Jeanne, avec ses deux enfants, distribue des bougies autour de la fontaine des Trois Grâces. Originaire de la banlieue parisienne elle se sent particulièrement touchée : « Il faut rester solidaires, unis et faire attention aux amalgames. Je n’ai qu’un seul mot à la bouche : solidarité ». Un peu plus loin, un jeune homme arrive en skateboard et dépose un sac de bougies au pied de l’Opéra. Christopher, l’un des meneurs du rassemblement, lui, est allé acheter des bougies dans un commerce juste à côté. Il les distribue dans la foule, qui se les transmet de mains en mains. La place de la Comédie baigne alors dans une lumière sombre et douloureuse. L’heure est au recueillement.
« J’ai pleuré pour les familles, la liberté, la France. »
Les jeunes sont venus en masse ce soir. Parmi la foule, Eve, 23 ans, brandit une pancarte « Je suis Paris » et exprime son émotion: « Quand j’ai appris ce qui s’était passé hier soir, j’ai littéralement fondu en larmes. J’ai pleuré pour les familles, la liberté, la France. » Calypso, 19 ans, bougie à la main, elle, est en colère : « J’ai une grosse boule au ventre. Je suis à la fois bouleversée et dégoûtée. Tout de suite j’ai été révoltée, je me suis dit il faut qu’on réagisse. »
Pour la jeune fille, réagir, ce n’est pas seulement se rassembler, c’est bien plus que ça, elle fait appel au gouvernement, aux chefs d’Etat qui doivent agir, même si elle ne sait pas très bien comment. Gengis dit n’avoir plus confiance dans le dispositif de sécurité mis en place par l’Etat : « C’est encore arrivé, alors qu’on a un plan Vigipirate, on voit bien que ça change rien. » Mais même si la peur se fait ressentir, comme l’exprime Eve qui dit avoir « vraiment très peur », la jeunesse sait de qui elle doit véritablement avoir peur. Pour Gengis , « ça crée une peur de l’autre, mais il ne faut pas tout confondre. »
« Il n’y avait rien de calculé, c’est le cœur qui parlait. »
Même si le rassemblement a été annoncé sur Facebook et Twitter par la ville de Montpellier Méditerranée Métropole, ce sont des inconnus qui se sont improvisés meneurs du rassemblement. Personne n’a voulu prendre de micro ce soir, aucune personnalité politique n’est intervenue afin d’éviter toute récupération.
Eric, Stéphane, Christopher et Ismaël, qui ne se connaissaient pas avant ce soir, ont scandé les slogans improvisés tels que « Ils ne gagneront pas, ce soir la France est là ! » ou encore « On a pas peur on a un cœur ». « Il n’y avait rien de calculé, tout était spontané. On s’est rassemblé autour des bougies. », témoigne Stéphane. Ismaël, le plus jeune des meneurs décide de placer les bougies en forme de tour Eiffel, de cœurs et en écrivant PARIS. Il fait appel à un homme parmi la foule : « Toi qui a de la voix, tu veux pas trouver un truc à dire ? » Stéphane commence avec « Non aux amalgames ! » Le slogan est efficace, la foule scande ces trois mots, qui résonnent sur la place de la Comédie.
À plusieurs reprises la foule chante la Marseillaise qui se termine par des applaudissements. Un citoyen lance Imagine de John Lennon, alors qu’au même moment au Bataclan un autre joue la mélodie au piano. Montpellier et Paris réunis en musique: «Imagine there’s no countries, It isn’t hard to do, Nothing to kill or die for, No religion too, Imagine all the people, Living life in peace…»[[ Imagine qu’il n’y a aucun pays, Ce n’est pas dur à faire, Aucune cause pour laquelle tuer ou mourir, Aucune religion non plus, Imagine tous les gens,Vivant leurs vies en paix..]].
À la fin du rassemblement, les gens forment une ronde, puis déposent leurs bougies au sol autour des drapeaux français et dessins d’enfants. Une femme s’exclame : « Bravo à la jeunesse, bravo et courage à vous ! » en brandissant son drapeau bleu blanc rouge. Et Gengis ajoute: « Nous si on est là c’est pour tout ce qui se passe partout dans le Monde. »
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