De l’Afghanistan aux otages

Par le 2 décembre 2010

Ce mercredi 1er décembre, le Diagonal a accueilli une conférence-débat organisée par le comité de soutien pour la libération de Stéphane Taponier et Hervé Ghesquière. Le thème : « Mieux connaître l’Afghanistan et la situation des otages. » Un sujet prometteur qui n’a pas attiré les foules.

18h15. Salle 2 du cinéma. Une quarantaine de personnes ont répondu présent au rendez-vous. « Je suis contente de voir autant de monde », s’exclame Sophie Pille, membre du comité de soutien. Pourtant, c’est une salle à moitié vide qui lui fait face. À croire que l’Afghanistan intéresse peu les Montpelliérains. Ce pays se rattache pour beaucoup à la guerre, aux attentats, aux talibans… La conférence a justement pour but de dépasser ces conceptions et de révéler une complexité souvent méconnue.

« Un diamant aux multiples facettes »

Georges Lefeuvre, ancien diplomate au Pakistan, se charge d’expliciter l’histoire afghane. Amputation de territoire, envahissements successifs, guerres multiples, diversité des tribus… Durant 45 minutes, l’anthropologue tente de faire partager son amour pour « un pays adorable mais abîmé ». L’Afghanistan est « un diamant » dont il faut comprendre les multiples facettes pour mieux appréhender la situation des otages.

À en croire Georges Lefeuvre, les deux journalistes auraient par ailleurs un peu de chance dans leur malheur : « La province de Kapisa où sont retenus Hervé et Stéphane n’est pas la pire. Un otage restera toujours un invité aux yeux des Pachtouns. Je n’envie pas leur sort, mais ils sont sûrement plutôt bien traités. »

Des briques et des rêves

Après ce long discours, place à un nouvel invité : Youssef Charifi. Ce producteur présente un extrait de la série documentaire Les Enfants de Kaboul : « Des briques et des rêves est un film tourné en 2008 dans le cadre des ateliers Varan, un organisme qui forme des réalisateurs. Ici, il est question du travail des enfants. »

Pendant 25 minutes, le spectateur suit Abdullah, 13 ans. Ce garçon est issu d’une famille nombreuse et pauvre. Il n’est jamais allé à l’école et travaille dans une briqueterie depuis trois ans. « C’est un métier dangereux, confie-t-il. Une brique peut tomber du camion et nous casser le dos ou blesser nos mains. » Abdullah n’est qu’un adolescent parmi tant d’autres, dans un pays où le travail des enfants reste la règle.

Des enfants qui ont souvent des rêves plein la tête. L’un veut devenir docteur, l’autre ouvrir un salon de thé, le troisième se verrait bien ingénieur. Mais ces moments d’égarement sont de courte durée. La briqueterie rythme leur vie. « Les gens qui font ce genre de boulot devraient faire des études, regrette Abdullah. Leurs parents devraient penser à eux pour ne pas gâcher leur avenir. Plus tard, je voudrais ne plus travailler. »

Quid du débat ?

Le film laisse certains songeurs tandis que d’autres profitent du retour des lumières pour s’éclipser. 19h55, la salle a perdu la moitié de ses effectifs. Il reste cinq minutes pour conclure. Exit le débat. À la place, les auditeurs sont invités à se rendre dans le hall du cinéma pour goûter une « cuvée spéciale otages ». « Cette initiative des vignerons et du comité est destinée à remonter jusqu’aux parlementaires, explique Sophie Pille. Comme ça, s’ils boivent ce vin, ils auront l’image d’Hervé et Stéphane à l’esprit. »

Les derniers invités prennent la parole à tour de rôle. Jean Kouchner, correspondant de Reporters Sans Frontières à Montpellier, intervient : « Quand le pays est loin, on a souvent l’image d’un gros pâté rempli de barbares. Pourtant, ce sont des hommes et des femmes qui vivent là. C’est justement cette réalité qu’ont voulu voir Hervé et Stéphane. Ils ont quitté leur convoi militaire pour montrer la complexité de l’Afghanistan. »

Face aux dernières personnes présentes dans la salle, Benoit Califano relativise : « Nous n’étions certes pas très nombreux ce soir, mais Montpellier a montré son soutien. Si personne n’avait bougé, les portraits des otages ne seraient pas tous les jours dans les médias, poursuit le directeur de l’École Supérieure de Journalisme de Montpellier, avant de conclure : Quand on fait du ramdam ici, notre voix porte là-bas. »

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à propos de l'auteur

Auteur : Cécile Alibert

« Tu veux faire quoi quand tu seras grand ? » Combien de fois avons-nous entendu cette question, apparemment incontournable ? Il y a d’abord les décidés qui répondent sans la moindre hésitation et quelques mètres derrière, tous les autres, qui se cherchent encore… Et puis, un jour, la grande révélation se produit. On ne se souvient plus trop comment, ni pourquoi, mais c’est désormais une évidence : on deviendra journaliste. Et peu importe les regards sceptiques ou compatissants qui en disent long sur ce que certains pensent du métier… Pour ma part, le déclic s’est fait au lycée, alors que je me spécialisais en ES. Il a mûri durant mon hypokhâgne à Toulouse, ma Licence d’histoire et mon Master de science politique effectués sur Montpellier. Mon projet s’est définitivement confirmé avec mes expériences au journal L’Indépendant à Narbonne. Pourquoi s’engager dans une telle voie ? Actualité, rencontres, découvertes, écriture… Ce sont tous ces intérêts mélangés qui m’ont naturellement poussée vers un choix de vie pas toujours évident… mais tellement exaltant.