Jacques Aben (CNRS) : « Il existe un droit au nucléaire »

Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté dernièrement une troisième série de sanctions afin que l’Iran interrompt son programme nucléaire. Entretien à propos d’une éventuelle bombe iranienne avec Jacques Aben, ancien responsable de l’axe « crises et conflits » à l’ESID (Etats, sociétés, idéologies, défense), unité mixte de recherche du CNRS.

Pensez-vous que l’Iran veut se doter de l’arme nucléaire ? Une bombe iranienne serait-elle vraiment dangereuse?
Je crois que Téhéran veut la bombe, mais elle ne serait pas plus dangereuse qu’une autre. La détention d’une arme nucléaire a la vertu de rendre prudent. Celui qui jouerait avec saurait qu’il s’expose à des représailles nucléaires.

Dans la revue Défense nationale de juillet 2007, Tewfik Hamel, doctorant en sciences politiques et relations internationales, avance que l’arme nucléaire est l’ultime et seule assurance pour un État jugé voyou.
C’est exactement ce que la France a toujours dit pour elle-même – ce qui ne veut pas dire que ce soit obligatoirement efficace. L’Iran voudrait, grâce au nucléaire militaire, devenir une puissance régionale capable de résister à la plupart des menaces.

Est-ce que le concept de « destruction mutuelle assurée », qui a marché pendant la Guerre froide, peut fonctionner ici entre l’Iran et Israël ?
S’agissant de la Guerre froide, tout ce que l’on sait c’est qu’elle n’a pas dégénéré, le reste n’est que spéculation. Cela dit, l’équilibre de la terreur est un concept potentiellement universel, pourvu qu’il s’applique à des États dits rationnels, intéressés par leur pérennité.

Le TNP (Traité de non prolifération nucléaire) annonce que « chaque pays aura le droit de se retirer du traité s’il décide que des évènements extraordinaires, en rapport avec l’objet du présent traité, ont compromis les intérêts suprêmes de son pays ». Téhéran pourrait-il avoir une excuse pour quitter le TNP ?
A-t-on vraiment besoin d’une excuse pour faire quelque chose dont, de toute façon, les autres ne veulent pas ? Qui a demandé quoi que ce soit à Israël ? On n’est pas dans le domaine du juste ou de l’injuste, mais dans celui du « bon pour moi » ou « mauvais pour moi » et donc des rapports de forces. Il ne faut pas oublier que la France a été le premier pays disséminateur.

Peut-on parler d’un droit au nucléaire?
C’est mon point de vue. Je ne vois pas au nom de quoi certains s’arrogeraient le droit d’interdire aux autres de se doter des mêmes capacités qu’eux. Reste qu’un État est seul juge de sa propre sécurité, sous réserve que son action pour la préserver ne provoque pas une réaction excessive de ses voisins ou du Conseil de sécurité de l’ONU.

Après l’Égypte dernièrement, d’autres pays du Moyen-Orient veulent se mettre au nucléaire civil. C’est le cas de l’Arabie Saoudite, du Yémen, de la Jordanie, mais aussi de la Lybie, de l’Algérie et du Maroc. L’Iran a-t-il pu jouer un rôle dans ces décisions ?
Un système vraiment civil et donc surveillé par l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) ne peut donner lieu à utilisation militaire. Et tout le monde sait que tôt ou tard le prix du pétrole deviendra exorbitant, et qu’il faudra bien continuer à produire de l’électricité. Je ne vois donc pas le besoin d’un exemple, iranien ou autre.

Jacques Aben (CNRS) : « Il existe un droit au nucléaire »

Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté dernièrement une troisième série de sanctions afin que l’Iran interrompt son programme nucléaire. Entretien à propos d’une éventuelle bombe iranienne avec Jacques Aben, ancien responsable de l’axe « crises et conflits » à l’ESID (Etats, sociétés, idéologies, défense), unité mixte de recherche du CNRS.

Pensez-vous que l’Iran veut se doter de l’arme nucléaire ? Une bombe iranienne serait-elle vraiment dangereuse?
Je crois que Téhéran veut la bombe, mais elle ne serait pas plus dangereuse qu’une autre. La détention d’une arme nucléaire a la vertu de rendre prudent. Celui qui jouerait avec saurait qu’il s’expose à des représailles nucléaires.

Dans la revue Défense nationale de juillet 2007, Tewfik Hamel, doctorant en sciences politiques et relations internationales, avance que l’arme nucléaire est l’ultime et seule assurance pour un État jugé voyou.
C’est exactement ce que la France a toujours dit pour elle-même – ce qui ne veut pas dire que ce soit obligatoirement efficace. L’Iran voudrait, grâce au nucléaire militaire, devenir une puissance régionale capable de résister à la plupart des menaces.

Est-ce que le concept de « destruction mutuelle assurée », qui a marché pendant la Guerre froide, peut fonctionner ici entre l’Iran et Israël ?
S’agissant de la Guerre froide, tout ce que l’on sait c’est qu’elle n’a pas dégénéré, le reste n’est que spéculation. Cela dit, l’équilibre de la terreur est un concept potentiellement universel, pourvu qu’il s’applique à des États dits rationnels, intéressés par leur pérennité.

Le TNP (Traité de non prolifération nucléaire) annonce que « chaque pays aura le droit de se retirer du traité s’il décide que des évènements extraordinaires, en rapport avec l’objet du présent traité, ont compromis les intérêts suprêmes de son pays ». Téhéran pourrait-il avoir une excuse pour quitter le TNP ?
A-t-on vraiment besoin d’une excuse pour faire quelque chose dont, de toute façon, les autres ne veulent pas ? Qui a demandé quoi que ce soit à Israël ? On n’est pas dans le domaine du juste ou de l’injuste, mais dans celui du « bon pour moi » ou « mauvais pour moi » et donc des rapports de forces. Il ne faut pas oublier que la France a été le premier pays disséminateur.

Peut-on parler d’un droit au nucléaire?
C’est mon point de vue. Je ne vois pas au nom de quoi certains s’arrogeraient le droit d’interdire aux autres de se doter des mêmes capacités qu’eux. Reste qu’un État est seul juge de sa propre sécurité, sous réserve que son action pour la préserver ne provoque pas une réaction excessive de ses voisins ou du Conseil de sécurité de l’ONU.

Après l’Égypte dernièrement, d’autres pays du Moyen-Orient veulent se mettre au nucléaire civil. C’est le cas de l’Arabie Saoudite, du Yémen, de la Jordanie, mais aussi de la Lybie, de l’Algérie et du Maroc. L’Iran a-t-il pu jouer un rôle dans ces décisions ?
Un système vraiment civil et donc surveillé par l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) ne peut donner lieu à utilisation militaire. Et tout le monde sait que tôt ou tard le prix du pétrole deviendra exorbitant, et qu’il faudra bien continuer à produire de l’électricité. Je ne vois donc pas le besoin d’un exemple, iranien ou autre.