« Avez-vous déjà vécu une situation de harcèlement scolaire ? », demande un élève à la rectrice de l’académie de Montpellier, Armande Le Pellec-Muller. Collégiens et lycéens impliqués dans la vie de leur établissement et élus aux Conseils de vie de leurs écoles sont invités à la journée « non au harcèlement » ce vendredi 4 novembre. L’Académie accueille associations, écoliers et enseignants à la Canopé de Montpellier, son espace de création et d’accompagnement pédagogique.
Depuis 2015, le ministère de l’Éducation organise une journée nationale de lutte contre le harcèlement scolaire, chaque premier jeudi de novembre. L’objectif : sensibiliser parents et élèves. La campagne de sensibilisation 2016-2017, s’attaque au cyberharcèlement, c’est-à-dire le harcèlement au travers des réseaux sociaux et des téléphones portables, loin du regard des adultes.
Élèves et lanceurs d’alerte
Des collégiens ont interrogé la rectrice, Armande Le Pellec-Muller. Les élèves buttent parfois sur leurs mots mais ont préparé minutieusement leurs questions. « Comment expliquer aux témoins muets qu’ils sont complices de leur silence ? » ; « Que pensez-vous de la notion de harcèlement modéré ? » ; « Comment se faire entendre quand certains parents se voilent la face ? »
Armande Le Pellec-Muller souligne le rôle prépondérant de lanceur d’alerte des élèves. « Vous devez briser la loi du silence, assure-t-elle. Les plus forts ne doivent pas s’imposer face aux plus faibles. Il ne faut jamais renoncer à parler et dénoncer ces situations de harcèlement ». Questionnée par un collégien sur les raisons qui poussent à harceler, la rectrice affirme que « les harceleurs ne sont pas bien dans leur peau. Il faut les dénoncer. » Jacky Pamart, président de l’association Hope for Education, dont les médiateurs interviennent dans les écoles pour lutter contre ce fléau, confirme que « les élèves demandent à être acteurs, ils sont pleins d’initiatives. »
700 000 cas de harcèlements scolaires
Armande Le Pellec-Muller rappelle que 700 000 cas de harcèlements scolaires sont dénombrés chaque année en France, soit environ un élève sur 20. Un chiffre d’autant plus important que le nombre de cas non décelé reste inconnu. La rectrice insiste sur l’importance de sensibiliser l’ensemble des acteurs : élèves, parents, professeurs et surveillants. Ils doivent être capables de détecter les « signaux faibles », ces détails, même infimes, qui permettent de dénoncer une situation de harcèlement. « En tant que pair, insiste la rectrice, vous pouvez, au même titre que les professeurs ou vos parents, aider vos camarades qui souffrent en silence. »
« Les professeurs aussi sont en capacité de déceler des cas de harcèlement au travers des différentes mises en situation des élèves, nous précise la rectrice. Même si on est 30 dans une classe, il y a des moments privilégiés pour identifier des élèves en difficulté : au travers des travaux collectifs, des prises de parole individuelles ou lors des interactions avec le professeur. »
« Il faut valoriser les bons comportements »
Le militant québécois Jasmin Roy met en œuvre une autre approche. Avec sa fondation, il se rend dans les écoles du Canada pour y instaurer un climat scolaire positif et bienveillant. Il a également écrit un livre intitulé Sale pédé (éditions de l’Homme) pour sensibiliser à l’homophobie à l’école.
« Pour mettre fin aux harcèlements, explique Jasmin Roy, il ne suffit pas de sanctionner les mauvais comportements. Il ne faut pas étiqueter systématiquement les harceleurs comme tels sans valoriser en même temps le bon comportement des élèves. Tous les acteurs doivent avoir une attitude positive. L’école doit très tôt apprendre aux élèves l’alphabétisation des émotions, c’est-à-dire apprendre à exprimer leurs émotions. Pour cela, ils doivent savoir créer du relationnel dès leur plus jeune âge afin d’éviter des situations de harcèlement. »
Jacky Pamart, et son association Hope for Education, essaie d’importer cette méthode. En France comme au Canada « les associations sont complémentaires de l’action gouvernementale. Elles doivent être encore mieux intégrées à l’action du gouvernement. »
À l’avenir Jacky Pamart souhaite que le ministère, les professeurs et les associations s’entendent pour que la lutte contre le harcèlement scolaire soit « universelle, accessible et mutualisée ».