C’est une démarche militante posant un regard féminin sur l’émigration africaine, la condition féminine et le partage entre deux cultures, qui rythme ce roman, véritable invitation au voyage. En lisant Citoyen de seconde zone, je me suis mis dans la peau de l’auteur, je me suis identifié à elle et j’ai vécu toutes sortes de sensations depuis son Nigeria natal jusqu’à son pays d’accueil.
L’oeuvre place Adah, personnage principal et, vraisemblablement, double de l’auteur, comme le porte parole des femmes et des immigrés. L’auteur adopte son point de vue par une focalisation interne et donne un ton personnel même si la narratrice parle d’elle à la troisième personne.
Grâce à ces techniques, j’ai vécu le combat de cette héroïne, orpheline de père à neuf ans, dans une culture machiste où la femme n’est réservée qu’aux tâches ménagères. Ce livre est porteur de messages essentiels, dans un contexte hostile où l’auteur nous montre comment cette femme battante, va renverser son destin grâce à sa motivation, son désir d’aller à l’école et d’apprendre. Son parcours est intéressant et mérite d’être un cas d’étude dans un monde où beaucoup de jeunes n’ont pas envie d’aller à l’école et ce, malgré leurs conditions sociales favorables. L’œuvre est instructive. Elle offre aux lecteurs la découverte de deux mondes différents (africain et européen) et transporte ainsi le lecteur dans un voyage de découvertes culturelles sans précédent.
Ce qui frappe surtout, c’est le récit d’une libération, d’une autonomisation : la conquête de la légitimité de la femme dans les années soixante, au sein d’une Afrique traditionnelle. Son regard est remarquable mais véhicule plusieurs stéréotypes qui ne sont pas toujours positifs. Par exemple, l’image de son mari Francis, paresseux, fainéant, jaloux, machiste. Elle dénonce cette société patriarcale. Ce point de vue me déplait car il a tendance à caricaturer l’homme africain.
Pourtant, j’ai aimé voir cette femme qui se libère en prenant la parole, en souhaitant écrire un livre dans une culture africaine de tradition orale. Elle nous offre un portrait de la femme africaine comme un modèle, un pilier fondamental de la société. Une femme à la fois mère, agent économique, éducatrice. Ce qui n’est pas négligeable. Le titre du livre Second class citizen renvoie à une personne considérée comme inférieure en statut et en droit comparé aux autres. Dans cette vision, l’auteur joue sur le sens de cette expression en l’attribuant à Adah en tant que femme mais aussi en tant que personne de couleur.
Même trente ans après la parution de cette œuvre, derrière une dimension historique intéressante, transparait une immédiate actualité. Ce livre présente de manière intemporelle la problématique de l’immigration à notre époque où ce sujet fait encore débat. L’héroïne, à travers ses mésaventures à Londres en tant qu’immigrée, est confrontée aux problèmes de logements, de discrimination, de racisme, de chômage. Le choc des cultures montre des visages qui pourraient faire comprendre à beaucoup de jeunes africains candidats à l’immigration vers l’Europe, que l’Occident est loin d’être un paradis.
En somme, ce livre est bénéfique aux Occidentaux : il permet de voir d’une part la condition féminine de l’auteur, les croyances machistes, les difficultés économiques de sa société et sa bravoure exemplaire pour dompter ses contraintes. D’autre part, elle est porteuse d’espoir pour certaines personnes en leur permettant de relativiser leur situation et de se rendre compte de toutes les chances qu’elles ont par rapport à la vie d’Adah, orpheline et pauvre, reléguée au second rang de la société.
Personnellement, la lecture de Citoyen de seconde classe m’a permis de voyager, de m’instruire encore plus sur la culture de l’auteur, sur les conditions féminines, sur les combats des femmes… Choses que je ne pourrais partager entièrement avec vous, car rien ne vaut une réelle expérience par soi-même en se plongeant au cœur du livre. A vous donc de vivre l’aventure.
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