L’ or olympique, un capital fragile

Pour améliorer leurs revenus, les nouveaux médaillés s’offrent de plus en plus les services de cabinets spécialisés

Après l’or des podiums olympiques, les médaillés français à Pékin vont se lancer dans une course d’un autre genre : comment faire fructifier leurs récompenses. Outre leur prime de podium (50 000 € pour l’or, 20 000 pour l’argent et 13 000 pour le bronze), les champions peuvent espérer décrocher des contrats publicitaires et de nouvelles subventions de l’État. Afin de faire fructifier ce pécule, de plus en plus d’athlètes se tournent vers des organismes spécialisés.

«Obnubilés par leur carrière, non par la gestion de leur patrimoine»

La société Tocqueville Finance a ainsi lancé le département Tocqueville Sport. « Le sportif doit avoir une gestion particulière de son patrimoine financier du fait de la durée très courte de sa carrière », explique Jean-Gilles Lombardo, directeur de Tocqueville Sport, qui était à Pékin pour trouver de nouveaux clients. « Les sportifs ne viennent pas d’eux-mêmes, poursuit-il. Ils sont obnubilés par leur carrière, non par la gestion de leur patrimoine. On tente de les décharger de ces problèmes. » Aide aux placements, optimisation fiscale, constitution d’une épargne… Le cabinet remplace le banquier en tenant compte des spécificités des revenus des sportifs. « La gestion est rendue plus difficile par la fluctuation des gains selon les performances », rappelle Jean-Gilles Lombardo. Aider à obtenir des revenus complémentaires à la fin de la carrière, c’est aider à se repositionner dans la vie sociale. Notre mot d’ordre est la prudence. »

Prudence dans les placements, mais aussi dans le choix des conseillers. La gestion post-Athènes 2004 de Laure Manaudou est un exemple de réussite. La nageuse a réussi à faire fructifier ses trois podiums d’Athènes en 2004 grâce aux contrats de sponsoring et au mécénat d’Artemis, la holding familiale de François Pinault. À l’inverse, l’histoire de Carole Merle, médaillée d’argent à Albertville 92 et ruinée par son oncle notaire, est révélatrice des échecs potentiels d’une mauvaise gestion, confiée à un proche…

L’athlétisme ne rapporte pas suffisamment

D’après Didier Poulmaire, avocat de Laure Manaudou mais aussi de Gaël Monfils, « être accompagné est essentiel. Il faudrait une réflexion ministérielle pour instaurer des garde-fous ». Le conseiller a observé que souvent, les athlètes ne savent pas vers qui se tourner. « Beaucoup se sont fait avoir, poursuit-il, faute d’avoir compris la nature de leurs placements. Ils ne doivent pas mettre leurs œufs dans le même panier. Mieux vaut s’orienter vers les grands établissements bancaires, gage de ne pas tout perdre ».

Cependant, tous les médaillés de Pékin ne connaîtront pas de retombées suffisantes pour s’attacher ces services de conseil. Les disparités de revenus entre les sports sont encore criantes. Même Laure Manaudou, rentrée d’Athènes « starifiée », n’arrive qu’en 29e position des sportifs français les mieux payés, loin derrière les footballeurs de la Ligue 1. René Auguin, agent du coureur de 110 m haies Ladji Doucouré, le rappelle : « L’athlétisme ne rapporte pas suffisamment pour attirer beaucoup de conseillers financiers. »

Chinois de Paris: entre mutisme et fierté

Jusqu’à la cérémonie de clôture, les communautés chinoises installées à l’étranger auront vécu avec fierté cette olympiade. Sans pour autant abdiquer leur esprit critique

À Paris, la communauté chinoise hésite entre mutisme et fierté. Car le sujet des JO reste sensible, même lorsque l’on aborde le côté sportif. Dans le quartier parisien de Belleville, les immigrés chinois sont peu loquaces. Beaucoup ne parlent pas français. Mais ils ont suivi les Jeux avec passion. Comme dans l’arrière-salle de ce petit bar. « Une petite dizaine de Chinois sont venus tous les matins regarder les jeux. Ils sont contents des résultats des athlètes de leur pays d’origine », confie, du bout des lèvres, le barman, dans une atmosphère enfumée.

Le premier événement d’envergure internationale organisé par la Chine

Dans le quartier chinois du 13e arrondissement de Paris, on s’épanche davantage. Xia, 38 ans, de l’association culturelle franco-chinoise Yangtze, a choisi de rester en France, contrairement à d’autres membres de l’association « retournés à Pékin faire la fête ». Il n’empêche, elle a pris ses congés jusqu’au 24 août pour pouvoir suivre les quinze jours d’épreuves. « Je connais toutes les médailles françaises et chinoises, s’enthousiasme-t-elle. Cela fait longtemps que l’on prépare ces Jeux. Nous confirmons que nous pouvons être très bons en sport. » Un élan de fierté partagé par Jin Yuliang, employé dans une agence de voyages et arrivé depuis moins d’un an dans la capitale française. « C’est le pays de ma mère. Terminer en tête au nombre de médailles d’or est une fierté pour tous les Chinois. C’est le premier événement d’envergure internationale organisé par la Chine, et c’est une réussite », déclare ce passionné de basket-ball.

«On voit la Chine changer»

Liu, qui tient une quincaillerie non loin de là, revient plutôt sur l’extra-sportif, sans pour autant entrer dans les débats politiques sur les droits de l’homme : « On voit la Chine changer. La cérémonie d’ouverture était un bel hommage, ils ont mélangé la civilisation, la technologie et l’espoir en l’avenir de la Chine. C’est une belle image donnée au monde. On voit que la démocratie se développe. On est fiers. »

Concernant la question des droits de l’homme, Benjamin, fils d’immigrés chinois, admet : « Je trouve cela bien d’avoir profité de l’événement pour soulever le problème mais il ne faut pas trop en faire. Chaque pays a ses problèmes intérieurs. Ce qui est sûr, c’est que les JO auront permis de moderniser Pékin. »

Ecoute Dopage, un service encore marginalisé

Eté 1998 « L’affaire Festina » déchirait à jamais l’image du cyclisme. Créé la même année par le Professeur Jean Bilard à Montpellier, Ecoute Dopage vise à prévenir et mieux comprendre le fléau du dopage. Son numéro vert (0 800 152 000) permet aux sportifs de s’informer sur les dangers d’une telle pratique.

Dix ans plus tard, le terme « dopage » est ancré dans les mœurs mais le travail en matière de prévention est loin d’avoir atteint le niveau escompté.
Durant les périodes sensibles du Tour ou des JO, le service ne reçoit pas plus d’appels qu’a l’accoutumée. «Cela fait dix ans que l’affaire Festina est passée. Il y a des générations d’athlètes qui auraient mérité d’être plus « éduqués » sur les pratiques dopantes. On a perdu assez de temps comme ça» déplore Dorian Martinez, chef du service Ecoute Dopage.
Pour autant, l’évolution du comportement des sportifs est notable. « Au début, ils avaient l’impression d’être un peu traqués. Maintenant, ils parlent beaucoup plus librement, c’est moins tabou » Le traitement médiatique est pour beaucoup dans l’intégration du « phénomène dopage » dans l’inconscient collectif.

Hypocrisie chez les dirigeants

Moins tabou chez les sportifs et le grand public, une part d’hypocrisie subsiste chez les dirigeants: « J’ai demandé à Christian Prud’homme (directeur du Tour de France ) de mettre un lien vers ecoutedopage.com sur le site du Tour. Il m’a répondu que ce n’était pas possible car notre nom faisait trop directement référence au dopage. C’est scandaleux de se voiler la face de la sorte. » Mais la Dorian Martinez, psychologue du sportfédération cycliste est loin d’être en queue de peloton en matière de prévention. «Ce qui rebute certaines fédérations comme celle du foot, c’est qu’ils se disent que faire de la prévention, ce serait avouer que le dopage est également présent dans leur sport. »

Beaucoup d’athlètes ne savent pas ce qu’est le dopage

En France, les fédérations ne jouent pas leur rôle en terme de prévention. «C’est dommage qu’avant d’envoyer nos athlètes au JO, il n’y ait pas eu de campagne de prévention. Les fédérations devraient plus collaborer avec les structures de lutte contre le dopage.» Il y a également toute une croyance sur le dopage qui reste à travailler, sur la connaissance des produits notamment. Beaucoup d’athlètes souhaitent se renseigner sur les médicaments licites ou non. «Il y a un gros manque d’information. »
La bataille contre le dopage se gagnera sur le terrain de l’éducation des plus jeunes. Reste à savoir si chacun est prêt à assumer la mission qui est la sienne.

JO: Tony Estanguet vise un triplé historique

Canoë-kayak. Tony Estanguet, porte drapeau de l’équipe de France Olympique à Pékin, a déjà remporté deux médailles d’or en 2000 à Sydney et en 2004 à Athènes.

Palois de naissance, Tony a baigné depuis son plus jeune âge dans la discipline du canoë kayak. Dès l’âge de cinq ans, il prend les commandes d’un canoë et signe une licence dans le club de son père Henri, médaillé mondial en bronze par équipes en descente en 1979. Fidèle à ses racines, le céiste est aujourd’hui encore licencié au Club universitaire palois Pyrénées eaux vives.

Tony Estanguet s’est inspiré du parcours de son frère aîné, Patrice, déjà en slalom. « En le voyant à la télévision décrocher sa médaille olympique de bronze à Atlanta en 1996, j’ai eu envie de suivre ses traces afin de connaître les mêmes émotions. » En 2000, les deux frères, talent oblige, doivent lutter pour s’offrir le deuxième billet disponible derrière Emmanuel Brugvin, qualifié d’office en tant que champion du monde en titre. « Me séparer de son exemple puis trouver ma voie n’a pas été facile. Jusqu’en 2000, je me considérais moins fort que lui. » Pourtant, c’est bien le benjamin qui partira à Atlanta pour décrocher l’or. Performance qu’il réitérera à Athènes en 2004. Aujourd’hui, « Patoche » Estanguet, 35 ans, fait désormais office de mentor et cogite sur chaque millimètre à grignoter sur la coque ou la pagaie.Tony Estanguet, vise l'or à Pékin

En 2006, Tony obtient la consécration avec un titre de champion du monde. A moins d’un mois du début des épreuves à Pékin (8 – 24 août), le porte-drapeau de la délégation française entend bien glaner une troisième médaille d’or, qui le propulserait au panthéon des athlètes français. Actuellement le seul double champion olympique français en activité, vise un triplé inédit dans toute l’histoire du sport français.