Le Second Tour de Haut Courant

Haut Courant poursuit son partenariat avec Montpellier Plus, le quotidien gratuit de Montpellier. Des membres de notre équipe ont pu suivre les faits marquants de ce deuxième dimanche électoral. Sur Montpellier, le seul suspense restait dans les pourcentages obtenus. La liste d’Hélène Mandroux passe largement au-dessus de son adversaire Jacques Domergue. La bonne surprise de la soirée est à mettre à l’actif de Jean-Louis Roumégas et des Verts (fusionnée avec la liste LCR-CUALs-MTE de Francis Viguié). Cette liste d’opposition peut se prévaloir de ses 18,62% pour revendiquer une place dans l’exécutif montpelliérain.

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L’agriculture héraultaise se lance dans l’alternance

Des agriculteurs Héraultais utilisent une nouvelle technique de travail du sol pour favoriser un équilibre écologique naturel.

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Dans l’Hérault, quelques agriculteurs se mettent à l’agriculture dite de conservation, déjà bien présente au Brésil, mais encore marginale dans le sud de la France. Fini le labour traditionnel. Tenez-vous bien ! Place… à la TCS, au SD et au SDCV ! Le labour, bien qu’encore pratiqué dans 80 % des exploitations françaises, connaît une forme plus simplifiée avec la TCS, technique culturale simplifiée. « La terre n’est plus creusée en profondeur, elle est travaillée superficiellement », explique Christophe Muret, viticulteur à Castelnau-de-Guers, près de Pézenas. Il a déjà adopté cette technique et, dès les prochaines cultures de blé, il passera aux SD, semis directs, et aux SDCV, semis directs sous couverture végétale. Ces deux méthodes, encore très rares, ne concernent qu’un pourcent des surfaces en France. Les agriculteurs languedociens convertis se comptent sur les doigts de la main.

Des réductions d’engrais et de désherbants

Comme son nom l’indique, le SD consiste à replanter sans le moindre labour. Entre deux cultures, il faut planter une couverture végétale (SDCV) afin de permettre la rotation de la terre. Une fois la vigne taillée, Christophe Muret passe du temps devant l’ordinateur ; il se documente. Des entreprises spécialisées lui fournissent une documentation importante. Il a déjà cette certitude : le passage à cette agriculture s’impose par « nécessités économiques et écologiques ». Entre deux cultures de blé – une graminée – une légumineuse est plantée pour fixer l’azote par ses racines. Ce gaz capté dans l’air est restitué à la terre à la destruction de cette couverture. Le blé, au moment de la pousse, bénéficie de cet apport en azote. Les choix du couvert, très nombreux, dépendent du climat et de la nature du sol.

L’impact écologique, plus difficile à apprécier reste notoire. Une réduction de l’érosion se mesure par effet des vers de terre et des racines qui laissent la possibilité à l’eau de s’écouler. En un mot « la terre retrouve un rythme de vie plus naturelle, équivalent à celui d’une prairie ».

Les premières années, le rendement s’infléchit légèrement, compensé en parti par des gains de productivité : moins de main d’oeuvre et utilisation réduite de machines agricoles. Christophe Muret estime, pour sa part, économiser cinquante litres de gazole par hectare, mais également réduire les engrais et les désherbants. Ces économies sont tant financières qu’écologiques.

Le retour sur investissement s’effectue, normalement, au bout de la quatrième année. A ce terme, les agriculteurs escomptent un gain d’environ 10% de leur productivité.

Avec ces nouvelles techniques, l’agriculteur se met au vert en préservant ses marges et sa production.

La difficile intégration des Roms de Béziers

Jean-Philippe Turpin, militant à la Cimade de Béziers (Comité inter mouvements auprès des évacués) fait partie d’un collectif de soutien aux quatre-vingts Roms installés à Revaut-le-Bas, sur la route de Maraussan, à l’est de Béziers. La plupart viennent des pays de l’ex-Yougoslavie et d’Italie. L’ABCR (Association biterroise contre le racisme) est également membre du collectif. Par ailleurs, Jean-Philippe Turpin dirige le Cada (Centre d’accueil des demandeurs d’asiles).

Une des interventions remarquables de la Cimade remonte au 17 mai 2006, jour d’une descente de police musclée où tous les hommes ont été embarqués privant ainsi leur famille (au sens large) de l’unique source de revenu. Le collectif a aidé les familles à organiser leur défense, à trouver des avocats et, au quotidien, à régler les problèmes administratifs et répondre à la survie élémentaire. Jean-Philippe Turpin témoigne : « La mairie de Béziers a, par exemple, la particularité de gérer elle-même la banque alimentaire mais prive les Roms de ses services. Nous sommes obligés de recueillir la nourriture par des associations pour la redistribuer. » Il a des mots très durs envers le pouvoir municipal. Le refus de Raymond Couderc, premier magistrat de la ville, de scolariser des enfants roms à la rentrée de septembre 2006 a conduit les familles au tribunal[ [Voir la réponse de Raymond Courderc, maire de Béziers ]]. « Les Roms n’en revenaient pas d’être de l’autre côté de la barre. » En plus, ils ont gagné !

Ignorants les règles de droit français, ils reçoivent des conseils juridiques et pratiques sur le mode de vie en France. Un d’entre eux, la trentaine et apatride, précise que ses origines sont indiennes. Il est né en Italie, ses enfants en France. « Le Rom veut travailler, mais sans papiers, c’est difficile. On vit des aides, souvent, je travaille au noir, pour les travaux de la maison, du jardin, ou dans les voitures d’occasion. » Il reconnaît que certains membres de sa communauté « volent pour pouvoir acheter du pain aux enfants. » Cela explique, sans doute, les tensions avec certains Gadjé (non-Roms). « Il y en a des bons, des mauvais, des racistes, comme partout. » Mais ils ne doivent pas oublier, conclut celui qui se présente comme gitan par commodité de langage, que les Roms « sont des humains, comme les autres. »

« Je dois rentrer chez moi ? Mais je vais partir où ? »

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Le collectif organise une réunion spécialement pour les Roms un mardi sur deux. L’occasion d’exprimer les doléances et pour les associations de tenter de faire avancer les choses. A l’ordre du jour, la question de la collecte de vêtements, l’avancée de la souscription ou encore la possibilité d’avoir un jardin devant sa caravane pour cultiver de quoi se nourrir. Le vendeur de voitures d’occasion au noir est présent. Il assure la traduction pour la communauté. Entre eux, ils parlent romani, la langue des Roms, mais aussi italien pour se rappeler où ils sont nés. Le ton monte lorsque Nadia Chaumont, chargée de la scolarité et membre de l’ABCR, explique qu’un enfant a été violemment frappé par de jeunes Roms à l’école. L’information n’est pas claire mais, vite, une femme rom se plaint du mauvais traitement que font subir les Gadjé à sa fille collégienne. Elle refuse d’envoyer sa fille au collège car elle a déjà commencé à fumer. La mère craint qu’elle ne passe bientôt au cannabis. Jean-Philippe Turpin rappelle l’importance de la scolarité des enfants, seul véritable moyen de prouver l’intégration des parents.

Là dessus, une mauvaise nouvelle. La préfecture serait sur le point de proposer aux Roms de rentrer chez eux par le biais de l’aide au retour volontaire. Cela concerne les habitants de Mercourant, sur la route de Bédarieux, de l’autre côté de la ville. La proposition vaut aussi pour ceux de la route de Maraussan et de Cantagale. Après échange, le traducteur gitan précise qu’aucun des siens n’accepterait cette offre. Apatride, il souligne, tout sourire : « Je dois rentrer chez moi ? Mais je vais partir où ? » Comme si chez lui, c’était au bord de la route de Maraussan. Et nulle part ailleurs.

Georges Frêche, victime de ses excès verbaux ou Le Pen de gauche ?

Dans le cadre de la sortie de son nouveau livre, « L’assassinat raté de Georges Frêche » (Editions Singulières), Alain Rollat, ancien journaliste au Monde et fondateur de La Gazette de Sète, revient sur ce qu’il appelle un « cas d’école ». Deux ans après l’affaire dite des « sous-hommes », l’auteur décrypte les rouages de la machine médiatique qui selon lui se serait emballée contre le président de la région Languedoc Roussillon. Après le scandale des «Blacks de l’équipe de France», ce sont ces deux « affaires » qui l’ont « décidé à opérer sur Georges Frêche un arrêt sur image, (…), comprendre comment ce notable auréolé par ses œuvres montpelliéraines avait pu devenir ce despote taxé de racisme dont la plupart des médias véhiculaient l’image. »

A quelques jours de la sortie officielle de son ouvrage (prévue pour le 21 février 2008) que nous avons pu nous procurer, Alain Rollat nous a accordé un entretien exclusif.

Avant d’aborder le sujet du livre, Alain Rollat revient sur le rachat du groupe des Journaux du Midi et la responsabilité du Groupe Le Monde dans cette affaire.
Alain Rollat a propos du Midi Libre

Hautcourant : Pourquoi ce livre ?

Alain Rollat : Pour opposer mon objection déontologique à l’équation aberrante selon laquelle Frêche serait assimilable à Le Pen. L’idée que je me fais du journalisme m’a conduit à démontrer l’absurdité de cette fausse symétrie. Je me suis attelé au décryptage de cette image mensongère parce que personne, visiblement, n’avait envie de le faire. J’ai cherché à comprendre pourquoi et j’ai démonté un mécanisme médiatique prouvant que l’addition de demi-vérités ne fait pas toujours une somme véridique.

Vous comparez le cas de Georges Frêche avec la vindicte roumaine, avec le massacre d’Ouvéa et les prisonniers israéliens. N’est-ce pas là une façon de créer de l’émotion avec Frêche que de comparer des scandales d’Etat, des prises d’otage, des exécutions sommaires de tyrans, des manipulations dramatiques, avec la vindicte dont est victime un seul homme et seulement pour des mots ?

Attention aux raccourcis trompeurs ! Le cas Frêche me paraît un cas d’école, en matière de traitement de l’information, parce qu’il prouve que l’addition de bouts de vérité ne fait pas toujours une vérité vraie. Quand je me réfère au syndrome de Timisoara je le fais pour renvoyer à un phénomène identifié : le refus, parfois observé chez les médias, de sortir de l’erreur collective consécutive à un emballement irrationnel. Quand je rappelle certaines des folles rumeurs colportées en Nouvelle-Calédonie dans la période où je « couvrais » ce sujet pour Le Monde, je le fais pour illustrer le complexe de Sem et Japhet exposé dans la Bible : le refus de voir la réalité en face comme les fils de Noé refusaient le spectacle de leur père ivre…Je ne recherche aucun effet émotionnel, je m’inscris dans une méthodologie qui m’oblige à préciser quels instruments j’utilise pour ma démonstration. Les comparaisons auxquelles je procède ont justement pour but de montrer qu’en politique le mot ne suffit pas à faire l’homme. Chez Frêche, l’emploi du mot « sous-hommes » présentait toutes les apparences du racisme mais cela n’autorisait pas à conclure que Frêche était raciste. Quand le journalisme se fait sommaire il n’est plus digne de ce nom.

Votre ouvrage paraît inattaquable sur le fond, vous démontez l’engrenage dans lequel Georges Frêche a été pris. Dans ce cas pensez-vous qu’il existe des vérités de fait absolues qui ne souffrent pas la contradiction ?

Les vérités de fait n’étant que des vérités « modestes », selon le qualificatif d’Hannah Arendt, elles ne sauraient être absolues. Les vérités journalistiques ne sont pas des vérités scientifiques. C’est justement pour cela que les règles déontologiques du journalisme préfèrent les notions d’intégrité et d’honnêteté intellectuelle au critère prétentieux de l’objectivité qui n’est que l’horizon à atteindre…

A propos de l’affaire des harkis, et sans avoir à préjuger de l’antiracisme de Frêche, est-il acceptable qu’un homme politique puisse utiliser en public de tels termes teintés de populisme ? Cela vaut aussi pour l’affaire des Blacks dans l’équipe de France ?

Non, aucun homme politique ne saurait être exonéré de ses écarts de langage. Populisme rime avec démagogie. Mais, en démocratie, c’est au citoyen qu’il appartient d’être vigilant. On a les élus qu’on mérite.

Avec cette affaire, Georges Frêche n’est-il pas dans la situation de l’arroseur arrosé et n’a-t-il pas suscité les réactions que l’on sait dans la mesure où, le matin même, à une inauguration du tramway, il avait justement déjà estimé que les harkis étaient « les cocus de l’UMP » ?

Oui, vous avez raison. A force de verser dans la violence verbale Georges Frêche a subi un retour de manivelle qui a coalisé contre lui, chez ses adversaires, comme chez certains de ses propres amis, ainsi que chez les journalistes locaux, tous ceux qui ne supportaient plus ses excès de langage. Ceux-là ont été ravis de le voir puni par là où il avait péché…De là à écrire « Frêche = Le Pen »… Les journalistes qui ont franchi ce pas ont manqué à toute retenue, et surtout à leur devoir d’information véridique.

A propos des malheurs de Frêche avec la Septimanie, l’An I de la gratuité, le Midi Libre se défendait des attaques du président de la région en arguant que le quotidien faisait son travail. Les articles étaient tous négatifs selon vous. Est-ce que Midi Libre avait un parti pris ou a fait preuve de négligence ?

Le rachat du groupe des Journaux du Midi, laisse à craindre, selon Alain Rollat un « appauvrissement du contenu rédactionnel« .

Alain Rollat sur La Depeche du Midi (2)

La défense de Midi Libre aurait été plus crédible si le quotidien régional s’était montré équitable. En montant en épingle tout ce qui apparaissait en négatif dans le bilan régional de Frêche, à l’automne 2005, sans publier en regard tout ce qui pouvait apparaître en positif, Midi Libre a donné le bâton pour se faire battre. Frêche y a vu une volonté de lui nuire, il a déclenché des représailles en privant le journal d’une partie de ses recettes publicitaires, puis ce contentieux a dégénéré quand l’affaire des « sous-hommes » a éclaté, en février 2006. A ce moment là Midi Libre a réglé ses comptes avec Frêche dans tous les sens du terme. Il a préféré la loi du talion à celle de l’information, ce n’était plus du journalisme mais une vulgaire empoignade.

Georges Frêche s’est-il réjoui des turbulences du Midi Libre? L’auteur donne son avis sur les relations qui unissent une presse régionale et la classe politique.
Alain Rollat, presse régionale et pouvoir politique (3)

Vous parlez des relations entre le président de la région et le Midi Libre qui sont houleuses. Le Midi Libre n’a-t-il que des torts ? Dans son rapport aux médias Frêche n’utilise-t-il pas des moyens de pression ?

Non, tous les torts ne sont pas du côté de Midi Libre. Georges Frêche a fait de ses rapports avec la presse des rapports de force et dans ce genre de situation la vie est difficile pour tout le monde. Le traitement de l’information en subit fatalement des conséquences et c’est dommage.

Dans la lutte des quotidiens régionaux ou locaux La Gazette est souvent taxée de « frêchiste ». Est-ce avéré ? Et cela n’est-il pas de nature à créer un système médiatique binaire ?

La Gazette de Montpellier s’est construite, depuis 1987, en opposition culturelle au contenu de Midi Libre qui était alors en situation de monopole. Et il vaut toujours mieux, où que ce soit, disposer de deux journaux plutôt que d’un seul. L’information des Montpelliérains y a trouvé son compte. Georges Frêche, dont les relations avec Midi Libre ont toujours été tumultueuses, a naturellement tiré profit de ce pluralisme mais le contenu de La Gazette a toujours été équilibré. Je veux dire que si son fondateur, Pierre Serre, ne fait pas mystère de ses convictions de gauche, ni de sa sympathie personnelle pour Georges Frêche, le contenu de son hebdomadaire n’est pas, pour autant, celui d’un journal militant ou celui d’un journal inféodé. Frêche n’y est pas épargné quand il mérite d’être épinglé. Le succès spectaculaire de La Gazette prouve, me semble-t-il, que, à Montpellier, les citoyens apprécient beaucoup la diversité que leur garantit ce système binaire en matière d’information, sans oublier la contribution satirique de « L’Agglo-rieuse »…

Après les deux livres de Delacroix et Maoudj votre ouvrage a-t-il vocation à servir de synthèse ou à faire pencher la balance ?

Mon livre n’est ni un pamphlet ni un dithyrambe. Je ne suis plus, depuis très longtemps, en recherche de vocation. Si ma démonstration pouvait faire réfléchir certains de mes jeunes confrères à la nécessité de l’humilité dans la pratique de notre métier – et parfois au devoir de dire « non » à son propre employeur- j’en serais le plus heureux des vieux crabes…

Alain Rollat, ancien du Monde et des Journaux du Midi, se sait attendu par la profession sur le contenu de son livre. Ne craint-il pas une levée de boucliers? Pourquoi parler de « cas d’école »?
Alain Rollat se sait attendu par la presse sur la sortie de son livre

Frêche a-t-il encore un avenir politique (région ou ministère) ?

Il ne sera jamais ministre et il le sait. C’est trop tard. Quel chef de gouvernement prendrait d’ailleurs le risque de sa « grande gueule » ? Georges Frêche aspire à finir sa carrière au Sénat et à exercer un second mandat à la présidence de notre région. Je lui souhaite de sortir de la vie politique par cette grande porte car il mérite mieux que l’image qu’il donne trop souvent de lui-même.

Quel avenir entre Georges Frêche et le nouveau groupe de presse régional, allant de Bordeaux à Montpellier?
Alain rollat, Frêche face à la restructuration des groupes de presse

Montpellier est-elle encore aujourd’hui une « surdouée » ?

Le fait d’avoir été surdouée ne l’empêche pas de vieillir mais je trouve que c’est une ville qui vieillit bien parce que sa population a conscience que c’est une chance de vivre à Montpellier.

Etes-vous devenu «frêchiste» ?

Le journalisme politique, tel que je le conçois, interdit la connivence. Il impose, au contraire, la prise de distance maximale vis-à-vis du « sujet » à observer. Mon regard est celui de l’entomologiste. Frêche m’intéresse parce qu’il est un « spécimen » peu commun dans le paysage politique. J’ai longtemps observé le fonctionnement de Georges Pompidou sans devenir pompidolien, puis celui de Valéry Giscard d’Estaing sans devenir giscardien, puis celui de François Mitterrand sans devenir mitterrandolâtre. Je suis allergique aux étiquettes. Je n’étais pas frêchiste et ne le suis pas devenu. Je tiens trop à ma liberté d’expression pour l’aliéner.