Vélo en ville : la sécurité passe-t-elle par le port du casque ?

1200 personnes ont défilé à vélo samedi 10 novembre entre le Peyrou et l’Hôtel de ville de Montpellier pour défendre la sécurité des cyclistes et demander des infrastructures plus adaptées.

Pour garantir leur sécurité, les cyclistes sont souvent sommés de porter le caque. Devenu obligatoire pour les enfants jusqu’à 12 ans, l’imposition du casque est toutefois contestée. Certains adeptes de la bicyclette considèrent que loin de protéger les cyclistes, il dissuade voire procure un sentiment de fausse sécurité. Les associations de cyclistes fustigent une réponse facile de la part des politiques ne souhaitant pas s’engager dans la valorisation du vélo en ville, ainsi qu’une culpabilisation des utilisateurs de vélo. Pour Olivier Razemon auteur du livre Le Pouvoir de la pédale, Comment le vélo transforme nos sociétés cabossées : « Les cyclistes paient un lourd tribut à l’insécurité routière ». Le journaliste du Monde s’attaque aux idées reçues, expliquant que les accidents de vélos sont moins graves en ville qu’à la campagne où l’on compte près de 150 décès annuels. Il souligne la grande confusion qu’il existe entre le cyclisme sportif ou de loisir, et le vélo utilisé comme moyen de locomotion.

De son côté, David Guillot urgentiste au CHU d’Angers juge qu’il est important de porter un casque pour les déplacements avec des véhicules ayant une cinétique, c’est à dire une vitesse conséquente pouvant éjecter le passager lors d’une chute. «On observe tout de même une différence entre les personnes qui arrivent aux urgences qui portaient un casque, et d’autres qui n’en portaient pas. Les conséquences traumatiques sont moins importantes ne serait-ce qu’au niveau cutané, il y aussi une absorption du choc ». Cependant, il rappelle que le casque n’est pas le sésame qui supprimerait tous les risques : « Des gros traumatismes crâniens à vélo, il n’y en a pas tant que cela, surtout en ville. Dans les cas d’accidents de vélo, on voit plus souvent des fractures de jambes, de bras ou de mains, des brûlures car les gens sont insuffisamment protégés». D’autre part, le casque n’est pas conçu pour résister à tous les chocs, parfois il n’empêche pas le traumatisme.

«Nous, on ne préconise pas le port du casque, explique Daniel Frayssinet, porte-parole de Vélocité grand Montpellier, c’est un choix personnel. Moi cela fait 50 ans que je fais du vélo, je n’ai jamais mis de casque. Ce n’est pas le vélo qui est dangereux, c’est l’environnement du cycliste». La discontinuité des itinéraires, des pistes cyclables qui s’arrêtent brutalement, les trous, et les obstacles, un manque de considération de la part des automobilistes fragilisent ainsi la sécurité des cyclistes. Le journaliste Olivier Razemon pointe du doigt des enjeux détournés, représentatifs en réalité d’un choix politique en matière de déplacement. « Soit on considère que les objets motorisés, voitures et motos, sont voués à rouler toujours aussi vite et en aussi grand nombre, quelle que soient les conséquences pour les autres usagers. En revanche, on peut considérer les déplacements dans leur ensemble, en cherchant à limiter la congestion, le bruit et la pollution, tout en favorisant l’accès de tous aux transports.»

Un constat partagé par l’association Troyes en Selle :« Libre à chacun de porter un casque, mais rendre obligatoire son port est un frein à la mobilité, un frein au développement d’une ville apaisée, une raison de plus de toujours prioriser le tout automobile à outrance ». Une solution, réduire la place de la voiture en ville pour renforcer la sécurité des cyclistes.

Vélomagg’, ce qu’en pensent les Montpelliérains

La start-up montpelliéraine spécialisée dans le vélo en libre-service, Smoove, vient de remporter le marché du Vélib’ à Paris. Celle qui remplacera JCDecaux au 1er janvier 2018 équipe depuis 2007 l’ensemble du parc à vélo de Montpellier avec Vélomagg’. Mais qu’en pensent les usagers?

« Les Vélomagg’, je les utilise depuis le début et le système s’est quand même bien amélioré ! », s’exclame Laurent, utilisateur occasionnel de la bicyclette héraultaise. Il est vrai que le système de vélo en libre-service montpelliérain a connu de nombreux soubresauts depuis juin 2007, date de sa création. Laurent se rappelle : « Au début , il y avait peu de stations. Les vélos étaient souvent dégradés, mais le pire, c’était le système de location qui était très compliqué  », comme en témoigne un article de Haut Courant paru en 2008.

Depuis 2011, le système a été simplifié par la société héraultaise Smoove avec la possibilité de location via une carte bancaire ou un numéro de téléphone portable. Aujourd’hui, avec 56 vélo-stations et près de 2500 vélos à disposition dont plus de 500 en libre-service, les difficultés pour louer un vélo sont certes moins prégnantes mais toujours présentes. « Le plus difficile c’est de trouver de la place pour rendre son vélo, explique Louise qui vient de finir ses études. Il m’est arrivé de tourner pendant plus de 40 minutes pour trouver un emplacement en station ». Marine, perchée sur son Vélomagg’, confirme :« Dans certaines stations, c’est très compliqué, surtout à partir de 17h ». Un problème qui touche surtout les stations Père Soulas, Observatoire ou encore Saint-Denis. La société Smoove, qui vient de remporter le marché parisien du Vélib’ au nez et à la barbe de JCDecaux, a déjà une solution. Pour remédier aux problèmes de places en stations qui touchent la grande majorité des agglomérations européennes, elle a lancé cette année une expérimentation à Helsinki en utilisant un nouveau dispositif nommé « overflow ». Ce système permettra de parquer son vélo même en cas de station pleine, en l’attachant à ceux déjà présents. « Une super idée ! » pour Marine, étudiante à Montpellier.
Les Vélomagg' face à leurs concurrents.
Si le système de location de vélo en libre-service montpelliérain a ses adeptes, il peine encore à convaincre de nombreux habitants. Au sein de l’association Vieux biclou, spécialisée dans la réparation de vélo et membre de la Fédération française des usagers de la bicyclette, on n’est pas contre le Vélomagg’, « mais acheter son vélo d’occasion coûtera moins cher que de louer à chaque fois un Vélomagg », explique Jean-Luc, récent membre de l’association. Au milieu des adhérents en pleine réparation de leurs bolides, William, vétéran de l’association témoigne : « Lorsque tu as ton vélo, il est optimisé pour toi et tu vas être vélonome ». Un néologisme que le fringant moustachu d’une soixantaine d’années détaille comme « le fait d’être autonome à vélo et surtout de connaître son fonctionnement ».

Du côté des professionnels de la location de vélo on reconnaît que le la petite reine montpelliéraine est peu chère et pratique. Mais « les Vélomagg’, vous avez vu la tronche qu’ils ont ! », s’exclament David Ardisson, gérant d’Ebike Premium. « Mes clients veulent sortir du vélo ordinaire et avoir un look différent », reprend-il.
Des questions de forme bien loin des préoccupations de la petite start-up montpelliéraine qui vise désormais les marchés du vélo en libre-service de Barcelone et du Luxembourg.

Finalement, partisan du Vélomagg’ ou pas, les Montpelliérains s’accordent sur les bienfaits de la bicyclette. Et comme l’affirme William : « Plus y a de vélos, moins y a de cons sur la route ! ».

Lorenza avale les kilomètres, et les souvenirs

11.mare-.jpg Cette étudiante italienne en géographie de 24 ans a quitté Bologne il y a un peu plus de deux semaines pour rejoindre le Portugal à vélo en vue d’une année Erasmus. Le jour elle pédale et fait des escales au grès de ses envies touristiques ; la nuit elle dort chez l’habitant à la campagne, ou chez des «prêteurs de divans», dégottés via le site couchsurfing.com.

Elle en garde des bons souvenirs, comme lors de son escale à Toulon. Ce jour là était la pire journée de vélo. «Je me suis perdue, j’avais terminé l’eau et je suis arrivée crevée». Mais l’accueil reçu lui réchauffe le coeur. Son hôte l’emmene voir un concert de jazz et se lève tôt le matin avec elle pour lui acheter des viennoiseries avant son départ.

Il y a une dizaine de jours, c’est à Montpellier qu’elle s’arrête, pour plus longtemps que prévu car les rayons de son vélo cassent. Le stress passé, elle profite de ces vacances forcées pour visiter la ville. «J’aime le vélo, explique-t-elle avec son sourire communicatif, la vitesse est idéale pour profiter du paysage». Elle s’étonne d’ailleurs que son périple intéresse autant de gens. «Quand ils sont surpris et que je vois comme une lumière dans leurs yeux, cela me plaît beaucoup, car ça peut être une motivation pour suivre ses rêves». Prochaine étape : Toulouse.