« Ne restez pas devant le magasin, cela gêne les clients ! », clame d’un ton méprisant et alarmiste l’un des vigiles du Monoprix de Béziers. Il a pour mission de chasser les marginaux qui mendient devant les vitrines. Parmi eux, une femme de trente-six ans : Julietta. Cela fait maintenant quatre ans qu’elle a fuit la Roumanie avec son mari et ses trois enfants, leurs conditions de vie étant devenues trop pénibles en raison de la discrimination et des persécutions dont sont victimes les roms là-bas – violences policières, haine raciale, discriminations pour l’emploi, accès restreint aux soins et à l’école. Avec sa famille, elle est donc montée dans un bus en partance pour le pays des Droits de l’homme, pour découvrir que les droits de l’homme ne rimaient pas toujours avec droits des Roms.
A leur arrivée, ils ont survécu tant bien que mal dans un camp proche de Béziers. Un camp est un endroit indirectement désigné par la mairie, le plus excentré possible de la commune, où la population rom se retrouve isolée, souvent privée de toute infrastructure sanitaire et de tout confort matériel. Après une année de vie dans ce camp biterrois, le mari de Julietta est parti avec une autre femme, abandonnant ses enfants. Ce n’est qu’après plusieurs nuits passées sur les allées Paul-Riquet qu’une assistante sociale lui a proposé une maisonnette, parce que des enfants en bas âge dormant sur des bancs publics, ça dérange. Pour payer son loyer et nourrir les petits, Julietta doit faire la manche. Elle confie qu’elle a essayé de trouver un travail, sans succès. Des postes de femme de ménage lui ont été refusés parce qu’elle n’avait pas le « profil » recherché. Pourtant, elle tente de s’intégrer. D’ailleurs, elle parle très bien le français comme ses trois enfants, qui ont pu être scolarisés après une longue bataille juridique[[Raymond Couderc, maire UMP de Béziers fraichement réélu, a été condamné par le tribunal administratif pour avoir refusé de scolariser des enfants roms à la rentrée 2006-07.]].
Mais sans revenu, les moindres dépenses deviennent une lourde charge pour le budget serré de la famille. N’étant pas de nationalité française, elle n’a aucune couverture médicale. Malgré tout cela, Julietta garde le sourire et l’espoir d’une vie meilleure. Symbole d’une pauvreté qui agace devant les vitrines des Galeries Lafayette abondant de produits Dior ou Chanel, elle incarne la triste destinée de ces Roms que l’Europe laisse à la porte, d’après le titre du rapport 2007 de Médecins du monde.
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