L’impayable François a finalement réussi, ce mardi 9 octobre, à faire voter par sa majorité parlementaire le fameux Traité sur la Stabilité, la Coordination et la Gouvernance (TSCG).
C’est un soulagement évident pour le dirigeant socialiste car, reconnaissons-le, l’affaire était assez mal engagée.
En effet, pour la majorité des humanoïdes répertoriés, le vote pour A plutôt que pour B indique que l’on est plutôt favorable à A, et que l’on peut ensuite (typiquement) défendre A.
Mais les socialistes échappent à cette banalité étouffante, Elisabeth Guigou, notamment, gratifie le Journal du Dimanche d’une véritable leçon de realpolitik : « Il n’est pas nécessaire d’aimer un traité pour le ratifier ».
Philippe Martin, député du Gers, a dégainé quant à lui un inoubliable « oui raisonnable ».
Enfin, Bruno le Roux et François Rebsamen, respectivement patrons du groupe socialiste à l’Assemblée et au Sénat, ont opté pour un sobre « oui de soutien »[[http://tempsreel.nouvelobs.com/politique/20121009.OBS5092/tscg-la-gauche-s-est-reunie-pour-voter-ce-traite.html]].
Dans un autre registre, il semblerait normal que, pendant la campagne, quand un candidat adopte une position s’opposant de facto à celle de son adversaire principal, il s’y tienne ensuite pour respecter son « mandat du peuple ».
Ou, au moins, qu’il ne renonce pas complètement à sa position pour adopter celle du camp d’en face.
Cette innovation politique socialiste est résumée sur le blog de François Fillon : « En votant à une très large majorité en faveur de ce traité, l’opposition a pris ses responsabilités, par sens du devoir et avec pour seul critère l’intérêt de la France et de l’Europe. Ce traité européen a été adopté, au mot près, tel qu’il a été négocié par Nicolas Sarkozy et François Fillon, en dépit de toutes les promesses de renégociation de François Hollande. »
En effet, le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a confirmé sur France 2 que le traité n’avait « pas été renégocié ».
Mais la palette du surréalisme socialiste est inépuisable, et les disciples de la rose entendent nous le prouver.
Car quand on prétend rompre avec la présidence précédente, on n’est, classiquement, pas soutenu par des personnalités représentant la même idéologie, surtout sur les questions économiques.
Sans surprise, cette logique n’est pas applicable à un Hollande qui peut à la fois protester vaguement contre la finance (ou Sarkozy), et être félicité par Arnold Schwarzenegger[[http://www.lemonde.fr/politique/article/2012/10/12/arnold-schwarzenegger-salue-la-politique-de-rigueur-de-francois-hollande_1774954_823448.html#xtor=RSS-3208]], ex-gouverneur républicain de Californie, pour sa politique d’austérité.
L’ex-culturiste autrichien aurait ensuite déclaré : « Si vous avez une vision et êtes prêts à travailler dur, vous pouvez arriver à n’importe quoi ».
Voilà peut-être le nœud du problème, car d’aucuns étaient persuadés que sortir de la crise était plus urgent qu’apprendre aux gens à « travailler dur », ce qu’Hollande fait d’ailleurs très (trop ?) bien.
Et si l’on parle de sortie de crise, donc de relance, alors l’exemple argentin semble nettement plus pertinent que le grec.
Plongée entre 1999 et 2002 dans une crise économique terrible, confrontée au même type de réformes que savourent actuellement les Hellènes, la république andine prend une décision cruciale fin 2001 : elle fait défaut sur la quasi-totalité de sa dette.
Comme l’Islande pendant la dernière crise, elle explique calmement à ses créanciers et au FMI qu’elle ne payera pas, effaçant une ardoise de 132 milliards de dollars.
Substituant l’industrie locale aux imports, ayant recours à des investissements publics et imprimant de la monnaie, elle va rapidement stabiliser son économie, la variation de son PNB passant de -10% en 2002 à +9%(!) en 2003.
La Grèce devrait-elle alors s’en inspirer ?
Peut-être, si l’on croit Roberto Lavagna, ex-ministre de l’économie et artisan du redressement argentin, qui affirme dans Libération que: « Les sorties de crise se font en dehors des chemins tracés par le FMI ».
Car le « président normal » va devoir frapper encore plus fort…
Refusant tout défaut sur la dette (plafonnée par le traité à 60% du PIB, sous peine de sanctions), et sans emprunter plus (le texte imposant la résorption d’1/20ème de l’excédent de dette par an), le chef de l’Etat ne veut rien de moins que relancer l’économie.
Or comme l’économiste Keynes l’expliquait en 1936, les relances les plus efficaces seraient « contracycliques », c’est-à-dire que quand les caisses sont vides, il ne faudrait pas économiser mais au contraire…dépenser le plus possible !
Une telle politique, notamment au travers d’investissements dans les infrastructures ou d’augmentations de salaire, va (théoriquement) conduire la production à augmenter pour profiter de l’accroissement des marchés et du pouvoir d’achat.
Mais ce type de relance, dite « par la demande », nécessite d’emprunter dans un premier temps, ce qui crée fatalement…de la dette.
Au final, on se retrouve avec un traité signé à reculons, une opposition ravie, des soutiens surprenants et une reprise plafonnée.
Qui expliquera enfin aux socialistes que leur présence à l’Elysée n’est qu’un accident, provoqué par un ras-le-bol du sarkozysme ?
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