Charlie Hebdo décimé !

Le siège parisien du journal Charlie Hebdo situé au 10, rue Nicolas-Appert dans le 11è arrondissement de la capitale a subi une attaque armée mercredi 7 janvier aux alentours de 11h30. Deux hommes cagoulés ont fait feu à de nombreuses reprises dans les locaux du journal satirique alors que journalistes et dessinateurs étaient réunis en conférence de rédaction. Une voiture de police a également essuyé des rafales d’armes automatiques de type Kalashnikov après avoir pris en chasse le véhicule des deux hommes.

« Un acte d’une exceptionnelle barbarie »

Le premier bilan provisoire est extrêmement lourd : 12 morts dont deux policiers et 4 blessés dans « un état d’urgence absolue » (François Hollande). Les célèbres dessinateurs Jean Cabut, alias Cabu, Bernard Verlhac, alias Tignous, Stéphane Charbonnier, alias Charb, et Georges Wolinski font partie des victimes décédées (source judiciaire/AFP).

cabu.jpg

Le chef de l’Etat, accompagné du ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve et de la maire de Paris Anne Hidalgo, s’est rendu sur place une heure et demie seulement après les événements et a évoqué « un acte d’une exceptionnelle barbarie » dans lequel journalistes et policiers ont été « lâchement assassinés« . Et de rajouter que « La France est aujourd’hui devant un choc, devant un attentat terroriste« . Le Premier ministre Manuel Valls a quant à lui relevé à son plus haut niveau (« alerte attentats ») le plan vigipirate en Île-de-France. Le chef du gouvernement a également « activé la cellule interministérielle de crise et a confié la conduite opérationnelle au ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve« . Le soir, dans une allocution télévisée exceptionnelle, François Hollande a décrété une journée de deuil national jeudi 8 janvier : »Il y aura à 12 heures un moment de recueillement dans tous les services publics et j’invite toute la population à s’y associer » a annoncé le Président de la République en ajoutant que les drapeaux français seront en berne pendant 3 jours. Il a également précisé que, dans une volonté d’unité nationale, »les chefs des deux assemblées ainsi que les forces représentées au Parlement » seront convoqués jeudi. Il a conclu son intervention en affirmant que « la liberté sera toujours plus forte que la barbarie« .

« On a vengé le prophète Mohammed, on a tué Charlie Hebdo »

Si l’identité des deux hommes qui sont toujours très activement recherchés par la police reste inconnue, une vidéo amateur disponible sur Internet laisse penser qu’il s’agirait de deux islamistes radicaux. Dans cette brève séquence, on entend clairement et distinctement l’un des deux hommes crier « on a vengé le prophète Mohammed, on a tué Charlie Hebdo« . Si les véritables motivations des deux terroristes ne sont pas encore connues, ces dernières ne vont pas sans faire écho aux menaces qu’avaient essuyé la rédaction de Charlie Hebdo suite à la parution des fameuses caricatures du prophète Mahomet en 2006. Dans une interview accordée au Monde en 2012, Charb déclarait « qu’il fallait continuer à se moquer de l’islam jusqu’à ce qu’il soit aussi banalisé que le catholicisme » tout en revendiquant : « je préfère mourir debout que vivre à genoux« . Ces mots ont aujourd’hui une résonance tragique.

x2e6xny

Le Canard croque la Vème République

Le dessinateur Cabu et l’un des anciens rédacteurs en chef du Canard Enchaîné Jacques Lamalle donnaient une conférence à Montpellier mercredi 26 novembre. Ils s’étaient déplacés pour présenter l’ouvrage « Le Canard Enchaîné : la Vème République en 2000 dessins », publié en octobre dernier. Avant le débat : séance d’autographe.

Les dessins au Canard

La satire de la Vème République pèse 650 pages et non moins de 4,5 kilos. C’est un minimum, car il y a de quoi dire. La Conférence-débat commence à 18h. Cabu est encore attablé dans le coin des dédicaces. C’est alors Jacques Lamalle qui ouvre le débat, auprès de Didier Thomas Radux du Midi Libre, qui anime la rencontre, et de Man, dessinateur pour ce même journal. Le Canard Enchaîné, c’est une douzaine de dessinateurs. Pour l’ancien rédacteur en chef, il y a eu de bons clients comme « le Grand Charles » (de Gaulle), Giscard, et aujourd’hui « le petit nerveux » (Nicolas Sarkozy). De Gaulle était aussi bon lecteur. Comme le rappelle J. Lamalle, le Général avait coutume de demander : « Que dit le volatile cette semaine ?« . Mais la meilleure vente date d’octobre 1979. Le journal révélait l’affaire des diamants de Giscard [[Cette affaire mettait en cause Valery Giscard d’Estaing lorsqu’il était ministre des finances au début des années 1970. Il aurait reçu du président centrafricain des plaquettes de diamants d’une valeur d’un million de francs. L’affaire est révélée par le Canard Enchaîné.]] Plus d’un million d’exemplaires sont vendus.

Le coeur à gauche

Jacques Lamalle le concède. « On a le coeur à gauche… Mais nous ne sommes pas encartés« . Fouillant dans sa mémoire, il revient sur l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981. « Nous étions contents. Puis, soudain, nos sources ne parlaient plus« . Finalement, un Canard Enchaîné complaisant n’a pas lieu d’être. Au delà des clivages politiques, l’ancien rédacteur en chef résume : « Notre vocation est d’être dans l’opposition, plutôt que du côté de la majorité au pouvoir« .


Il est 20h, Cabu n’a pas rejoint la conférence. La foule devant la table des dédicaces s’est dissipée trop tard. Pas le temps de lâcher son crayon. Il file vers la sortie, lançant un baiser en guise de mot d’excuse…

_MG_4265.jpg