L’après-Frêche : entre continuité et rupture

La mort de Georges Frêche, le 24 octobre 2010, a signé la fin d’une histoire politique extraordinaire, qui aura duré près de quarante ans en Languedoc-Roussillon. Élu député socialiste pour la première fois en 1973, puis maire de Montpellier de 1977 à 2004, pour enfin devenir président de la Région jusqu’à sa mort, le natif de Puylaurens dans le Tarn aura laissé une trace indélébile. Les conséquences de sa disparition sont encore floues. Toutefois, les contours se dessinent déjà.

La fédération socialiste de l’Hérault dans la tourmente

Mise sous tutelle controversée et existence d’adhérents fantômes au sein d’une des fédérations les plus puissantes de France, la rupture avec le Frêchisme entraîne un chaos dans le camp de la gauche régionale. Tout cela à l’approche des élections cantonales.

Quel héritier à Georges Frêche ?

La succession de Georges Frêche dans le monde politique socialiste pose un certain nombre de questions. L’une d’elles concerne son héritage direct. Aujourd’hui, plusieurs de ses proches tentent de se positionner comme successeur de « l’Empereur de Septimanie ». Présentation de quatre d’entre eux.

Une aubaine pour l’extrême droite ?

Il y a un aspect crucial concernant les conséquences politiques du décès du président de la Région Languedoc-Roussillon : le profit que pourrait en tirer le Front National. Car la captation d’une partie de cet électorat par Georges Frêche n’était plus un secret. Pour Jacques Molénat, « aucune voix ne lui était indifférente, de l’extrême gauche à l’extrême droite. »

Tour d’horizon des partis politiques

Alors que le Parti socialiste tente de se réorganiser en Languedoc-Roussillon et que la bataille s’intensifie pour se positionner en tant que leader, les autres partis politiques ne sont pas en reste. Les prochaines échéances électorales vont se transformer en une lutte pour récupérer un certain nombre d’électeurs qui étaient davantage fidèles à un homme, Georges Frêche, qu’à un parti politique.

Emmanuel Négrier : « Le PS est obligé de réintégrer les exclus héraultais dans la perspective des primaires »

Le décès de Georges Frêche provoque le bouleversement d’un système politique bien ancré en Languedoc-Roussillon et des défis à relever pour ses successeurs. Emmanuel Négrier, directeur de recherche en Science Politique à l’Université Montpellier 1 et membre du CNRS, apporte un éclairage sur les perspectives de l’après-Frêche.

Haut Courant : Quels vont être les principaux défis du successeur de Frêche, Christian Bourquin, à la tête de la région pour les mois à venir ?

Emmanuel Négrier : Les principaux défis vont être d’instituer une continuité de gouvernement et en même temps d’imposer une marque particulière. La région est une institution très personnalisée, surtout en Languedoc-Roussillon. En l’occurrence, Christian Bourquin a une posture présidentielle puisqu’il a exercé la présidence au sein d’un département. Son défi personnel est d’imposer sa marque tout en donnant à l’administration, le gage d’une certaine continuité politique. Dans cette phase immédiate d’après-Frêche, un peu dramatisée, on a pu voir ses deux facettes. Elles sont personnalisées d’une part par le fait qu’il ait donné beaucoup de gages à celui qui représente l’administration, Claude Cougnenc, directeur général des services, et d’autre part en intégrant des alliés très proches des Pyrénées-Orientales comme Jacques Cresta. Il a également revu à la baisse le rôle de certains conseillers régionaux comme François Delacroix. Autrement dit, il y a l’appui sur des forces de l’administration, la force des amitiés politiques proches et la force de la coalition frêchiste qui se situe à l’échelle régionale et à l’échelle de l’agglomération.

Est-ce que la réforme des collectivités territoriales et la situation économique de la région ne vont pas être un frein à ces défis ?

Le deuxième défi est justement d’assumer les effets de la réforme des collectivités territoriales. Avec une diminution des marges de manœuvre et l’anéantissement en pratique du pouvoir fiscal, c’est-à-dire la possibilité de jouer sur le taux des impôts reversés au Conseil Régional, les finances de la région vont être soumises à plus de rigueur.
Le troisième défi est de faire sortir le Languedoc-Roussillon de ce marasme que l’héroïsme frêchiste n’a pas réussi à masquer. La place de la région en terme d’emplois et de développement économique montre qu’il y a beaucoup de marge de progression sans forcément beaucoup de moyens pour le faire. La recherche des moyens et des ressources pour le développement par le biais de l’institution régionale reste difficile sachant que ce n’est pas la collectivité la plus puissante.

Pensez-vous que l’accession de Christian Bourquin est synonyme de continuité du Frêchisme ?

Cette accession est le signe d’une crise de pouvoir dans un cadre de continuité. Mais en même temps, l’ouverture vers d’autres possibilités de gouvernement, de rapprochement avec le parti socialiste. Dans l’immédiat après-Frêche, c’est la victoire d’un certain frêchisme contre des candidats qui étaient éventuellement prêts à tourner la page de manière un peu plus nette avec les Gardois et les Audois. La faiblesse de la région est de se présenter comme une petite compétition interdépartementale, où ce sont les Pyrénées-Orientales et l’Hérault de Navarro qui donnaient le ton au Gard et à l’Aude.

Est-ce que la nomination de Robert Navarro comme premier vice-président de la Région, n’est pas une erreur stratégique pour réintégrer les 58 membres frêchistes au sein du Parti socialiste ?

Cela pourrait être une erreur stratégique si la réintégration des 58, et particulièrement des Héraultais dans ce lot, était un objectif impératif. La stratégie adoptée consiste au contraire à maintenir une frontière entre le parti lui-même et l’appareil politique régional. Dans une logique de maintien d’autonomisation d’un Parti socialiste en Languedoc-Roussillon, cette stratégie peut se comprendre d’emblée dans l’après-Frêche. Si on avait liquidé immédiatement l’appareil du parti socialiste héraultais au sens de Navarro, le président de la région se serait rendu dépendant de l’autre clan. Il devait négocier avec l’autre branche du parti socialiste composé par Vézinhet, Alliès. L’idée est de compter sur les conseillers régionaux qui vont procéder à l’élection du président. Ce n’est pas une élection populaire mais une élection entre pairs, donc il fallait tenir compte des forces vives des conseillers régionaux. A terme, la stratégie est de dire que le PS est obligé de réintégrer les exclus héraultais dans la perspective des primaires. Cette fédération est quand même un bastion du Parti Socialiste.

Maintenant que Jean-Pierre Moure est à la tête de l’agglomération, le projet d’une « grande agglomération » va-t-il pouvoir aboutir ?

Jean-Pierre Moure n’est pas la reproduction de Georges Frêche. C’est un personnage à part qui peut se tourner vers la constitution d’une grande agglomération. Le plus logique serait une métropole jusqu’à Sète mais politiquement, c’est délicat. La région de Montpellier a toujours été un foyer de contentieux intercommunal très vif avec des entrées et des sorties du périmètre.

Est-ce que le film Le Président apporte un réel éclairage sur la personnalité de l’homme politique ?

Le film apporte beaucoup d’éclairage sur la politique sous Frêche, sur une forme de vide du quotidien d’une politique en campagne. Il montre aussi le rapport ambivalent de la jeune garde, comme Frédéric Bort, qui apparaît encore plus cynique, encore moins ouverte à l’expression d’une vision politique que Georges Frêche. C’est un film qui se déroule durant une période très particulière de la vie politique de Frêche où l’on ne parle absolument pas de l’action publique, de projets. On se gargarise sur une vague populiste, sur un petit monde politique local et régional, du coup ça ne traduit pas ce que Frêche était en politique pendant les 33 années de son action à l’échelle de Montpellier et de la région depuis 2004. C’est une vision épuisée du Frêchisme.

Robert Navarro : « L’après-Frêche a surpris tout le monde »

Premier secrétaire de la fédération socialiste de l’Hérault de 1990 à 2010, Robert Navarro fait partie des 58 exclus du Parti Socialiste. Il a su profiter de la redistribution des cartes de la « Frêchie » en devenant premier vice-président du conseil régional du Languedoc-Roussillon. Directement concerné par la succession de Georges Frêche, il a accordé un entretien à Hautcourant dans lequel il évoque l’héritage du « Président », la fédération de l’Hérault ainsi que son avenir politique.

La question de la succession directe de Georges Frêche semble problématique. Existe-t-il un héritier naturel ? Robert Navarro donne son avis :

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La fédération socialiste de l’Hérault a été mise sous tutelle en septembre 2010. La gestion de l’ancien premier secrétaire est vivement critiquée par ses détracteurs. Robert Navarro est notamment soupçonné d’avoir falsifié le fichier des adhésions et d’avoir créé la XIe section, bras armé au service des Frêchistes. Il répond à ces accusations :

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Georges Frêche se plaçait au-dessus des partis politiques. En plus des votes de gauche, il avait réussi à capter un électorat traditionnellement de droite. Avec sa disparition, la gauche languedocienne est-elle en danger ? Robert Navarro répond et aborde la question de son avenir politique personnel :

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Montpellier à l’heure du haut débit

La qualité du débit de connexion à Internet est devenue un vrai enjeu pour la ville et le département. Tous les deux ont misé sur la nécessité d’intégrer à leur politique le développement du réseau haut et très haut débit.

Augmenter la rapidité d’accès à Internet compte aujourd’hui comme un enjeu politique, culturel et social. Dans cette optique, Montpellier s’est lancée dans la course à l’équipement numérique dès 1983 avec le réseau Pégase.
La ville fait très tôt le pari d’équiper son réseau de télécommunications pour les entreprises et de l’étendre par la suite aux structures de la ville et aux citoyens.

En 2005, Montpellier s’est engagée aux côtés de DRl’agglomération pour apporter le haut débit. Désormais, la fibre optique est la nouvelle priorité et trouve des appuis auprès des principaux fournisseurs d’accès. Quatre quartiers de Montpellier en bénéficient depuis fin 2010 : Malbosc, Croix-d’Argent, Antigone, Hôpitaux-Facultés. Et d’ici 2012, toute la ville sera desservie selon la mairie. Elle rejoint ainsi la liste des principales agglomérations bénéficiant de la nouvelle technologie, comme Bordeaux, Lyon ou Lille.

Un équipement d’envergure départementale

Dans cette dynamique, le département a de son côté tablé depuis 2007 sur le développement du réseau Num’Hér@ult, soutenu par la région Languedoc-Roussillon. Soucieux de garantir l’accès large à une connexion de bonne qualité, le Conseil Général de l’Hérault s’est engagé à étendre le réseau public Internet et garantir au minimum 2 Mégabits/seconde via des infrastructures de télécommunications.Crédit photo CCI Montpellier

Plusieurs entreprises se sont rattachées à l’initiative pour permettre de couvrir les villages les plus reculés et, à terme, permettre la réception du très haut débit d’ici 2011. En mêlant les différentes technologies de réception Internet (fibre optique, ondes radio), le département veut réduire les inégalités que rencontrent les habitants des quatre coins de l’Hérault. Coût de l’opération : 81,75 millions € dont 27,9 millions d’euros provenant de participation publique selon le Conseil Général de l’Hérault ; 61,7 millions d’euros selon la Gazette de Montpellier.

La commercialisation du réseau par Hérault Télécom, la société délégataire du département auprès des divers fournisseurs d’accès, permettra d’obtenir des offres similaires à celle des grandes agglomérations telle Montpellier, assure le Conseil Général. Les efforts déployés en matière de connexion par les collectivités contribuent à donner un rayonnement numérique à Montpellier.

Quelques dates :

1983 : Montpellier lance un programme de câblage, le réseau Pégase.

2005 : Lancement d’«Agglomération innovante», programme d’amélioration des infrastructures de réseaux haut-débit. La couverture ADSL de l’agglomération montpelliéraine passe de 94,4 % du territoire à 98,2 % à la fin de l’année.

Mise en place de « Quartier Wi-Fi Access », couverture de 85 sites par la technologie Wi-Fi par Orange.

2007 : déploiement des premiers réseaux fibre optique par la ville de Montpellier. Le Conseil Général de l’Hérault lance Num’Hér@ult, projet d’équipement du réseau départemental.

2008 : Free est associé à Montpellier pour poursuivre la mise en place de la fibre optique.

2009 : équipement des parcs d’activités de la ville en réseau fibre optique : Eurêka, Euromédecine, Grabels, Millénaire, parc de l’Aéroport à Pérols par l’agglomération.

Été 2010 : Orange lance un plan d’investissement en fibre optique pour Montpellier d’un montant de deux milliards d’euros. 98,7% des Héraultais bénéficient d’un débit de 2 Mbit/s minimum selon le Conseil Général.

2011 : l’Hérault compte couvrir l’ensemble du département en très haut débit.

Robert Navarro tacle les hommes du « Président »

Dans un entretien accordé à HautCourant le lundi 7 février, Robert Navarro, sénateur et premier vice-président de la Région Languedoc-Roussillon, s’est lâché sur Frédéric Bort.

France Jamet : « Les élus du FN en Languedoc-Roussillon sont à 100% derrière Marine »

France Jamet est la présidente du groupe Front National au Conseil régional du Languedoc-Roussillon. Elle est également la fille d’Alain Jamet, membre historique du FN et président du comité de soutien à Marine Le Pen. Elle supporte la vice-présidente du FN dans la prochaine élection interne du parti, visant à désigner le successeur de Jean-Marie Le Pen.