporté sa 3e victoire consécutive et repoussé le chrono de référence à 2h48’53“.
Quel bilan tirez-vous de ces 5 premières éditions avant d’observer une trêve d’une année ?
Globalement, le bilan est très positif. Avec des moyens inférieurs aux autres marathons, nous arrivons à proposer une belle course comme en atteste le succès populaire et la réitération de l’appui des élus de la métropole. Entre le budget honorable et la chute du nombre de bénévoles, dont je tiens d’ailleurs à saluer le travail (700 en 2010 à 550 actuellement), nous optimisons au maximum les moyens mis à notre disposition. Nous espérons garder la même dynamique en 2016 et offrir un beau premier marathon métropolitain. En attendant la prochaine édition, je donne rendez-vous aux adeptes de course de fond au trail urbain nocturne de Montpellier, le 21 mars 2015 !