Presse, réveille-toi !

Il faut que ce soit les politiciens, et a fortiori ceux qui ont eu par le passé à pâtir de la presse, qui la défendent et la secouent, autant qu’elle le mérite.

Alors que, depuis ce matin, les radios et chaînes d’informations continues scandent comme un événement planétaire la présence en demi-finale de Roland-Garros d’un Français (phénomène plus ou moins rare), on en oublierait presque la présence de véritables informations. Les vraies.

Comme le premier sondage donnant le « non » victorieux en Irlande. Oui, vous avez bien lu. Le premier sondage, à une semaine du référendum sur l’adoption du traité de constitution simplifié de Lisbonne, qui donne le « non » victorieux (35 % de « non » et 35 % d’indécis tout de même), personne n’en parle. Enfin, si. France Info en a parlé. Un flash entre deux discours dithyrambiques sur les capacités de joueur de Gaël Monfils ou des témoignages de collègues/famille/amis/ancienne voisine de quand il était jeune, on nous annonce un « sondage inquiétant pour l’Irlande ». Et basta.

Après un déni démocratique en France, visant à aller contre la volonté du peuple (qui s’est laissé faire) en imposant un traité simplifié reprenant peu ou prou l’essentiel de ce dont le peuple n’a pas voulu, voilà la presse qui fait preuve une fois de plus de son inféodation aux arcanes du pouvoir.

Dominique de Villepin donc, invité par l’université Paris Dauphine le 6 mai et que le site Marianne2 vient de publier, rappelle les manquements à la presse généraliste et la conseille pour qu’elle fasse ce qu’elle serait supposée n’avoir jamais cessé de faire.

Après un Bayrou conspué, un Dupont-Aignan « interdit de TF1 » (selon ses propres termes), et un Villepin épargné par Clearstream, mais toujours sous le coup d’une enquête, Combien faudra t-il de voix de standing avant que le vieux mastodonte ne se réveille et « reprenne les armes » ?

Discorde dans la majorité

Sarkozy énerve. Et la tendance ne s’arrête pas à la gauche. Outre les villepinistes, depuis le début critiques à l’égard du président, certains barons de l’UMP montent au créneau. Après la crise à propos des OGM, nouvelles tensions en perspective dans les rangs de la majorité.

L’UMP serait-il sur le point de voler en éclats ? Depuis l’accession de Sarkozy à la tête du parti de la droite parlementaire, de nombreuses voix critiques s’élèvent à son encontre. Dans son propre parti, sa propre majorité.

Dans un entretien à L’Express du 6 mai, c’est Hervé Gaymard, député UMP, qui a jugé « incroyable que des bureaux politiques du parti du Président se tiennent au palais de l’Élysée ». L’ancien ministre de l’Economie du gouvernement Raffarin s’est ensuite référé à De Gaulle, incarnation, selon lui, « de la liberté de l’esprit et de la liberté intérieure». rapportgaymard_500.jpgAjoutant qu’il avait « toujours opéré une distinction nette entre les sphères publique et privée ». Première attaque !
Plus loin, le député de Savoie rappelle que le général De Gaulle « opérait une séparation claire entre le chef de l’Etat et, comme il disait, « l’armée de ceux qui le soutiennent ». Que des bureaux politiques de l’UMP se tiennent aujourd’hui au palais de l’Elysée me paraît incroyable». Deuxième attaque. Une dérive partisane de Sarkozy que Gaymard partage avec Julien Dray, porte-parole du PS. «Ces propos traduisent une dérive préoccupante de celui qui devrait être le premier des Français, au-dessus des contingences partisanes et des intérêts personnels », dénonce-t-il. Critiquant également la transformation de l’Elysée en «local de l’UMP».

«Le parti n’est pas à la hauteur»

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Cette armée, indéfectible, commence justement à montrer des signes de méfiance. Le 11 mai, dans une interview accordée au Parisien Dimanche, c’est le maire de Nice et proche du chef de l’Etat Christian Estrosi qui s’est exprimé sans ménager l’organisation actuelle de l’UMP : «elle tarde à porter ses fruits. Les députés se battent pour défendre avec ferveur les convictions de ceux qui les ont élus. En revanche, le parti, lui, n’est pas à la hauteur.»

Le parti ou son utilisation par le président ? Car cette réorganisation dont il parle, c’est l’arrivée dans l’organigramme de deux ministres, proches de l’Élysée, Xavier Bertrand et Nathalie Kosiuscko-Morizet, faisant fi des militants. Un bel exemple de démocratie. Suite à la défaite aux municipales, Estrosi pointe ainsi l’échec de cette stratégie.

Copé refuse les « réformes toutes ficelées« 

COPPE_JeanFrancois_2_.jpgCe même 11 mai, sur Canal +, c’est Jean-François Copé, président du groupe UMP à l’Assemblée nationale qui s’est attardé sur le manque de concertation des députés de la part du gouvernement. « On produit ensemble les réformes. On ne les prend pas toutes ficelées après le Conseil des ministres pour appuyer sur le bouton ‘oui’, ironise-t-il. D’ailleurs, à chaque fois qu’on n’est pas associé en amont, ça fait des couacs. »

Lors des dernières municipales, les urnes, et les sondages qui ont suivis, ont démontré que Nicolas Sarkozy s’était éloigné des Français. S’il s’éloigne de ses partisans, attention au risque, déjà présent, d’ultra-personnalisation du pouvoir.