Vaccins obligatoires, débat piquant

Onze vaccins devraient devenir obligatoires au 1er janvier 2018 pour les enfants de moins de deux ans. Une mesure qui divise en France, pays le plus méfiant au monde vis-à-vis de la vaccination selon une étude anglaise publiée en 2015*.

Pro ou anti-vaccin : la polémique est relancée. Annoncée en juillet par la Ministre de la Santé, Agnès Buzyn, cette loi prévoit d’étendre l’obligation vaccinale aux huit vaccins jusque alors recommandés (coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque C), en plus du classique DTP (diphtérie, tétanos, polio).

Cette mesure est-elle réellement nécessaire pour remédier à la défiance française ? Le pédiatre Eric Jeziorski et Céline Demeyer, vice-présidente d’Info-vaccins France, une association en faveur de la liberté vaccinale, nous répondent.

POUR : « On parle trop des risques et pas assez des bénéfices »

Dr Eric Jeziorski, pédiatre au CHU de Montpellier

  • L’obligation vaccinale est-elle réellement nécessaire ?

Oui, la population est insuffisamment protégée. Pour la rougeole, il faut que 95% de la population soit vaccinée pour stopper la propagation. Or, seulement 70% des français ont les deux doses de vaccins requises. En 2011, il y a eu le retour d’une épidémie de rougeole qui aurait pu être évitée grâce à la vaccination. Autre exemple, la polio n’a pas encore été éradiquée, les pays du nord de l’Europe qui ont retiré l’obligation ont vu des cas ressurgir. L’obligation ou la recommandation d’un vaccin n’est pas liée à la gravité la maladie.

  • Est-ce dangereux de ne pas être vacciné ?

Oui c’est dangereux. Il s’agit de prévenir des maladies qu’on ne peut pas traiter. Le tétanos est une bactérie présente dans le sol, il n’y a pas moyen de l’éradiquer. Tous les ans il y a des cas de coqueluche sur des nourrissons, allant jusqu’au décès. La rougeole, c’est 800 cas sévères par an. C’est intolérable. Les complications existent même si elles ne sont pas visibles. Ce sont des maladies infantiles, les nourrissons sont la population la plus fragile.

  • Pourquoi obliger à la vaccination?

Il y a une trop grande défiance par rapport à la vaccination. Cette loi est basée sur la recommandation de la concertation citoyenne de 2016, menée par le Pr Fischer, demandée par le gouvernement. Il s’agit d’une obligation temporaire, jusqu’à ce que l’on retrouve un taux de couverture vaccinale suffisant, afin d’éviter la ré-émergence des maladies.

  • N’y-a-il pas un intérêt économique sous-jacent en faveur des laboratoires ?

Ce sont des thèses complotistes, auxquelles je n’adhère pas.

  • Comment expliquer une telle défiance des français à l’égard de la vaccination ?

Il y a une peur des effets indésirables, qui sont rares et très surveillés. L’hépatite B provoquerait la sclérose en plaque. La corrélation n’est pas prouvée, alors qu’il y a 1000 cas d’hépatite par an en France. Le taux d’aluminium est faible dans les vaccins et la recherche se penche sur des adjuvants moins toxiques. En fait, on ne communique pas assez sur les pathologies. On parle trop des risques et pas assez des bénéfices de la vaccination.

CONTRE : « Les bénéfices restent à prouver »

Céline Demeyer, vice présidente de l’association Info vaccins France

  • Pourquoi être contre l’obligation vaccinale ?

C’est une restriction de nos droits fondamentaux, inscrits dans la Déclaration des Droits de l’Homme et dans la loi Kouchner de 2002. Cela nous nous permet de disposer librement de notre corps. Nous militons pour la liberté vaccinale. Pour cela, on informe sur la législation et sur les risques, présents sur la notice des vaccins. On milite pour que les médecins nous informent justement. Les effets indésirables ne sont pas reconnus dans la profession. Mais on ne donne pas de recommandation, le plus important c’est que la population ait la vérité.

  • Pourtant vous informez sur les risques, mais pas sur les bénéfices ?

Les bénéfices restent à prouver. Les études officielles disent qu’il n’y a pas de corrélation entre hépatite B et sclérose en plaque, mais qu’il y a une corrélation entre vaccination et baisse de la rougeole. Pourquoi la corrélation serait-elle valable que dans un sens ? Il y a des études indépendantes, notamment du Pr Romain Gherardi, qui prouvent que l’aluminium est neurotoxique.

  • Cette loi profiterait-elle davantage aux laboratoires pharmaceutiques ?

Les laboratoires ne sont pas instigateurs de la loi mais il y a de l’argent en jeu donc il y a un intérêt pour eux. Il faut être plus clair sur les conflits d’intérêts. D’ailleurs, nous avons apporté notre contribution à la concertation citoyenne de 2016, mais notre avis n’a pas été pris en compte.

  • La vaccination est-elle uniquement dangereuse ?

Il y a plus de risques qu’on pourrait limiter. Avant 18 mois le système immunitaire des nourrissons n’est pas formé, il ne faut pas les surcharger. Il y a des enfants qui ne peuvent pas être vaccinés pour raisons médicales et qui sont parfois refusés en crèches. Il y a aussi des médecins qui refusent de suivre les patients non vaccinés. Avant la vaccination, chaque patient devrait faire des analyses pour vérifier qu’il n’y a pas de contre indication. Elles ne sont pas faites non plus alors que c’est inscrit dans la loi.

  • Vous préférez guérir que prévenir donc ?

Ne pas prendre le risque oui, mais c’est un choix personnel. Dans les années 1980, les médecins disaient que la rougeole était bonne pour la santé. Dans les chiffres, je ne vois pas de recrudescence de maladies. On parle d’épidémie de rougeole mais 24 000 cas ce n’est pas énorme. Si les vaccins étaient si efficaces, ils ne seraient pas obligatoires : les gens se vaccineraient d’eux-mêmes.

Les vaccins contre le VIH : où en est la recherche ?

Trente ans après la découverte du VIH, la recherche scientifique a effectué des avancées révolutionnaires en matière d’immunologie. 2011, à l’aube de nouveaux progrès dans la lutte contre le Sida, voici un point sur les avancées scientifiques concernant le vaccin.

Depuis le début de l’épidémie, au début des années 80, les chercheurs sont à l’affût pour mettre au point le traitement ultime, le vaccin. D’une façon générale, la mise au point d’un vaccin contre le sida est extrêmement délicate car les connaissances sur le virus sont incomplètes. De nombreux chercheurs, financés par des firmes ou des laboratoires, ont engagé alors une concurrence effrénée.

Vers un vaccin préventif ?

vaccinSIDA_M.jpgEn septembre 2009, des chercheurs thaïlandais et américains (laboratoire californien VaxGen) avaient annoncé à Bangkok, avoir mis au point un vaccin à même de réduire significativement le risque de contamination par le virus du sida. Un essai clinique conduit sur 16 000 personnes avait cependant montré l’effet modeste de ce vaccin expérimental, avec 30% de personnes infectées en moins par rapport au groupe témoin. Or il faudrait atteindre 60% pour constater un impact sur l’évolution de l’épidémie. Le vaccin était une combinaison de deux vaccins testés auparavant mais qui ne s’étaient pas révélés efficaces indépendamment l’un de l’autre. Même si les données sont positives, les chercheurs militaires américains soulignent que de nombreuses discussions doivent encore avoir lieu avant que quelqu’un décide d’utiliser des vaccins avec une aussi faible efficacité. Mais ils représentent toutefois une avancée scientifique qui encourage à poursuivre les recherches. « Ce résultat représente une percée car c’est la première fois qu’il y a une preuve qu’un vaccin contre le virus VIH a une efficacité préventive », ont indiqué dans un communiqué les chercheurs.

La découverte de nouveaux anticorps aux Etats-Unis

Le_virus_du_sida_s_agrippe_a_une_cellule_lymphocyte_T4_et_l_infecte.jpg Autre stratégie vaccinale explorée : de nouveaux anticorps, capables de neutraliser 90% des souches connues du VIH, ont été découverts par des chercheurs américains en août 2011. Le Professeur Dennis Burton et ses collègues du Scripps Research Institute ont isolé 17 anticorps qui deviennent de nouvelles pistes dans la recherche de vaccins. Les anticorps sont en quelque sorte les « armes » du système immunitaire contre les agents infectieux, virus ou bactéries. Dans le cas du VIH, ses multiples et rapides mutations lui permettent d’échapper aux anticorps. Les virologues ont découvert les nouveaux anticorps à partir de prélèvements provenant de quatre individus séropositifs, qui se trouvaient dotés d’une forte réponse immunitaire naturelle contre le VIH. En inhibant une protéine située à la surface du virus, ces anticorps empêchent le VIH d’attaquer les cellules immunitaires. Mais ces travaux restent à un stade encore préliminaire, les tests ont été réalisés in vitro, pas encore sur l’animal.

Un vaccin pour protéger le système immunitaire made in France

2867153-isol-le-virus-vih-2.jpgL’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a autorisé en octobre la société biopharmaceutique française InnaVirVax, du Génopole d’Evry en Essonne, à tester un vaccin thérapeutique (VAC -3S) contre le sida sur 24 patients sous trithérapie à l’hôpital Cochin et à la Pitié-Salpêtrière. Ce vaccin ne vise pas à protéger les individus sains du virus VIH, mais à aider ceux qui ont déjà été infectés à mieux s’en défendre, en protégeant le système immunitaire. Il faut être sûr qu’il ne provoquera pas d’effet néfaste, c’est donc un essai clinique de phase 1. Si un jour ce vaccin voit le jour pour le grand public, « le traitement sera plus léger pour le malade qu’une prise médicamenteuse journalière » nous apprends Joël Crouzet, fondateur d’InnaVirVarx. « Il consiste en trois injections intramusculaires du vaccin à 4 semaines de distance.» Ce traitement viendrait en complément des thérapies actuelles, basées sur les antirétroviraux, qui font presque disparaître toute trace du virus mais n’améliorent pas la défense de l’organisme. En bref, si les essais sont concluants, le vaccin VAC-3S deviendrait le premier traitement à renforcer les défenses immunitaires pour les patients infectés par le VIH.

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En conclusion, la recherche sur les vaccins représente un réel espoir et ouvre de nouvelles perspectives. Même si de précédents essais de vaccins contre le VIH ont donné finalement peu de résultats, les chercheurs continuent de poursuivre leur effort pour éradiquer cette maladie.