Bon anniversaire Claude Lévi-Strauss

Par le 27 novembre 2008

L’anthropologue français Claude Lévi-Strauss a 100 ans. A cette occasion, retour sur l’un des plus grands penseurs du XXe siècle, sur un humaniste qui a su apporter les clefs théoriques pour une compréhension de la vie sociale

Il y a de ces êtres humains qui sortent de l’ordinaire. Il y a des ces penseurs qui marquent une époque. Il y a de ces génies qui n’accèdent à la reconnaissance qu’une fois décédés. Trop peu sont ceux qui peuvent être discutés de leur vivant, honorés ou déshonorés pour leurs travaux. Claude Lévi-Strauss est de ceux là, il a aujourd’hui 100 ans.

Une vie pour comprendre

Claude Lévi-Strauss est avant tout un homme qui aime l’être humain. Un siècle d’existence dont une bonne partie consacrée à l’analyse de ses congénères résidant au fin fond de la forêt amazonienne. Anthropologue de génie, il a apporté aux sciences humaines une vision nouvelle sur ces peuplades du bout du monde trop souvent qualifiées de « barbares » par les explorateurs qui ont pu danser avec l’amazone. « Le barbare, c’est d’abord l’homme qui croit à la barbarie » leur répondait-il. De toute manière, ces voyages et ces explorateurs, il les haïssaient, reprise du célèbre incipit de son best seller « Tristes Tropiques » paru en 1955. « Ce que d’abord vous nous montrez, voyages, c’est notre ordure lancée au visage de l’humanité ». Une haine de ces voyages qui ne parvenaient qu’à saisir du bout du doigt ces cultures, sans jamais réussir à rentrer en profondeur dans leur constitution et leur fonctionnement. Des explorateurs qui colonisaient plus qu’ils apprenaient. Des explorateurs qui ne pouvaient se détacher de leur culture propre pour comprendre le différent.
Le différent, c’était sa raison de vivre, c’était son métier. « L’anthropologie est une discipline dont le but premier, sinon le seul, est d’analyser et d’interpréter les différences ». C’est en ces termes qu’il qualifiait sa science dans « Race et Histoire ». Faire des « barbares » des individus, étudier la « pensée sauvage » plutôt que la « mentalité primitive » qui, renvoyait selon lui, à une domination colonialiste savante. Il a fait de ces sociétés lointaines, un objet de compréhension du monde, un laboratoire d’étude de l’analyse de la vie sociale.

Reconnaissance unanime

Ses études, ses réflexions ont donné naissance à des publications, de nombreux livres, un courant issu de la linguistique : le structuralisme. Ce courant anthropologique suppose que la structure sociale génère des pratiques et des croyances propres aux individus qui en dépendent, de manière inconsciente. Elémentaire et pertinente, elle inspira entre autres Deleuze, Foucault ou encore Bourdieu.
Des travaux qui restent unanimement reconnus pour leur rigueur et leur précision. Décoré de la Grand-croix de la légion d’honneur, il fut également nommé commandeur des arts et des lettres. En 2008, ses écrits font leur entrée dans la prestigieuse collection de la bibliothèque de la Pléiade, à côté de ceux de Malraux, Gide ou Yourcenar.
Une récompense dont il ne se soucie guère, préférant dénoncer les dérives actuelles de nos civilisations.

Triste monde

Fuyant la France pour New York pendant la guerre, il assista aux prémices de la folie des hommes, il dénonça la transformation du monde. « L’humanité s’installe dans la monoculture ; elle s’apprête à produire la civilisation en masse, comme la betterave. Son ordinaire ne comportera plus que ce plat. » Phrase bien contemporaine. Elle a en vérité plus de cinquante ans. Ce monde qu’il aime tant semble au fur et à mesure se gangrené, ses terrains d’études favoris disparaître. « Vue du dehors, la forêt amazonienne semble un amas de bulles figées, un entassement vertical de boursouflures vertes, on dirait qu’un trouble pathologique a uniformément affligé le paysage fluvial ». Une maladie crée par l’homme qui finira par rendre ses tropiques bien tristes.

Un hommage à sa mesure

L’académicien est aujourd’hui centenaire. L’hommage qui lui sera rendu sera vraisemblablement à la hauteur de son œuvre, de sa carrière. Le quai Branly à Paris lui consacrera une journée le 28 novembre en proposant chaque heure une visite guidée à travers les 1500 objets qu’il a ramené de ses périples. Des films choisis par l’écrivaine Catherine Clément retraçant sa vie seront également diffusés tout au long de cette journée. Les nombreuses photographies qu’il a rapportées seront exposées.
Un hommage à sa mesure, humble, loin des strass et des paillettes, qu’il a toujours fuies.

Catégorie(s) :
Étiquettes : , , , , ,

Vous avez aimé cet article ? Partagez-le !

à propos de l'auteur

Auteur : Benjamin Gil

A l’âge de 16 ans, j’ai effectué des piges de sport pour le journal local de Dijon « Le Bien Public ». Cette aventure a duré au total cinq années où week end après week end, j’arpentais les terrains de football, de rugby, de handball et les gymnases de toute la Côte d’Or. Parallèlement à cela, après un Bac ES option économie, je me suis inscrit dans un D.U.T information communication à Dijon. Cette formation m’a ouvert les portes du plus grand quotidien sportif, « L’Equipe », dans lequel, à l’issu de mon stage de trois mois, j’ai été embauché en CDD en qualité de rédacteur iconographique. Malgré cette expérience très enrichissante, j’ai décidé à l’issu de ce stage de me réorienter, de quitter pour un temps la communication, pour m’inscrire et obtenir une licence de sociologie à Dijon. L’année dernière, l’envie de changer d’air, de revenir à ma passion première, m’a envoyé à Rennes où j’ai pu mêler la sociologie et la communication dans un Master 1 de sociologie des nouvelles technologies. Toujours très orienté journalisme, j’ai choisis de faire mon stage de trois mois dans une télévision locale, TV Rennes 35, en tant que JRIM (journaliste reporter d’image monteur) malgré le fait que la formation n’orientait aucunement vers cette voie. L’expérience fut passionnante, le travail enrichissant, la passion était revenue comme au premier jour. Je me suis donc inscrit au Master 2 de journalisme à Montpellier afin d’avoir enfin une base théorique dans ce métier. Toujours passionné de sport, je souhaiterais travailler dans cette branche si particulière du journalisme soit en presse écrite ou bien sûr en télévision.