Carol : Apologie de la délicatesse

Par le 21 janvier 2016

Primé lors du dernier festival de Cannes pour l’interprétation de Rooney Mara – ex-aequo avec Emmanuelle Bercot pour « Mon Roi » – « Carol » est le septième film de Todd Haynes à qui l’on doit l’original biopic de Bob Dylan « I’m not there » (2007) ou encore la série « Mildred Pierce » avec Kate Winslet. Sorti le 13 janvier, cette adaptation du roman de Patricia Hightsmith « The Price of Salt » est un émerveillement perpétuel.

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Touchées par la grâce. Deux femmes, Thérèse et Carol, une rencontre, un amour, un interdit. Dressé dans le contexte des années 50, ce mélodrame impose un schéma simple mais d’une finesse étincelante. La grandeur et la portée de l’œuvre ne sont pas le fruit du hasard. Todd Haynes aime « les fifties » et démontre une capacité de reconstitution incroyable. En s’amusant avec ses costumes et ses décors, il restitue l’âme et l’élégance d’une époque, donnant à ses œuvres, et particulièrement à Carol, un classicisme flamboyant tout en gardant une idée de réel historique.

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Inscrire une aventure homosexuelle dans une époque réfractaire à cette idée n’est pas anodin. Mais au lieu de jouer sur l’interdit de cette liaison, il focalise son film sur le désir inhérent, sur l’amour inéluctable des deux protagonistes. Et c’est là que le film emporte la mise, par sa sincérité.

La composition de ses cadrages et le placement de sa caméra sont d’une justesse rare. Pas de fioritures, pas de mouvements brusques mais un sens de la mise en scène dans son terme le plus pur. Une élégance qui prend la pleine mesure de son époque, de ses codes, de ses décors et ses costumes tout en mettant en exergue la moindre des attentions : un regard, un sourire, une caresse, une hésitation. Une manière éblouissante de filmer la pudeur des sentiments.

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Bercée par les mélodieuses touches de piano de Carter Burwell – qui signe une sublime bande originale – l’œuvre affiche une délicatesse et une sensibilité sans égal. Une émotion palpable qui doit beaucoup à Cate Blanchett et Rooney Mara. La première illumine chaque plan de sa prestance, la deuxième bouleverse par son authentique sincérité. Elles animent au détour d’un regard ou d’un geste toute la complexité de leur relation attisée par l’ardeur d’une flamme qui refuse de s’éteindre. Comme le souvenir d’une étreinte qui vous hante. Somptueux.

La bande annonce du film :

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à propos de l'auteur

Auteur : Jonathan Rodriguez

Né en terre Montpelliéraine, le journalisme m’est toujours apparu comme une évidence. Les notions de partage et de curiosité m’ont constamment accompagné dans mon développement. Rendre compte du monde qui nous entoure est mon leitmotiv. Passionné par le cinéma depuis le plus jeune âge - où les douces images de Terrence Malick m’ont bercé – ainsi que par le sport et sa ferveur enivrante, le journalisme me permet à travers ses formats divers et variés de transmettre ses passions, les faire vivre et c’est ce qui est le plus important. La transmission. Ma formation en science politique m’a également permis d’accentuer mon attrait pour la politique, les relations internationales et les questions sociétales. Du nécessaire Mediapart, au collectif revigorant So Press en passant par l’indispensable Monde Diplomatique, toutes ses inspirations me façonnent au quotidien et me confortent un peu plus chaque jour dans mon envie d’être un journaliste. Je me bats pour un journalisme citoyen, ludique, intelligent et accessible. « A quoi est supposé servir un journaliste, selon les canons d’une tradition qui unit règles professionnelles et principes politiques ? Tout simplement à apporter aux gens les informations dont ils ont besoin pour être libres et autonomes. » Edwy Plenel