« C’est l’histoire d’une famille qui a tout perdu. Ses parents, son habitat, ses champs d’oliviers ». Né à Palerme en 1969, Stefano Savona, documentariste depuis 1999 après être passé par l’archéologie et l’anthropologie, revient avec un documentaire coup de poing.
Dans son film, Savona ne cherche pas à restituer de façon sommaire l’ampleur d’un évènement complexe : l’antagonisme israélo-palestinien. Au-delà de la plainte et de la dénonciation, le réalisateur trace le portrait d’une famille de la banlieue rurale de Gaza touchée par un conflit destructeur et meurtrier. Une guerre (2008-2009) qui change leur vie à jamais.
Arrivé à Gaza en 2008 au moment des attaques israéliennes contre la Bande de Gaza, le réalisateur italien rencontre la famille Samouni, une communauté de paysans jusque-là épargnée par soixante ans de conflits et d’occupation.
« Echapper à cette double rhétorique des médias »
Stefano Savona réalise Plomb Durci en 2009, conçu comme une sorte de « blog cinématographique au jour le jour qui voulait rompre l’embargo sur les images imposé par les israéliens pendant leur opération militaire ». A cela, s’ajoute sa colère contre les médias. « Ils racontent la guerre soit de façon aseptisée, de l’extérieur et sans savoir ce qui se passait vraiment dans la Bande, soit de l’intérieur mais de façon pornographique, en ne se concentrant que sur les cadavres, la douleur et la violence. Je voulais échapper à cette double rhétorique, qui ne permettait pas de comprendre ce qu’il se passait réellement pour la population de Gaza », rajoute le réalisateur italien à Cinemed.
Ce qui influence la suite de son travail ? Un message ! « J’ai reçu un message m’annonçant que le mariage d’un jeune couple qui semblait impossible à cause de la tragédie de janvier 2009, et en particulier de la mort des pères des deux futurs mariés, allait finalement avoir lieu ». Un « déclic ». Une évidence surtout. Malgré la difficulté d’y entrer, Stefano Savona retourne à Gaza en 2010, un an après la tragédie pour montrer autre chose que Plomb Durci.
Une réalisation qui dure neuf ans
Le natif de Palerme prend alors la décision de retracer l’histoire de cette famille, avant, pendant et après la guerre.
Face à la difficulté de montrer des situations qu’ils n’avaient pas filmées (avant la guerre, et pendant l’attaque israélienne), Stefano Savona et sa productrice, Penelope Bortoluzzi, décident de se tourner vers les animations de Simone Massi. « Ses dessins ont un côté onirique mais ils sont visuellement très réalistes, très précis, ce qui permet de les raccorder à des prises de vue réelles », explique le réalisateur. Une reconstitution des souvenirs des protagonistes en animations inspirée des récits et des témoignages des membres de la famille Samouni. Un travail d’architecture et de 3D. Une précision pour reproduire le réel. Un cheminement qui le mène, neuf années plus tard, à ce nouveau film : Samouni Road.
Un documentaire touchant et bouleversant. « Je voulais redonner aux Samouni une existence longue, cesser de les ensevelir tous, les vivants et les morts, sous le poids de l’évènement fatal » révèle le documentariste. Mais aussi la reconstitution d’une mémoire. Celle du peuple palestinien brisé par la guerre qui ne cesse malgré tout de se reconstruire. Une histoire de résistance et d’espoir. Un éloge au courage, un hymne à la famille.
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