Procès en appel de Jean Michel Bissonnet: la tension monte aux assises de Carcassonne

C’est dans une atmosphère relativement confidentielle que s’ouvre, mercredi 16 novembre, aux assises de Carcassonne, cette nouvelle journée du procès en appel de Jean Michel Bissonnet. Un procès auquel nous avons pu assister depuis les bancs de la presse.

Alors que les sièges alloués au public sont encore partiellement vides, les trois prévenus font leur entrée dans le box. Un box surprenant. Il se situe juste dans le prolongement des places dévolues aux proches de la victime, Bernadette Bissonnet. Ses deux fils en tête ! Ces proches sont ainsi contraints d’avoir en ligne de mire de façon permanente le fantasque trio des accusés. Il est composé d’un notable, l’époux de la victime, Jean Michel Bissonnet, de l’homme à tout faire du couple, Meziane Belkacem, et enfin de l’aristocrate ruiné, Armaury d’Harcourt.

Jean Michel Bissonnet, placé au plus près de sa famille, tend le bras sous les vitres du box et tient la main de son fils cadet Marc. La sonnerie annonçant le début de l’audience et l’entrée de la Cour, abrège ce bref moment de partage. Cette journée de procès est d’ailleurs très importante pour la défense, car est appelé à la barre l’adjudant-chef Michel Géniès, qui dirigea l’enquête sur le meurtre de Mme Bissonnet. Il s’attèlera, pendant près de sept heures, à défendre son enquête point par point, tout en essuyant les attaques, parfois véhémentes, des avocats.

La colère d’un fils à bout

Un premier éclat de voix se fait entendre dans l’assistance, où la tension est montée d’un cran, moins de deux heures après le début de l’audition du sous-officier de gendarmerie. C’est Marc, l’un des deux fils de Bernadette Bissonnet, qui, à bout de nerf, s’emporte. La colère du jeune homme fait suite aux propos tenus par l’avocat général, au sujet d’une découverte dans la table de nuit de la chambre de ses parents. Les gendarmes ont en effet retrouvé, lors de leur perquisition, des accessoires et objets à caractère sexuel. Ne supportant une énième évocation de ce détail intime sur la vie privée de ses parents, épisode qui n’a pas de lien direct avec l’affaire, le jeune homme ne se contient plus. «Et le respect de l’intimité des personnes, il est où là ? C’est de ma mère dont vous parlez, alors respectez-là ! Vous vous régalez avec ce genre de détail ! ». Dépassé par ses émotions, il quitte l’assistance. Grand silence dans la salle. L’avocat général rétorque alors «Je ne vois pas en quoi parler de vibromasseur en 2012 est indélicat ». L’autre fils (Florent) répond « D’accord, mais pas à chaque fois! C’est de la délectation, c’est du sadisme. Est-ce bien nécessaire ? ». Ambiance électrique et tendue. Le président Daniel Duchemin suspend l’audience pour que chacun recouvre ses esprits.

Cet accès de colère du jeune Marc Bissonnet, très proche de sa mère avant son meurtre, fait écho à la manière dont la vie privée de ses parents a été jetée en pâture à l’opinion publique, via la presse. Ces informations, livrées par la gendarmerie, ont été relayées de manière outrancière par certains médias, s’attardant davantage sur le potentiel racoleur de cette affaire, que sur les véritables tenants et aboutissants du crime. Lors du procès précédent (au palais de justice de Montpellier), Marc et Florent avaient déjà exprimé leur colère contre les enquêteurs, qu’ils suspectent d’avoir mené une enquête à charge, notamment en livrant à la presse, au mépris de l’intimité, ce genre de fuites. Des « saloperies« , pour reprendre les propos de Florent. Ce débat soulève donc une question morale et éthique plus générale: jusqu’où peut-on rendre public la vie privée d’une victime ou d’un accusé? Autre problème. Comment préserver famille et proches de ce déballage médiatique et judiciaire ?

A la reprise, le président se sent dans l’obligation de clarifier la situation. « Il n’est pas d’usage que les parties civiles soient maltraitées. Je ne voudrais pas être amené à interdire la présence d’un membre d’une partie civile ; cette idée m’est désagréable. Mais je ne peux tolérer de tels incidents ». Il demande alors aux avocats d’annoncer ce genre d’éléments, avant d’en parler, pour que la partie civile puisse mieux s’y préparer. L’avocat général reprend ensuite la parole, mais tient avant tout à apporter quelques précisions. « Il n’est pas dans la volonté du ministère public de bafouer la mémoire de la victime. Au contraire, il faut que la vérité soit faite. Et pour que vérité soit faite, il ne peut pas y avoir de sujets tabous ». L’incident clôt, l’audition peut enfin reprendre.

Marc et Florent Bissonnet accompagnés de leur avocate Me Chalié

Des assises qui dérivent vers le branle-bas de combat

Il n’y a pas que du côté de l’assistance que les assises sont mouvementées. La partie de bras de fer à laquelle se livrent avocats, témoins, accusés, ministère public et cour engendre de nombreux soubresauts. En effet, disputes et piques fusent entre avocats des différentes parties. A un moment le président avertit même Me Iris Christol (défendant Meziane Belkacem). « Je vais vous demander de regagner votre banc si ça continue ! ». L’essentiel des attaques et emportements vont, cependant, être impulsés par les avocats de Jean Michel Bissonnet et de ses deux enfants.

S’instaure alors une stratégie qui vise à déstabiliser Michel Genies. Ils démontent point par point son enquête, qu’ils jugent menée à charge contre leur client. Par exemple, l’ex adjudant explique que l’un des éléments prouvant la culpabilité de Monsieur Bissonnet concerne les écoutes téléphoniques d’Armaury D’Harcourt. Le vicomte dit à sa fille et ex-femme (qui le prient de s’aligner sur la version de Meziane Belkacem), « C’est le jardinier qui dit la vérité ». A ces mots, Me Liénart s’offusque de la perversité de cet élément par lequel le vicomte peut éventuellement mentir à sa famille, tout en y trouvant son compte. Il lance alors à Michel Genies : « Vous croyez que c’est un raisonnement intelligent ? ». Il n’hésite pas non plus à dire que c’est aberrant, pour l’élite de la gendarmerie, de se suffire de « la pitié » comme mobile expliquant ce meurtre. Lors de sa garde à vue, le jardinier avait en effet déclaré, pour expliquer son geste, avoir éprouvé de la pitié envers son patron.

Lorsque les avocats du notable insistent sur le manque de rigueur dans l’étude des « fadettes », les factures téléphoniques des accusés, et surtout dans la surveillance des appels attribués à Meziane Belkacem, le ministère public estime que cette intervention traîne en longueur. L’avocat général explique qu’ « on perd du temps avec ces points de détail ». A ces mots, les avocats ne manquent pas de s’indigner une nouvelle fois. « C’est systématique que vous m’interrompiez ainsi l ! », s’insurge Me Darrigade. Jean Michel Bissonnet, qui prend des notes depuis le début, parce qu’il est constamment empêché de parler par ses proches et avocats, n’y tient plus et s’emporte à son tour. « C’est un point de détail ? Il s’agit du meurtre de ma femme!». Nouvel incident et nouvelle suspension de séance.

La tension devient tellement palpable qu’elle finit par gagner Michel Genies. Les nerfs de l’ancien gendarme ont, des heures durant, été mis à rude épreuve. Chacun son tour, les avocats remettent en doute le sérieux de son enquête et l’objectivité dont a fait preuve son équipe. Si pour Jean Michel Bissonnet, «Les gendarmes écrivent ce qu’ils veulent » sur les procès-verbaux, Me Liénart, lui, tempère les propos de son client. Il explique que ce n’est pas la sincérité des gendarmes qui est remise en cause. Simplement, «nous pensons que les gendarmes peuvent se tromper honnêtement». Se retenant depuis trop longtemps, Michel Genies coupe court à toutes ces accusations. Il hausse nettement le ton et impose le silence autour de lui. Il défend bec et ongles son enquête qu’il juge objective. Ce n’est pas de sa faute si des témoins changent leur version quand ils arrivent à la barre. «Ils ont prêté serment, ils ont signé, pourtant ces mêmes gens se rétractent devant le juge d’instruction! Alors qui fait le faux ?! Les témoins ou les gendarmes ? Nous avons mené une enquête basée sur des éléments recueillis, sans se prononcer pour telle ou telle personne!»

Un partout, retour à l’envoyeur! Heureusement, le président, est là pour détendre l’atmosphère. « Allons ! Réservons nos forces pour cette fin de semaine car elle sera au moins aussi active qu’aujourd’hui».

Finalement la montée en pression générale durant cette journée de procès aura une nouvelle fois montré à quel point l’affaire est confuse, les preuves minces et les suspicions grandes. Les quelques questions non résolues, et pourtant non négligeables, comme celles portant sur l’identité du propriétaire de l’arme du crime, ont été trop vite expédiées. Des sujets ainsi éclipsés, au bénéfice de la défense ou de l’attaque des habituels éléments à charge de l’enquête. Des éléments qui n’ont toujours pas débouché sur de nouvelles pistes.

« J’ai la mémoire qui flanche »…

Mercredi 16 novembre, le jugement en appel de l’affaire Bissonnet se poursuit aux assises de Carcassonne. Cette nouvelle journée de procès axée sur le jour du crime va, une fois de plus, tenter d’éclairer le jury sur le degré d’implication, dans le meurtre de Bernadette Bissonnet, de ces trois improbables protagonistes que sont le vicomte Amaury d’Harcourt, le jardinier Méziane Belkacem et le notable montpelliérain Jean-Michel Bissonnet. L’enjeu est de taille, surtout pour ce dernier, puisque, condamné à 30 ans de prison en première instance, il nie toute implication au crime et plaide toujours l’acquittement.

Affaire du meurtre de Bernadette Bissonnet à Castelnau-le Lez: ouverture du procès en appel devant les assises de Carcassonne :

Ce lundi 7 novembre 2011 va débuter devant la cour d’assises de Carcassonne, le troisième acte judiciaire d’un procès mettant en scène, sur le banc des accusés, un invraisemblable et fantasque trio. Jean-Michel Bissonnet, riche homme d’affaires montpelliérain , affrontera une nouvelle fois le duo Meziane Belkacem/Amaury D’Harcourt : jardinier et homme à tout faire immigré pour l’un, vicomte de 86 ans, noble ruiné et ami du notable pour l’autre. Tous trois comparaissent en appel pour meurtre ou complicité du meurtre de Bernadette Bissonnet, l’épouse de Jean-Michel. Un procès de trois semaines, suivi en direct sur place par Hautcourant.

Rappel des faits:

Bernadette Bissonnet, pharmacienne de 57 ans a été découverte abattue de deux coups de fusils de chasse dans sa villa huppée de Castelnaud Le Lez, par son époux (Jean Michel Bissonnet), le soir du 11 mars 2008. Très tôt, les gendarmes découvrent un indice inespéré sur la scène de crime, à savoir un bout d’ongle et des gouttes de sang disséminées un peu partout dans la demeure, appartenant au présumé coupable de ce meurtre. Le tueur, alors encore inconnu, semble être un amateur qui se serait éraflé le haut du pouce en tirant avec le fusil. Arborant un pansement au pouce gauche lors de son entretien à la gendarmerie, le jardinier algérien, placé aussitôt en garde à vue, avoue rapidement être l’auteur de ce crime. Un crime qu’il prétend avoir commis pour le compte de son patron, lui ayant promis en échange du meurtre de sa femme, la somme de 30000 euros.

En simple visite amicale, selon ses dires, Amaury d’Harcourt, présent avant et juste après le drame, finit par corroborer les accusations faites par Mr Belkacem envers Jean Michel Bissonnet. L’aristocrate, piégé par des écoutes téléphoniques, explique qu’il s’est emparé de l’arme et l’a faite disparaître en la jetant dans le Lez par pure amitié pour le notable montpelliérain. Comme le jardinier, il justifie le crime commandité par Jean Michel Bissonnet, du fait que le couple ne s’entendait plus. Il explique même que ce projet taraudait l’époux depuis plusieurs années déjà.

Mais l’homme d’affaires, fort d’une réussite professionnelle et sociale incontestable, n’a pourtant aucun mobile apparent dans cette affaire. Il nie toujours être l’instigateur de l’assassinat de Bernadette qu’il dit être la femme de sa vie. Un discours d’ailleurs relayé par Marc et Florent, les enfants du couple ; qui continuent de soutenir leur père. A part le vicomte d’Harcourt, famille et proches estiment, pour la plupart, que Bernadette et Jean-Michel coulaient des jours paisibles ensemble, et ne peuvent pas croire en une quelconque responsabilité de celui-ci dans cet assassinat. En première instance, M. Bissonnet a souvent pleuré en évoquant sa femme. Il s’est aussi emporté contre les enquêteurs, et a tenu tête au président, aux avocats généraux et aux parties civiles, déplorant ce procès injuste fait à un notable. Sa stratégie de défense s’attachera donc à démontrer que ce meurtre fait suite à une tentative des deux co-accusés, pour dérober l’argent du couple, caché dans la villa, avant de filer à l’anglaise. « On va démontrer que ces deux-là avaient intérêt sur le plan financier à tenter un cambriolage » chez les Bissonnet, un « cambriolage qui tourne très mal« , déclare Me Martial, avocat du notable.

Une mission délicate pour le jury populaire de Carcassonne:

Les aveux et discours contradictoires des trois hommes accusés, n’ont donc pas encore permis d’établir le mobile réel de ce crime malgré leurs confrontations au cours de l’instruction, puis deux procès d’assises successifs menés à Montpellier. Le verdict du dernier procès (en janvier 2011) a infligé une peine de 30 ans de réclusion criminelle à J.-M. Bissonnet. Meziane Belkacem a quant à lui écopé de 20 ans de réclusion pour assassinat, alors que le vicomte d’Harcourt, l’ami trop « fidèle » a hérité d’une peine de 8 ans pour complicité de meurtre.

Mais chacun des accusés conteste sa peine et l’appel de J.-M. Bissonnet traduit un certain malaise en ce qui concerne sa sentence. Il a été condamné (à une voix près), alors qu’il ne pouvait qu’être reconnu innocent ou coupable. Et, d’un point de vue pénal, si sa culpabilité avait été avérée, le notable aurait dû recevoir la peine la plus grave: la perpétuité. Tout l’enjeu pour le jury populaire de Carcassonne, chargé de rejuger les trois protagonistes de cette affaire, sera donc de clarifier ce mystère criminel par la mise en exergue des relations et intérêts particuliers qui lient chacun des accusés.

Jean-Michel Bissonnet condamné à 30 ans de prison

Après plus d’un mois de débats à la Cour d’assises de Montpellier, le procès de Jean-Michel Bissonnet vient de toucher à sa fin. Accusé d’avoir commandité le meurtre de sa femme en mars 2008, il est condamné à 30 ans de prison. Retour sur une affaire qui a déchaîné les passions.

Le scénario de cette affaire est digne des meilleurs romans policiers. Un couple de notables, une belle résidence, une victime innocente et trois assassins présumés.

Le mari, Jean-Michel Bissonnet, 62 ans, aurait commandité le meurtre de sa femme, Bernadette. Le jardinier du couple, Meziane Belkacem, aurait tué cette dernière avec un fusil contre une promesse de 30 000€. Et le vicomte Armaury d’Harcourt, ami du couple, aurait donné des conseils sur la façon de procéder puis fait disparaître l’arme dans le Lez pour « protéger son ami ».

Au fil du procès, le vicomte et le jardinier ont avoué ce qui leur était reproché mais ont remis toute la responsabilité sur M. Bissonnet, désigné comme seul commanditaire. Pourtant, le mari clame son innocence depuis le début et accuse Armaury d’Harcourt d’avoir tout organisé avec l’aide de M. Belkacem.
Alors quel a été le rôle de chacun ? Et surtout, quel était le motif ?

« Un des accusés ne dit pas la vérité »

La vérité a toujours semblé très compliquée à établir. Les déclarations ne concordent pas avec les faits et chaque aveu est resté partiel. « Un des accusés ne dit pas la vérité », a déploré d’ailleurs un avocat de la défense face aux versions contradictoires de chacun.

Les différents témoins entendus à la barre n’ont pas plus été capables d’éclairer la situation. Aujourd’hui encore, beaucoup de zones d’ombre persistent et trop de questions restent sans réponses malgré le rendu du verdict.

Bissonnet, décidé à ne pas capituler

Au début du procès, assis sur le banc des accusés, Jean-Michel Bissonnet a pu parfois sembler étonnamment calme, presque indifférent à ce qui était dit. Pourtant, il lui est arrivé de s’emporter, de plus en plus avec le temps.

Lors de la troisième semaine d’audience par exemple, fatigué d’être traité en coupable, il se met à hurler : « Je suis innocent ! Je suis la deuxième victime de cette affaire. Trente ans de couple, je sais ce que c’est. Je sais ce que j’ai fait. » Puis pointant Meziane Belkacem du doigt, il affirme : « Pour moi l’homme que vous poussez à condamner n’est pas coupable. »

Ces trois derniers jours, il a même décidé de ne plus se présenter au procès, exaspéré par ce qu’il qualifie de « mensonges » au sein d’une « enquête à charge depuis le début ». Stéphanie Archambault, experte psychologique qui l’a rencontré, affirme d’ailleurs qu’il « passait sans transition d’un état émotionnel à un autre. »

Malgré tout, beaucoup de personnes le pensent innocent, certaines allant même jusqu’à créer une « Association de soutien à Jean-Michel Bissonnet« .
Aujourd’hui, de retour dans la salle, il a encore réaffirmé son innocence lors de sa dernière déclaration.

Un jugement très attendu

Mardi 8 février, l’avocat général, Me Denier, a requis la prison à perpétuité contre Jean-Michel Bissonnet, 25 ans contre M. Belkacem et 10 ans contre le vicomte d’Harcourt.

Pour cette dernière journée, la grande salle du Tribunal de Montpellier est comble et la tension palpable. Les deux hommes qui avaient avoué leur implication dans le meurtre ont exprimé des regrets. Mais Bissonnet ne les a pas acceptés.

Après plus de cinq heures de délibération, la justice a tranché : 30 ans de réclusion pour Jean-Michel Bissonnet, qui s’est évanoui à l’annonce du verdict. Belkacem a été condamné à 20 ans de prison et Amaury d’Harcourt à 8 ans. Aujourd’hui, même si les jurés ont fait leur choix, il est probable que face au manque évident de preuves le doute persiste dans beaucoup de têtes.