« Ça n’a rien à voir avec le cubi !», proteste Sophie Vialis lorsqu’on lui demande la différence avec un Bag-in-box. Pour autant, à bien y regarder, le packaging nous semble rester le même.
La chargée d’études à Inter Rhône, organisme interprofessionnel viticole de la Vallée du Rhône, ne goûte guère la comparaison : « Le cubi c’est un simple contenant en plastique, alors que pour le BIB la poche se rétracte autour du vin dès qu’il est consommé. Ça empêche le vin de s’oxygéner et il peut être conservé plusieurs semaines. C’est un emballage très technique. »
Le Bag-in-Box, littéralement « le sac dans la boîte », est composé d’une poche en plastique flexible fixée sur un robinet étanche. Le tout est placé dans une boîte en carton. Sous l’influence de la gravité, la poche se rétracte et l’air ne peut pas pénétrer dans l’emballage lorsque le vin s’écoule.
Un système en pleine expansion malgré quelques a priori
Selon des chiffres publiés dans les Echos, le conditionnement en BIB représente aujourd’hui plus d’un tiers des ventes en grande surface. Ce conditionnement représentait il y a 15 ans seulement 2 % des ventes françaises. En Europe, ce sont les pays scandinaves qui dopent le marché. L’étude d’Ubifrance-MAAP, intitulée « Les vins biologiques sur 14 marchés clés. Potentiel pour les vins bio français », met en avant une hausse des ventes de 50% en Norvège et 60% en Suède pour l’année 2010.
Pourtant, auprès de nombreux acheteurs non connaisseurs, le vin en boîte n’a pas forcément bonne presse. Plus connu pour contenir de la piquette que des Châteauneuf du Pape, les moins de 35 ans boudent encore le Bag-in-Box. Ils sont d’ailleurs nombreux à ne pas connaitre le BIB.
Au rayon vin du supermarché du coin, Ana, 24 ans et jeune professeure des écoles, n’a jamais entendu parler du BIB mais bien davantage de l’ancien cubi. Quand on lui explique le principe de l’innovation, elle rechigne : « Ça enlève le beau côté de la bouteille ancestrale et le geste de déboucher une bonne bouteille. » La distance à parcourir est encore longue pour changer les mentalités. Pour l’instant, les jeunes ne l’utilisent souvent que pour des événements festifs.
Emballage plus pratiques à petits prix
La hausse continue des ventes – qui devrait atteindre la moitié de la consommation de vin d’ici à quelques années – a d’autres explications. Comme l’avance l’association Performance BIB, cette augmentation des ventes est aussi due à la simplicité d’utilisation du BIB ainsi qu’à ses qualités indéniables : facile à transporter, léger et incassable.
Le Bag-in-Box permet aussi la consommation responsable. Point important puisqu’il devient possible de ne boire qu’un seul verre tout en évitant le gaspillage. « Je n’y avais pas pensé, mais ça c’est vraiment un bon point », admet Ana.
Le bon rapport qualité-prix convainc souvent les consommateurs. Un conditionnement en BIB de cinq litres représente 6,66 bouteilles et pour le même prix, il est possible de déguster 25 à 35% de vin en plus. Le vin bio étant plus cher qu’un vin traditionnel, cela pourrait amener plus d’un consommateur de vin bio à se tourner vers le BIB pour en réduire le coût.
Vin bio en BIB : le bon dosage à trouver
«L’important est de bien maîtriser son process pour mettre du vin bio en BIB», souligne Sophie Vialis d’Inter Rhône. Les deux produits ont des exigences différentes et parfois contradictoires.
Les spécialistes cherchent toujours plus de techniques afin de supprimer l’oxygène qui peut être piégé dans le Bag-in-Box. Pour réduire l’impact de l’oxygène sur le vin, il est parfois nécessaire d’augmenter les sulfites – appelés de façon plus technique le SO2. Or le cahier des charges à remplir pour que du vin soit reconnu comme bio implique une plus faible dose de sulfites. Les producteurs de vin bio ont donc moins de marges de manœuvre et il s’agit de trouver la juste mesure.
« Vin bio et BIB sont tout à fait compatibles » confirme Sophie Vialis, qui est l’une des intervenantes de la conférence sur le Bag-in-Box lors du Salon Millésime bio. Brice Abbiate, chargé de mission qualité/œnologie au Salon Millésime Bio, partage son avis : « Ce n’est pas antinomique de faire du BIB et du bio, on peut faire du vin de très bonne qualité avec peu de SO2. »
Selon lui, c’est aussi plus écologique de boire du vin bio en BIB. Une valeur qui est l’une des plus fondamentales pour les amateurs de produits écologiques.
Un conditionnement plus respectueux de l’environnement
« La première impression qu’on a, c’est que le verre pollue moins » analyse Brice Abbiate. Recyclable à l’infini, c’est pourtant le contenant de vin le plus polluant. Une étude scandinave menée par Bio intelligence Service en 2010, a donné lieu à des réponses particulièrement intéressantes. Que ce soit au niveau des émissions de gaz à effet de serre, de l’acidification de l’air, de la consommation d’eau, de l’épuisement des ressources naturelles, ou de l’énergie primaire utilisée, le BIB est toujours – et de loin – plus écologique que la bouteille en verre avec un bouchon en métal.
Une tendance générale montre aussi que les emballages à plus grande capacité ont tendance à avoir de plus faibles impacts sur l’environnement. Cela permet de réduire la quantité de matière utilisée. À vide, un BIB pèse 150g de carton et plastique lorsque le verre pèse environ 1,8 kilo de verre. Ce qui offre une empreinte carbone plus faible pour le BIB, puisque le transport et le stockage nécessitent moins d’énergie. Le recyclage est lui aussi facilité lorsqu’il reste moins de déchets à traiter.
Un recyclage moins évident pour le BIB comme pour la bouteille
Pour recycler les emballages de vin bio, l’avancée du BIB est plus limitée. Si le verre est recyclable indéfiniment, Brice Abbiate indique qu’il « a un gros impact sur l’environnement ». L’empreinte carbone est très forte puisqu’il est nécessaire de faire tourner des fours à très haute température, « qu’on ne peut pas éteindre pendant une quinzaine d’années » précise le chargé de mission pour Millésime Bio.
Pourtant, il n’est pas non plus facile de recycler le BIB. Si le carton est 100% recyclable, le plastique est plus problématique. D’après l’étude réalisée par Valérie Pladeau pour SudVinBio, il est « potentiellement recyclable après séparation de l’outre et de la boîte en carton ». Le recyclage avance sur le sujet notamment via la filière bioplastique, et « des projets sur les technologies de séparation des matériaux qui s’organisent en France », selon l’étude. Reste donc encore au citoyen adepte du bio à recycler davantage et plus efficacement, afin de mettre de l’eau dans son vin.