Quelques parents attendent dans leur voiture garée le long de l’enceinte des deux écoles de Cournonsec. Un groupe d’hommes discute, accoudés à la barrière de sécurité du trottoir d’en face. Les mamans, un peu plus nombreuses, forment des petits groupes, juste devant l’entrée. Il est 16 heures15 quand la sonnerie retentit. Pas de bousculade. Le temps de quelques échanges, les enseignants laissent partir les enfants attendus. C’en est fini pour le temps d’enseignement.
Dans la commune de 1 450 habitants, la modification des rythmes scolaires n’a pas chamboulé les horaires. Les directeurs des écoles maternelle (151 enfants répartis en 6 classes) et élémentaire (182 enfants répartis en 8 classes) n’étaient pas favorables à l’application de la réforme. La décision s’imposant à eux, ils se sont mis d’accord pour adopter des horaires identiques. Comme avant, l’école commence à 9 heures, jusqu’à midi. L’après-midi, la sortie a été avancée de 45 minutes.
À peine un quart d’heure plus tard, une enseignante referme la dernière des portes de classe encore ouverte. Elle prétexte devoir assurer le soutien scolaire pour ne pas livrer son avis sur la réforme. Elle lâche tout de même : « Tant qu’on n’aura pas pris le parti d’écourter les vacances d’été, il ne faut pas attendre de bonnes évolutions. » Les abords de l’école retrouvent le calme quand Cécile embarque ses deux filles. C’est son jour de repos. Les autres jours, elle les laisse jusqu’à 18 heures à la garderie. Comme elle, peu de parents ont réorganisé leur temps de travail pour être présent à la sortie des classes.La semaine de 4 jours et demi n’a généralement pas diminué le temps de présence de l’enfant à l’école. À Cournonsec, 45% des enfants restent à l’école après l’heure de sortie des classes contre 25-35% avant la réforme. Dans d’autres communes, c’est nettement plus : 75% à Clapiers, 80% à Castries.
Financer la réforme sans augmenter les impôts
Alors pour les communes à qui reviennent l’organisation et le financement des activités périscolaires, la charge s’avère lourde. Surtout, elle vient peser sur les finances locales dans une période où la pression fiscale alimente le discours des politiques à l’approche des élections municipales. Dans cette perspective, « ne pas augmenter la pression fiscale locale » est le mot d’ordre de la municipalité à Cournonsec. Même si la commune, la plus endettée de l’agglomération,a choisi d’appliquer la réforme scolaire dès la rentrée 2013.
«Les grandes lignes de cette réforme étaient connues en 2012. Vu son impact financier sur le budget de la commune, la municipalité avait intérêt à l’appliquer au démarrage pour bénéficier du fonds d’amorçage accordé par l’Etat (50 euros par élève), qui finalement est reconduit en 2014.» défend Elsa Simon, directrice du service de jeunesse de Cournonsec, chargée du pilotage de la réforme.
Il a fallu dans le même temps, réorganiser le service d’accueil des enfants à l’école, recruter, bâtir un programme d’activités culturelles et sportives. Le budget a été serré au plus près.La commune s’est appuyée sur des structures existantes : l’ALAE (Accueil de Loisirs Associés à l’Ecole) et l’ALSH (Accueil loisirs sans Hébergement) conventionnées et subventionnées par la Caisse d’Allocations familiales. Elle a convenu avec elles d’une nouvelle articulation pour la prise en charge des enfants. La CAF apporte son soutien financier à la commune mais ce n’est pas sans contrepartie.
L’aménagement du temps de travail d’employés municipaux à temps partiel, intervenant dans les écoles, a été modifié. Pour certains agents, le temps de travail a pu être allongé. Six animateurs supplémentaires ont été recrutés à temps partiel pour respecter la réglementation touchant l’encadrement des enfants en temps périscolaire : un animateur pour dix enfants de moins de dix ans et un pour quatorze enfants de plus de six ans. Ces animateurs sont qualifiés : ils détiennent au minimum le BAFA. Ce recrutement ne permet pas à la commune de prétendre aux dispositifs d’emplois aidés du type emploi d’avenir avec allègement de charges à la clé.
La gratuité des activités périscolaires passées à la trappe
Aux dépenses de personnel viennent s’ajouter les frais de matériel et de salles, qui alourdissent le budget à consacrer aux activités périscolaires. Tout compte fait, fonds d’amorçage et subvention ne couvrent pas la totalité des dépenses. Quelle solution pour financer le solde quand d’autres investissements touchant le poste « école » sont inéluctables ? L’aménagement de deux nouvelles classes supplémentaires et l’extension du restaurant scolaire se sont imposés sous l’effet de la poussée démographique que connaît le territoire. Pour ne commettre aucune entorse à la rigueur budgétaire, la municipalité a dû arbitrer. La gratuité des activités périscolaires est passée à la trappe. Les familles sont donc mises à contribution selon une tarification modulée en fonction du nombre d’enfants et du revenu de la famille. «Toujours en dessous d’un euro, par enfant et par activité »,souligne Elsa Simon.
La pilule est dure à avaler pour certains parents. « Franchement, ce n’est pas cher. Mais au départ ce n’est pas ce qui avait été prévu, rappelle une maman dans un groupe en discussion. Par principe, Je ne suis pas d’accord. » Le cas de Cournonsec n’est pas isolé parmi les communes partantes pour la réforme scolaire en septembre 2013. Une tarification des activités périscolaires est appliquée à Saussan, tandis qu’elle s’applique seulement pour certaines activités à Lavérune. Et elle pourrait voir le jour à Murviel-les-Montpellier à la prochaine rentrée. Qu’en sera-t-il à Montpellier ? La municipalité actuelle n’a pris aucun engagement sur la gratuité des activités périscolaires, contrairement au candidat Jean-Pierre Moure, qui en fait un engagement de campagne au volet de l’école de la diversité.
Cournonsec pourra-t-elle lui servir d’exemple à Montpellier ? Difficile de calquer le modèle d’une commune sur une autre selon Elsa Simon. Chaque commune possède ses structures d’accueil, regroupées ou dispersées et des infrastructures sportives et culturelles plus ou moins nombreuses. Mais l’expérience reste bonne conseillère.