Une philosophie du voyage
Cette initiative, telle qu’elle nous est proposée aujourd’hui, a été lancé en 2004 par un américain, Casey Fenton. Celui-ci avait envoyé, au culot, des demandes de logements gratuits à 1500 étudiants islandais pour voyager en marge des circuits habituels et à moindre coût. Face à la réussite de son entreprise, il a décidé d’étendre le projet et de le rendre accessible à tous. Ainsi est né le couchsurfing project. Aujourd’hui, le site internet recense plus de 820 000 participants dans 229 pays. Le succès est retentissant, si on en croit les chiffres qui nous sont proposés, le pourcentage d’expériences positives s’élèverait à 99,79%. Les annonces sont prometteuses : « Il s’agit de créer des connections à l’échelle de la planète ». Mais il ne faut pas s’y tromper, ce n’est pas seulement une affaire de logement, il y va plutôt d’une nouvelle conception du voyage, teintée d’humanisme.
C’est une initiative en marge du monde marchand qui pourrait faire hurler plus d’un hôtelier mais qui a le mérite de nous rappeler un certain nombre de règles, souvent oubliées : l’hospitalité, la générosité et la confiance. Il est presque inutile de le répéter : sans la curiosité et le plaisir de découvrir des cultures et des personnalités souvent très éloignées de la sienne, inutile de participer. Les bénévoles qui animent le site internet y tiennent : « Notre but est d’intensifier les relations entre les différentes cultures, faisant du vaste monde un lieu plus proche et plus pacifique. Nous mettons en relation voyageurs et locaux sur chaque continent, créant des amitiés et renforçant une nouvelle fois la compréhension entre des cultures différentes. Le but de Couchsurfing n’a jamais été l’argent. »
Le fonctionnement
Être un membre actif du Couchsurfing consiste, dans un premier temps, à s’inscrire. Il s’agit de donner quelques renseignements concernant ses goûts, ses dispositions et ses attentes. Chaque membre se doit d’accepter une charte qui constitue autant de règles et de consignes à suivre pour que les échanges se passent au mieux. Les adresses et les noms sont vérifiés par les gestionnaires du site afin de garantir un minimum de sérieux et de sécurité.
L’organisme agit comme une personne morale à part entière, avec une charte qui protège ses participants. « Pour information, Couchsurfing est le seul grand réseau d’hospitalité ayant ce statut légal » nous assure-t-on.
Les voyageurs et leurs hôtes sont parfaitement libres ensuite. Il n’y a aucune obligation d’héberger qui que ce soit. Les contacts se font par mail dans un premier temps et donnent parfois naissance à de véritables amitiés. Cette couchsurfeuse des Pyrénées nous le confirme : « Ma première expérience m’a transportée au Québec tout en restant sur mon canapé. Val et Steeve sont restés deux nuits et je pense que nous avons fait plus que couchsurfer ! ». Si l’organisme tient à rester gratuit, tant dans son fonctionnement que lors des échanges, il y a des milliers de manières de témoigner de sa reconnaissance : « De nombreux couchsurfeurs aiment apporter un cadeau à leurs hôtes ou leur préparer un repas en remerciement ».
Une initiative exceptionnelle ?
Cette initiative n’est ni la première, ni la seule. Il existe plusieurs sites internet proposant des hébergements, des échanges de services ou des rencontres enrichissantes. Sur www.hospitalityclub.org, www.bewelcome.org ou www.globalfreeloaders.com, on peut trouver des propositions d’échanges interculturels tout aussi alléchantes. La plupart de ces sites sont aujourd’hui traduits en français.
Utopie quand tu nous tiens
Point trop d’utopisme cependant, si le Couchsurfing a la prétention de brasser les cultures à faible coût, il n’est pas accessible à tous. La fracture mondiale est telle que c’est toujours la même partie du monde qui voyage. Vous trouverez certainement un canapé en Jordanie, au Brésil ou au Nigéria mais les Etats-Unis, le Canada et l’Europe restent majoritairement représentés.
De même, les principaux utilisateurs de cet organisme ont moins de 26 ans. On comprend aisément qu’il soit plus compliqué de loger une famille entière sur un canapé qu’un jeune voyageur en quête de nouveaux horizons. En vieillissant, les revenus moyens des individus augmentent et leur permettent d’accéder à un autre type de voyage. Mais c’est oublier les ambitions du projet: la promotion des échanges interculturels et des règles de solidarité.
Pour les valeurs qu’il défend, le système mérite d’être pratiqué et étendu à toutes les catégories de la population, aux quatre coins du monde.