Le Languedoc-Roussillon devient un enjeu national pour Europe Ecologie

Par le 19 février 2010

De nombreux leaders d’Europe Écologie se sont réunis, mercredi 17 février 2010, pour un meeting animé à Montpellier. Daniel Cohn-Bendit, José Bové et Noël Mamère se sont donnés rendez-vous pour soutenir Jean-Louis Roumégas, tête de liste Europe Écologie LR. La campagne pour les régionales a pris des accents nationaux.  » Le Languedoc Roussillon est un laboratoire pour qu’émerge une nouvelle culture politique  » résume Dany le Vert.

19h15, la salle Fernand Pelloutier commence à s’échauffer. Elle attend les « stars » d’Europe Écologie. Soudain, la musique retentit et c’est sous une nuée de caméras que Dany, José, Noël et Jean-Louis se dirigent vers la scène.

«Il y a de l’ambiance ce soir», s’exclame Noël Mamère, invité surprise, qui a remis pour l’occasion son costume de journaliste afin d’animer le débat. Rapidement le ton est donné : les socialistes et Georges Frêche en prennent pour leur grade. «Le Languedoc-Roussillon a été le théâtre d’une vaste opération de manipulation du Parti Socialiste qui a préféré s’accommoder de M. Frêche. Quant à Mme Mandroux, la pauvre, elle a été sacrifiée par le Parti Socialiste.» Les régionales sont, pour lui, une étape dans la reconquête de la gauche. Europe Écologie représente une alternative au frêchisme, «variante du sarkozysme adapté au niveau régional

Un programme, point par point

«Il est temps de parler programme», lance Agnès Langevine, tête de liste P-O. Les spotlights laissent place à une lumière tamisée… Confortablement assis sur d’immenses canapés installés sur la scène, les uns après les autres, différents candidats présentent quelques points du programme d’Europe Écologie. Trois par trois, pour un temps de trois minutes chacun.

La perpignanaise ouvre le bal et parle de s’attaquer au chantier de l’emploi : «il faut créer des emplois non délocalisables.» Et cela passe par quoi ? « La transformation écologique de l’économie. Un exemple : la reconversion de l’agriculture qui développera des emplois et amènera une autonomie alimentaire de la région. » Puis, c’est au tour de Pere Manzanares de s’essayer à l’exercice des trois minutes, avec un maître-mot : l’euro-région. «Pour le moment, l’euro-région est plus virtuelle que réelle. Elle doit devenir l’instance d’une coopération gagnant-gagnant entre deux territoires. L’euro-région est une chance, la transformation un outil», dit-il avant de conclure sur quelques mots de catalan. L’accent chantant, Silvain Pastor, le Gardois l’a aussi : «il est nécessaire que notre région soit dénucléarisée et développe l’énergie positive. Le potentiel est là. Il faut décroître notre consommation d’énergie, gaspillée inutilement, et il faut mettre en place des moyens massifs pour cela.» Ce n’est pas Georges Fandos, le représentant héraultais de Cap21 qui va le contredire. L’agronome, adepte de l’aménagement équilibré du territoire, est aussi contre le gaspillage : «arrêtons avec cette société consumériste où si t’as pas une marque, t’es rien». En effet, «nous nous croyions à l’abri des désordres du monde. Il en n’est rien», tance Pascal Frissant, le tête de liste audois. Le viticulteur évoque les difficultés du monde paysan et viticole : «notre colère est au niveau de notre tristesse». Pour lui, il est clair qu’«il faut mettre de l’argent sur la table.» Et pour cela, changer le modèle de gouvernance. «Ici, la gouvernance actuelle est contestée. Ce n’est pas une question de personne mais de projet politique qui s’appuie sur la loi du plus fort», explique Nadja Flank, la représente de Gauche Alternative. Elle décrie le modèle de métropolisation abusif et prône la promotion de la diversité sociale et culturelle, et la coopération.

Transformation sociétale, démocratique, économique et écologique : on l’a compris Europe Écologie veut que les choses changent ! «Nous sommes les visionnaires», explique Georges Fandos.

Roumégas :« On part pour gagner !»

P1380304.jpg Finies les discussions au coin du feu, confortablement installés sur un canapé. Le patron est de retour. Avec ferveur et dynamisme, du haut de son pupitre, il réveille la salle : «c’est une urgence sociale et écologique. Si on n’agit pas, on ne s’en sortira pas !» Érosion du littoral, réchauffement climatique, folles dépenses énergétiques, tout y passe. Jean-Louis Roumégas rappelle quelques données du bilan économique de Georges Frêche : chômage le plus important de France, région dernière en terme de PIB par habitant, Languedoc-Roussillon champion du RMI… «On dit dans les médias, Georges Frêche est certes amoral mais il a un bon bilan. Ce n’est pas vrai. Pour un chantre du développement libéral, ce n’est pas un bon résultat ! » C’est le résultat de « rêves mégalomaniaques». Pour Roumégas, il faut sortir «de la tutelle de cette économie de la grande distribution qui nous tue». Le défi est lancé : «on va gagner ! En plus, il y a les copains du Front de Gauche avec nous.» Une alliance de second tour est annoncée : Europe Écologie et le Front de Gauche feront front commun contre Frêche… pour gagner !

José Bové: «l’alternative de cette région, c’est l’écologie»

P1380338.jpg Noël Mamère l’accueille comme «un des alliages fondateurs d’Europe Écologie avec Cohn-Bendit et Éva Joly», ajoutant non sans humour «l’alliance du taulard et de la juge». L’ex-leader de la Confédération paysanne José Bové se déclare «heureux» de revenir à Montpellier, où l’engagement des militants ne faiblit pas. Le député européen insiste sur l’importance de créer un pont entre l’Europe et les régions, et de renforcer les moyens d’actions en ce sens. Sans oublier les enjeux locaux qu’il connait bien, lui qui réside près de Millau : «je ne peux m’empêcher de penser au projet de la Salamane, et à l’implantation de cette plateforme logistique par Système U. Ce serait plus utile de donner ces terres à de jeunes agriculteurs locaux, au lieu de favoriser cette logique de concurrence déloyale inacceptable.» Le projet Agrexco n’a pas échappé à son courroux. Il s’engage au nom d’Europe Écologie et de la coalition des 85 associations : «si nous arrivons en tête au second tour, nous arrêterons ce projet immoral soutenu par Frêche.». Il achève son pamphlet sous les applaudissements du public : «nous avons quatre semaines pour montrer que l’alternative de cette région, c’est Europe Écologie ! Vive Europe Écologie Languedoc Roussillon !»

Daniel Cohn-Bendit: «l’écologie est une préoccupation universelle, même la femme du patron ne veut pas que le ciel lui tombe sur la tête».

Il était attendu comme le messie, Dany le vert. Orateur hors pair, il a fait un discours dont la ferveur et le franc-parler ne faiblissent depuis un certain jour de mai 1968, dans la cour de la Sorbonne. Il a rappelé aux militants qu’«Europe Écologie est la troisième force politique en France. Il n’y a pas d’alternance possible sans ! Ce qui est fondamental, c’est que nous serons dans les majorités de gestion. Peu importe que le PS fasse 20% et nous 17 ou 18%. Ce ne sera pas une défaite. Plus nous sommes forts, plus nous serons nombreux dans les conseils régionaux et plus nous pourrons effectuer une politique de transformation.» Le député européen réaffirme sa position d’ouverture au Modem ou au PS: «Nous cultiverons une culture de partenariat dans le respect d’un projet commun. Ne nous coupons pas de cela avec un jusqu’au boutisme incohérent». Il cite l’exemple improbable de l’Alsace, traditionnellement à droite, comme la seule région où les sondages donnent gagnant Europe Écologie : «nos militants, là bas, ont réussi à rassembler». Selon Dany, Europe Écologie se positionne sur beaucoup de sujets à gauche, mais concernant l’écologie, elle est centrale : «il s’agit d’une préoccupation au centre d’une lutte planétaire, universelle. Même la femme du patron ne veut pas que le ciel lui tombe sur la tête !»

L’État Major de Solférino sérieusement critiqué

Dans ce meeting, ce n’est pas tant la maire de Montpellier qui est critiquée, vue par Europe Écologie comme «une sacrifiée», mais plutôt le bureau national du Parti Socialiste. Pour ne citer que des morceaux choisis : «le PS a fait preuve de péché d’orgueil en pensant qu’ils étaient les seuls à pouvoir avoir une réflexion politique sur la région et en demandant ainsi la direction de la liste», selon José Bové. Cohn-Bendit ajoute : «les membres du PS ne sont pas nos adversaires, ni nos concurrents. Leur logiciel est resté collé au XXe siècle. Alors camarades socialistes, venez, nous sommes capables de vous emmener vers le XXI e siècle !» Revenant sur l’alliance manquée entre la liste de Jean-Louis Roumégas et celle d’Hélène Mandroux, il tape sur les doigts de Solférino, affirmant qu’une «solution locale avait été trouvé» et que lorsque la maire de Montpellier a demandé l’aval du bureau national, celui-ci a refusé. «Ils voulaient la direction de la liste et non pas une démocratie gérée à parité et à égalité».

Bien qu’en début de meeting Noël Mamère ait annoncé «le maelström des derniers jours est maintenant derrière», la pilule a du mal à passer…

Georges Frêche, «le parrain» a les oreilles qui sifflent

S’il y a bien une personne dont les oreilles ont du siffler, c’est le président de Région sortant : Georges Frêche. Chacun y va de son petit commentaire. Noël Mamère critique l’anti-parisianisme primaire du sudiste : «il n’y a pas Paris contre la province. Georges Frêche fait du localisme contre la démocratie.» José Bové souhaite en finir avec cet «égoïsme régional» et devient même poétique : «les coqs sur leurs tas de fumier croient que lorsque le soleil se lève, c’est parce qu’ils chantent». Quant à Jean-Louis Roumégas, il critique le «fait du prince» et «l’exploitation marketing de la morale politique». Une chose est sûre, le porte parole national des Verts ne porte pas Georges Frêche dans son cœur. Pas plus que Dany le Rouge : «vous avez un parrain. Vous pouvez avoir tous les projets que vous voulez pour la Sicile, vous ne gagnerez jamais face à la mafia. Ces clientélismes touchent des pans entiers de la société. Il faut en finir avec le frêchisme, avec cette gauche au visage ubuesque

Et même «Monsieur Météo» en prend pour son grade

La liste Génération Écologie de Patrice Drevet a été qualifiée d’«imposture» ou «d’usurpation de la démocratie» par Daniel Cohn Bendit. L’alliance de Drevet avec Georges Frêche au deuxième tour n’est un secret pour personne. Puis, ironisant sur les origines douteuses de ce produit «peine en vert», il a appelé les chercheurs qui ont «retrouvé» le père de Toutankhamon à faire des recherches pour retrouver les origines du Piscenois.

22h. C’est avec liesse et joie, que l’ensemble des candidats présents ont rejoint les « stars » sur scène. Applaudissements et pas de danses viennent clôturer la soirée. Le meeting d’Europe Écologie aura fait salle comble. Plus en tout cas qu’Hélène Mandroux la veille, qui n’avait réuni que 300 militants…

Retour au dossier spécial Régionales 2010 en Languedoc-Roussillon

Catégorie(s) :
Étiquettes : , , , , , , , , , ,

Vous avez aimé cet article ? Partagez-le !

à propos de l'auteur

Auteur : Julie Derache

« Un photographe est un funambule sur le fil du hasard, qui cherche à attraper des étoiles filantes » (Querrec) Diplômée du Master 2 Métiers du journalisme, je suis passionnée à la fois par les lettres, l’écriture et par la photographie. J'aime à reprendre les mots d'Eric Valli : « La photographie est avant tout, pour moi, la rencontre, la découverte, l’apprentissage d’autres mondes. Et le partage. C’est parce que ce métier est avant tout humain qu’il me passionne. » Ces propos résument tout. Mes expériences professionnelles, mes rencontres, mes passions, et surtout pourquoi j’ai choisi d’être à la fois journaliste et photographe. Amoureuse des mots, des livres, des images et des rencontres, j’ai toujours eu à cœur de comprendre le monde et de défendre ce que je crois être des causes justes. Curieuse, j’ai toujours voulu acquérir le plus de connaissances et d’expériences possibles dans divers domaines. Ainsi, mes multiples cheminements, atypiques bien souvent, se sont constamment éloignés des sentiers battus. Jeune, je me suis engagée par le biais d’une action pour la protection de l’environnement soutenue par PPDA, Roger Gicquel, Robert Hossein, entre autres. Grâce à cela, j’ai appris les bases du métier de journaliste, son éthique, et surtout à me dépasser pour aller vers l’autre. Ensuite, mon baccalauréat littéraire en poche, je me suis dirigée naturellement vers des études d’Histoire. Après ma licence, je suis allée voir ce qui se passait ailleurs, au Québec. M’intéressant à l’investigation et voulant m’immerger dans l’histoire du pays qui m’accueillait, j’y ai écrit un essai sur la femme amérindienne chrétienne en Nouvelle France dirigé par Paul André Dubois (Université Laval), explorant ainsi la culture et l’environnement des Premières Nations. A mon retour, je me suis vraiment lancée dans le journalisme. D’abord en intégrant le Master 1 Science Politique et le Master 2 Métiers du Journalisme, puis en faisant des stages dans le monde de la presse comme du photojournalisme. Notamment à l'Agence Vu, au sein de la rédaction locale, de la rédaction Culture/Magazine de Midi Libre et de celle de Polka Magazine où j’ai notamment eu la chance de pouvoir publier une première photographie commandée par Alain Genestar. Au sein du Master, j'ai également rédigé un mémoire intitulé « Au delà des clichés. Des évolutions du photojournalisme et de l'avenir d'une profession » sous la direction d'Edwy Plenel. A ce jour, je le retravaille en vue de le publier. Pour conclure, je pourrai vous dire, en reprenant les mots de Cédric Gerbehaye : « Je fais de la photo parce que j’ai des convictions », en ajoutant que pour moi le journalisme, c'est à la fois les mots et l'image, et que mon objectif est de faire des reportages pour documenter ce dont on ne parle pas, pour rendre compte, pour témoigner en prenant le temps, en analysant, en assumant sa subjectivité.