Turcs, Kurdes : même combat

Par le 25 janvier 2014

Mardi 21 janvier, la Maison des Relations Internationales de Montpellier ouvrait ses portes pour le vernissage d’une exposition de photos sur les résistances turques et kurdes. L’occasion de rappeler que le gouvernement turc ne fait pas de distinction dans la répression de ses concitoyens.

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manifestations_turques_et_kurdes.png Ils étaient une petite trentaine, réunis dans la grande salle de la Maison des Relations Internationales de Montpellier ce mardi 21 janvier pour assister au vernissage d’une exposition de photos intitulée « Gezi Park et les résistances turques et kurdes ».
Accrochés aux murs en grand format, des dizaines de clichés donnés gratuitement par le collectif turc NarPhotos. Un collectif de photographes engagés dont la volonté est de sensibiliser les gens aux enjeux démocratiques en Turquie.
Sur les photos, des processions de femmes, les portraits d’hommes disparus à la main, des photos d’une foule massée à Diyarbakır pour le nouvel an kurde (Newroz) ou encore des gaz lacrymogènes lancés contre les manifestants.

Une répression qui s’exerce depuis des années au Kurdistan

protestation_femmes_kurdes_istanbul.png La force de ces photos ? Mettre en évidence la violence de la répression des autorités turques, que ce soit contre les Kurdes ou les Turcs.
En juin dernier à Istanbul pendant Gezi Park, les Stanbouliotes et les Occidentaux ont été témoins de la violence que l’Etat turc exerce depuis des années à l’encontre du peuple kurde.
Dans la salle déambulent les visiteurs. Certains sont venus par curiosité, après avoir lu l’info dans la presse locale, d’autres déjà sensibles à la question kurde ont fait le déplacement exprès. A l’instar de Guy Guyot, cofondateur de la Maison des Tiers-Mondes et de la Solidarité Internationale. « J’ai découvert le problème kurde à titre personnel. En 1962 avec des copains, on voulait partir en voyage, on a lancé une pièce, c’est tombé sur le Kurdistan, voilà comment j’ai connu cette région. Depuis je continue à m’intéresser au problème. En 2004 par exemple, avec José Bové, on avait diffusé un documentaire sur le sujet à Montpellier. »
Silence dans la salle, Sophie Mazas (Présidente de la Ligue des Droits de l’Homme de Montpellier et membre de l’Institut des Droits de l’Homme du barreau de Montpellier et du Syndicat des Avocats de France) prend le micro pour un petit discours. C’est grâce à sa collaboration avec le collectif NarPhotos que l’exposition a vu le jour. Engagée depuis des années dans la défense des Droits de l’Homme, Sophie a été particulièrement touchée par la question kurde. « J’ai découvert ma vocation en 1999. C’est la date à laquelle Abdullah Öcalan leader de la résistance kurde a été condamné à mort*. J’étais en droit et je ne comprenais pas cette décision qui me semblait tellement injuste. Je me suis donc intéressée à la question kurde et je suis partie pour le Kurdistan en 2000 et en 2002. »

Accusé d’appartenir à Amnesty International, il est arrêté

occupy_gezi_18.06.2013.pngCette exposition s’inscrit dans le cadre de conférences qui auront lieu vendredi 24 janvier autour de la question des avocats menacés dans l’exercice de leur fonction. Pour prolonger leur visite, les curieux pourront ainsi assister à des débats sur les mécanismes juridiques de répression de la défense en Turquie. Au programme, de grands avocats turcs tels que Ercan Kanar ou encore Osman Baydemir, maire de Diyarbakır, mais aussi Ragip Zarakolu, journaliste victime de son engagement à plusieurs reprises. Accusé d’appartenir à Amnesty International, organisation qualifiée de « subversive » par les autorités turques, il est condamné à cinq mois de prison en 1972. Plus récemment en 2011, il retourne en prison, cette fois en raison de son engagement pour la reconnaissance du génocide arménien.
Malgré la répression, Turcs et Kurdes continuent de remettre en question la violence d’un Etat autoritaire qui perd chaque jour sa légitimité. Avec une démocratie de façade affichée, on est loin du principe de liberté d’expression et d’opinion. Ces conférences sont l’occasion d’en apprendre un peu plus sur ce voisin pas si lointain.

* Abdullah Öcalan n’a finalement pas été condamné à mort. En 2004, la peine de mort est abolie en Turquie dans la perspective d’intégrer l’Union européenne. Abdullah Öcalan échappe ainsi à la peine capitale. Il demeure tout de même condamné à perpétuité sur l’île d’Imrali en mer de Marmara.

A savoir :

 l’exposition de photos a lieu du 21 au 27 janvier 2014 à la Maison des Relations Internationales de Montpellier. L’entrée est libre et gratuite (voir les horaires d’ouverture de la Maison des RI) ;

 jeudi 23 janvier à 19h40, diffusion en avant-première au Diagonal du film « My sweet pepper land » suivi d’un débat ;

 vendredi 24 janvier, conférence-débat «[ Les mécanismes juridiques de répression de la défense en Turquie ->http://www.lexposia-advertising.com/newsl/barreau-de-montpellier/2013/journee-de-l-avocat-menace-montpellier-janvier-2014.htm
]» dans la Salle Rabelais – Esplanade Charles de Gaulle, Montpellier (9h-12h et 14h-18h30), entrée libre.

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à propos de l'auteur

Auteur : Julia Baron

Originaire du pays des crêpes et du beurre salé en folie, j'ai passé la première partie de mes études à la Faculté de Droit et de Science Politique de Rennes. Puis, dix ans après avoir vu l'Auberge Espagnole au cinéma, j'ai décidé de tenter l'expérience en Turquie. Cette année Erasmus a été extrêmement riche en rencontres et en découvertes. D'autant plus que la fin de mon séjour à Istanbul a été marquée début juin 2013 par les manifestations de Gezi Parc. Des femmes, des hommes, qu'importe l'âge, sont sortis dans la rue avec pour seules armes leurs slogans et leurs voix. « Faşizme karşı omuz omuza » (Au coude à coude contre le fascisme). Ils ont été accueillis par un déchaînement de violence. Gaz lacrymogènes, canons à eau, matraques, tout y est passé. De nombreux journalistes, qu'ils soient turcs ou étrangers ont été passés à tabac. Mes amis turcs m'ont fait prendre conscience de la chance que nous avions de pouvoir nous exprimer librement. Beaucoup m'ont dit qu'ils avaient renoncé à leur rêve d'être journaliste devant les trop grands risques de la profession. Cette expérience a renforcé mon envie de devenir journaliste.