Dominique Reynié revendique l’urgence de renouveler la pratique politique. Prof à Science Po Paris et directeur d’une fondation, il est habitué aux plateaux de télévision (C dans l’air sur France 5) et de radio (une chronique sur France Culture jusqu’en 2012). Mais l’heure était pour lui venue de passer du commentaire à l’engagement. « Je sentais que la tentation était là, chez un politologue il y a toujours l’envie de passer de l’autre coté du miroir », confie son collègue Pascal Perrineau, professeur et chercheur à Science Po Paris, un ami de trente ans.
Désigné après une interminable primaire régionale de quatre jours, il est définitivement adoubé tête de liste LR-UDI en mai 2015 avec une courte avance (deux voix face à Bernard Carayon, maire de Lavaur). Au cœur de son programme, la revalorisation de la région comme « pouvoir public » face à « l’affaissement de l’Etat ».
Inconnu au bataillon
Le professeur Reynié est un curieux produit, un homme politique qui ne veut pas en être un. « Il n’est pas un professionnel de la politique, il est dans l’efficacité et apporte une vision fraîche », se félicite Elisabeth Pouchelon, tête de liste Les Républicains en Haute-Garonne. Tous ses colistiers, mais également ses adversaires, s’accordent à dire qu’il n’utilise pas les codes politiques du milieu. Qu’il se pose souvent en candidat décalé, bref qu’il n’est pas du giron.
Ses partisans assurent le croire « sincère et novateur ». Un créneau qui peut séduire le citoyen désenchanté par la politique politicienne. « Ils m’ont désigné, accepté, ils ont pris le risque de prendre quelqu’un d’atypique, si c’est pour en faire un politique comme les autres ce n’est la peine », explique le candidat content de son positionnement.
« Illégitime, inexpérimenté, amateur, décalé », autant d’adjectifs utilisés par ses détracteurs, surtout dans son propre camp. Des élus ont criés au parachutage ? Dominique Reynié, 55 ans, les a pris au mot et s’est offert un saut en parachute à la communication bien orchestrée.
« Il est têtu ! »
Le prof aime faire la leçon mais n’aime pas s’en laisser donner. Et surtout pas par Nicolas Sarkozy qui a plusieurs reprises a haussé le ton et menacé de le démettre pour le faire entrer dans le rang. Une vive tension était né autour de la composition de ses listes régionales quand Paris avait voulu lui imposer des noms. Mais le rappel à l’ordre de l’ancien président de la République n’y avait rien changé. « C’est un têtu, un sacré gaillard, il ne plie pas facilement le genou », confirme son ami Pascal Perrineau.
Le 5 novembre, Reynié ne se dégonfle pas et présente au conseil national Les Républicains la liste définitive qu’il a choisie et déposée en préfecture de Toulouse. Résultat : des caciques et des apparatchiks locaux ont été rayés ou rétrogradés.
Désabusé, piégé, énervé par ce comportement insolent, Sarkozy encaisse. Cet affront que certains attribuent à son inexpérience est aussi l’expression d’une réelle agilité politique. Le sage professeur se paie d’ailleurs ce jour-là le luxe d’une ovation par un parterre ultra-sarkosyste.
Mais de retour à sa campagne locale, une autre embûche l’attend. Il est accusé par le sénateur Les Républicains Jean-Pierre Grand de ne pas être domicilié dans la région qu’il brigue. Lui, assure être inscrit sur les listes électorales et résider dans l’Aveyron depuis mars 2015. Au final, il exhibera un contrat de location. Mais celui-ci révèle que l’appartement qu’il dit occuper depuis toujours n’est qu’une chambre individuelle dans la maison de sa mère à Onet-le-Château. De petits arrangements avec la vérité qui montrent que l’ovni Reynié fait aussi sa politique comme les autres.
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