De l’Afghanistan aux otages

Ce mercredi 1er décembre, le Diagonal a accueilli une conférence-débat organisée par le comité de soutien pour la libération de Stéphane Taponier et Hervé Ghesquière. Le thème : « Mieux connaître l’Afghanistan et la situation des otages. » Un sujet prometteur qui n’a pas attiré les foules.

18h15. Salle 2 du cinéma. Une quarantaine de personnes ont répondu présent au rendez-vous. « Je suis contente de voir autant de monde », s’exclame Sophie Pille, membre du comité de soutien. Pourtant, c’est une salle à moitié vide qui lui fait face. À croire que l’Afghanistan intéresse peu les Montpelliérains. Ce pays se rattache pour beaucoup à la guerre, aux attentats, aux talibans… La conférence a justement pour but de dépasser ces conceptions et de révéler une complexité souvent méconnue.

« Un diamant aux multiples facettes »

Georges Lefeuvre, ancien diplomate au Pakistan, se charge d’expliciter l’histoire afghane. Amputation de territoire, envahissements successifs, guerres multiples, diversité des tribus… Durant 45 minutes, l’anthropologue tente de faire partager son amour pour « un pays adorable mais abîmé ». L’Afghanistan est « un diamant » dont il faut comprendre les multiples facettes pour mieux appréhender la situation des otages.

À en croire Georges Lefeuvre, les deux journalistes auraient par ailleurs un peu de chance dans leur malheur : « La province de Kapisa où sont retenus Hervé et Stéphane n’est pas la pire. Un otage restera toujours un invité aux yeux des Pachtouns. Je n’envie pas leur sort, mais ils sont sûrement plutôt bien traités. »

Des briques et des rêves

Après ce long discours, place à un nouvel invité : Youssef Charifi. Ce producteur présente un extrait de la série documentaire Les Enfants de Kaboul : « Des briques et des rêves est un film tourné en 2008 dans le cadre des ateliers Varan, un organisme qui forme des réalisateurs. Ici, il est question du travail des enfants. »

Pendant 25 minutes, le spectateur suit Abdullah, 13 ans. Ce garçon est issu d’une famille nombreuse et pauvre. Il n’est jamais allé à l’école et travaille dans une briqueterie depuis trois ans. « C’est un métier dangereux, confie-t-il. Une brique peut tomber du camion et nous casser le dos ou blesser nos mains. » Abdullah n’est qu’un adolescent parmi tant d’autres, dans un pays où le travail des enfants reste la règle.

Des enfants qui ont souvent des rêves plein la tête. L’un veut devenir docteur, l’autre ouvrir un salon de thé, le troisième se verrait bien ingénieur. Mais ces moments d’égarement sont de courte durée. La briqueterie rythme leur vie. « Les gens qui font ce genre de boulot devraient faire des études, regrette Abdullah. Leurs parents devraient penser à eux pour ne pas gâcher leur avenir. Plus tard, je voudrais ne plus travailler. »

Quid du débat ?

Le film laisse certains songeurs tandis que d’autres profitent du retour des lumières pour s’éclipser. 19h55, la salle a perdu la moitié de ses effectifs. Il reste cinq minutes pour conclure. Exit le débat. À la place, les auditeurs sont invités à se rendre dans le hall du cinéma pour goûter une « cuvée spéciale otages ». « Cette initiative des vignerons et du comité est destinée à remonter jusqu’aux parlementaires, explique Sophie Pille. Comme ça, s’ils boivent ce vin, ils auront l’image d’Hervé et Stéphane à l’esprit. »

Les derniers invités prennent la parole à tour de rôle. Jean Kouchner, correspondant de Reporters Sans Frontières à Montpellier, intervient : « Quand le pays est loin, on a souvent l’image d’un gros pâté rempli de barbares. Pourtant, ce sont des hommes et des femmes qui vivent là. C’est justement cette réalité qu’ont voulu voir Hervé et Stéphane. Ils ont quitté leur convoi militaire pour montrer la complexité de l’Afghanistan. »

Face aux dernières personnes présentes dans la salle, Benoit Califano relativise : « Nous n’étions certes pas très nombreux ce soir, mais Montpellier a montré son soutien. Si personne n’avait bougé, les portraits des otages ne seraient pas tous les jours dans les médias, poursuit le directeur de l’École Supérieure de Journalisme de Montpellier, avant de conclure : Quand on fait du ramdam ici, notre voix porte là-bas. »

Sommet de l’OTAN à Lisbonne :Le Mouvement de la paix renforce son opposition

Ce week-end, les pays membres de l’OTAN se sont réunis à Lisbonne pour trouver un accord sur le retrait des troupes en Afghanistan. En marge de ce sommet, une coordination de mouvements pacifistes et anti-nucléaires de tous les continents se sont mobilisés pour faire entendre leur voix. Le Mouvement de la paix, qui est une ONG française en faveur du désarmement nucléaire était présent. A cette occasion, son représentant, Roland Nivet, membre du bureau de Rennes et présent au Portugal a accepté de répondre à nos questions à l’issue de ces réunions.

Otages : ne les oublions pas

Ce lundi 25 octobre est marqué par un bien triste anniversaire. Hervé Ghesquière, Stéphane Taponier et leurs trois accompagnateurs sont retenus en Afghanistan depuis 300 jours maintenant.

Les deux journalistes de France 3 ont été enlevés dans la vallée de Kapisa, au nord-est de Kaboul, alors qu’ils réalisaient un reportage pour le magazine Pièces à conviction. Une détention plus longue que celles, très médiatiques, de Christian Chesnot, Georges Malbrunot (124 jours en Irak en 2004) et Florence Aubenas (157 jours en Irak en 2005).

Une campagne de discrédit

Aujourd’hui, personnalités et anonymes se mobilisent pour tenter de faire libérer les otages. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. Des polémiques ont éclaté durant les premiers mois qui ont suivi le 29 décembre 2009, date de l’enlèvement. A l’époque, les hautes sphères de l’Etat avaient dénigré les deux hommes, jugés inconscients.

Fabien Namias, chef du service politique d’Europe 1, a révélé le 6 janvier 2010 le mécontentement du président de la République. Nicolas Sarkozy aurait manifesté sa colère en conseil des ministres et vivement critiqué le comportement des journalistes.
Le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant (42’40), s’est quant à lui indigné le 17 janvier contre la recherche excessive d’un scoop.

Un mois plus tard, c’est au tour du chef d’état-major des armées d’apporter sa pierre à l’édifice. A quelques jours de la retraite, Jean-Louis Georgelin (19’55) a enchaîné les maladresses au micro d’Europe 1. Il a entre autres révélé le coût exorbitant des recherches, s’élevant alors à plus de 10 millions d’euros.

Tollé parmi les confrères

Journalistes, associations et syndicats sont immédiatement montés au créneau. Les responsables de Reporters sans frontières ont exprimé leur révolte face à de telles déclarations. Ils ont rappelé que leurs confrères avaient été enlevés en exerçant leur métier. Un métier qui suppose parfois de prendre des risques pour accomplir un objectif louable : informer la population de ce qui se passe hors de ses frontières.

Il faut rappeler que les journalistes de France 3 étaient loin d’être inexpérimentés. Tous deux étaient habitués à travailler dans des zones difficiles. Hervé Ghesquière a notamment couvert la guerre en ex-Yougoslavie, au Rwanda et en Irak. Stéphane Taponier, caméraman, a pour sa part réalisé des reportages en Afrique, en Irak et s’est rendu plusieurs fois en Afghanistan.

Un soutien massif

L’appui de la profession a permis de lever l’anonymat des journalistes. Les otages ont depuis le mois d’avril retrouvé un nom, un visage et un CV. Ils sont alors devenus plus humains. Plus réels. Le soutien de l’opinion a logiquement suivi.

A présent, fini les polémiques. C’est à celui qui manifestera le plus fort son engagement. Et dans ce domaine, les hautes sphères du pouvoir ne sont pas en reste. Loin des critiques initiales, Nicolas Sarkozy s’emploie aujourd’hui à régler la situation. Edouard Guillaud, le nouveau chef d’état-major des armées, se montre quant à lui optimiste. Les journalistes ont été joints par téléphone en septembre dernier. Une libération avant Noël pourrait être envisageable.

D’ici-là, des actions sont prévues pour rappeler quotidiennement la détention des deux journalistes. Ce soir, France 3 diffusera en direct un concert de solidarité réunissant une pléiade d’artistes, de journalistes et d’animateurs. Il en aura fallu du temps pour que Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier retrouvent une crédibilité dans leur propre pays.

Le Club de la Presse de Montpellier se mobilise

Alors que deux journalistes de France 3 sont détenus depuis 80 jours en Afghanistan, le Club de la Presse de Montpellier organise un rassemblement de soutien le vendredi 19 mars à Montpellier, en présence de Florence Aubenas, dans le cadre d’une mobilisation nationale des Clubs de la Presse.

Depuis le 29 décembre 2009, Stéphane et Hervé, deux journalistes de France 3 sont retenus en otage en Afghanistan. Journalistes spécialistes des missions en zones de conflit, ils effectuaient un reportage dans le pays.

« Malgré certaines déclarations révoltantes de la part des autorités, les Clubs de la Presse tiennent à rappeler que ces journalistes ont été kidnappés alors qu’ils exerçaient leur mission d’information du grand public », précisent les Clubs de la Presse dans leur appel à la mobilisation. En effet, Nicolas Sarkozy a jugé que leur travail était d’une « imprudence vraiment coupable », et Claude Guéant, secrétaire général de l’Élysée, de surenchérir, le 17 janvier, sur Europe 1 que « le scoop ne doit pas être recherché à tout prix » et que les deux journalistes ont fait « courir des risques aussi à beaucoup de nos forces armées qui, du reste, sont détournées de leurs missions principales ».

Ces propos avaient soulevé la colère des gens du métier, du Syndicat National des Journalistes et de Reporters sans Frontières. « A la question de savoir s’ils ont pris des risques, la réponse est oui, bien évidemment. Tous les journalistes qui posent le pied en Afghanistan prennent un risque. Tous les jours, des centaines de journalistes prennent des risques. Les deux reporters de France 3 menaient un travail d’intérêt général. Exactement comme ceux qui sont au milieu des gravats de Port-au-Prince » rappelle Reporters sans Frontières dans un communiqué.

Chose qu’Alain Genestar a fait également valoir dans le Monde du 27 février : « l’époque – celle des jours actuels – est désormais à la comptabilité de la générosité, à la réprimande, à la discorde, à la désignation des présumés coupables. On dénonce leur comportement en public, au mépris de la discrétion qu’imposent ces circonstances. On les montre du doigt. On les expose à la vindicte populaire, les accusant de gaspiller l’argent des contribuables et de jouer avec la vie de nos fiers soldats. Jamais les journalistes et les photographes n’ont demandé à être traités avec une considération particulière. Ils n’exigent aucun régime de faveur – surtout pas -, mais seulement le respect dû à leur métier qui, dans certaines circonstances exceptionnelles – et la guerre, bien sûr, en est une -, s’exerce dangereusement, exige un courage et une audace qui échappent aux règles normales de la vie ordinaire ». Et de conclure : « sans l’audace et le courage de Robert Capa, sans l’audace et le courage des reporters, les lecteurs, les auditeurs, les téléspectateurs, le public, les citoyens ne seraient pas informés de la réalité de la guerre. De la « vraie » réalité, celle qui ne s’écrit pas ni ne se photographie, à l’abri du danger. Alors, « imprudents coupables », Capa et les autres ? Oui, nous sommes tous, par profession, journalistes et photographes, des « imprudents coupables ». »

Ainsi, engagés au quotidien pour la liberté d’exercer des journalistes, les Clubs de la Presse ont décidé de se mobiliser. Un rassemblement public est organisé le vendredi 19 mars, à partir de 10h, sur le parvis de l’Opéra-Comédie, à Montpellier, à l’occasion des 80 jours de détention des deux journalistes.

La journaliste Florence Aubenas, ancienne otage en Irak, prendra la parole pour apporter son soutien aux deux journalistes en captivité. Elle sera accompagnée de Claude Sérillon, qui a exercé pendant de longues années sur les antennes de France Télévision. De même, des représentants du Club de la Presse, de Reporters Sans Frontières et de plusieurs médias régionaux, seront également présents pour témoigner de leur solidarité envers leurs confrères.

Il est à savoir également que Reporters Sans Frontières a lancé un « Appel de soutien à nos confrères de France 3 enlevés en Afghanistan ». Il est consultable ici.

Alors, toutes les personnes sensibles à la question sont invitées, par le Club de la Presse de Montpellier, à rejoindre la place de la Comédie, « pour que
Stéphane et Hervé ne tombent pas dans l’oubli
».

 Pour plus d’informations n’hésitez pas contacter le Club de la Presse de Montpellier au : 06 07 64 86 03.

Julie DERACHE & Ibra Khady NDIAYE

Où en est-on en Afghanistan ?

Le sommet de l’Otan réuni à Riga en novembre 2007 avait approuvé une directive d’après laquelle « contribuer à la paix et à la stabilité de l’Afghanistan est sa priorité essentielle ». A l’heure où les Etats-unis demandent aux nations engagées d’accroître leur contribution en troupes, l’Otan semble s’enliser dans une irakisation afghane.

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Les Etats-Unis demandent depuis plusieurs mois à leurs alliés engagés en Afghanistan dans le cadre de l’Otan d’augmenter le nombre de leurs soldats, notamment dans le sud du pays, la zone la plus violente. Le gouvernement polonais a donc annoncé l’envoi de 400 militaires de plus, portant ainsi leurs troupes à 1600 hommes. Une condition est pourtant ajoutée, à savoir que la totalité des troupes soit basée au même endroit. La chambre des communes canadienne a donné son feu vert la semaine dernière à la prolongation de la mission de ses 2500 soldats jusqu’en 2011 au sud de l’Afghanistan. Elle demande en échange l’envoi de 1000 soldats en renfort dans la zone.

La France réfléchit à accroître son effort militaire hors de Kaboul et à la réintégration des commandos des forces spéciales, retirées en majorité en 2007 par Jacques Chirac. Nicolas Sarkozy a aussi envoyé le mois dernier trois avions Rafale pour compléter les Mirage déjà présents. Il explique vouloir garantir « l’avenir de nos valeurs et celui de l’aliance atlantique ». « La France restera engagée en Afghanistan aussi longtemps qu’il le faudra ». Mais les réflexions ne suffisent plus, les Etats-Unis et le Canada font pression sur Paris pour savoir où exactement ils comptent envoyer leurs renforts. Cela pourrait se faire à l’est du pays, permettant à des unités américaines de rejoindre les canadiens au sud.

La France au sein de deux missions multinationales

Deux coalitons internationales se déroulent en Afghanistan et la population locale s’y perd. La première est l’Opération Enduring Freedom (OEF) appelée aussi liberté immuable, menée par les Etats-Unis contre le terrorisme islamiste. Elle a débuté en 2001 à la suite de l’intervention américaine après les attentats du 11 septembre. La deuxième est la Force internationale d’assistance à la stabilité (Fias), crée en 2001 lors des accords de Bonn. Elle est commandée par l’Otan depuis 2003 qui pour la première fois se déploie en dehors de sa sphère atlantique. Depuis 2006 la Fias tend à remplacer l’OEF. Rassemblant 39 Etats et comptant 43 250 soldats (les soviétiques à l’époque avaient déployé jusqu’à 115 000 hommes), son but est « d’aider les autorités afghanes à exercer leur pouvoir sur l’ensemble du pays afin de créer les conditions propices à la stabilisation et à la reconstruction ».

La France est engagée sur ces deux fronts. Elle n’y a pas beaucoup d’intérêts stratégiques, à part la lutte contre le terrorisme, la drogue et manifester sa solidarité transatlantique. Toutefois surmonter les clivages existants entre les 25 nations européennes engagées peut donner un aperçu de l’avenir de l’Europe de la Défense, un projet que Nicolas Sarkozy aimerai relancer. L’Hexagone met ainsi à disposition pour l’OEF et la Fias 1900 hommes en comptant ceux basés dans des pays limitrophes et assure un commandement tournant de la région autour de Kaboul. Les troupes françaises ont plusieurs missions. Certains sont chargés du contrôle de Zone, d’autres forment des officiers afghans et des forces spéciales (kandaks) ou sont intégrés dans des unités de l’armée nationale afghane. De plus un contrôle de l’espace aéro-maritime du nord de l’océan indien est en place.

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Un contexte historique turbulent

La situation actuelle ne peut se comprendre sans un retour dans le passé. L’Afghanistan est un pays qui comporte plusieurs ethnies (Patchouns, Tadjiks, Turkmènes…) et influences islamiques. En 1979, mais après déjà des siècles de turbulences en tout genre, l’Afghanistan est envahit par les troupes soviétiques qui y ont des intérêts stratégiques. La résistance du djihad afghan commence, avec l’aide entre autre des Etats-Unis et du pakistan. La guérilla attire de nombreux moudjahidines qui profite de la situation pour s’entrainer. Un certain Oussama Ben Laden crée alors le mouvement Al-Quaeda (la base). L’extrémisme religieux augmente et le pays devient le symbole de la guerre sainte contre l’Occident.

En 1989 les troupes soviétiques se retirent et laissent place à une guerre civile entre afghans et talibans (étudiants en religion). Le régime communiste de Kaboul fini par tomber et les talibans instaurent un régime répressif en 1996.

Le 11 septembre 2001 ont lieu les attentats du World trade center. Le régime des Taliban refuse d’extrader Ben Laden, accusé d’en être l’organisateur. Les américains lancent donc contre l’Afghanistan l’opération Enduring Freedom. Ils sont rejoins notamment par les français et les britanniques. Après trois mois les talibans capitulent et un gouvernement sous l’autorité d’Hamid Karzaï est mis en place. Les complications continuent. Les forces de l’Otan sont souvent considérées par la population locale comme des occupants et non des libérateurs.

L’insécurité actuelle du théâtre afghan

Il y a eu plus de 8000 victimes du conflit en 2007, dont plus de 1500 civils. Ces chiffres sont en augmentation par rapport à ceux de 2006 et les violences sur le terrain continuent. Les humanitaires sont aussi touchés et ont de plus en plus de mal à travailler. Actuellement les insurgés talibans sont 15 000 en moyenne et sont soutenus par un tiers de la population afghane. Ils essaient de retourner contre ceux qui sont pour eux des troupes d’occupation le maximum de personnes. Effectuant au début une guerre classique qui leur faisait subir des pertes, ils sont passé à une guerre asymétrique d’embûches et de raids éclairs, avantagés grâce aux montagnes et aux profondes vallées. Ils récupèrent aussi les techniques utilisées par la guérilla irakienne, soit les engins explosifs et les attentat-suicides.

Les talibans trouvent leurs ressources financières grâce à la drogue. L’Afghanistan est le premier pays producteur d’opium et l’argent de la drogue corrompt toute la société. Or la lutte à ce sujet n’est pas vraiment active. Pour le Colonel à la retraite René Cagnat, titulalire d’un doctorat consacré à l’Asie centrale, rien ne peut se gagner sans une guerre préalable contre le narco-trafic. « un véritable combat contre la drogue, à sa source afghane, donnerait la meilleure de justifications à l’action de la Fias », explique-t-il dans la revue Défense Nationale.

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Un échec militaire

N’en déplaise aux Etats-Unis qui aimeraient des résultats positifs avant la prochaine élection présidentielle afin de pallier au bourbier irakien, l’afghanistan semble être un échec militaire. Après déjà six ans de guerre, la pacification du pays ne se fait pas. Les alliés ne viennent pas à bout de la guérilla. « L’insurection est plus tenace que prévu » a constaté Jean-Marie Guéhenno, chef des opérations de maintien de la paix, lors d’un réçent débat au conseil de sécurité de l’Onu. Politiquement, il est impossible de reconstruire un pays avec autant d’insécurité. Le président afghan Hamid Karzaï pense que la victoire est tout de même possible. La Fias a a contrario des réussites dans les activités civiles, comme la scolarisation des jeunes et la construction d’infrastructures.

En avril aura lieu le prochain sommet de l’Otan à Bucarest, et en juin la conférence internationale sur l’Afghanistan à Paris. Des réflexions plus nettes sur de nouvelles stratégies à adopter vont peut être enfin pouvoir se faire.

Où en est-on en Afghanistan ?

Le sommet de l’Otan réuni à Riga en novembre 2007 avait approuvé une directive d’après laquelle « contribuer à la paix et à la stabilité de l’Afghanistan est sa priorité essentielle ». A l’heure où les Etats-unis demandent aux nations engagées d’accroître leur contribution en troupes, l’Otan semble s’enliser dans une irakisation afghane.

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Les Etats-Unis demandent depuis plusieurs mois à leurs alliés engagés en Afghanistan dans le cadre de l’Otan d’augmenter le nombre de leurs soldats, notamment dans le sud du pays, la zone la plus violente. Le gouvernement polonais a donc annoncé l’envoi de 400 militaires de plus, portant ainsi leurs troupes à 1600 hommes. Une condition est pourtant ajoutée, à savoir que la totalité des troupes soit basée au même endroit. La chambre des communes canadienne a donné son feu vert la semaine dernière à la prolongation de la mission de ses 2500 soldats jusqu’en 2011 au sud de l’Afghanistan. Elle demande en échange l’envoi de 1000 soldats en renfort dans la zone.

La France réfléchit à accroître son effort militaire hors de Kaboul et à la réintégration des commandos des forces spéciales, retirées en majorité en 2007 par Jacques Chirac. Nicolas Sarkozy a aussi envoyé le mois dernier trois avions Rafale pour compléter les Mirage déjà présents. Il explique vouloir garantir « l’avenir de nos valeurs et celui de l’aliance atlantique ». « La France restera engagée en Afghanistan aussi longtemps qu’il le faudra ». Mais les réflexions ne suffisent plus, les Etats-Unis et le Canada font pression sur Paris pour savoir où exactement ils comptent envoyer leurs renforts. Cela pourrait se faire à l’est du pays, permettant à des unités américaines de rejoindre les canadiens au sud.

La France au sein de deux missions multinationales

Deux coalitons internationales se déroulent en Afghanistan et la population locale s’y perd. La première est l’Opération Enduring Freedom (OEF) appelée aussi liberté immuable, menée par les Etats-Unis contre le terrorisme islamiste. Elle a débuté en 2001 à la suite de l’intervention américaine après les attentats du 11 septembre. La deuxième est la Force internationale d’assistance à la stabilité (Fias), crée en 2001 lors des accords de Bonn. Elle est commandée par l’Otan depuis 2003 qui pour la première fois se déploie en dehors de sa sphère atlantique. Depuis 2006 la Fias tend à remplacer l’OEF. Rassemblant 39 Etats et comptant 43 250 soldats (les soviétiques à l’époque avaient déployé jusqu’à 115 000 hommes), son but est « d’aider les autorités afghanes à exercer leur pouvoir sur l’ensemble du pays afin de créer les conditions propices à la stabilisation et à la reconstruction ».

La France est engagée sur ces deux fronts. Elle n’y a pas beaucoup d’intérêts stratégiques, à part la lutte contre le terrorisme, la drogue et manifester sa solidarité transatlantique. Toutefois surmonter les clivages existants entre les 25 nations européennes engagées peut donner un aperçu de l’avenir de l’Europe de la Défense, un projet que Nicolas Sarkozy aimerai relancer. L’Hexagone met ainsi à disposition pour l’OEF et la Fias 1900 hommes en comptant ceux basés dans des pays limitrophes et assure un commandement tournant de la région autour de Kaboul. Les troupes françaises ont plusieurs missions. Certains sont chargés du contrôle de Zone, d’autres forment des officiers afghans et des forces spéciales (kandaks) ou sont intégrés dans des unités de l’armée nationale afghane. De plus un contrôle de l’espace aéro-maritime du nord de l’océan indien est en place.

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Un contexte historique turbulent

La situation actuelle ne peut se comprendre sans un retour dans le passé. L’Afghanistan est un pays qui comporte plusieurs ethnies (Patchouns, Tadjiks, Turkmènes…) et influences islamiques. En 1979, mais après déjà des siècles de turbulences en tout genre, l’Afghanistan est envahit par les troupes soviétiques qui y ont des intérêts stratégiques. La résistance du djihad afghan commence, avec l’aide entre autre des Etats-Unis et du pakistan. La guérilla attire de nombreux moudjahidines qui profite de la situation pour s’entrainer. Un certain Oussama Ben Laden crée alors le mouvement Al-Quaeda (la base). L’extrémisme religieux augmente et le pays devient le symbole de la guerre sainte contre l’Occident.

En 1989 les troupes soviétiques se retirent et laissent place à une guerre civile entre afghans et talibans (étudiants en religion). Le régime communiste de Kaboul fini par tomber et les talibans instaurent un régime répressif en 1996.

Le 11 septembre 2001 ont lieu les attentats du World trade center. Le régime des Taliban refuse d’extrader Ben Laden, accusé d’en être l’organisateur. Les américains lancent donc contre l’Afghanistan l’opération Enduring Freedom. Ils sont rejoins notamment par les français et les britanniques. Après trois mois les talibans capitulent et un gouvernement sous l’autorité d’Hamid Karzaï est mis en place. Les complications continuent. Les forces de l’Otan sont souvent considérées par la population locale comme des occupants et non des libérateurs.

L’insécurité actuelle du théâtre afghan

Il y a eu plus de 8000 victimes du conflit en 2007, dont plus de 1500 civils. Ces chiffres sont en augmentation par rapport à ceux de 2006 et les violences sur le terrain continuent. Les humanitaires sont aussi touchés et ont de plus en plus de mal à travailler. Actuellement les insurgés talibans sont 15 000 en moyenne et sont soutenus par un tiers de la population afghane. Ils essaient de retourner contre ceux qui sont pour eux des troupes d’occupation le maximum de personnes. Effectuant au début une guerre classique qui leur faisait subir des pertes, ils sont passé à une guerre asymétrique d’embûches et de raids éclairs, avantagés grâce aux montagnes et aux profondes vallées. Ils récupèrent aussi les techniques utilisées par la guérilla irakienne, soit les engins explosifs et les attentat-suicides.

Les talibans trouvent leurs ressources financières grâce à la drogue. L’Afghanistan est le premier pays producteur d’opium et l’argent de la drogue corrompt toute la société. Or la lutte à ce sujet n’est pas vraiment active. Pour le Colonel à la retraite René Cagnat, titulalire d’un doctorat consacré à l’Asie centrale, rien ne peut se gagner sans une guerre préalable contre le narco-trafic. « un véritable combat contre la drogue, à sa source afghane, donnerait la meilleure de justifications à l’action de la Fias », explique-t-il dans la revue Défense Nationale.

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Un échec militaire

N’en déplaise aux Etats-Unis qui aimeraient des résultats positifs avant la prochaine élection présidentielle afin de pallier au bourbier irakien, l’afghanistan semble être un échec militaire. Après déjà six ans de guerre, la pacification du pays ne se fait pas. Les alliés ne viennent pas à bout de la guérilla. « L’insurection est plus tenace que prévu » a constaté Jean-Marie Guéhenno, chef des opérations de maintien de la paix, lors d’un réçent débat au conseil de sécurité de l’Onu. Politiquement, il est impossible de reconstruire un pays avec autant d’insécurité. Le président afghan Hamid Karzaï pense que la victoire est tout de même possible. La Fias a a contrario des réussites dans les activités civiles, comme la scolarisation des jeunes et la construction d’infrastructures.

En avril aura lieu le prochain sommet de l’Otan à Bucarest, et en juin la conférence internationale sur l’Afghanistan à Paris. Des réflexions plus nettes sur de nouvelles stratégies à adopter vont peut être enfin pouvoir se faire.