Jacques Chirac a été mis en examen, le 21 novembre, pour « détournement de fonds publics », dans le cadre de l’affaire des chargés de mission de la Ville de Paris. C’est une première dans l’histoire de la République française. Il a été entendu pendant trois heures par la juge d’instruction Xavière Simeoni, au pôle financier du palais de justice de Paris. Il s’agit de la seconde audition de l’ancien président de la République. En juillet dernier, le juge de Nanterre, Alain Philibeaux, chargé des emplois fictifs du RPR, s’était déplacé dans son bureau, rue de Lille, pour l’entendre comme témoin assisté. À ce jour, il n’a été soumis à aucun contrôle judiciaire.
Entre 1977 et 1995, 460 personnes auraient bénéficié d’un emploi de complaisance à la mairie de Paris. Seulement une vingtaine d’entre elles sont poursuivies pour avoir touché des salaires provenant du cabinet de Jacques Chirac, maire de l’époque, sans que ces derniers donnent lieu à contrepartie pour la Ville de Paris. Parmi elles, se trouvent Michèle de Charrette, épouse de l’ancien ministre UDF des affaires étrangères et Marc Blondel, ancien secrétaire général de Force ouvrière, qui a bénéficié pendant dix ans d’un garde du corps payé par la ville. Il a depuis remboursé les salaires perçus par son employé. Plusieurs anciens directeurs de cabinet de Jacques Chirac et de son successeur Jean Tiberi avaient déjà été mis en examen pour « détournement de fonds publics » en 2002.
Dans une tribune au Monde publiée aujourd’hui, l’ancien chef de l’Etat estime que ces embauches étaient en accord avec la loi. Il affirme que « jamais il n’y a eu d’enrichissement personnel. Jamais il n’y a eu de système ». Il ajoute qu’il s’est entouré « d’hommes de qualité traversant une période professionnelle difficile et à qui [il] a voulu redonner une chance ». Avant janvier 1984, il existait un flou législatif concernant les chargés de mission. Une loi a alors été votée mais n’a jamais été appliquée. Ce n’est qu’en mai 1994 qu’un décret réglemente les conditions d’emploi des collaborateurs de cabinet et des agents non titulaires et en décembre 1998, une délibération du Conseil de Paris le rend applicable.
Une décision jugée tardive
Malgré la volonté de Jacques Chirac de démontrer sa bonne foi, l’annonce de sa mise en examen a provoqué de nombreuses réactions. Arnaud Montebourg, député socialiste, a regretté que cette intervention de la justice n’arrive que maintenant. Il a estimé que « c’est bien tard pour s’en prendre à un homme âgé, qui a des problèmes de santé et qui est retiré de la vie publique ». Côté UMP, l’ancien président du Conseil constitutionnel Pierre Mazeaud, proche de l’ancien président de la République, lui a exprimé son « estime et [son] amitié ». Il a jugé cette décision de la justice un peu tardive et s’est dit pour « une amnistie, mais avec des textes clairs qui doivent s’appliquer et des sanctions très sévères ».
Pour l’instant, Jacques Chirac peut toujours siéger au Conseil constitutionnel, dont il est membre de droit en tant qu’ancien chef de l’Etat. Présumé innocent, aucune disposition légale ne l’empêche d’honorer ses fonctions.
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