Pika Chica, le tatouage dans la peau

Par le 10 janvier 2013

Alexandra est l’une des deux tatoueuses de Montpellier. Loin des stéréotypes à base de crânes et de grosses cylindrées rattachés au milieu, elle s’est construit un cocon à son image, à la fois rebelle, délurée et girly. Pourtant, si c’est bien son rêve qu’elle réalise avec cette boutique, elle le fait toujours en restant au service de sa clientèle.

Quelques figurines manga, une banderole rose, un canapé rococo… situé en haut de la rue de l’Université, à Montpellier, le salon Peau de lapin Tattoo a tout d’un sanctuaire « glam-cucul » et sa propriétaire, auteur de la description, n’a rien à lui envier. Pika Chica, Alexandra pour l’état-civil, officie depuis mai 2012 dans cette boutique qu’elle a façonnée au gré de ses envies : « C’est comme ça aussi chez moi. Je fais beaucoup de récup’, j’avais envie que ce soit frais et que les gens se sentent à l’aise. »

« C’est leur séance, c’est comme ils le sentent. »

Directe, la jeune trentenaire à l’air mutin ne s’encombre pas de politesses inutiles : dans son échoppe, le « tu » est, en général, de rigueur, que ce soit pour préparer le tatouage ou lors de sa réalisation. Le ressenti du client est sa première préoccupation. C’est lui qui mène la danse, Alexandra se contente de suggérer quelques recommandations techniques.

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En plein travail, le visage penché sur un mollet à moitié encré, elle explique : « Un tatouage c’est personnel, je ne me permets pas de juger le dessin, je peux conseiller de changer d’endroit ou de taille, modifier certains détails mais toujours en accord avec la personne. » Elle lève la tête de son ouvrage, fait cesser le bourdonnement régulier de sa machine et sourit malicieusement avant de continuer : « Quand je suis fan, je le cache pas, par contre. » Elle est comme ça, Alexandra, en retrait mais enthousiaste, discrète mais déjantée. Elle s’adapte à son interlocuteur : « En général, les gens parlent beaucoup dans la douleur. Il y en a aussi qui disent rien. C’est leur séance, c’est comme ils le sentent, je les laisse décider. »

« Beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de rêves. »

Alexandra consacre la plupart de son temps à son métier. Pour que son travail soit à la hauteur des attentes du client, elle ne compte pas les heures : « Le matin, je dessine ; le soir, quand je rentre chez moi, je dessine ; le week-end, je dessine… » Cette diplômée des beaux-arts, qui se définit comme une fille « assidue, très mal organisée mais avec beaucoup d’ambition et de rêves, beaucoup, beaucoup, beaucoup, beaucoup de rêves », a reçu son premier tatouage à 16 ans. Elle raconte, le regard espiègle : « comme j’étais mineure, il a fallu que je demande l’autorisation à mes parents. Je l’ai joué de façon sentimentale en leur disant que le déménagement qu’ils avaient prévus me forcerait à quitter mon mec et qu’en souvenir, je voulais me faire tatouer par lui. » Depuis, une trentaine d’autres a suivi, elle a arrêté de compter. Pika Chica a commencé le tatouage il y a 8 ans, avec le soutien de sa famille, sur qui elle a réalisé ses premières œuvres. La toute première n’est d’ailleurs pas forcément restée un bon souvenir : « J’étais verte, livide. J’avais envie de vomir, c’était sur un mollet, à chaque fois que je faisais un trait, je m’excusais. Je me suis dit que plus jamais je referai ça. » Elle a changé d’avis. Grand bien lui fasse, tout en haut de la rue de l’Université, la boutique à la devanture « glam-cucul » ne désemplit pas.

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à propos de l'auteur

Auteur : Pauline Chabanis

En 1988, alors qu’Etienne Chatiliez racontait sur grand écran l’histoire trépidante des familles Groseille et Le Quesnoy, je vivais les premières minutes d’une vie qui n’aurait rien d’un long fleuve tranquille. En réalité, de Lyon à Montpellier, en passant par Cannes, j’ai plutôt ricoché. D’un naturel pragmatique et rigoureux, je me tournai très vite vers une filière scientifique, jonglant avec les chiffres, jouant avec les équations. J’étais le Fred de la fonction affine, le Jamy de la masse molaire et je n’y trouvais vraiment rien de sorcier. Puis je me suis rendue compte que les expériences les plus enrichissantes ne se faisaient pas dans des laboratoires mais à travers des rencontres et un partage d’informations. Je n’ai pas eu d’appel, de vocation ; le journalisme ne s’est pas imposé comme une évidence mais comme une alternative envisageable. Une voie possible que j’ai empruntée, d’abord à tâtons en intégrant l’IUT journalisme de Cannes, puis d’un pas décidé lorsque j’ai réalisé, à travers des stages variés, que ce milieu me convenait. Curieuse et déterminée, je ne m’imagine pas en Indiana Jones de l’information, casse-cou et engagée mais en ouvrière discrète de la société. Je ne veux pas de fabuleux destin télévisé, juste une toute petite place en presse spécialisée… sans en faire tout un cinéma.