Mitterrand ou le verrou sauté de la tragédie algérienne

Jeudi 4 novembre sur France 2 était diffusé un documentaire exceptionnel : « Mitterrand et la Guerre d’Algérie ». Signé de l’historien Benjamin Stora et du journaliste François Malye, il retrace le rôle souvent ignoré et complexe que joua le futur Président de la République, en appliquant une sévère politique de répression en Algérie.

Angolagate : « Papa m’a dit » et Pasqua condamnés

Le tribunal correctionnel de Paris a rendu aujourd’hui son verdict sur l’affaire de « l’Angolagate ». Les accusés, au rang desquels se trouvent Charles Pasqua et Jean-Christophe Mitterrand, écopent de lourdes peines. Rappel des faits.

L’Angolagate, c’est avant tout un mauvais roman d’espionnage, un Ian Fleming sans James Bond, où se croisent le fils d’un Président de la République socialiste, un ministre de l’Intérieur gaulliste, un écrivain et des hommes d’affaires internationaux véreux.

1994 : l’Angola est en pleine guerre civile. Profitant de la situation chaotique qui suit la chute du bloc de l’Est, deux hommes d’affaires de nationalité française – Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak – font main basse sur plusieurs stocks d’armes soviétiques, livrés ensuite au gouvernement angolais, en guerre contre les rebelles de l’UNITA. Le prix total de la transaction est estimé à 790 millions de dollars américains. Parmi la cargaison, environ 850 000 mines antipersonnel, qui aujourd’hui encore continuent à tuer des civils.

Cette vente d’armes, effectuée par l’intermédiaire de la société Brenco International (dirigée par Falcone et basée à Paris) n’est à aucun moment officiellement autorisée par le gouvernement français, comme l’exige pourtant la loi. Or, étrangement, entre 1994 et 1998, plusieurs personnalités plus ou moins proches du pouvoir touchent d’importantes rémunérations de la part soit de Brenco International, soit de son président, Pierre Falcone. La raison de ces « rémunérations » ? Dans la plupart des cas, il s’agit officiellement du paiement de « conseils » dispensés à l’entreprise.

Au fur et à mesure que l’enquête – commencée en 2000 – avance, la liste de ces étranges conseillers devient de plus en plus fournie : Charles Pasqua (alors ministre de l’Intérieur du gouvernement Chirac et membre du bureau politique du RPR), Jean-Christophe Mitterrand (directeur de la « cellule africaine » de l’Elysée), Paul-Loup Sulitzer (écrivain), Jacques Attali (conseiller de François Mitterrand), la Sofremi (société en partie contrôlée par l’Etat et dépendant du ministère de l’intérieur), la banque Paribas (soupçonnée d’avoir financé Falcone et Gaydamak), etc. Au total, plus de 42 personnes physiques – de gauche comme de droite – ou morales ont figuré sur la liste des prévenus, que ce soit au titre de recel de biens sociaux et trafic d’influence ou à celui de trafic d’armes illicite.

Le tribunal correctionnel de Paris a donc rendu aujourd’hui son jugement, en condamnant à de lourdes peines la plupart des prévenus:

  Charles Pasqua écope de trois ans de prison, dont deux avec sursis et de 100.000€ d’amende.

  Jean-Christophe Mitterrand, alias « Papa m’a dit » a été condamné à payer 375.000€ d’amende, et à deux ans de prison avec sursis.

  Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak (qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt en France) ont été condamné à 6 ans de prison ferme.

  Paul-Loup Sulitzer écope lui de 15 mois de prison avec sursis et de 100.000€ d’amende.

Au total, 36 des 42 prévenus ont été condamnés. Parmi les relaxés se trouve Jacques Attali, ancien conseiller de François Mitterrand et actuel conseiller de Nicolas Sarkozy. Les avocats de Charles Pasqua, de Pierre Falcone et d’Arcadi Gaydamak ont d’ores et déjà annoncé qu’ils vont faire appel de cette condamnation.

Mais malgré ces condamnations, l’affaire « Angolagate » laisse un goût amer dans la bouche : apparemment, on ne connaitra jamais le rôle réel du RPR ainsi que ceux du Premier Ministre et du Président de l’époque (respectivement Jacques Chirac et François Mitterrand). Mêmes regrets quant à l’absence de l’Angola à la barre, et ce d’autant plus que le Président actuel, José Eduardo dos Santos, était également au pouvoir lors de la livraison des armes. Rappelons que lors de sa visite en Angola en mai 2008, Nicolas Sarkozy – accompagné de toute une kyrielle d’entreprises françaises – avait annoncé qu’ « aucun ressortissant angolais n’est poursuivit », et que « le Président dos Santos a déjà obtenu de ne pas être directement impliqué ». Il semblerait qu’en dépit des promesses de campagne, l’ère glorieuse de la françafrique ne soit pas prête de se terminer.