A. J. : On vous classe souvent dans la catégorie du Death Metal, vous retrouvez-vous sous cette appellation?
Mario Duplantier : Nous appartenons sans nul doute à la grande famille du Metal. La musique du Death Metal, plus extrême encore, nous a chamboulés dès les débuts, du fait de la de la technicité très poussée de ce style et de la récurrence autour de la noirceur. Mais au delà de ça, même si nous n’hésitons pas à parler de nos propres démons, nous restons des humanistes. Nous avons foi en l’Homme. L’important dans notre recherche, c’est de donner une dimension d’ordre existentiel et spirituel à notre musique.
A. J. : Au delà de la question des influences, Gojira a t-il une idole en commun qui fait l’unanimité au sein du groupe ?
M. D. : Notre groupe existe grâce à Metallica. J’avais 12 ans la première fois que je l’ai écouté, c’est ce qui m’a fait abandonner le sport pour la batterie. Sinon, nous admirons aussi Sepultura et Death.
A. J. : On vous dit engagés. En faveur de quoi « militez » vous ?
Nous ne sommes pas spécialement branchés politique, bien que tout le soit plus ou moins. Il y a des choses qui nous touchent, d’autres qui nous font mal. On essaie de composer des hymnes à la nature et à la vie.
A. J. : Comment se déroule la phase de composition de votre musique ?
M. D. : C’est mon frère Joseph qui écrit les textes et compose les mélodies. Il gère de nombreux aspects culturels du groupe, jusqu’aux pochettes. De mon côté, je crée le dynamisme des morceaux. Souvent, une idée part d’une partie de batterie que je viens de trouver.
A. J. : Pouvez-vous me parler un peu de votre jeu de batterie, impressionnant de technicité ?
M. D. : Le Metal est un challenge technique formidable. Pour être bon dans ce domaine, il faut se spécialiser corps et âmes dans cette rythmique spéciale. Sur scène ou en répétition, je me mets toujours en péril, je cherche à toujours repousser mes limites de jeu. Le rapport au corps doit donc s’appréhender comme celui d’un athlète de haut niveau qui ne se relâche jamais. Mon souci majeur avec mon instrument, c’est de réduire la marge entre les concerts où je suis fatigué et ceux où je pète la forme, pour que le public ne s’en aperçoive pas.
A. J. : Vous marchez très bien outre-atlantique, qu’est ce qui séduit les américains dans votre musique, selon vous ?
M. D. : L’avantage du Metal, c’est que c’est une musique universelle. Nous obéissons aux mêmes codes à travers le monde. Gojira crée une musique internationale, mais avec une touche « à la française » : nos textes sont basés sur une réflexion critique et cultivée, plus complexe que certains groupes allemands ou américains. Aux États-Unis, les gens sont fascinés que l’on vienne de France. Ils ont un respect incroyable et nous déroulent à chaque fois le tapis rouge.
A. J . : L’année dernière sortait votre dernier album « The Way Of All Flesh » (La voie de toute chair). Quelle est la signification du titre ?
M.D. : Joseph a commencé à avoir ses premières rides. Tout de suite, il s’est posé certaines questions fondamentales sur l’après-vie. Sommes-nous juste un tas d’os qui pourrit sous la terre, nous réincarnons-nous? Avec cet album, il a décidé d’appréhender sa propre mort, pour ensuite se demander ce que l’on peut bien faire du temps qui nous est imparti jusqu’au coup d’arrêt.
A. J. : Vous êtes cette année sur la route. Avez-vous des projets après 2009 ?
M. D. : Avec la tournée en tête d’affiche aux États-Unis cette année, le rythme va être soutenu! Donc après, on envisage de se calmer sur les concerts. Nous avons joué dans un cinéma en live il y a quelques temps pour illustrer un péplum muet. Ce projet nous a plu, nous enregistrerons peut-être la BO si nous récupérons les droits d’auteur!
A. J. : Et au fait, Gojira, c’est un hommage à la puissance de Godzilla, n’est-ce pas ?
M. D. : Oui, c’est le nom de Godzilla en japonais. Ça évoque la puissance, bien sûr, mais c’est aussi une référence au nucléaire : Ce monstre est né de radiations nucléaires, d’une déformation de la nature. Et puis, notre musique, elle aussi, est monstrueuse.