« Les lycéens ont un niveau très bas en culture politique »

Par le 22 novembre 2016

Dominique Pons, professeur de science politique au lycée Georges Clémenceau de Montpellier, a abordé les primaires avec ses 52 élèves de terminale ES. Pour Haut-Courant, elle livre son analyse sur l’ouverture du vote à 16 ans par le PS et EELV, et le rôle du lycée en matière d’éducation politique.

Comment avez-vous envisagé de travailler sur les primaires avec vos élèves ?

Je souhaite aborder les primaires avec mes élèves à partir de mi-novembre. Nous allons nous pencher sur le fonctionnement de ces primaires : détailler les candidats, les différents partis ainsi que les modes de scrutin. Je souhaite également envoyer mes élèves en reportage dans les bureaux de vote à l’occasion du premier tour des républicains.

Par ailleurs, j’envisage de proposer à mes élèves de suivre l’actualité des primaires sur les réseaux sociaux. Les lycéens ne lisent pas la presse, il est donc préférable de trouver des modes d’accès à l’information différents afin de les intéresser et d’encourager une pratique plus autonome et moins rébarbative pour eux.

Pourquoi avoir choisi d’aborder les primaires si tardivement dans l’année? Une sensibilisation plus en amont aurait permis d’informer les élèves sur leur droit de vote et de les accompagner dans la compréhension des programmes politiques. Je pense notamment aux primaires EELV qui ont clôturé l’inscription sur leur liste électorale le 1er octobre.

Je reconnais que j’ai un peu loupé le coche des primaires EELV cette année. Toutefois mon intention n’est pas tant d’inciter les jeunes à aller voter mais plutôt de leur apporter quelques bases en matière de politique. Si je n’ai pas d’avis tranché sur la question du vote à 16 ans, je sais en revanche que les lycéens ont un niveau très bas en termes de culture politique. Ces problématiques ne sont pas abordées au collège et il me paraît difficile pour des jeunes de seconde d’aller voter sans aucun pré-requis en la matière. Pour beaucoup les notions mêmes de gauche et de droite ne sont pas évidentes.

La culture politique n’est pas innée, c’est quelque chose qui s’apprend et se travaille dans le temps. Je considère les primaires comme une bonne amorce pour se familiariser avec la politique, sans intention de vote spécifique derrière. Il s’agit avant tout d’un exercice que les élèves pourront remettre en pratique à 18 ans.

D’après vos observations et vos ressentis en tant qu’enseignante, diriez-vous que les lycéens sont curieux et désireux d’en apprendre davantage sur les questions politiques ?

Cela dépend des élèves. Sur les 52 étudiants que je prends en charge, l’intérêt est très inégal. Concrètement, je dirai que seul un tiers d’entre eux s’intéresse réellement à la politique.

Pensez-vous qu’il est du devoir du lycée de sensibiliser davantage les jeunes à la politique ?

Au lycée Georges Clémenceau, seules trois classes de terminale sur 13 suivent l’option science politique. Les autres élèves suivent des cours d’EMC (Éducation civique et morale) et les sujets traités sont au choix du professeur. Rien n’est réglementé dans le programme scolaire officiel en matière de sensibilisation politique. De plus, tous les lycées ne proposent pas une option science politique à leurs élèves.

En outre, il me paraît important d’avoir quelques notions d’économie afin d’aborder les questions politiques, ce que n’ont pas les lycéens en parcours littéraire ou scientifique. Pour enseigner la politique à l’ensemble des élèves il faudrait repenser beaucoup de choses. Cela serait assez compliqué à mettre en œuvre.

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à propos de l'auteur

Auteur : Chloé Garillot

Éditrice de formation, je m’intéresse à la littérature en tant que miroir réaliste ou métaphorique de nos sociétés contemporaines. Depuis toujours, la littérature participe à éveiller les consciences politiques et sociales des lecteurs et constitue un tremplin majeur dans la formation et l’avancée des débats publics. Aussi, c’est presque naturellement que cette appétence pour l’information et l’examen de nos civilisations m’a conduite vers le métier de journaliste. Loin d’être antagonistes, je perçois l’édition et le journalisme comme des pratiques d’informations complémentaires qui me permettent d’élargir mes horizons et de satisfaire ma curiosité. Aujourd’hui, je souhaite moi aussi prendre la plume, investir le terrain et m’immerger au cœur des problématiques populaires. Car, comme le disait Socrate, je suis d’avis que l’information la plus juste se glane sur « la place publique, près des comptoirs des marchands ». Idéaliste pragmatique, j’aspire à faire reculer le mépris ignorant et participer à l’émulation collective d’idées et d’opinions. En devenant journaliste, j’aspire à faire démentir la citation de Paul Valéry qui affirme que « la politique est l’art d’empêcher les gens de se mêler de ce qui les regarde ».