L’importance de l’action est soulignée par Marjolaine de Clerc, unique salariée de l’association : « Le moment semble presque idéal. Les émeutes de la faim, le débat sur les OGM… Tous ces éléments du quotidien soulèvent l’inquiétude des citoyens. » Répondre par la sensibilisation à cette anxiété, voilà le rôle de la Quinzaine. Et puis la question du prix n’est pas la seule en jeu.
« Les citoyens ont un pouvoir d’action sur l’évolution du monde »
Le principe du commerce équitable repose sur la volonté de soutenir des agriculteurs dans les pays en développement. Des petits producteurs peuvent alors se réunir pour mutualiser matériel et récoltes, afin de réunir une masse exportable. Les revenus tirés de cette activité permettent alors de développer la vie économique locale. L’achat éthique garantit une production respectueuse des droits des travailleurs et de l’environnement. « Le développement durable, qui n’était pas une priorité il y a trente ans quand Artisans du monde a débuté, fait maintenant partie des exigences, précise Marjolaine. Les articles ne portent pas systématiquement de label bio mais leur fabrication suit les mêmes procédés. »
Et comme pour le bio, plusieurs labels éthiques existent. Des gammes de café estampillées Max Havelaar fleurissent d’ailleurs dans les supermarchés, à l’inverse de celles d’Artisans du monde. Un parti pris pour Marjolaine : « Ils tentent la quantité pour faire basculer les comportements mais c’est une part si infime par rapport aux gammes classiques ! » La caractéristique d’Artisans du monde est de garantir que l’intégralité de ses articles respecte l’éthique. Une lourde tâche pour l’association, qui manque cruellement de bénévoles. Mais Marjolaine reste optimiste. « À nous de rappeler aux citoyens qu’ils ont un pouvoir d’action sur l’évolution du monde. » Un pouvoir qu’ils peuvent découvrir tout au long de la Quinzaine.
Entretien
Yuna Chiffoleau, sociologue à l’Inra (Institut national de recherche agronomique), travaille à la coordination de projets de commerce équitable à l’échelle locale
En quoi consiste le commerce équitable de proximité ?
On développe des filières courtes entre producteurs et consommateurs avec, au maximum, un seul intermédiaire entre eux. Cela permet de limiter les transports, à la fois dans une logique de développement durable et pour préserver la qualité des produits. L’idée est la même que pour le commerce Nord-Sud. Ils ne se nuisent pas entre eux car les espaces de solidarité sont extensibles. Les circuits sont complémentaires aussi, avec des produits différents. Et, contrairement aux filières longues, les produits n’ont pas besoin d’un conditionnement lourd pour l’acheminement à destination.
Comment cette initiative est-elle née ?
Le constat vient d’un diagnostic de l’agriculture française. Les exploitants sont fragiles, surtout dans le Languedoc. La profession connaît une forte dévalorisation sociale, malgré l’image donnée par la compétitivité des grandes exploitations. L’objectif était donc de trouver une alternative à la grande distribution. À la fois pour des producteurs qui en sont exclus et des clients qui souhaitent privilégier la qualité tout en s’engageant dans une démarche citoyenne.
Le public s’implique-t-il en dehors de l’acte d’achat ?
Une relation d’échange se forme plus facilement car les intermédiaires sont rares. Les consommateurs citoyens demandent aussi une qualité grandissante, dans le respect du développement durable. Ce dialogue permet à tous de progresser, de s’adapter.
Quels sont les résultats de cette démarche ?
L’impact dépasse le seul secteur économique. Les producteurs ouvrent des boutiques, créent des emplois. Les synergies réalisées pour partager le matériel trop coûteux permettent de tisser du lien social. L’activité peut évoluer aussi. Certains agriculteurs proposent maintenant des produits transformés, comme de la tapenade ou de la confiture. L’essentiel, c’est de redonner une valeur à la coopération agricole. Et de s’intéresser davantage aux hommes qu’aux produits.
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