« On sent qu’on est en train de passer une sorte de cap »
« Isaac Delusion » va se produire dans quelques heures désormais, vos impressions sur la salle Victoire 2 ?
Très bien, ça a l’air de bien sonner et c’est grand !
Connaissez-vous bien le public local?
On a déjà joué une fois à Montpellier, au Rockstore. C’était cool, c’était une soirée étudiante. Mais après nous, des mecs passaient de la musique qui collait pas vraiment selon nos goûts. Donc le public présent ce soir n’était pas forcément adepte du type de musique qu’on fait. Les gens venaient plus pour « clubber ». C’était pas aussi chaleureux par rapport aux soirées où les gens viennent pour écouter ta musique ou le type de musique que tu fais.
Vous êtes sur « Cracki Records », label parisien, comme vous. Comment s’était fait le contact à l’époque ?
À la base, c’est des potes, tout simplement. Ça découle de là. Quand on s’est lancés dans le projet « Isaac Delusion », ils n’étaient pas loin car on traînait dans un cercle d’amis communs. Ils nous ont dit : « Les gars, si vous voulez, on peut faire un truc ensemble ! » C’était les premiers à s’intéresser aux démos, aux premiers trucs qu’on faisait. Ils nous ont mis le pied à l’étrier parce qu’ils organisaient déjà pas mal de soirées et connaissaient pas mal de monde. Ils nous ont lancé dans ce milieu de la musique parisienne. C’est grâce à eux qu’on a pu passer sur Nova par exemple, mais ça, c’était il y a deux ans, déjà.
Quoi qu’il arrive, vous continuerez l’aventure avec eux…
Ce sont des mecs qui ont une certaine façon de travailler. Cracki a une vision « à la cool ». Ils sont bons dans l’attitude et dans l’image ils ont de supers bonnes idées. Ce sont des défrayeurs de talents. Après, difficile de dire si on restera toute notre vie avec eux mais en tout cas, ils ont un très bon flair.
Cinq mois après la sortie de votre album « Isaac Delusion », qui porte donc le nom du groupe, avez-vous le sentiment du travail accompli pour ce premier opus, avec le recul ?
Ouais bien sûr. On a un peu mis, entre guillemets, le pied dans la cour des grands. On a fait beaucoup de travail de promotion. On est passés des dizaines de fois à la radio. On commence à rentrer dans un cycle où on commence à pas mal tourner, on fait minimum trois ou quatre dates par mois. Ça commence à être un rythme assez intéressant, assez intense, on sent qu’on est en train de passer une sorte de cap.
« Le secret, c’est la simplicité »
Vous aviez sorti « Midnight Sun » (2012), un single qui avait pas mal fait écho, et là, tout s’est enchaîné pour vous…
C’est vrai que c’est allé assez vite. Après, ça fait pas longtemps qu’on sent une rapide évolution. Depuis le début et la sortie de « Midnight Sun », on a pu être relayé, les gens commençaient à parler de nous, même si ce n’était pas massif. Ça nous a aidé à faire des choses, à les faire avancer, pouvoir continuer et placer la barre plus haut à chaque fois, de grandir, de se construire.
Quels sentiments vouliez-vous justement évoquer dans « Midnight Sun » ? Comment désiriez-vous cette mélodie ?
« Midnight Sun », ça a été quelque chose d’assez naturel. Ça a été un des premiers morceaux qu’on ait composé. On était au tout début de l’aventure « Isaac Delusion » et c’est un des titres sur lequel on a passé le moins de temps. Sans se poser de questions, sans presque réfléchir.
C’est vraiment la quintessence du groupe?
Exactement ! C’est l’essence même de ce projet-là. C’est un des morceaux qui accroche le mieux les gens, on ne se l’explique pas ! De tous les morceaux qu’on a fait, où on a parfois essayé de faire des trucs plus compliqués, plus travaillés, esthétiques, la majorité des gens accrochent sur celui-là alors qu’on a passé très peu de temps dessus. Au final, le secret, c’est la simplicité.
Après le studio, c’est actuellement la tournée du groupe. Comment se passe la transition entre l’enregistrement et le show ?
Ça se fait assez naturellement. Avant d’aller en enregistrement, on travaille les morceaux en live. Le travail est fait avant, du coup c’est un aller-retour. On commence par composer le morceau, essayer de le jouer en live, le faire évoluer par rapport à ça. Après, on l’enregistre, puis on revoit des choses qui ne vont pas, ou mieux. Comme on le rejoue en live ensuite, il y a une constante évolution. Il y a des morceaux qu’on remixe parce qu’on aime plus les jouer comme ils étaient à la base. C’est un échange. Le live permet de mieux travailler sur l’enregistrement, et vice-versa.
« Notre force : mélanger assez efficacement des sonorités complètement différentes »
On sent que la basse tient un rôle majeur sur l’ensemble de vos titres, comment travaillez-vous cet élément-là ?
C’est pas mal parti de Jules (Paco, l’arrangeur ndlr) qui composait, au début, les basses de son côté sur son ordi, sans savoir en jouer lui-même, mais ça donnait des rythmiques vraiment interessantes, assez sacadées et complexes à restituer. Puis Nicolas (le bassiste, ndlr) a commencé par apprendre les lignes des basse composées. Ça donnait un style assez funky, groovy, qu’on aimait bien à la base. Après, on a essayé de mélanger le côté numérique de la composition avec quelque chose de plus fluide.
Les influences pour vos lignes de basse sont plutôt du côté des années 70, 80…
Ouais, pas mal ! On est pas mal influencés de tout ce qui est vieille pop, « sunshine pop » et pas mal de sons funky. On est un peu rétro dans ce qu’on écoute, mais il faut aussi s’adapter à la musique actuelle.
Est-ce que vous rangez votre musique dans un style particulier ?
Non. En fait c’est ce qu’on aime bien se dire. Justement, on essaie d’aporter quelque chose de frais, qui n’est pas forcément classable, quelque chose sans étiquette. À l’heure actuelle, quand on regarde notre live, celui qui arrive à coller une étiquette n’a pas forcément raison. Notre force c’est justement d’arriver à mélanger assez efficacement des sonorités complètement différentes. Y’a même un côté « world » dans notre musique. Plein de gens nous sortent de nouveaux termes de genres musicaux à chaque fois, et, au final, c’est bon signe quand ils n’arrivent pas vraiment à mettre le doigt sur notre style. Après, ça dérange certaines personnes, ceux qui ne veulent pas perdre de temps, qui sont très occupés à écouter pleins de trucs et qui d’un coup tombent sur un truc un peu « OVNI ». Malgré tout, c’est un truc sur lequel on travaille. Peut-être qu’un de ces quatre, on va se diriger vers quelque chose de plus concret et une ligne directrice un peu plus classique. Aujourd’hui notre musique demeure inclassable.
On parle aussi de « pop sucrée »…
Ouais… (rires). C’est très dur de se détacher de ce terme. On pense que c’est dû au fait que nos morceaux sont « easy-listening », avec des belles mélodies, mais quelqu’un qui qualifie notre musique de « pop sucrée » n’a pas vraiment écouté notre album parce qu’il y a aussi des phases très rocks dedans, des phases « percussy ». C’est un peu réducteur et ça ne veut pas dire grand chose, il y a des choses un peu plus « salées » dans « Isaac Delusion ».
« Pink Floyd, une inspiration de tous les jours »
On passe par toutes les émotions dans cet album, notamment avec les deux titres : « Lands Of Gold » et « The Devil’s Hand », où on plane un petit moment avant de se diriger vers le même sample, mais plus nerveux…
Les suites de morceau c’est un truc qu’on aime beaucoup faire. On est tous des gros fans de Pink Floyd. Quand t’écoutes « The Wall » ou « Atom Heart Mother » t’as un morceau qui dure tout le vinyl, ou plus exactement quatre morceaux différents qui se recoupent en un seul. On aime bien faire des espèces de ponts entre les morceaux aussi. Certes, on a hésité à les laisser ensemble, mais vu qu’ils sont reliés par un sample, le même du début à la fin, on s’est dit que c’était la suite logique. D’ailleurs on les joue tout le temps collés en live.
Vous parliez de « Pink Floyd ». La couverture « d’Isaac Delusion » est à l’instar du groupe britannique, très recherchée. Vous en inspirez-vous beaucoup ?
Bien sûr. Pink Floyd c’est une inspiration de tous les jours. On a tellement baigné là-dedans, c’est rentré dans nos veines. Après, c’est un exemple, mais c’est un groupe sur lequel on est tous d’accord. Même si ce n’est pas une référence volontaire, on l’a forcément toujours en nous.
Cet album vous a-t-il permis d’affirmer votre style, malgré votre désir d’échapper aux étiquettes ?
Oui et non. C’est un album qui a été composé il y a plus d’un an. Les titres ont été composé, un, deux, voire trois ans avant sa sortie. Cet album, c’est un peu une page qui s’est tournée. Quand on l’a composé, on était encore dans la phase de recherche d’identité et on ne savait vraiment où on était capable d’aller. On est partis dans pas mal de directions et on a pu, un peu, créer notre identité. Il y a maintenant un travail à faire sur la sonorité typique qu’on pourrait avoir, trouver notre patte, quelque chose d’assez fort, une signature musicale qu’il n’y a pas encore forcément dans « Isaac Delusion ». Il découle pas mal du fait d’avoir composé nos morceaux pendant deux ans et de les avoir joué en live. C’est la retranscription de ce qu’on a voulu faire, on a voulu poser ça dans un CD.
Finalement, comment voyez-vous le groupe évoluer ?
C’est dur à dire. Nous, on aimerait bien que ça continue à marcher. On aimerait sortir un deuxième album, continuer à remplir des salles, jouer à l’étranger, réussir à en vivre, kiffer avec notre passion et donner du bonheur aux gens. Bon, on sait jamais ce qui peut se passer. La vie d’un groupe ça peut être très éphémère donc on sait pas. Mais pour l’instant si ça continue comme ça, ça nous va très bien !
Propos recueillis par Jérémy Lochi pour Radio Campus Montpellier et Haut-Courant
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