Haut Courant : Aujourd’hui, dans le quartier Port Marianne, vous avez fait la ZAC les Jardins de la Lironde sur 40 hectares, les éco-quartiers Parc Marianne et Rive gauche et vous avez pour projet de faire le futur quartier République dont l’objectif sera de « mettre en œuvre tous les principes du développement durable pour devenir un éco-quartier ». Concrètement, essayez-vous de faire de Port Marianne un quartier écologique ?
Michaël Delafosse : Oui. Port Marianne a été lancé au début des années 90 et très clairement, à chaque fois qu’on réalise une ZAC (ndlr : Zone d’Aménagement Concerté), on situe le niveau d’ambition en terme d’urbanisme durable à un niveau plus élevé. Voici quelques exemples pour en attester.
La ZAC Rive Gauche qui vient de commencer est réalisée par Pierre Tourre que nous avons choisi en 2003 (ndlr : Pierre Tourre est un architecte urbaniste). Il a posé le principe de l’orientation bio-climatique des bâtiments, qui fait travailler le cabinet d’étude TRIBU pour essayer d’avoir la norme thermique qui va bien au-delà de la réglementation BBC (Bâtiment de Basse Consommation). L’objectif est que le quartier soit très sobre dans sa consommation énergétique.
Autre exemple d’un équipement complètement structurant du point de vue d’un urbanisme durable : la réalisation d’une centrale tri-génération qui permettra à la fois d’approvisionner en électricité, en chaud et en froid 1000 logements. Autant de carbone en moins consommé, s’appuyant sur une énergie renouvelable.
Troisième exemple, c’est quand même un quartier qui est maillé et structuré autour de deux lignes de tramway et qui conduit donc ses habitants à pouvoir utiliser des mobilités durables que sont les réseaux de tramways ou piétonne car les espaces publics sur ce quartier sont généreux. On peut donc se déplacer sans être obligé d’avoir recours à la voiture, ce qui n’est pas le cas dans d’autres quartiers de la ville.
Justement, le stationnement reste un problème majeur dans le quartier. Est-ce que la conception du quartier incite à sortir la voiture de la ville ?
C’est une invitation à changer les habitudes de mobilité. Il y a du stationnement à Port Marianne. Il y a deux parkings : un sous l’Hôtel de ville de 900 places et un autre en construction de 800 places sous La Mantilla. Plus du stationnement enterré sous les logements. Tout est fait pour créer une alternative à l’automobile et changer les habitudes de mobilité.
Que manque-t-il encore pour que Port Marianne devienne le quartier écologique que vous souhaitez ?
Je pense que Port Marianne est un des endroits en France, du point de vue de l’urbanisme, où les principes les plus aboutis se mettent régulièrement en œuvre. Sur la ZAC de la République, on va faire des toits végétalisés pour faire en sorte que la déperdition de chaleur sur les toits soit atténuée. Chaque fois, on essaie d’avoir un trafic novateur tout autant que la technique le permet et que les coûts sont supportables du point de vue de l’achat des logements qu’ils soient privés ou sociaux.
Les habitants de ces appartements estiment que seul le toit photovoltaïque est écolo et, surtout, que c’est très coûteux. Comment faire pour que ces logements ne fassent pas exploser les prix ?
Il y a encore 4 ou 5 ans de ça, vous m’auriez dit : « Pourquoi on ne met pas des panneaux photovoltaïques partout ? » Il y a eu une grande tendance à la photovoltaïque pendant quelques années donc on en a réalisé. C’est vrai qu’il y a des logements extrêmement chers, de très haut standing. Mais il y a un tiers de logements qui sont des logements sociaux pour des gens très modestes. Et on fait cet équilibre-là parce que c’est comme ça que l’on fait la mixité sociale.
Différentes associations de quartier à Port Marianne pensent que « les éco-quartiers sont construits sans demander aux citoyens dans quoi ils ont envie de vivre ». Les citoyens sont-ils concertés lors de la création d’un quartier ?
Il y a de la concertation, il y a du dialogue et de l’échange avec les associations. La réalisation d’un quartier est un dialogue avec les citoyens mais elle est aussi une ambition professionnelle qui marque un niveau d’exigence. C’est pour ça que les architectes en chef de chacune des ZAC viennent apporter en matière d’urbanisme durable du savoir-faire et des approches novatrices. Le rôle d’un élu est donc de trancher et de définir l’intérêt général. Dans 100 ans on pourra dire que dans cette partie-là de la ville, sur le plan environnemental, on a fait beaucoup plus qu’à d’autres endroits en France. Dans la partie ouest de Montpellier construite dans les années 60, cette problématique est totalement absente.
Et concernant le processus décisionnel à Port Marianne ?
Je vais vous donner un exemple. On a une demande d’aménagement du bassin Jacques Coeur qui est un espace public structurant. Les gens ont été concertés sur les modalités de cet aménagement. On a donné les contraintes techniques et financières, on a posé des principes. Il y a eu une discussion avec les associations. Aménager un espace public doit se faire de manière concertée et ne doit pas céder à l’intérêt particulier.
Beaucoup de riverains se plaignent de la présence importante de Roms dans un camp juste derrière l’école Chengdu. Est-ce que ça ne salit pas un peu la belle image que vous essayez de donner au quartier ?
Oui, c’est très difficile. On peut comprendre la tension que ressentent beaucoup de riverains parce qu’il y a une population fragile installée sur ces terrains. La ville réalise un village d’insertion parce que la place des Roms n’est pas là. Je pense qu’il serait de bon ton que d’autres communes s’engagent aussi pour régler ces problèmes qui sont complexes et qui ne se règlent pas avec une logique populiste. Je ne dis pas ça pour les riverains qui font preuve de patience et de responsabilité.
Quels sont vos projets écologiques pour Port Marianne ?
Je ne veux pas opposer écologique et social. Quand on fait une ZAC il y a trois principes que l’on doit défendre : celui de la mixité sociale, celui de la générosité des espaces publics et faire en sorte que la contribution du quartier participe au changement de modèle de développement.
Interview réalisée par Wally Bordas
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