Jean-Pierre Grand: « L’affaire Filippis est le symbole des dérives de la presse »

Jean-Pierre Grand, député UMP et maire de Castelnau-le-Lez (Hérault), est l’un des premiers parlementaires à s’être indigné de l’interpellation musclée de l’ancien directeur de publication de « Libération », Vittorio de Filippis le 28 novembre 2008. Le motif ? Une plainte en diffamation datant de 2007 concernant un commentaire d’internaute sur le site du journal.
Interrogé à ce sujet, l’élu nous livre sa position sur l’évolution de la presse.

Jean-Pierre Grand dénonce la disproportion des moyens employés lors de l’arrestation, une dérive. Alors que les ministres de la Justice et de l’Intérieur défendaient la régularité de la procédure, Nicolas Sarkozy a exprimé « son émoi ». M. Grand estime que son intervention à l’assemblée nationale [[le 1er décembre, « Je considère aujourd’hui que, dans notre démocratie, on a le de voir absolu de préserver la liberté de la presse »]] n’est pas étrangère à cette rectification.

Se référant certainement à Serge Dassault, il pose la question de l’indépendance des titres.
Il préconise une aide publique « plus forte » pour pallier la capitalisation « embarrassante » des journaux.
Il n’hésite à faire appel à la mémoire collective pour rappeler que le secret des sources est un enjeu à part entière.

Le député villepiniste exprime ses réserves quant aux initiatives de Nicolas Sarkozy : réforme de l’audiovisuel et États Généraux de la Presse.

« Le journalisme par « effraction », une réponse aux stratégies du pouvoir »

Vendredi 1er février 2008. Le journaliste Guillaume Dasquié se retrouve à nouveau face aux étudiants du Master professionnel « Métiers du Journalisme » de Montpellier. Thème de l’intervention : le journalisme par « effraction », ou comment exercer sa profession par tous les moyens et continuer de délivrer une information honnête au citoyen.

Fin novembre, il avait fait le déplacement pour parler de son expérience comme journaliste d’investigation, de sa vision du métier, et délivrer quelques conseils pratiques aux reporters en formation. Entre-temps, le 7 décembre dernier, Guillaume Dasquié a été mis en examen pour « détention et diffusion de documents ayant le caractère d’un secret de la défense nationale ».Tout ça pour avoir publié, le 17 avril 2007, dans Le Monde, une enquête qui démontrait qu’avant le 11 septembre 2001, la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) avait anticipé les menaces d’Al-Qaida sur les États-Unis et qu’elle avait transmis ces informations aux services secrets américains (voir « Dérives et pressions pendant la garde à vue du journaliste Guillaume Dasquié »). Le jeudi 24 janvier, les avocats de Guillaume Dasquié ont déposé une requête en annulation de la procédure devant la chambre d’instruction de la cour d’appel de Paris, au nom du droit à la protection des sources journalistiques. « Obtenir des informations sensibles génère forcément le type de réaction qui m’est arrivée. Mais ce n’est pas parce qu’un journaliste arrive à se procurer une information avec le tampon « confidentiel défense » qu’il doit tourner la tête et passer à autre chose » explique-t-il, déterminé. Presque deux mois après sa garde à vue de trente-huit heures et sa mise en examen, il revient sur sa « mésaventure », renforcé dans ses convictions :

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Pour Guillaume Dasquié, exercer le métier de journaliste dans un monde où règnent les stratégies de communication est devenu un sacerdoce, une mission quasi impossible sans le contournement des méthodes traditionnelles. Il introduit alors le concept d’un journalisme nerveux, virulent et déterminé, dont les seules limites restent, pour lui, la morale et l’éthique. « Les journalistes se doivent de contourner les dispositifs violents de la part des acteurs politiques ou individuels qui visent à cadenasser l’information : faire du vrai journalisme aujourd’hui, c’est faire du journalisme par « effraction » ».

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Qui parle de journalisme par « effraction », parle des moyens – pas toujours très légaux – que le journaliste utilise pour aller chercher l’information, ou alors pour se protéger lui-même. Le meilleur exemple : les micros et caméras cachés.

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Certains professionnels, comme le journaliste Edwy Plenel, s’interdisent le recours à de tels procédés, quel que soit l’enjeu de l’information à glaner. Guillaume Dasquié, lui, ne voit ces techniques que comme des outils au service du jeu « informateur-informé ». « Pour s’en sortir dans le jeu de la communication, le journaliste ne doit pas être l’instrument du jeu, mais le manipulateur lui-même. Pour produire de l’information sur des sujets touchant la raison d’État, il faut forcément briser les règles, passer par des chemins détournés. Au bout du compte, on est soit manipulateur, soit manipulé. Au journaliste de choisir son rôle ».

En conclusion, Guillaume Dasquié évoque l’avenir du journalisme d’investigation avec le développement de l’information sur Internet. Pour lui, les médias on-line offrent de véritables perspectives : « C’est un vrai succès aujourd’hui dès que des sites Internet produisent de l’information de qualité. Ils développent une identité journalistique propre et une crédibilité supérieure aux supports papier. Les possibilités de développement ramènent les journalistes aux questions essentielles, aux bases du métier ».