Séisme et nucléaire : la Californie tremble déjà…

La catastrophe qui s’est abattue sur le Japon le 11 mars 2011, a réveillé l’inquiétude des Américains face aux risques du séisme nommé «The Big One », qui menace la Californie et ses deux centrales nucléaire : San Orefon et Diablo Canyon.

Le « Big One » ou l’onde de choc

« The Big One », tel est le nom donné à un séisme dévastateur qui devrait selon les géologues frapper la côte ouest des Etats-Unis dans un avenir proche. C’est la faille de San Andréas, longue de 1300 km et large de 140 km, qui serait à l’origine de ce futur cataclysme.
san-andreas-fault-map.jpg Située en décrochement, à la jonction des plaques tectoniques Nord-Pacifique et Nord-Américaine, la faille géologique traverse la Californie du nord au sud en passant par la baie de San Francisco et par Los Angeles. Cette dernière provoque chaque année pas moins de 200 séismes dont la plupart sont à peine ressentis par les californiens. Cependant, selon plusieurs chercheurs américains, il pourrait bien y avoir une gigantesque secousse qui ébranlerait l’état le plus peuplé et le plus riche des Etats-Unis. La probabilité du terrible séisme (environ 9 sur l’échelle de Richter) pourrait être de 75% dans les 80 prochaines années (selon l’Université de Californie). L’USGC, le département américain d’études géologiques, se veut plus rassurant en estimant que dans les cinquante prochaines années, il y aurait de 25% à 40% de risques de survenue d’un séisme de magnitude de plus de 6 sur l’échelle de Richter, et entre 7% et 10% de risques pour un séisme de plus de 7,5. Pour Kelly Huston, secrétaire adjointe de l’Agence de gestion des urgences de la Californie (CEMA), c’est dans la région de Los Angeles que le Big One se fera le plus ressentir, avec une secousse d’environ 7,8. « Vous verrez l’effondrement des bâtiments, vous verrez des gens pris au piège, vous verrez l’effondrement des routes… Ce sera une destruction massive de la ville», déclare Kelly Huston. Historiquement, il ne s’est jamais produit en Californie un séisme aussi fort, excepté celui du 18 avril 1906 à San Francisco (avec une magnitude de 7,8) qui détruisit la ville, non par les effets de la secousse, mais par l’incendie qui en résulta et qui causa la mort de 3000 personnes. Un siècle plus tard, San Francisco reste exposée à cette « bombe à retardement » qu’est le Big One et qui dévasterait la ville, avec un grand risque de tsunami.

Selon la Commission de la Sécurité sismique en Californie, dans un rapport de 2005, cet état américain est aussi une zone à risque pour les tsunamis. « Quatre-vingt-deux tsunamis possibles ou confirmés ont été observés ou enregistrés en Californie. […] Le plus grand tsunami découlerait d’un tremblement de terre dans la zone de subduction de Cascadian au large de la côte de la Colombie-Britannique, de l’Orgeon et de la partie septentrionale de la Californie. En 1700, un tremblement de terre avait produit un tsunami qui a laissé sa marque sur l’histoire géologique du comté de Humboldt», précise le rapport. Une secousse locale pourrait donc générer une énorme vague, et emporter avec elle une partie de la « Golden Gate », avec des retombées humaines et économiques catastrophiques. Mais un an après l’accident de Fukushima, les angoisses se concentrent surtout sur les centrales nucléaires situées sur la côte ouest des Etats-Unis.

Californie : la peur des radiations

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Détenteurs du premier parc nucléaire mondial, avec 65 centrales nucléaires et 104 réacteurs, les Américains ont regardé la situation japonaise de mars 2011 avec crainte. Et pour cause, ils partagent un certain nombre de points communs : leurs installations vieillissent, 35 sont équipés de réacteurs à eau Bouillante (REB) comme à Fukushima et des faiblesses dans les circuits électriques de secours peuvent apparaître. Mais ce sont surtout les aléas environnementaux qui inquiètent avec les tornades, les ouragans et le fameux « Big One » qui pourrait avoir lieu.

Ce sont notamment les deux centrales nucléaires situées en bord de mer de la Californie, à proximité de la faille de San Andréas, qui préoccupent.
La première, celle de San Onofre (dirigée par Southern California Edison) dans le comté de San Diego, est située à huit kilomètres de la faille de Christianos. Et La deuxième, plus problématique et bien nommée, celle de Diablo Canyon (dirigée par la Pacific Gas and Electric) se trouve dans le Comté de San Luis Obispo, à 154 kilomètres de la grosse faille de San Andréas et à 5 kilomètres de la faille de Hosgri, qui risque à tout moment de trembler. Ces deux centrales comptent deux réacteurs chacune, et puisent l’eau de refroidissement dans l’Océan Pacifique. Celle de Diablo Canyon est perchée sur un renfort rocheux de 26 mètres de hauteur, et celle de San Onofre est située au ras de l’eau, protégée par un mur d’environ 7,6 mètres en cas de tsunami. Southern California Edison proclame fièrement que la centrale de San Onofre a été construite pour résister à un tremblement de terre de 7 sur l’échelle de Richter. A titre de comparaison, Fukushima Daiichi au Japon a été construite pour résister à un séisme de magnitude 7,9, mais a été touchée par un de 9,0.

Celle de Diablo Canyon a été conçue, quant à elle, pour résister à un séisme de 7,5 à partir de la faille la plus éloignée qui est Hosgri (5 km). Mais entre temps, des géologues et notamment Jeanne Hardebeck, sismologue de l’ USGS, ont découvert en 2008 la faille de Shoreline, longue de 25 km et située à seulement 600 mètres des réacteurs. La faille de Shoreline pourrait être connectée avec celle de Hosgri, et elles pourraient, à elle deux, provoquer un séisme de magnitude de 7,7 en dessous de la centrale. Pacific Gas and Electric, à qui la centrale appartient, veut se montrer plus rassurant en indiquant « qu’il est peu probable que la rupture de la faille se produise directement sous la centrale, mais qu’elle peut provoquer simplement des déformations dans le champ proche du sol. L’impact potentiel de déformation du sol impliquerait principalement les composants enterrés, tels que la tuyauterie et les conduits ». Une note qui ne s’avère pas très rassurante…

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Mais si la plupart des scientifiques jugent peu probable que les centrales soient affectées par un séisme et un tsunami aussi violents que ceux du Japon, ils pointent néanmoins les failles dans le système de secours. Les générateurs électriques ne seraient en effet pas assez puissants pour alimenter le circuit de refroidissement par l’eau et permettre l’arrêt de la centrale en cas d’urgence, et donc ne pourrait pas empêcher la fusion du cœur du réacteur nucléaire.

Jacques Aben (CNRS) : « Il existe un droit au nucléaire »

Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté dernièrement une troisième série de sanctions afin que l’Iran interrompt son programme nucléaire. Entretien à propos d’une éventuelle bombe iranienne avec Jacques Aben, ancien responsable de l’axe « crises et conflits » à l’ESID (Etats, sociétés, idéologies, défense), unité mixte de recherche du CNRS.

Pensez-vous que l’Iran veut se doter de l’arme nucléaire ? Une bombe iranienne serait-elle vraiment dangereuse?
Je crois que Téhéran veut la bombe, mais elle ne serait pas plus dangereuse qu’une autre. La détention d’une arme nucléaire a la vertu de rendre prudent. Celui qui jouerait avec saurait qu’il s’expose à des représailles nucléaires.

Dans la revue Défense nationale de juillet 2007, Tewfik Hamel, doctorant en sciences politiques et relations internationales, avance que l’arme nucléaire est l’ultime et seule assurance pour un État jugé voyou.
C’est exactement ce que la France a toujours dit pour elle-même – ce qui ne veut pas dire que ce soit obligatoirement efficace. L’Iran voudrait, grâce au nucléaire militaire, devenir une puissance régionale capable de résister à la plupart des menaces.

Est-ce que le concept de « destruction mutuelle assurée », qui a marché pendant la Guerre froide, peut fonctionner ici entre l’Iran et Israël ?
S’agissant de la Guerre froide, tout ce que l’on sait c’est qu’elle n’a pas dégénéré, le reste n’est que spéculation. Cela dit, l’équilibre de la terreur est un concept potentiellement universel, pourvu qu’il s’applique à des États dits rationnels, intéressés par leur pérennité.

Le TNP (Traité de non prolifération nucléaire) annonce que « chaque pays aura le droit de se retirer du traité s’il décide que des évènements extraordinaires, en rapport avec l’objet du présent traité, ont compromis les intérêts suprêmes de son pays ». Téhéran pourrait-il avoir une excuse pour quitter le TNP ?
A-t-on vraiment besoin d’une excuse pour faire quelque chose dont, de toute façon, les autres ne veulent pas ? Qui a demandé quoi que ce soit à Israël ? On n’est pas dans le domaine du juste ou de l’injuste, mais dans celui du « bon pour moi » ou « mauvais pour moi » et donc des rapports de forces. Il ne faut pas oublier que la France a été le premier pays disséminateur.

Peut-on parler d’un droit au nucléaire?
C’est mon point de vue. Je ne vois pas au nom de quoi certains s’arrogeraient le droit d’interdire aux autres de se doter des mêmes capacités qu’eux. Reste qu’un État est seul juge de sa propre sécurité, sous réserve que son action pour la préserver ne provoque pas une réaction excessive de ses voisins ou du Conseil de sécurité de l’ONU.

Après l’Égypte dernièrement, d’autres pays du Moyen-Orient veulent se mettre au nucléaire civil. C’est le cas de l’Arabie Saoudite, du Yémen, de la Jordanie, mais aussi de la Lybie, de l’Algérie et du Maroc. L’Iran a-t-il pu jouer un rôle dans ces décisions ?
Un système vraiment civil et donc surveillé par l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) ne peut donner lieu à utilisation militaire. Et tout le monde sait que tôt ou tard le prix du pétrole deviendra exorbitant, et qu’il faudra bien continuer à produire de l’électricité. Je ne vois donc pas le besoin d’un exemple, iranien ou autre.

Jacques Aben (CNRS) : « Il existe un droit au nucléaire »

Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté dernièrement une troisième série de sanctions afin que l’Iran interrompt son programme nucléaire. Entretien à propos d’une éventuelle bombe iranienne avec Jacques Aben, ancien responsable de l’axe « crises et conflits » à l’ESID (Etats, sociétés, idéologies, défense), unité mixte de recherche du CNRS.

Pensez-vous que l’Iran veut se doter de l’arme nucléaire ? Une bombe iranienne serait-elle vraiment dangereuse?
Je crois que Téhéran veut la bombe, mais elle ne serait pas plus dangereuse qu’une autre. La détention d’une arme nucléaire a la vertu de rendre prudent. Celui qui jouerait avec saurait qu’il s’expose à des représailles nucléaires.

Dans la revue Défense nationale de juillet 2007, Tewfik Hamel, doctorant en sciences politiques et relations internationales, avance que l’arme nucléaire est l’ultime et seule assurance pour un État jugé voyou.
C’est exactement ce que la France a toujours dit pour elle-même – ce qui ne veut pas dire que ce soit obligatoirement efficace. L’Iran voudrait, grâce au nucléaire militaire, devenir une puissance régionale capable de résister à la plupart des menaces.

Est-ce que le concept de « destruction mutuelle assurée », qui a marché pendant la Guerre froide, peut fonctionner ici entre l’Iran et Israël ?
S’agissant de la Guerre froide, tout ce que l’on sait c’est qu’elle n’a pas dégénéré, le reste n’est que spéculation. Cela dit, l’équilibre de la terreur est un concept potentiellement universel, pourvu qu’il s’applique à des États dits rationnels, intéressés par leur pérennité.

Le TNP (Traité de non prolifération nucléaire) annonce que « chaque pays aura le droit de se retirer du traité s’il décide que des évènements extraordinaires, en rapport avec l’objet du présent traité, ont compromis les intérêts suprêmes de son pays ». Téhéran pourrait-il avoir une excuse pour quitter le TNP ?
A-t-on vraiment besoin d’une excuse pour faire quelque chose dont, de toute façon, les autres ne veulent pas ? Qui a demandé quoi que ce soit à Israël ? On n’est pas dans le domaine du juste ou de l’injuste, mais dans celui du « bon pour moi » ou « mauvais pour moi » et donc des rapports de forces. Il ne faut pas oublier que la France a été le premier pays disséminateur.

Peut-on parler d’un droit au nucléaire?
C’est mon point de vue. Je ne vois pas au nom de quoi certains s’arrogeraient le droit d’interdire aux autres de se doter des mêmes capacités qu’eux. Reste qu’un État est seul juge de sa propre sécurité, sous réserve que son action pour la préserver ne provoque pas une réaction excessive de ses voisins ou du Conseil de sécurité de l’ONU.

Après l’Égypte dernièrement, d’autres pays du Moyen-Orient veulent se mettre au nucléaire civil. C’est le cas de l’Arabie Saoudite, du Yémen, de la Jordanie, mais aussi de la Lybie, de l’Algérie et du Maroc. L’Iran a-t-il pu jouer un rôle dans ces décisions ?
Un système vraiment civil et donc surveillé par l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) ne peut donner lieu à utilisation militaire. Et tout le monde sait que tôt ou tard le prix du pétrole deviendra exorbitant, et qu’il faudra bien continuer à produire de l’électricité. Je ne vois donc pas le besoin d’un exemple, iranien ou autre.

Nouvelles sanctions du Conseil de sécurité de l’ONU

Traduction de l’article de Manal Lotfi, dans le numéro du 23 janvier 2008
d’Asharq al-awsat, volume 30, numéro 10.648.


L'article d'Asharq al-awsat«

Les grandes puissances surprennent l’Iran en décidant de renforcer les sanctions contre les banques et contre les gardiens de la révolution

Un responsable américain : « les désaccords ne portent pas sur “le principe des sanctions“, mais sur “leurs dimensions“»

L’Allemagne et les pays membres du Conseil de sécurité de l’ONU ont annoncés hier qu’ils étaient parvenus à trouver un accord concernant la troisième révision des sanctions imposées à l’Iran par le Conseil. Cette nouvelle décision concerne les banques iraniennes accusées d’être enlisées dans le soutien au “terrorisme“, ou investies dans le “programme nucléaire iranien“. Elle vise également à restreindre les entreprises internes à la garde révolutionnaire iranienne, d’après les propos confiés par un responsable américain à Asharq al-awsat. Le rapport surprend grandement l’Iran, puisque Téhéran avait refusé lors des jours passés, la publication des nouvelles mesures de sanctions adoptées par le Conseil de sécurité. Alors que les détails de cette nouvelle révision n’ont pas encore été dévoilés, le responsable américain en question a expliqué que les Etats-Unis souhaitaient “renforcer des sanctions qui de fait sont déjà entrées en vigueur, particulièrement celles qui concernent les banques iranienne et la garde révolutionnaire“. Il a également déploré que la Chine et la Russie ne soient pas sur la même longueur d’onde que les Etats-Unis. Les négociateurs -Conseil de sécurité et Allemagne- se réuniront dans les jours à venir, afin de discuter de l’ampleur des nouvelles sanctions imposées à l’Iran, et de déterminer la liste des responsables religieux qui se verront dans l’interdiction de voyager, ou qui verront leurs comptes bancaires gelés. »

Asharq al-awsat, ou « Moyen-Orient », est un quotidien panarabe tiré à près de 200.000 exemplaires. Fondé à Londres en 1978, le journal est aujourd’hui édité par Saudi Research and Marketing Limited, dont le dirigeant n’est autre que le demi-frère du roi d’Arabie Saoudite, le prince Salman Ben Abdel Aziz. Distribué en Angleterre, au Maghreb et au Machreq (Proche-Orient), il se définit comme étant “le journal international des arabes“. Ses pages d’informations se composent essentiellement de traductions de dépêches d’agence. Le journal détient l’exclusivité pour les articles consacrés au monde arabe dans le Washington Post, dans USA Today, ainsi que dans le Global Viewpoint. L’actuel rédacteur en chef d’Asharq al-awsat est Tariq Alhomayed. Présent sur le Web depuis décembre 1995 en arabe et en anglais.
www.asharqalawsat.com