A Montpellier, quand on passe devant la statue de Jésus entourée d’un parterre municipal joliment fleuri, on peut être surpris. Surpris dans un pays où la laïcité est utilisée, même par l’extrême droite, comme prétexte systématique aux réflexes islamophobes. Cette statue semble refléter la puissance de l’Eglise catholique dans les enseignements primaire et secondaire de la ville.
La France est avec la Turquie le seul pays européen dont la Constitution est laïque. Pourtant, l’enseignement privé catholique y est encore aujourd’hui extrêmement développé. On ne compte pas moins de 8500 établissements, dans lesquels deux millions d’enfants sont scolarisés. Pour cela, 137 000 enseignants sont rémunérés par l’Etat, donc par nous tous. Sans parler des aumôneries toujours présentes dans les lycées publics (et laïcs).
Même si le département de l’Hérault est largement en dessous de la moyenne nationale, celle de la ville de Montpellier est symptomatique de ce phénomène. Les écoles élémentaires privées catholiques accueillent un enfant sur cinq (un sur dix dans l’Hérault), tandis que les chiffres s’envolent dans le secondaire (29% à Montpellier, 14% dans l’Hérault).
Presque tous les établissements privés catholiques se situent en centre-ville. A cette configuration particulière s’ajoutent les restrictions dictées par la politique des gouvernements successifs du Premier ministre François Fillon. La ville de Montpellier accueille chaque année plus d’élèves à scolariser, tout en ayant moins de personnel enseignant.
La dynamique des établissements privés à Montpellier pourrait s’expliquer d’abord par une dépréciation, du point de vue des parents, réelle et symbolique de l’enseignement public. Réelle, car les nombreuses dispositions prises à son encontre font qu’il est de plus en plus difficile, voire impossible, pour un enseignant de travailler correctement avec ses élèves. Symbolique, car à force d’entendre répéter que l’enseignement public est de piètre qualité (cela s’applique aussi à l’enseignement supérieur), il finit par être reconnu comme tel. Les réformes de l’Education nationale cherchent à rapprocher l’école du modèle éducatif des Etats-Unis, qui est pourtant loin de faire l’unanimité.
Pourtant, la mairie de Montpellier finance depuis 1983 ces écoles élémentaires contrôlées par le diocèse. La cartographie de l’enseignement à Montpellier (le privé catholique est très concentré dans le centre-ville), en fait l’illustration (une cause et une conséquence) de la gentrification qui touche aussi bien les quartiers populaires centraux de Montpellier que ceux des autres métropoles françaises.
Pour ceux qui se sont battus pour une école publique, laïque, et gratuite, c’est un véritable calvaire.
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