Le Déni de Grossesse, un phénomène tabou

Par le 9 décembre 2008

Le déni de grossesse, phénomène encore mal connu est pourtant une pathologie qui touche environ 2 femmes sur 1000 chaque année. Félix Navarro, médecin inspecteur de santé publique a fondé il y a 5 ans à Toulouse l’Association pour la Reconnaissance du Déni de Grossesse. Il témoigne.

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Félix Navarro, pouvez vous expliquer quelles sont les principales caractéristiques d’un déni de grossesse?

La définition même d’un déni de grossesse est simple. Il s’agit d’une femme enceinte qui n’a pas conscience de l’être. Notre association reconnaît réellement un déni de grossesse à partir de la 20ème semaine d’aménhorrée. Il n’y a pas à proprement parler de déni de grossesse avant le 3ème mois. Pour le reste, le déni de grossesse montre que la plupart des femmes ne présentent pas de signes apparents de grossesse: elles ne prennent pas de poids, n’ont pas d’arrêts dans leurs menstruations. Leurs conjoints quant à eux, ne voient rien.

Quelles sont les femmes touchées par le déni de grossesse? A combien sont-elles estimées chaque année?

Nous pouvons estimer grâce à l’étude réalisée par James Wessel, un obstétricien de Berlin que 2 grossesses sur 1000 faisaient l’objet d’un déni. Il s’agit là d’un déni partiel. Concernant le déni total, celui qui concene les femmes qui se rendent compte qu’elles sont enceintes le jour de leur accouchement, cela chute considérablement. Elles sont estimées à 1 sur 2500 environ.
D’une manière générale, le déni de grossesse est stéréotypé. Il ne touche pas seulement les femmes issues de milieux sociaux défavorisés. Il touche un éventail de femmes de tous âges en mesure de procréer et de tous niveaux sociaux-culturels. Il touche aussi bien les femmes qui n’ont pas eu d’enfants que celles qui en ont déjà.

Pourquoi avoir crée une association sur un phénomène qui laisse encore le corps médical perplexe?

Au cours de ma carrière médicale, j’ai recueilli de nombreux témoignages de femmes ayant vécu un déni de grossesse. A travers cette association, j’ai souhaité mettre en lumière ce phénomène qui rentre dans le cadre des grandes pathologies obstétricales. Aujourd’hui, l’association permet aux femmes de libérer leurs paroles, de mettre un nom sur un sujet resté tabou. Quant au corps médical qui se heurte encore à ce phénomène, il confond encore déni de grossesse et grossesse cachée. Cette dernière étant plus liée à des raisons culturelles.

Par extension, est ce un phénomène que nous pouvons qualifier de physique ou de mental?

Mental bien sûr. Mais il ne faut pas tout confondre. Nous nous battons pour que les femmes concernées ne soient pas considérées comme des folles ou des menteuses. Le déni de grossesse peut très bien être lié à une souffrance vécue comme la croyance de l’infertilité.
D’autre part, je tiens à souligner qu’il ne faut pas mélanger déni de grossesse et infanticide. Bien au contraire, bien que relayé par la Presse en général, l’infanticide reste marginal dans le cas d’un déni de grossesse qu’il soit partiel ou total.

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à propos de l'auteur

Auteur : Marion Grenes

Un Master Humanitaire à Aix en Provence en poche et une brève passade aux Pays Bas, direction Montpellier pour le Master Journalisme. Une pause cependant cette année, avec un remplacement de journaliste au Télégramme de Brest. Une révélation pour moi qui souhaitais acquérir des bases dans un métier idéalisé depuis bien longtemps. Mes expériences passées m’ont également permis d’écrire pour le magazine Kinés du Monde et d’exercer au sein du service presse de la Fondation de France. Une activité touche à tout particulièrement formatrice. J’attends du Master un enseignement riche et de belles rencontres, me faire une petite place un jour dans une rédaction où les mots se conjuguent avec déontologie et respect d’autrui.