Le phénomène Chavez

Chavez, le président vénézuelien presque tout puissant, grande gueule et médiatique. Un phénomène. Pour mieux comprendre le chavisme et sa perception dans l’ensemble de l’Amérique Latine, neuf des principaux quotidiens de la région formant le Grupo de diarios de America (La Nacion (Argentine), O Globo (Brésil), El Mercurio (Chili), El Tiempo (Colombie), La Nación (Costa Rica), El Comercio (Equateur), ElUniversal (México), El Nuevo Día (Puerto Rico), El País (Uruguay)) ont mené une enquête de fond dans leurs pays respectifs. Ces enquêtes ont ensuite donné lieu à des publications de dossiers spéciaux sur le chavisme.

Voici des extraits du dossier spécial consacré au chavisme et publié le 20 Mai 2007 dans le quotidien argentin, La Nacion.

« Avec une politique de séduction, le président vénézuelien avance ses pions dans sa stratégie pour devenir indispensable. Un dossier spécial du Groupe des Journaux d’Amérique (Grupo de diarios de America) révèle comment se tisse la toile chaviste sur le continent.

Le phénomène parcourt la région. Du Mexique à l’Argentine, le pouvoir vénézuélien tisse des alliances à force de sympathie, ou simplement, d’argent. Dans certains lieux, son activité est visible, dans d’autres, juste une présence naissante. Chaque jour s’ouvre dans un pays américain un « cercle bolivarien ». Et un nom est omniprésent dans les débats politiques : Hugo Chavez. Le Socialisme du XXI ème siècle est sa marque déposée. Les ressources économiques du pétrole et l’ambition internationale de son leader sont les piliers de cette structure connue sous le nom de chavisme.

Comme nulle part ailleurs sur le continent, en Argentine, l’appareil chaviste semble fortement consolidé. La multitude des actes en faveur de Chavez et sa présence permanente dans l’agenda national le démontrent.

Le quotidien brésilien O Globo indique que, malgré la concurrence vénézuelienne pour le leadership régional, le commerce et les investissements justifient l’intérêt du Brésil pour le pays voisin. Cependant, des voix s’élèvent, surtout dans l’opposition, pour demander de maintenir une certaine distance avec Caracas. Les chiffres montrent que la relation entre Brésil et Venezuela, sur le terrain commercial, est en pleine expansion. Cependant la présence de Chavez au Brésil ne se limite pas à des associations dans le secteur pétrolier ou à des projets sociaux.

Au Chili, où, selon le quotidien El Mercurio, les chavistes préfèrent s’appeler « boliviarianistes » et s’inscrire en marge du pouvoir officiel (au niveau gouvernemental il n’existe rien de plus qu’une relation protocolaire), s’est lancé en mai dernier le chapitre chilien du Congrès Bolivarien des Peuples, organe le plus actif du chavisme. Le CBP a organisé six voyages pour transférer plus de 500 personnes aidés par la « Mission miracle » afin qu’en 10 ans, 600 000 latino-américains affectés de maladies visuelles soient opérés.

L’équipe d’investigation de El Mercurio assure aussi que le Venezuela a acquis l’hebdomaire gratuit « La poca ». Manière de participer aux contenus d’un media écrit dans ce pays. De plus, le Venezuela a commencé à aider techniquement l’unique chaîne de télévision étatique. Et ce afin de transmettre les messages politiques jusqu’aux plus défavorisés.

Mais l’influence du Venezuela en Bolivie va plus loin. Chavez aide techniquement la Paz en matière de pétrole et le transport et la sécurité du président Morales sont à la charge du Venezuela.

Affinités et différences

En Equateur, les bénéfices de la relation avec le Venezuela ne sont pas significatifs, malgré les expectatives générées dans le domaine de l’échange commercial. Néanmoins, sur le plan politique, idéologique et personnel, l’affinité est grande entre le président Rafael Correa et Chavez. Mais le gouvernement a montré qu’il n’était pas inconditionnel au gouvernement chaviste.

El Universal, au Mexique, souligne un chiffre intéressant sur la différence de conception de la révolution bolivarienne qu’ont d’un coté les politiques et les entrepreneurs, et de l’autre la population. Selon une étude du Consejo Mexicano de Asuntos Internacionales, 25% des leaders mexicains considèrent le Venezuela comme un pays ami du Mexique contre 45% de la population en général.

Autre face de la diffusion chaviste : le programme d’alphabétisation des adultes « Yo Si puedo » (Je peux le faire) qui, depuis 2004 avec un financement vénézuelien, se met en place sur le continent. Avec les méthodes proposées, on apprend à lire et écrire en seulement trois mois.

Se détacher du leader

Le périodique uruguayen El Pais souligne, que suite à des débuts idylliques dans les relations entre les gouvernements de Tabré Vazquez et Hugo Chavez, l’Uruguay donne des signes de vouloir de détacher du leader vénézuélien. Le politologue Romeo Perez a expliqué dans El Pais que « dans les derniers mois, les politiques conduites par le gouvernement uruguayen s’éloignent des propositions du Venezuela chaviste ». Il témoigne également qu’en Uruguay, le chavisme a une « influence limitée, qui s’exprime minoritairement au Parti Communiste et dans le mouvement syndical ».

Pour la Nacion du Costa Rica, le président Chavez tente d’exercer son influence dans ce pays d’Amérique centrale par le biais de quatre plateformes : les voies diplomatiques traditionelles, la manipulation du pouvoir économique, l’influence sur les organisations sociales et la construction d’alliances régionales.

Le journal de Porto Rico, El Nuevo Dia a ressorti une phrase qu’a dit Chavez au moment de la création d’une alliance pétrolière entre les pays caribéens. « Un Empire d’Amérique latine et des Caraïbes serait plus grand que l’empire de la Guerre des Etoiles, et il ne pourrait être freiné. »

Chavez compare sa construction politique à un empire. Pour le moment, ses réseaux s’étendent dans la région. »

« El Fenomeno Chavez », La Nacion