Haïti : Un secouriste témoigne

A 24 ans, Christophe Urquia, sapeur-pompier et membre de l’ONG Secouristes Sans Frontières a participé au sauvetage d’une jeune Haïtienne, retrouvée vivante sept jours après le séisme, le mercredi 20 janvier. Rencontre.

Disqueuse thermique, groupes électrogènes, tentes, médicaments …
La mission de l’ONG Secouristes sans Frontières (SSF) en Haïti s’est achevée samedi 23 janvier. Aux associations haïtiennes, ils ont fait don de 20 000 euros de matériels techniques.
« On a laissé 800 kilos d’équipements, annonce Christophe, il nous faut tout racheter pour être prêt à repartir en cas d’urgence. » [[Adressez vos dons à l’ordre de : « Secouristes Sans Frontières » 21 rue des Roussottes 21 000 DIJON]]

Encore sous le coup de l’émotion, le jeune président de la délégation Aquitaine enchaîne les plateaux et les interviews. Raconter, au delà de la douleur, la tristesse et l’indescriptible odeur de mort, pour rappeler leur victoire. Elle porte le nom d’Hoteline Losana, une jeune Haitienne de 25 ans qui fait partie des 133 rescapés.

« Ses premiers mots ont été «Merci !»»

«C’est la concrétisation des années d’entraînements», apprécie Christophe.
Il aura fallu douze heures aux membres de SSF assistés par un groupe de pompiers Haïtiens et une équipe de secours américaine pour sortir la miraculée des décombres. Dans le fracas des marteaux piqueurs sur les dalles de béton, les secouristes se sont relayés pour préserver le contact avec la jeune femme.
« Je lui disais que l’équipe ne partirait pas tant qu’elle ne serait pas sortie.»

Au moment du séisme, Hoteline se trouvait dans un supermarché à la recherche d’un cadeau pour une amie. Les appartements situés au dessus du magasin se sont effondrés sur elle.
«Elle doit sa survie à une poche d’air. Quand le bâtiment s’est écroulé, elle s’est retrouvée coincée entre deux dalles de béton, soutenues par une table sous laquelle elle a pu se protéger.
Pour l’extirper, on a dû d’abord consolider la zone, puis évacuer un corps sans vie qui gênait le passage. Il n’ y avait pas d’autres survivants. C’est déjà miraculeux d’avoir sauvé une vie sept jours après le drame.
»

Après lui avoir administré une solution saline, Hoteline a été conduite dans un hôpital où elle a été soignée pour quelques égratignures.
« Ses premiers mots ont été «Merci !» Elle a ensuite demandé des nouvelles de son frère. Celui-ci, sans nouvelle de sa soeur, l’avait crue morte.» témoigne Christophe.

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«Un deuxième tsunami»

Pourtant, cette opération aurait pu ne jamais avoir lieu. Composée de cinq médecins, une infirmière et de spécialistes du sauvetage-déblaiement, les vingt volontaires de SSF n’ont pu atterrir à Port-au-Prince que quatre jours seulement après la catastrophe.
«Dans ce genre de mission, tout se met en place minutes par minutes et on ne pensait qu’à une chose partir.»
L’ONG a finalement réussi à décoller dimanche avec un avion de la sécurité civile.

«Les américains qui gèrent l’aéroport principal de Port-au-Prince, ont fait d’abord venir leurs équipes. Une fois installés, ils ont autorisé les autres équipes de secours du monde à venir. Ici, l’enjeu ce n’est pas les victimes, c’est celui qui aura le marché de la reconstruction. »

A leur arrivée, les bénévoles de SSF ont été accueillis par une cellule de l’ONU.
«D’abord, on s’enregistrait, puis on a monté notre campement sur l’aéroport et là, on a attendu qu’ils nous donnent des missions. Le premier jour, on nous a conduit dans un hôpital de campagne pour prodiguer des soins aux blessés. On a aidé l’équipe belge en place jusqu’au couvre-feu de 18 heures. »

Pour organiser l’aide, des réunions de l’ONU regroupant toutes les ONG sont prévues tous le matins à six heures et une autre le soir.
«Le mardi (ndlr : 19 janvier), on a décidé de trouver notre propre véhicule auprès de la population locale. On ne voulait plus être tributaire de l’ONU pour se déplacer. A partir de ce moment, on était autonome et on nous a confié des missions beaucoup plus intéressantes. C’est à dire des missions d’urgence et de fouilles pour lesquelles on est compétents et équipés.»

Dans les rues de la capitale, SSF a aussi porté secours à la population, «Les gens avaient besoin d’aide, ils venait directement à notre rencontre dès qu’on arrivait.»
Ce que Christophe dit garder en mémoire ce sont les visages des gens, les cris et toutes les habitations effondrées. «C’est comme un deuxième tsunami. Il y a tellement de détresse. Tous ces gens là ne vivent pas, ils survivent.»

Malgré des souvenirs qui l’ont marqués, Christophe a repris ce lundi son travail à la caserne de Langon, en Gironde. «Çà a été dur pour moi de rentrer en France et de retrouver le quotidien. J’aimerai y retourner pour les aider. J’ai pris contact avec des gens de là bas. Je ne compte pas les abandonner.»