Le centre de dépistage de Montpellier lève le doute

Anonyme et gratuit, le centre de dépistage de l’hôpital Saint-Éloi accueille quotidiennement plusieurs dizaines d’hommes et de femmes. En une heure, les médecins et les infirmières du centre aident, conseillent et, surtout, permettent à leurs patients de se soulager d’un doute.

« Le numéro 12 s’il vous-plait ! ». Dans la salle d’attente du centre de dépistage de l’hôpital Saint-Éloi, à Montpellier, il faut savoir s’armer de patience tout en essayant de ne pas trop angoisser. Sur les murs, les affiches de prévention mettent un peu de couleurs. Sida, Hépatites B et C, Chlamydiae et autres IST entourent les nombreux jeunes venus aujourd’hui passer les tests. « Positiver c’est ma force », des messages optimistes pour détendre les nerveux et quelques magasines pour faire passer le temps à ceux qui ont déjà rempli le questionnaire, obligatoire pour tous.

Date de naissance, tests déjà effectués, raison de la visite, nombre de partenaires, fréquences des rapports sexuels, utilisation du préservatif, drogue, tatouage, voyage à l’étranger, hospitalisation, etc, les questions sont précises. Trois amies remplissent assidûment leur feuille, commentant certaines de leurs réponses. Dans la salle, une majorité de jeunes, garçons et filles, occupent les sièges auprès des rares quadragénaires présents. Seul, en couple ou entre amis, le dépistage se fait sans tabou. « C’est la première fois que je viens dans ce centre. Je suis là parce qu’une de mes amies m’a encouragé à le faire. Ça faisait longtemps que j’y pensais, mais je n’osais pas. », confie Sarah, 22 ans, étudiante en Science politique. « Je ne stresse pas trop, ça va. C’est juste une vérification, je ne pense pas avoir pris de risque. Enfin j’attends de voir comment ça va se dérouler. ». Pour son amie, Julie, ce n’est pas une première : « Moi, j’essaye de le faire une fois par an. Je suis arrivée cette année sur Montpellier et j’ai trouvé facilement l’adresse de ce centre sur Internet. ».

« Ici, nous avons un gros centre de dépistage, c’est une ville étudiante et il y a également une importante communauté gay. », explique Michelle, une des infirmières du CDAG (Centre de Dépistage Anonyme et Gratuit). « Nous accueillons 15 000 personnes par an en moyenne. La majorité sont des jeunes, dont certains sont envoyés par la Protection Judiciaire de la Jeunesse. Nous faisons aussi de la prévention dans les collèges de la région, auprès des classes de 3ième. », ajoute-elle avant d’accueillir son prochain visiteur.

« Pour vivre plus sereinement »

Après un entretien rapide avec un médecin du centre, qui offre également conseils et préservatifs, la prise de sang est effectuée par une infirmière. Sarah ressort du centre avec le sourire : « Je suis contente, ça s’est très bien passé. Le médecin ne te juge pas, il t’explique bien tous les tests et pourquoi il les fait. Je vais revenir plus souvent, parce que j’ai compris que même avec les préservatifs on pouvait attraper pleins de maladies, comme la chlamydiae. »

Une fois dehors, l’attente n’est pas terminée. Les résultats des tests ne seront disponibles que dans quelques jours et chacun devra revenir en personne pour savoir si, oui ou non, il pourra reprendre normalement le cours de sa vie. Le dépistage est « un passage obligé pour vivre plus sereinement », commente Jérôme, 31 ans, chauffeur, pour qui c’était la seconde visite. « On a toujours un peu peur, mais vivre dans le doute c’est ce qu’il y a de pire ».

Les questionnaires du centre de dépistage de Montpellier sont necessaires  pour savoir exactement quels tests doit passer le patient.

Les affiches de la salle d'attente se veulent originales, informatives et avant tout convaincantes.

Montpellier teste le dépistage rapide du Sida

«C’est une véritable innovation», le ton est donné : le test rapide de dépistage du VIH marque un tournant dans la lutte contre le virus. A l’initiative de Aides et de l’Agence Nationale de Recherche sur le Sida (ANRS), le projet d’expérimentation Com’test était présenté par Bruno Spire, président national de l’association, mardi 18 novembre à la faculté de médecine de Montpellier. Plusieurs responsables locaux de la Lesbian and Gay Pride et de SOS Homophobie étaient présents pour inaugurer ce dispositif dont Montpellier est la ville pilote.

Plus simple et plus rapide qu’une analyse en laboratoire, la personne s’auto prélève une goutte de sang sur le doigt. A la manière d’un test de grossesse, la bande immunochromatographique révèle son statut sérologique. Trente minutes plus tard, si la bande bleue apparaît le résultat est positif. Un gain de temps énorme qui, à terme, vise à réduire au maximum le délai entre la prise de risque et le dépistage, même si les trois mois d’attente restent pour l’instant la norme. La réduction de ce délai devrait permettre d’agir au plus vite tant au niveau du traitement que de la prévention. « Les personnes qui connaissent leur statut virologique se protègent davantage que les personnes qui l’ignorent», rappelle Bruno Spire.
Comme toute expérience, celle-ci portera sur un échantillon de population : les HSH (hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes). A l’origine de ce projet, un chiffre : la population masculine homosexuelle est soixante-dix fois plus touchée par l’épidémie que les hétérosexuels [[étude INVS, 2006]]. Dans l’Hérault, 36% des nouveaux cas diagnostiqués entre 2003 et 2007 sont des HSH, contre une moyenne nationale de 29%. Ajouté à cela un constat : un sentiment d’incompréhension et de jugement moral de la part des soignants à l’égard de personnes qui vont régulièrement se faire dépister.

Dépistage alternatif en 30 minutes

«Le VIH n’est toujours pas une maladie banalisée dans notre société, le jugement moral peut être un frein car ces personnes [ayant des pratiques à risque] se sentent en échec d’une certaine prévention», explique Bruno Spire. La démarche communautaire a été choisie pour y pallier. L’accueil, l’écoute et le suivi tout au long de la procédure s’effectuent dans un cadre non médicalisé par des volontaires formés par Aides. Et c’est justement tout l’intérêt de la démarche, car il est déjà possible d’acheter ce type de test sur internet pour le faire à domicile. Le test des laboratoires Biomérieux a été choisi pour l’expérimentation. Parmi les autres tests rapides agréés par les Autorités de Santé françaises et européennes, celui-ci a été jugé «plus fiable [à 98-99%] et plus maniable» précise France Lert, responsable du groupe dépistage à l’ANRS. Il ne s’agit pas de le substituer au dépistage classique par prise de sang. D’autant que contrairement au dépistage en laboratoire celui-ci ne permet pas de détecter d’autres Infections Sexuellement Transmissibles (IST) comme les hépatites. Atout majeur mis en avant par Aides : l’accessibilité. «Une offre de dépistage diversifiée permet d’attirer ceux qui n’ont pas suffisamment recours au dépistage» souligne le président de Aides. Si aujourd’hui la loi ne permet pas à des acteurs non médicaux de réaliser ce test, Roselyne Bachelot, Ministre de la santé, s’est dite favorable aux expérimentations menées par les associations. Dans le cas où cette expérimentation s’avèrerait concluante en terme de réduction des risques et de fréquence de dépistage chez les HSH, elle pourrait être reconduite auprès d’autres populations. Après Montpellier, le dispositif sera étendu à Lille, Bordeaux et Paris. L’étude prendra fin au mois d’octobre 2009, les résultats attendus fin 2010.

3 questions à Fanny Cherpe, Présidente d’Aides Hérault

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A 27 ans, Fanny Cherpe est Présidente de l’association Aides dans l’Hérault depuis mars 2007.

Pourquoi le centre d’Aides à Montpellier a-t-il été choisi?

Aides-Montpellier n’a pas été choisi. Nous sommes à l’initiative du projet et nous y travaillons depuis juin 2007, voilà pourquoi nous sommes les premiers à nous lancer. Lorsqu’au printemps 2007 nous avons senti les premiers frémissements [[Les scientifiques et associatifs impliqués dans la lutte contre le Sida commençaient à s’intéresser à cette nouvelle forme de dépistage pour le grand public. Le test rapide était jusque là utilisé par les soignants maniant des seringues et exposés au risque.]] en France de la possibilité de se saisir de cet outil de dépistage utilisé en Europe [[Les Pays-Bas et la Suisse ont recours au test rapide mais en présence de personnel médical. La France devient avec cette expérimentation le premier pays européen à proposer le dépistage rapide communautaire.]], Aides-Montpellier a décidé de sauter sur cette occasion. J’ai immédiatement été partie prenante du projet avec la volonté ferme de le mener à terme. Aujourd’hui je suis très heureuse et fière du travail accompli par l’équipe. Nous sommes aujourd’hui 10 personnes, volontaires et salariés, formées au dépistage rapide.

Combien comptez-vous faire de dépistages?

L’objectif de l’étude n’est pas quantitatif mais bien qualitatif. Nous pensons néanmoins dépister 3 à 4 personnes par permanence pendant un an, ce qui nous amène à près de 400 dépistages.

Comment allez-vous communiquer cette information auprès de votre public?

La communication se fait aujourd’hui par le bouche à oreille. Nous avons choisi de ne pas lancer le projet tambours battants afin de nous permettre de gérer le flux de personnes souhaitant se faire dépister plus sereinement. Mais très bientôt des flyers présentant le projet seront mis à disposition dans les lieux identitaires gays.

Sida : Un dépistage rapide bientôt lancé par Aides

Aides veut mettre à disposition un nouveau test de dépistage du virus du Sida

Lors de l’inauguration de ses nouveaux locaux (1), mardi 1er avril au soir, l’association Aides a annoncé vouloir mettre en place un dépistage rapide du virus du sida, d’ici la fin de l’année. Le principe est simple. Une goutte de sang (prélevée sur un doigt) dans un boîtier et, vingt minutes après, le résultat (fiable à 99,9 %) apparaît.

Les personnes seront reçues par les membres de Aides, dans deux pièces, pour faire le test mais surtout pour discuter et être orientée.
« Ce projet est expérimental, associatif et non médicalisé. Nous voulons être un auditeur en plus des autres centres de dépistage, explique Jean-Philippe Morel, coordinateur départemental. Si le test est positif, nous enverrons la personne vers les structures classiques. »

Néanmoins, comme pour les autres tests, il faut compter un délai de trois mois avant de déceler le virus. « Ce n’est donc pas un permis de baiser, prévient Alain Ligni, secrétaire de la délégation départementale. Le résultat signifie que la personne est saine à un instant T, c’est tout ».

L’association projette de créer le même système pour déceler l’hépatite C. La volonté des membres de l’association ne s’arrête pas au dépistage. Il existe également des groupes de parole, des actions de soutien pour les personnes séropositives et tout un travail de prévention pour les séronégatives.

Dans le département de l’Hérault, une personne sur 200 serait contaminée par le virus du Sida.

(1) Avenue Saint-Charles, ouvert le lundi, mercredi, vendredi de 14 h 30 à 17 h 30.

(article publié dans Midi Libre du 3 avril 2008)