Port-Marianne : nouvel eldorado des commerçants

Après l’implantation de la nouvelle mairie, la SERM (Société d’Equipement de la Région Montpelliéraine) cherche à faire de Port-Marianne le nouveau quartier qui compte à Montpellier. D’où la venue de nombreux commerçants, ici pour engendrer une vraie vie de quartier, mais aussi pour faire du chiffre.

Ils sont beaucoup de restaurants, alignés, côte à côte. Mais « ils sont tous pleins le midi, il n’y a pas de problèmes de concurrence » affirme Jean-François Boudet, commercial et responsable d’une agence AXA aux bords du bassin Jacques-Cœur mais aussi président de l’APPM (Association des Professionnels de Port-Marianne). Cette association, créée il y a quatre ans, rassemble aujourd’hui plus d’une cinquantaine d’adhérents. Malgré les critiques récurrentes faites sur Port-Marianne, les commerçants sont nombreux à voir leur chiffre d’affaires augmenter.
Beaucoup sont là depuis peu, tout juste un an. Et ils constatent que les affaires commencent à tourner.

Les nouveaux commerçants ne sont pas là par hasard. Car ce ne sont pas tout à fait des « nouveaux ». De l’expérience, ils en ont. « Les restaurateurs étaient restaurateurs, les coiffeurs étaient coiffeurs, pas bouchers ! » ironise Jean-François Boudet. La majorité a déjà tenu un établissement ailleurs et l’a parfois encore. S’installer ici, c’est surtout « du plus ». Mais aussi un peu de l’avant-garde. La ville de Montpellier mise beaucoup sur ce quartier. Et les commerçants sont déjà au rendez-vous.

Un quartier en pleine expansion

« On attend 40 000 personnes ici » avance Jean-François Boudet. Voilà l’une des grandes raisons de l’implantation de tous ces commerces. Le quartier est tout jeune et il est en plein essor. Bien sûr, ce n’est que le début : « on commence à peine à connaître le bassin Jacques-Cœur » poursuit le président de l’association.

La plupart des commerçants sont donc arrivés avec un but bien précis : faire des affaires.
Caroline Curtet, gérante de la Factory, un bar à vins aux abords du bassin, explique avoir fait « un vrai placement immobilier ». Une stratégie qui paye aujourd’hui : « On a un autre restaurant à Lattes qui fonctionne très bien. Au début ici, on voulait simplement un petit établissement, un peu pour voir. Finalement, la Factory fait deux étages !» explique-t-elle.

Le bassin Jacques Cœur attend d’ailleurs un réaménagement. Des travaux de près d’un million d’euros sont prévus, dans le but d’attirer encore plus de monde. Quand le bassin sera terminé, le quartier aura un réel potentiel. « Je suis sûr que, dès les travaux finis, le quartier sera très sympa pour dîner en ville le soir » assure Raba Ait, gérant du restaurant le D’Cartes, tout proche du bassin. Et il continue « le plan d’eau, les roseaux… Ce paysage naturel me plait particulièrement pour moi qui vient de la campagne. Et je n’ai aucun doute sur le fait que ça plaise aux futurs clients ».

De nouvelles stratégies… et de l’argent de côté

Mais pour l’instant, Port-Marianne n’est pas encore le nouveau centre-ville, les commerçants l’ont bien compris. Et ils s’adaptent. Port-Marianne, c’est un quartier de bureaux, d’hommes d’affaires et de déjeuners. D’où le nombre de restaurants qui n’ouvrent leurs portes que le midi. Avec des prix autour de 30 euros pour un menu le midi, les restaurants préservent tout de même leur chiffre d’affaires. Et ils précisent en même temps leur clientèle : pas les habitants, encore trop peu nombreux, mais bien les businessmen. « Je me suis aussi installé ici car je trouve plus agréable de travailler pour une clientèle d’affaires plutôt que touristique » raconte le restaurateur du D’Cartes.

« Si un restaurant fait quelque chose de bon et d’original, il marche » veut résumer Jean-François Boudet. Et prend l’exemple du restaurant situé juste en face de son agence AXA, le Trinque Fougasse, dont le gérant n’est autre que… son frère. Mais un détail est oublié : le Trinque Fougasse existe déjà au nord de Montpellier et il marche très bien.

Les affaires sont donc bonnes à Port-Marianne. Il « suffit » d’avoir la bonne idée. Et peut-être aussi – et surtout – un autre établissement qui paye à côté.

Port-Marianne  : le restaurant La Factory, une affaire qui roule

Dans le quartier, ce ne sont pas les restaurants qui manquent, au contraire, ils prolifèrent. Difficile de se faire un nom dans ce paysage où nombreux mettent prématurément la clef sous la porte. La Factory a pourtant réussi à sortir du lot en misant sur les atouts de Port-Marianne.

Dans le quartier de Port Marianne, au sud de Montpellier, entre les constructions modernes, les lignes de tramway et les projets urbains encore en chantier, de nombreux restaurants ont peu à peu pris place.
Crêperies, restaurants japonais ou encore à tapas, bar à vin et autres restaurants plus traditionnels entourent le bassin Jacques Cœur. Parmi eux, La Factory un restaurant qui fait également office de bar à vin tenu par Caroline Curtet et son mari. À l’entrée, un immense feu vert donne le ton de la décoration. Dans un style new yorkais sobre et moderne, le restaurant s’intègre parfaitement dans le quartier. Installé depuis un an exactement, il enregistre un très bon démarrage.

Port Marianne : «  un quartier neuf et dynamique en pleine expansion »

Déjà propriétaires du Bistrot d’Ariane, un restaurant dans le port de Lattes, ils ont choisi Port Marianne pour leur deuxième restaurant en raison de l’image du quartier. Caroline Curtet confirme : « C’est un quartier neuf et dynamique en pleine expansion. Il y a plein de commerçants à s’installer, c’est très vivant ». Le quartier ne cesse de grandir. En témoignent les grues, les immeubles en constructions et les nombreux projets à venir. Proche des lignes de tramway et de parking, le restaurant est très bien desservi, ce qui renforce son succès. Pour les Curtet, La Factory est plus qu’un simple restaurant. « C’est un investissement immobilier. On espère qu’il prendra de la valeur par rapport à l’évolution du quartier » affirme la gérante.

Une clientèle bien ciblée

La proximité des autres bars et restaurants n’inquiète pas Caroline Curtet, elle explique : « C’est de la bonne concurrence. Il y a une grande variété d’offre de restauration, mais ces offres ne sont pas toutes réservées à la même clientèle. Ce ne sont pas les mêmes personnes qui viennent manger chez nous ou à la Patacrêpe par exemple. » Effectivement, avec des menus le midi entre 25 et 35 euros, le restaurant est intéressé par une clientèle avec un fort pouvoir d’achat. Dans le viseur, les cabinets d’études notariales, les banques et les promoteurs immobiliers voisins. « Nous voulons faire de la qualité et pas de la quantité, nous ne faisons pas de la restauration de masse ».
À Port Marianne, les Curtet ont réussi à tirer profit d’un quartier en plein boom et d’une clientèle haut de gamme. Après un an d’ouverture, il semblerait que le pari soit en passe d’être réussi.

« A Port Marianne, on a acheté de l’illusion »

Port Marianne est le quartier « à la mode » de Montpellier. Cependant derrière une façade attirante mais toujours en construction, de nombreux commerçants en dressent un portrait totalement différent. Vincent en fait partie, rencontre.

Vincent, 60 ans, est coiffeur pour hommes à Port Marianne depuis 12 ans. Ce qui en fait le plus vieux commerçant du quartier. Chemise blanche rayée et noire, jean foncé et chaussures marron. Son métier, il l’exerce depuis ses 15 ans, âge auquel il a commencé son apprentissage. Aujourd’hui il fêtera sa 45ème année dans la profession. Avant d’arriver à Port Marianne il a travaillé dans le Centre, sa région d’origine, puis dans la région lyonnaise ainsi qu’a Genève en Suisse. Il est arrivé à Montpellier il y a plus de 20 ans. Avant de monter son propre salon à Pérols, il a travaillé dans trois établissements du centre ville.

« On m’a présenté Port Marianne comme les Champs Élysées de Montpellier »

Cependant il y a 12 ans il choisit de déménager : « je voyais qu’a Pérols le chiffre d’affaires baissait beaucoup, et je me suis dit que cet endroit ne valait plus rien pour le commerce ». C’est à ce moment qu’il choisit de s’installer à Port Marianne, rue Famagouste, à deux pas de l’arrêt de Tramway du même nom que le quartier. Ce changement il l’explique par « le ouï-dire. Tout le monde disait il y a 12 ans que Port Marianne serait le futur de Montpellier. La pub de Georges Frêche présentait ce quartier comme les nouveaux Champs Elysées de Montpellier. Tout le monde en disait beaucoup de bien. Ce quartier avait une image de luxe ».

« Un quartier complètement bidon »

Or aujourd’hui, ce choix ne parait pas si judicieux. Cette image du quartier de Port Marianne est pour lui : « complètement erronée. Ce quartier est complètement bidon. Il ne vaut rien pour le commerce. A Pérols ça fonctionnait beaucoup mieux qu’ici ». Il pointe de nombreux dysfonctionnements. Notamment le manque de places de parking. Et le zèle de la police municipale : « quand les clients viennent, ils tournent pendant 30 minutes pour trouver une place. Quand ils repartent, ils ont souvent pris un PV. Si la seconde fois c’est pareil, la troisième ils ne reviennent pas ». Outre ces problèmes, le manque de vie du quartier l’impressionne : « c’est un quartier qui n’est pas vivant. Il n’est passé que trois piétons en 2h. Alors qu’à l’origine on m’avait dit que ce serait fabuleux, qu’avec la fac à côté il y aurait du monde. J’avais fait un bilan prévisionnel. Je pensait coiffer huit étudiants par jour alors qu’aujourd’hui j’en coiffe huit par mois. Aujourd’hui 80% de ma clientèle sont des clients que j’avais à Pérols et à la Grande Motte. Seuls 20% habitent Port Marianne ». Sur les 10000 nouveaux habitants arrivés depuis douze ans, il répond : « Moi je n’ ai eu que dix clients de plus à peine. Les restaurateurs font le même constat, ils ont peu de gens du quartier ». Il trouve aussi très étonnant le manque de diversité des commerces. Et estime très dommageable pour l’activité du quartier qu’il n’y ait que « des banques, des restaurants et des agents immobiliers ».

Une situation qui ne s’améliore pas

« Il y a de plus en plus d’habitants et le quartier est presque plus mort qu’avant ». S’il admet que la crise est certainement passée par là, il trouve ce constat « paradoxal ». Et pas isolé à son salon. Membre de l’association des commerçants de Port Marianne, il estime que 80% de ceux qui la composent font le même constat. Mais aucun d’entre eux ne tient à l’ébruiter. « On se dit que plus on va l’ébruiter, moins on aura de chances de vendre nos commerces, ou alors moins cher ». Propriétaire de ses murs, il ne se trouve pas tout à fait malheureux à côté de ceux qui sont locataires, « parce qu’ici, les loyers sont fous ». Ils rendent difficile la réalisation de bénéfices. Dans ce contexte, le grand turnover l’a amené à voir « des commerces changer sept ou huit fois en 12 ans. Les commerces ne tiennent pas plus de trois ou quatre ans ». Si lui tient, il le doit pour beaucoup à sa femme, qui a un « bon salaire ». Sans elle, il admet qu’il aurait « déjà fermé le salon, parce que certains mois, je ne me fais même pas 500€ de salaire. Alors que j’ai encore deux ans de crédit ».

« La priorité c’est de construire des parkings »

Avec son association de commerçants, ils essaient de faire pression sur la ville. Mais défaitiste, il balance : « ils n’en ont rien à foutre de nous ». Le sentiment d’abandon est assez fort. Durant la période de Noël, il s’est étonné qu’il n’y ait « aucune guirlande » dans sa rue, alors que son « lotissement de Lattes était tout illuminé ». Autre exemple concernant les Parkings. Alors que la place à la journée coûte 1,60 € à un riverain, les commerçants doivent payer 13 €. Et quand ils demandent l’application du tarif riverain pour les commerçants, la mairie répond « allez vous garer à Odysseum ». La priorité pour lui, c’est de construire des parkings. Il concède que cela « coûte cher ». Cependant, il estime que la proximité d’un parking gratuit à côté de son salon augmenterait son chiffre d’affaires de « 20 à 30% ».

Aujourd’hui, Vincent est désabusé et se sent trompé : « quand on a acheté ici, on pensait qu’il y aurait un port qui ramènerait du monde. Depuis, ce projet est tombé à l’eau. On a acheté de l’illusion. Ici il y a trois canards qui se battent en duel dans le bassin, les gens ne viennent pas pour trois canards ». Mais à deux-trois ans de la retraite, avec le soutien de sa femme, il préfère continuer pour atteindre ses annuités légales. Si la vie est plus difficile depuis 12 ans, Vincent garde le sens de l’humour : « A l’époque je partais en vacance aux Bahamas, maintenant que je suis à Port Marianne, j’ai du mal à partir à Palavas ».

Port-Marianne : le mal-vivre des commerçants

Port-Marianne, le nouvel Eldorado promis aux montpelliérains, peine à se diversifier. Entre les innombrables bâtiments et bureaux d’entreprises, les commerçants ont la vie dure. Résultat : des habitants frustrés, des restaurants qui pullulent, un flux extérieur qui n’arrive pas…

Port-Marianne n’a rien du quartier vivant et attractif décrit dans les annonces immobilières. Tranquille, ça oui, il l’est. Le quartier vit le midi. Au rythme des cadres et employés aux alentours. 20 heures passées, ce n’est plus la même ambiance. Les rues sont désertes et sombres. Quelques riverains s’aventurent sur le bassin Jacques Cœur. Souvent les mêmes. Ils promènent leurs chiens ou passent rapidement en footing. Les visiteurs se font rares. Les plus débrouillards arrivent à se garer et regagnent un restaurant. Car les restaurants, ce n’est pas ce qui manque aux alentours.

La logique du tout-restaurant poussée à l’extrême

« Les restaurateurs du Bassin Jacques Cœur ferment les uns après les autres. Il y en a trop  », résume Alain, un riverain. Pour ce sexagénaire, membre de l’association Défense du Bassin Jacques Cœur, la Serm (Société d’équipement de la région montpelliéraine) est la principale responsable : « Elle a voulu faire de Port-Marianne un endroit festif. Mais à trop mettre de restaurants…la concurrence tue  », tranche-t-il. Des propos relayés par Jean-François Boudet, président de l’association des professionnels de Port-Marianne. « C’est la Serm qui décide de l’implantation des commerces avec la mairie. Les restaurants sont imposés sur le bassin Jacques Coeur  », explique-t-il. Les restaurants autour du bassin sont quasiment une institution. A tel point que l’arrivée d’un quelconque autre commerce sur ce secteur en étonne plus d’un. « Un magasin de vêtements avait ouvert en début d’année. Il n’a pas fait long feu. D’ailleurs tout le monde s’est demandé ce qu’il venait faire ici  », se rappelle Jean-François. Cet agent général d’assurance ne semble pas trop dérangé par le surplus de restaurants. Il travaille chez Axa, à l’angle du bassin. « Moi, ça ne me gêne pas qu’il y ait autant de restaurants. C’est pratique pour déjeuner le midi, j’ai le choix ! », plaisante-t-il. Il reconnaît tout de même que cela pose problème. « Souvent, les restaurants ne sont ouverts que le midi. Le soir, seuls la Factory ou le Trinque-Fougasse, celui de mon frère, sont ouverts. Port-Marianne, c’est beaucoup de bureaux. Les gens qui déjeunent là le midi travaillent sur le bassin ou viennent du Millénaire. Le soir, c’est désert  », regrette-t-il.
Il est vrai que la concurrence est rude. Si le Trinque-Fougasse et la Factory s’en tirent bien, les restaurants milieu de gamme ont bien du mal à maintenir le cap. Les charges sont énormes et la clientèle se dilue. En témoigne le turnover impressionnant des restaurateurs. Marc Rayna, vice-président du comité de quartier de Port-Marianne, est bien placé pour en parler. Il est agent immobilier : « Les restaurants sont tellement nombreux qu’on aurait de quoi nourrir la moitié de Montpellier ! Le prix des loyers est rédhibitoire. Sur le Lez, il faut compter 23 euros le mètre carré pour de la location, sans charges. Sur le bassin, c’est bien plus cher. Par exemple, le restaurant Jap Asian, qui compte 200m² de surface, doit payer un loyer mensuel de 7000 euros. Si vous êtes la Tour d’Argent (restaurant chic de Paris à 170 € le menu du soir, ndlr) vous pouvez vous le permettre, mais sinon…c’est suicidaire ». Il conclut, un brin défaitiste : « La mairie a vendu ce quartier comme étant les nouveaux Champs-Élysées. Du coup, les prix sont très élevés. Les investisseurs achètent les locaux très cher et forcément, derrière, ils les louent cher. Malheureusement, au bout de la chaîne, les gens n’ont pas l’argent nécessaire pour faire face ».

Et le commerce de proximité alors ?

A l’image de tous les habitants, Didier, retraité, regrette qu’il n’y ait pas plus de diversité des commerces. « Si on avait mis d’autres types de commerces et qu’on les avait mieux mélangés, tout le monde s’y serait retrouvé. Le tout-restaurant, c’est se tirer une balle dans le pied  », soupire-t-il.
Marc Rayna est remonté contre la Serm et la mairie. « Les gens, ce qui les intéresse, c’est la vie quotidienne. On est censés être le nouveau centre-ville et il n’y a rien… Le Carrefour Market, c’est nous qui avons insisté pour qu’il soit construit  », déplore-t-il. Port-Marianne est un quartier en devenir. Mais la méthodologie de construction n’est pas au point :  « On sait monter des immeubles mais il n’y a pas de service minimum offert aux habitants. Pour faire vivre un quartier, il faut une crèche, une poste, des médecins, des commerçants de toutes sortes  », poursuit Marc. Il regrette le manque de relation commerçants-habitants : « moi, en tant qu’habitant, il me manque un boucher, un traiteur, un pressing, un poissonnier… Il y a ce genre de services au Carrefour Market mais ce n’est pas pareil. Chez un boucher de quartier, on n’est pas anonyme  ». Il reconnaît que tout n’est pas noir. Côté boulangeries, la situation est satisfaisante. Le secteur Jacques Cœur en compte trois. Les coiffeurs sont présents. Eux aussi souffrent. « La dernière fois que j’ai croisé mon coiffeur, il m’a dit qu’il n’avait fait que trois coupes dans la journée. Avant, il était basé à Pérols. Il avait un salon de coiffure qui marchait bien. Aujourd’hui, il se mord les doigts d’avoir déménagé  », rapporte Jean-François Boudet.
Certains services du quotidien sont inexistants. Déposer un vêtement au pressing est un vrai parcours du combattant. Marc Rayna, comme tout agent immobilier qui se respecte, porte tous les jours des costumes. Autant dire que c’est une galère, pour lui : « je dois aller jusqu’à Odysséum. Nous n’avons pas de pressing à Port-Marianne. Moi, encore, ça va, mais imaginez une personne à mobilité réduite… C’est juste infaisable  », peste-t-il.

Pas de lumière, pas de parking, pas d’entretien…

La Serm n’est pas la seule fautive dans l’histoire. Si le flux extérieur n’est pas au rendez-vous, ce n’est pas qu’une question de stratégie d’implantation de commerces. Alain témoigne d’un contexte global qui s’est dégradé. « Le Fise et le wakeboard ont dégradé le cadre de Port-Marianne. Les roseaux poussent de manière très anarchique sur le bassin. Il n’y a plus cet attrait champêtre du début. Il n’y a quasiment plus de pelouse  ». Selon lui, le cadre joue fortement sur la fréquentation du quartier : « Avant, venir ici, ça faisait une sortie sympathique. Mais maintenant, les chemins sont défoncés et l’environnement est beaucoup moins agréable. Le bassin est laissé en friche depuis deux-trois ans. Evidemment que ça a contribué à la perte de clientèle  ». Il tient à souligner un problème majeur : le manque de lumière autour du bassin. « Le soir, quand les dames de l’association rentrent chez elles, elles ne sont pas tranquilles. Il fait vraiment très sombre  », commente-t-il. Il ajoute :  « Depuis peu, un camp de roms s’est installé dans le quartier. Les gens ne sont pas venus s’établir à Port-Marianne pour vivre dans un contexte pareil. Mais personne ne fait rien ».
Quoi qu’il se dise, Port-Marianne reste une cité dortoir. Retraités aisés et jeunes cadres moyens se partagent le quartier. Le charme n’opère pas et les visiteurs se font rares. En cause, le stationnement. Un réel handicap dans le quartier. Aller au restaurant, oui. Mais où se garer ? Bien évidemment, les commerçants en pâtissent. Marc Rayna en témoigne : « j’ai parlé à un ami restaurateur il y a quelques jours. Il m’a raconté qu’un soir, des clients qui avaient réservé une table ont appelé pour annuler. Cela faisait 40 minutes qu’ils tournaient en rond sans trouver de place pour se garer. Ça devient vraiment problématique  ». Alain pense que c’est une question de pratique : « Les montpelliérains ont eu l’habitude d’aller au restaurant et de laisser leur voiture juste devant. A Port-Marianne, c’est tout bonnement impossible  ». Odysseum, le centre commercial à ciel ouvert regroupant plus de 100 boutiques, n’est pas loin…et dispose d’un parking de 2000 places. De quoi faire rêver les commerçants de Jacques Coeur. « L’ouverture d’Odysseum a drainé une partie de la clientèle. Avec ses restaurants, le cinéma et les parkings à côté, Odysseum est beaucoup plus attractif. Ça a créé un réel déséquilibre. Pour le coup, là-bas, on peut aller au restaurant et garer sa voiture juste à côté  », explique Alain.
Les esprits s’échauffent et les tensions se font sentir entre riverains et pouvoirs publics. Les revendications des habitants du quartier sont simples. Marc Rayna se charge de les faire remonter aux autorités compétentes. Visiblement, le temps de réaction est long. Très long. « Il faut une meilleure signalétique. Pas un panneau indique la direction du bassin Jacques Cœur. Il est complètement confiné et n’amène que très peu de clients. De façon similaire, personne ne sait qu’il y a un parking accessible sous la mairie  », rapporte-t-il.

Seules la mairie et la Serm ont le pouvoir de venir en aide aux commerçants de Port-Marianne. Malheureusement, ces instances sont restées muettes face à nos questions. Espérons qu’elles ne seront pas sourdes face à la colère grandissante des habitants du quartier.

Le stationnement à Port-Marianne : une préoccupation majeure du quartier

Avec les nombreuses créations de logements et de bureaux, Port-Marianne est devenu un secteur très attractif pour les Montpelliérains. L’arrivée de nouveaux résidents et de nouvelles entreprises a fait augmenter le parc automobile créant un véritable problème de stationnement, comme dans le reste de la ville.

Un employé de la fourrière témoigne. Pour lui, ce sont les constructions incessantes dans le quartier qui posent problème « Ils font n’importe quoi. Ils construisent des résidences sans parking, où alors ne prévoient pas assez de lieu de stationnement. Souvent il n’y a qu’une place alors que la plupart des gens ont deux voitures. » Selon Michel Meyer de la DAP (Direction Aménagements et Programmation) à la mairie de Montpellier, « le problème à Port Marianne c’est que tout le monde veut se garer devant chez lui. Physiquement c’est impossible. Les résidents, souvent, se garent dans la rue plutôt que dans leurs parkings sous terrains privés. C’est de là que viennent les problèmes de stationnement. On a dû trouver une solution ».

Un stationnement coûteux pour les habitants de Port-Marianne

Et cette solution, c’est le stationnement payant. Se garer était gratuit jusqu’au premier janvier 2014 sur le secteur Port Marianne sud (Bassin Jacques Cœur) pour cause de travaux. Dans le nord, la ZAC de port-Marianne, il était payant depuis plus de 2 ans. Des horodateurs ont récemment été placés sur l’avenue du Mondial 98 et sur les rues Victor Vasarely, Andy Warhol, Shirin Ebadi, Raymond Dugrand, Aung San Suu Kyi, Raoul Dufy et Wangari Maathai. Port-Marianne est maintenant classée zone de stationnement orange dans son intégralité, ce qui contraint les résidents à devoir payer assez cher pour se garer. Sur le site internet de la Municipalité, on peut lire « le tarif mensuel passe à 15 € pour les résidents. 2 véhicules par foyer peuvent bénéficier de ce tarif préférentiel ».

Si les résidents du quartier ne trouvent pas de places en voiries, ils leur restent toujours les parkings privés. Le Parking Effia de 686 places, situé en dessous de l’Hôtel de Ville, prévoit un tarif de 60 euros par mois pour les résidents (120 euros pour les autres). Il y a aussi un petit parking provisoire à côté du bassin composé de 70 places. Il coûte 2 euros la nuit pour tout le monde, 1,60 euro pendant la journée et 1 euro entre midi et deux.

Un endroit où se garer : un des critères de recherche d’un appartement

Les agences immobilières sont unanimes, une place de parking ou un garage est un des critères primordiaux dans la recherche d’un logement. Selon Côté sud Immobilier, « Il y a une forte demande en termes de parkings et de garages. Il y en a peu qui passent par les agences et ils se vendent très vite. Le coût d’une location de place de parking est d’environ 100€ par mois. »

Sylvain, agent immobilier chez Montpellier Immo, fait remarquer qu’il y a souvent une place de parking avec les locations et que sur les grands appartements, il peut même y en avoir deux. Malgré cela, il évoque un véritable problème à Port-Marianne : « Le parcmètre est cher, plus de 10€ pour une journée de travail moyenne (9h-12h, 14h-18h). Il faut environ 10 minutes pour trouver une place de parking dans le quartier. De nombreuses personnes cherchent des garages ou des places de parking à acheter » . Selon lui, Les habitants du quartier seraient prêts à mettre dans les « 20 000€ pour un garage et 17 000/18 000€ pour une place de parking ».

Marie : « Je suis choquée… Avant, les stationnements étaient gratuits »


Accolée à un grand pilonne qui borde le bâtiment, Marie, un café à la main, travaille au service des ressources humaines du CCAS de Port Marianne. Auparavant elle habitait à Mondial 98, à un arrêt de là. Depuis elle a déménagé à Moularès, à une station de tramway, et d’après elle, la situation a changé : « Je suis choquée. Avant, les stationnements étaient gratuits, maintenant c’est payant partout. Je viens à pied ou en tram’ mais c’est impossible de se garer. Moi je ne suis pas concernée, mais j’ai des collègues qui sont obligés de stationner à plusieurs arrêts de tram : c’est pas normal. » Selon Marie, cette situation est due, à une trop grande concentration des habitants : « C’est un quartier attractif, ils font tout pour d’ailleurs, là ils font la place du marché, mais qui va venir ? En voiture c’est inenvisageable ! On ne peut pas nier que c’est un quartier agréable, mais il y a un bruit infernal : entre les voitures, les trams et les travaux. » déclare-t-elle. Outre la concentration, la jeune femme a une théorie sur la politique d’urbanisation à Port Marianne : « Ils délocalisent tout, maintenant la Mairie est à Port Marianne, pour moi ils veulent déplacer le centre ville. Il y a le centre ville historique, plus touristique, et maintenant le nouveau centre ville c’est ici !» La concentration des voitures a pour effet de ne plus laisser une seule place payante libre dans le quartier, à cette gêne s‘ajoute une efficacité certaine les agents de stationnement, comme le rapporte Marie : « Je viens de Paris, et je n’ai jamais vu ça ! Il ne faut pas laisser sa voiture sans payer ils sont redoutables… A l’image des contrôleurs de la TAM ».

Pour régler ces difficultés, la municipalité compte beaucoup sur le projet immobilier Mantilla dont la livraison est prévue fin 2014. Cette construction de 27 000 m2 située le long de l’Avenue Raymond Dugrand prévoit en plus des bureaux, des commerces et des logements pour étudiants, un parking souterrain de 600 places. Si une partie sera privée, ce serait selon laDAP (Direction Aménagements et Programmation) environ 400 places de plus disponibles à Port Marianne. Une solution aux problèmes de stationnement ?

Port-Marianne : le nouveau centre-ville de Montpellier?

Depuis la construction de la nouvelle mairie, le quartier Port Marianne fait de la concurrence au centre historique : avantages et inconvénients pour les riverains et ceux qui y travaillent

Un nouveau centre-ville. C’est la vocation du quartier Port-Marianne, fraîchement sorti de terre au sud-est de Montpellier. Construit au bord du Lez, à proximité de la nouvelle mairie, il est aujourd’hui l’un des quartiers les plus recherchés par les acheteurs et les locataires.

Mais les appartements ne sont pas accessibles à toutes les bourses. Selon l’agence Côté sud immobilier, à l’achat le mètre carré coûte environ 4000€ dans les logements neufs. Pour un F4, il faut compter en moyenne 1400€ de loyer. « Les prix sont plutôt homogènes dans le quartier et il y a une forte demande » explique la responsable de l’agence. A quelques mètres de là, l’agence Square habitat tempère : « les appartements les plus chers se trouvent autour du bassin Jacques Cœur. Les prix sont moins élevés aux jardins de la Lironde, car l’endroit est plus éloigné des transports en commun, ça freine souvent les personnes âgées ». Malgré quelques disparités, le quartier reste l’un des plus chers de la ville.

Eric « Le stationnement pour moi c’est pas un soucis : je trouve toujours une place. »

Douze ans que Eric habite entre Port Marianne et les Rives du Lez, et comme il l’affirme fièrement « quand je suis arrivé, il n’y avait rien ! ». Ce pâtissier, actuellement au chômage, évoque un quartier agréable, bien loin des problèmes de stationnement : « Pour moi c’est un quartier très agréable, c’est vert, c’est jeune. C’est vraiment super, le stationnement pour moi c’est pas un soucis : je trouve toujours une place. C’est aussi l’idée écolo du quartier donc oublie ta bagnole et prends le tram’ » Ce riverain approuve autant le cadre de vie, que la population : « Et puis il n’y a pas de racailles , c’est tranquille, pas de délinquance, en ville c’est pas pareil. » Eric a de grands projets pour son quartier, tournés vers la jeunesse et le sport : « Il faudrait un skate-parc pour les jeunes, conserver les espaces verts, des toilettes publiques et des tables de ping-pong ! » Eric a une théorie sur la stratégie d’urbanisation de la Ville : « Pour moi le nouveau centre ville ça sera Odysseum, je dis ça, car je pense à Béziers. Depuis qu’ils ont construit le nouveau centre commercial il n’y a plus de centre ville. »

Les cadres supérieurs très présents

Avec de tels prix, le profil des acheteurs est homogène : « ce sont en général des retraités ou des personnes proches de la retraite. La majorité sont des cadres supérieurs ou des professions libérales » observe Sylvain, agent immobilier chez Montpellier Immo. Et Port-Marianne n’attire pas que les Montpelliérains : environ un tiers des acheteurs ne seraient pas originaires de la ville, selon Sylvain. Ces nouveaux venus sont en majorité des parisiens qui cherchent un pied-à-terre dans le sud. Du côté des locataires, le profil est légèrement différent. « Il y a beaucoup de jeunes couples dans les petits appartements, et des familles dans les plus grands. Souvent, ce sont des personnes de Montpellier qui changent de quartier. » selon l’agence Square Habitat. Grâce à la faculté d’économie de l’université Montpellier 1, les étudiants sont aussi présents à Port-Marianne, où les studios sont légèrement plus chers. La faute peut-être à l’absence d’une cité universitaire dans le quartier.

Xavier  » je pars 30 minutes plus tôt le matin pour éviter les embouteillages. »

Ingénieur, Xavier a la chance d’avoir un parking privé « C’est ma boîte qui loue les parkings, sans ce service je ne sais pas comment je ferais… Déjà que je pars 30 minutes plus tôt le matin pour éviter les embouteillages.» Son entreprise a bien anticipé le problème, quinze jours qu’il a embauché et il félicite cette initiative. Malgré les difficultés d’accès, Xavier découvre un quartier : « C’est marrant comme endroit, il y a des bâtiments neufs et des plus vieux, c’est un peu excentré mais c’est ni une banlieue ni une zone industrielle.» Le quadragénaire déplore néanmoins le bruit : « Heureusement les bureaux sont biens insonorisés mais quand on sort c’est vraiment bruyant. »

Malgré les prix, Port-Marianne semble séduire sur le long terme : « il y a peu de départs, les habitants sont satisfaits du quartier » conclut l’agence Côté sud Immobilier. Malgré ses 30% de logements sociaux, le quartier n’est pas accessible à tous les revenus.

Marché de Richter : un nouveau lien entre les habitants ?

À l’abord du quartier Richter, sur la place Thermidor, se construit depuis quelques mois l’espace qui accueillera un marché alimentaire. Les travaux devraient être terminés avant juin 2014. Ce projet a pour ambition de créer du lien entre le quartier Richter où habite bon nombre d’étudiants et Port Marianne, peuplé de cadres supérieurs, de familles et de retraités.

Le projet est né il y a de ça 2 ans par le comité de quartier de Port Marianne Nord, Sud et monsieur Dufour, 3ème adjoint au maire. Ce n’est pas une première. Un marché avait déjà été implanté à Port Marianne, près du bassin Jacques Cœur. Au bout d’un an à peine, la poignée de commerçants qui constituait ce marché a plié bagage faute de client car il était « beaucoup trop enclavé » explique Marc Rayna, président adjoint du comité de quartier de Port Marianne Sud. Il poursuit : « Le marché à Richter est situé idéalement. Il est parfaitement desservi par les tramways et beaucoup plus visible. » Car en plus « de créer du lien entre les habitants de Richter et Port-Marianne » l’idée est aussi de « ramener une clientèle extérieure au quartier. »

Le marché devrait se dérouler le samedi matin et prévoit une quinzaine de stands. Stéphane Lopez directeur adjoint à l’espace public explique : « nous avons recensé les candidats et fait, avec l’aide de professionnels, une sélection pour équilibrer ce marché afin de veiller à ce qu’il y ait des produits accessibles, de qualité et aussi de lutter contre les monopoles. » Pour Marc Rayna, ce marché est aussi une occasion pour les étudiants de Richter de « consommer une nourriture plus saine.»

Richter – Port Marianne : « une relation propriétaire-locataire »

L’un des buts avoué de ce marché est bien de créer du lien social entre les habitants. Richter est peuplé majoritairement d’étudiants locataires contrairement à Port Marianne où l’on trouve bon nombre de propriétaires. Que ce soit Marc Rayna ou Michel Audigier, de l’agence UrbanImmo, tout deux caractérisent l’avenue Marie de Montpellier de « Rubicon » ou bien de « frontière » et reconnaissent volontiers que les deux quartiers sont bien différents. Daniel Bartement, maître de conférences en géographie à l’université de Paul Valéry reste dubitatif sur ce projet de marché. Pour lui « la réalité des relations sociales entre Richter et Port Marianne, est une relation de propriétaire-locataire, il poursuit, le projet de la ville c’est d’attirer les étudiants avec les universités. Cela fait une rente pour les retraités de Port Marianne qui louent des appartements à des étudiants dans le quartier Richter. » Pour Marc Rayna il y a toujours eu du lien entre les habitants. Ils n’ont pas attendu le marché pour se rencontrer. Il précise que lotos et autres vides greniers, sont organisés de part et d’autre de l’avenue Marie de Montpellier et que les comités de quartier « ont toujours cherché à animer le quartier ». Le marché semble une initiative de plus pour arriver à ce but.

Pourquoi Richter a-t-il un plus bel avenir que Port Marianne

Le développement exponentiel de Port Marianne à Montpellier provoque des fractures spatiales dans le paysage urbain. Analyse de la situation immobilière du quartier en chantier, au regard de son voisin du Nord, Richter.

Rive Est du Lez, face à l’Hôtel de Ville, se dressent les immeubles de Port Marianne. Ils sortent encore de terre, tirés par les grues. Les façades se veulent modernes, le projet grandiose. Au Nord, lorsque l’on dépasse l’Avenue de Marie de Montpellier, où passent les tramways 1 et 3, on arrive à Richter. Délimité à l’Est par l’Avenue de la Mer et à l’Ouest par le Lez, le quartier abrite la Bibliothèque Universitaire éponyme et la faculté d’Administration Économique et Sociale.

Il y a deux mondes bien distincts séparés par l’avenue Marie de Montpellier. Malgré l’apparente homogénéité de l’avenue, les populations qu’on trouve de part et d’autre sont bien différentes. Richter accueille des habitants majoritairement étudiants, gravitants autour de l’université. Le quartier Port Marianne est, quant à lui, prisé des retraités et des jeunes cadres aux revenus élevés. Ce marquage territorial est appelé à se renforcer, accentuant encore cette «frontière» déjà visible.

Port Marianne, quartier le plus attractif de Montpellier

Richter est un quartier doté d’un cadre de vie agréable. Il a été construit entre 1992 et la fin des années 90 et bénéficie de l’attrait des rives du Lez. Pour cela, les prix à l’achat tournent en moyenne à 3500 euros du mètre carré et les locations sont comprises entre 500 et 600 euros pour un F2. Mais paradoxalement, la présence des étudiants, qui rendent Richter dynamique, bloque son attractivité immobilière. Comme le dit Michel Audigier de l’agence Urbanimmo, «qui dit étudiant dit fête. Et qui dit fête… dit bruit»!. Ici comme dans la plupart des autres secteurs de Montpellier, les prix à la location sont donc destinés à baisser légèrement dans les années à venir.

Ce phénomène sera moins visible à Port Marianne, porté par un développement qui maintiendra des prix hauts au moment où Richter se normalisera. A plus de 4000 euros le mètre carré, «les prix de l’immobilier à Port Marianne sont parmi les plus chers de la ville».
Selon les agences immobilières locales, le quartier est le plus demandé de l’agglomération. Designs tendances, logements spacieux, promesses écologiques… et le neuf ne fait pas tout. La situation de cette zone voulue par Frêche comme le nouveau centre de Montpellier est avantageuse: mairie toute proche, autoroute et aéroport accessibles, centre commercial Odysséum et centre historique à un quart d’heure en transports, font de l’endroit un lieu proche de tout. Même de la mer. Si l’on ajoute l’attrait que peuvent susciter le parc Charpak, le bassin Jaques Cœur, les nombreux commerces et les lignes de tram, on obtient un quartier choyé, avec un haut niveau de vie entretenu.

Les entreprises aussi sont attirées par le carrefour que représente Port Marianne. Pour elles aussi, les prix à l’achat et à la location sont les plus chères de la capitale héraultaise. Pour Lucy John, consultante chez Tourny Meyer, le quartier est en passe de devenir le pôle d’affaire de la ville. «La locomotive, c’est la Serm». La Société d’Equipement de la Région Montpelliéraine, chargée des grands chantiers de développement de la ville, est installée place Ernest Garnier. L’offre, portant sur des locaux situés principalement autours du rond-point, ne satisfait pas encore la forte demande en équipement. Un marché dont Richter, à deux pas de là mais dépourvu de bureau, est complètement exclu.

Un avenir compliqué

Ce décorum étincelant et prometteur cache pourtant des débuts difficiles. Pour Patricia Martin, directrice de Côté Sud Immobilier, la crise, les chantiers qui s’éternisent, la loi Duflot qui attire moins que la loi Scellier, bloquent les acheteurs potentiels. Ceux-ci, pas aussi nombreux qu’espéré, sont d’ailleurs en grande partie primo-arrivant, le revenu du montpelliérain moyen ne lui permettant pas de s’offrir un logement à Port Marianne.

Pour Daniel Bartement, maître de conférences de géographie, le futur du quartier s’annonce à l’image de sa conception originelle : catastrophique. Si Richter représentait le franchissement du Lez et la conquête de nouveaux horizons par une ville historiquement développée vers le Nord et l’Ouest, Port Marianne est l’allégorie du manque de vision politique des dirigeants actuels. «On est passé d’une ville conçue comme une œuvre d’art à une ville-produit immobilier, pensée sur des études de marché». Lointaine époque que celle de Raymond Dugrand! Depuis 10 ans, l’adjoint du Maire à l’urbanisme est un «représentant des entreprises privés» et non plus un penseur de la ville.

En résulte des logements fabriqués comme des biens de consommation, construits non pour y vivre mais pour les louer. M. Bartement ose la comparaison avec le quartier populaire du Petit Bard: l’architecture, de mauvaise facture, «a inclus l’obsolescence» et le design et l’urbanisme seront très vite passés de mode. Les charges de copropriétés, déjà élevées, grimperont en conséquence de la piètre qualité du bâti. Pire, l’urbanisation des rives ont rendus les sols imperméables. Il n’est donc pas insensé de craindre de nouvelles crues du Lez, plus rapides et violentes qu’avant.

A première vue, Port Marianne et ses paillettes font passer Richter pour un banal petit quartier résidentiel. Traverser l’avenue Marie de Montpellier en direction de Jacques Cœur, c’est changer de dimension. Rendez-vous dans vingt ans. D’ici là, l’ambitieux quartier devrait se garder d’être prétentieux.

Michaël Delafosse : « A Port Marianne, tout est fait pour créer une alternative à l’automobile »

Michaël Delafosse, adjoint à l’urbanisme de la mairie de Montpellier, a répondu aux interrogations de Haut Courant sur le projet écologique de la ville pour le quartier de Port Marianne.

Haut Courant : Aujourd’hui, dans le quartier Port Marianne, vous avez fait la ZAC les Jardins de la Lironde sur 40 hectares, les éco-quartiers Parc Marianne et Rive gauche et vous avez pour projet de faire le futur quartier République dont l’objectif sera de « mettre en œuvre tous les principes du développement durable pour devenir un éco-quartier ». Concrètement, essayez-vous de faire de Port Marianne un quartier écologique ?

Michaël Delafosse : Oui. Port Marianne a été lancé au début des années 90 et très clairement, à chaque fois qu’on réalise une ZAC (ndlr : Zone d’Aménagement Concerté), on situe le niveau d’ambition en terme d’urbanisme durable à un niveau plus élevé. Voici quelques exemples pour en attester.
La ZAC Rive Gauche qui vient de commencer est réalisée par Pierre Tourre que nous avons choisi en 2003 (ndlr : Pierre Tourre est un architecte urbaniste). Il a posé le principe de l’orientation bio-climatique des bâtiments, qui fait travailler le cabinet d’étude TRIBU pour essayer d’avoir la norme thermique qui va bien au-delà de la réglementation BBC (Bâtiment de Basse Consommation). L’objectif est que le quartier soit très sobre dans sa consommation énergétique.
Autre exemple d’un équipement complètement structurant du point de vue d’un urbanisme durable : la réalisation d’une centrale tri-génération qui permettra à la fois d’approvisionner en électricité, en chaud et en froid 1000 logements. Autant de carbone en moins consommé, s’appuyant sur une énergie renouvelable.
Troisième exemple, c’est quand même un quartier qui est maillé et structuré autour de deux lignes de tramway et qui conduit donc ses habitants à pouvoir utiliser des mobilités durables que sont les réseaux de tramways ou piétonne car les espaces publics sur ce quartier sont généreux. On peut donc se déplacer sans être obligé d’avoir recours à la voiture, ce qui n’est pas le cas dans d’autres quartiers de la ville.

Justement, le stationnement reste un problème majeur dans le quartier. Est-ce que la conception du quartier incite à sortir la voiture de la ville ?

C’est une invitation à changer les habitudes de mobilité. Il y a du stationnement à Port Marianne. Il y a deux parkings : un sous l’Hôtel de ville de 900 places et un autre en construction de 800 places sous La Mantilla. Plus du stationnement enterré sous les logements. Tout est fait pour créer une alternative à l’automobile et changer les habitudes de mobilité.

Que manque-t-il encore pour que Port Marianne devienne le quartier écologique que vous souhaitez ?

Je pense que Port Marianne est un des endroits en France, du point de vue de l’urbanisme, où les principes les plus aboutis se mettent régulièrement en œuvre. Sur la ZAC de la République, on va faire des toits végétalisés pour faire en sorte que la déperdition de chaleur sur les toits soit atténuée. Chaque fois, on essaie d’avoir un trafic novateur tout autant que la technique le permet et que les coûts sont supportables du point de vue de l’achat des logements qu’ils soient privés ou sociaux.

Les habitants de ces appartements estiment que seul le toit photovoltaïque est écolo et, surtout, que c’est très coûteux. Comment faire pour que ces logements ne fassent pas exploser les prix ?

Il y a encore 4 ou 5 ans de ça, vous m’auriez dit : «  Pourquoi on ne met pas des panneaux photovoltaïques partout ? » Il y a eu une grande tendance à la photovoltaïque pendant quelques années donc on en a réalisé. C’est vrai qu’il y a des logements extrêmement chers, de très haut standing. Mais il y a un tiers de logements qui sont des logements sociaux pour des gens très modestes. Et on fait cet équilibre-là parce que c’est comme ça que l’on fait la mixité sociale.

Différentes associations de quartier à Port Marianne pensent que « les éco-quartiers sont construits sans demander aux citoyens dans quoi ils ont envie de vivre ». Les citoyens sont-ils concertés lors de la création d’un quartier ?

Il y a de la concertation, il y a du dialogue et de l’échange avec les associations. La réalisation d’un quartier est un dialogue avec les citoyens mais elle est aussi une ambition professionnelle qui marque un niveau d’exigence. C’est pour ça que les architectes en chef de chacune des ZAC viennent apporter en matière d’urbanisme durable du savoir-faire et des approches novatrices. Le rôle d’un élu est donc de trancher et de définir l’intérêt général. Dans 100 ans on pourra dire que dans cette partie-là de la ville, sur le plan environnemental, on a fait beaucoup plus qu’à d’autres endroits en France. Dans la partie ouest de Montpellier construite dans les années 60, cette problématique est totalement absente.

Et concernant le processus décisionnel à Port Marianne ?

Je vais vous donner un exemple. On a une demande d’aménagement du bassin Jacques Coeur qui est un espace public structurant. Les gens ont été concertés sur les modalités de cet aménagement. On a donné les contraintes techniques et financières, on a posé des principes. Il y a eu une discussion avec les associations. Aménager un espace public doit se faire de manière concertée et ne doit pas céder à l’intérêt particulier.

Beaucoup de riverains se plaignent de la présence importante de Roms dans un camp juste derrière l’école Chengdu. Est-ce que ça ne salit pas un peu la belle image que vous essayez de donner au quartier ?

Oui, c’est très difficile. On peut comprendre la tension que ressentent beaucoup de riverains parce qu’il y a une population fragile installée sur ces terrains. La ville réalise un village d’insertion parce que la place des Roms n’est pas là. Je pense qu’il serait de bon ton que d’autres communes s’engagent aussi pour régler ces problèmes qui sont complexes et qui ne se règlent pas avec une logique populiste. Je ne dis pas ça pour les riverains qui font preuve de patience et de responsabilité.

Quels sont vos projets écologiques pour Port Marianne ?

Je ne veux pas opposer écologique et social. Quand on fait une ZAC il y a trois principes que l’on doit défendre : celui de la mixité sociale, celui de la générosité des espaces publics et faire en sorte que la contribution du quartier participe au changement de modèle de développement.

Interview réalisée par Wally Bordas