Elle débute par des clichés de Dresde détruite par les bombardements alliés en 1945, et s’achève par des images de Détroit aujourd’hui. Pourtant, l’exposition photographique « Apocalypse, la disparition des villes », qui se tient au Pavillon populaire de Montpellier jusqu’en février prochain, n’est ni une rétrospective historique ni un plaidoyer anti-guerre. C’est une interrogation sur les formes urbaines et les aspects que prennent leurs mort.
L’approche est pour le moins originale. « Une continuité, par la photographie, de la thématique de la ruine développée en peinture au XVIIIème siècle» explique Gérard Milési, médiateur culturel de la galerie. Mais pas seulement. Elle explore également une réflexion beaucoup plus novatrice: celle de la ville vide. Une idée devenue depuis les années 2000 « un genre en soi » selon Alain Sayag, commissaire de l’exposition. « L’espace urbain est traité comme si il ne subsistait plus de l’humanité que des monuments vides. » Ainsi, Dubaï, New York ou encore Canton sont immortalisés sans leurs habitants. Réduites au statut de maquettes sans vie, les bâtiments, les tours neuves et autres constructions extravagantes paraissent alors dérisoires. Même le temps semble suspendu. « Ces images surprenantes pointent du doigt l’uniformisation et la déculturation des nouvelle formes architecturales, tout en posant la question de la place de l’humain dans l’urbain » analyse Gérard Milesi.
Les villes sont loin d’être des entités durables
Mais elles viennent aussi illustrer des tendances beaucoup plus concrètes. Comme le font les photographies de Détroit qui sont, pour Alain Sayag, « beaucoup plus explicites sur ce qui semble se jouer aujourd’hui ». Devant l’objectif d’Yves Marchand et Romain Meffre se dévoilent des habitations abandonnées, laissées en friche et à la décrépitude. Des clichés qui résument à eux seuls l’histoire récente de cette ville américaine. Capitale mondiale de la production automobile à l’aube de la seconde guerre mondiale, les habitants ont fini par fuir. En cause, la baisse des activités économiques dues à la décentralisation des industries automobile et à l’automatisation des processus de fabrication. En 1950, la cité d’Henry Ford comptait près de 2 millions d’habitants. Aujourd’hui elle n’en abrite « plus que » 700 000. Désormais, la réhabilitation des maisons désertées semble impossible tant elles font l’objet de spéculations financières.
Un exemple parmi d’autres mais révélateur de ce que représentent les villes au sein du monde actuel. Des structures omniprésentes, symbole de notre modernité qui sont, malgré tout, loin d’être des entités durables. Et ce en dépit des richesses qu’elles peuvent dégager.