A l’Arena, le handball devient show

Mercredi 14 décembre à la Park&Suites Arena. Ce soir, la récente salle omnisport montpelliéraine accueille le derby de handball entre le Montpellier Agglomération Handball (MAHB) et le club de Nîmes. Retour sur une soirée riche en spectacle.

Une salle moderne

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20h, devant l’Arena. Le bâtiment massif et moderne impressionne. Le toit qui couvre une immense baie vitrée est illuminé d’un bleu saphir. Une fois le portique de sécurité franchi, les gens pénètrent dans l’enceinte. A l’intérieur, l’architecture est également sublime. Mais le chaland est d’abord attiré par les lumières et odeurs des nombreux stands. Le vaste hall d’entrée propose tout ce que la société de consommation peut imaginer. Qui dit spectacle dit marketing. Après avoir payé sa place à partir de 9€ ou pris un pack de deux matchs à 12€, le consommateur de sport est fortement invité à se restaurer ou acheter un produit dérivé de son équipe favorite. Une fois le devoir de consommation accompli, il est temps de pénétrer dans l’arène.

Un show à l’américaine

20h45, dans les gradins. Les presque 9000 spectateurs présents tout autour du terrain assistent à un véritable show à l’américaine. Suspendu au plafond, un dirigeable survole la salle près de l’écran géant. Au sol, un alignement de jeunes handballeurs montpelliérains quadrillent le parquet. La lumière s’éteint, le speaker annonce les arbitres du match. Ces derniers se retrouvent sous les feux des projecteurs, accueillis au centre du terrain comme de véritables rock stars. Vient ensuite le tour des joueurs nîmois avant les montpelliérains. Un par un, les hommes de Patrice Canayer apparaissent sur fond d’une musique entrainante. Leur nom est scandé par la foule tandis que des flammes s’élèvent sur le terrain. A l’applaudimètre, il n’y a pas de match, Nikolas Karabatic est ovationné. Pour un spectacle total, il faut des stars. Le tout juste élu « champions des champions » par le journal l’Equipe en est une toute trouvée. Tous les yeux sont rivés sur lui, « Karabatic c’est le meilleur » résume un enfant en tribune. Cette entrée spectaculaire des joueurs peut paraître exagérée pour une rencontre de championnat qui oppose le leader à l’avant-dernier. « Mais c’est bon pour le hand » rétorque Christelle, la compagne d’un joueur, présente parmi les spectateurs.

21h début du match. Le show se poursuit. Les joueurs locaux sont encouragés par une fanfare dans la tribune allouée à leurs supporters. Les yeux rivés sur eux, un speaker chauffe la salle au micro et réclame une ola à chaque temps mort. Outre les « Montpellier, Montpellier » et autres trompettes des supporters, la rencontre est rythmée par diverses musiques émises par la sono de la salle. Ainsi, un célèbre morceau, extrait de Star Wars, résonne lorsque les joueurs du MAHB tirent leurs penaltys.

22h30, coup de sifflet final. Sur le terrain aussi le spectacle a tenu toutes ses promesses avec un suspense haletant jusqu’au bout. Le MAHB s’impose sur le fil grâce à un but à 10s de la fin. Le Rideau se ferme sur le parquet. Seuls les plus privilégiés pourront poursuivre la fête dans les loges VIP de l’Arena…

Troisième mi-temps dans les coulisses des loges V.I.P.

photo_coulisses.jpg 23h, devant les portes des loges VIP. Les vigiles veillent, il faut montrer patte blanche pour entrer. Une fois à l’intérieur le spectacle est alléchant. Plusieurs tables sont garnies de charcuteries, fromages et autres victuailles. Tenue de soirée et sourire aux lèvres, de charmantes hôtesses reçoivent les invités, journal l’Equipe à la main. En Une du quotidien : Nikola Karabatic. Champion des champions, le handballeur est la fierté de Montpellier.

Une centaine de personnes se rassemblent sous un éclairage teinté de jaune et de violet. L’ambiance est feutrée. Sur l’estrade, le Président de l’Agglomération de Montpellier Jean-Pierre Moure ne cache pas sa satisfaction: « Le titre de Nikola fait honneur au sport de l’agglomération de Montpellier. Nous sommes la première agglomération de France sur le plan sportif. Je suis convaincu qu’on ira plus loin ». A ses côtés, l’ancien handballeur Joël Abati et actuel conseiller régional savoure : « Aujourd’hui, à travers ce titre qu’a reçu Nikola, c’est enfin la reconnaissance du handball ».

René Girard, entraîneur de l’équipe de football de Montpellier, est présent. Venu pour soutenir son homologue et ami nîmois Patrice Canayer, il ne tarit pas d’éloges pour Nikola Karabatic : « Il mérite amplement cette distinction. C’est un joueur formidable et un homme exceptionnel ». Les retrouvailles entre les deux entraîneurs se font sourire aux lèvres. « C’est quelqu’un que j’apprécie énormément, on se connait depuis longtemps » assure le coach des handballeurs montpelliérains, avant de conclure. « On échange beaucoup mais pas sous forme de conseils ».

Photo0173.jpgLa soirée poursuit son cours, et voit l’arrivée au compte-goutte des joueurs. Ceux-ci retrouvent leurs compagnes et amis, puis s’éclipsent discrètement. Deux heures après minuit, les derniers verres de vins sont versés. Tandis que les personnes encore présentes finissent de quitter les lieux, les petites mains s’affairent pour débarrasser le surplus de nourriture.

La presse sportive ne connaît pas la crise

Grande oubliée des États Généraux, la presse sportive semble moins sous le feu de la crise actuelle. Encore économiquement rentable, l’Équipe conserve son monopole ainsi que des ventes correctes. Un, deux puis trois nouveaux quotidiens sportifs tentent de prendre leurs marques sur un marché apparemment ouvert.
Radiographie d’un guerre entre plusieurs David et un Goliath.

Pour le sport en France, il y a une institution : l’Équipe. Elle jouit d’une position monopolistique depuis des années, et même des décennies. Elle a même atteint un tirage à faire pâlir les meilleurs quotidiens nationaux en 1998 pour la victoire finale de l’équipe de France de football en coupe du monde. Le succès ne se dément pas, porté par quelques évènements majeurs comme la victoire en coupe d’Europe en 2000, le bide retentissant de 2002 ou encore le coup de tête de Zidane en 2006. Depuis quelques temps pourtant, suivant le mouvement d’une presse qui se meurt, le quotidien connait une baisse de régime, plutôt importante si on la met en relation avec un été qui aurait du être porteur (coupe d’Europe de football, jeux olympiques). On note quelques tentatives pour contrecarrer l’image du journal roi comme le lancement du quotidien Élans en 1948 ou encore Le Sport en 1988, mais aucune d’elles n’aboutirent. Ces temps-ci pourtant, la concurrence se relance à l’attaque d’un géant qui connait, comme l’ensemble de la presse, un passage à vide ( -7% en septembre 2008). Le mois de novembre 2008 a vu paraître deux nouveaux quotidiens sportifs, à mi-chemin entre les gratuits et les payants (50cts) : Le 10 Sport et Aujourd’hui Sport, et le mois de janvier verra naître un troisième titre : Le Sport.

La nouvelle concurrence

3 novembre 2008. Un nouveau quotidien sportif vient marcher sur les plates-bandes du géant national. Son nom : Le 10 Sport. Crée par Michel Moulin, ancien conseiller sportif du Paris St Germain, et Alain Weill, patron de NextRadioTV, le journal est vendu 50 centimes en kiosque. Un prix inférieur à celui de l’Équipe (90 centimes), un même nombre de
pages, mais du côté de 10 Sport on se défend de faire concurrence à la référence.
« La France, qui ne compte qu’un seul et même journal sportif a le droit elle aussi, tout comme nos voisins Espagnols et Italiens, d’offrir aux lecteurs et aux passionnés de sport un nouveau journal« . Michel Moulin qui a notamment lancé Paru Vendu est conseiller du groupe Hersant Média, axe son quotidien à 70% sur le football, le reste du journal étant consacré au rugby, à l’omnisport et aux courses hippiques. Mais le football, c’est le fond de commerce de l’Équipe, sa matière première. Le Destroyer, malgré l’attitude du 10 Sport qui tente de calmer le jeu et se défend de toute récupération de lecteurs, ne voit pas d’un bon œil que l’on vienne chasser dans ses eaux. Ainsi, l’Équipe dès les prémices de la mise sur pied du 10 a contre attaqué en lançant du tac au tac : Aujourd’hui Sport. Quotidien, 50 centimes, là encore même format, axé football, l’Équipe a poussé le vice à délibérément copier son adversaire afin de le supprimer d’entrée et de récupérer une part des lecteurs qui auraient pu s’y intéresser.

Des objectifs pas atteints

« Le point mort se situe à 80.000 exemplaires vendus » a récemment annoncé Michel Moulin au Journal du Dimanche. Il va falloir pour lui revoir ses intentions à la baisse. Les premiers jours de parution se sont situés à environ 100 000 lecteurs par jour pour les deux quotidiens, jouant certainement sur la curiosité des lecteurs. Mais comme le signalait très justement Marie Odile Amaury, la patronne de Aujourd’hui Sport, les ventes lors des premiers jours ne sont pas significatives. L’effervescence passée, les ventes ont dégringolé. Selon des chiffres recoupés, les ventes moyennes du 10 Sport auraient avoisinées les 40 000 exemplaires, Aujourd’hui Sport lui, serait à 30 000 exemplaires par jour. Des ventes bien éloignées du chiffre d’équilibre. Face à ce constat d’échec, le 10 Sport s’est vu contraint à retravailler sa copie. Nouvelle maquette, nouvel habillage, le groupe s’est également associé au groupe Partouche afin d’ouvrir ses colonnes au Poker, de plus en plus populaire en France. De son côté Aujourd’hui Sport n’a rien changé sur la forme ou le fond mais est allé chercher son lectorat à la source en installant des points de ventes aux entrées des stades.
Guerre des nerfs, bataille de communication, tout est bon pour éliminer son adversaire et faire progresser les ventes. Dans cette histoire, c’est Le 10 qui a beaucoup à gagner mais aussi beaucoup à perdre. Marie Odile Amaury a d’ores et déjà annoncé que si Le 10 se retirait, elle cesserait la parution de son concurrent. C’est donc au journal de Michel Moulin de faire ses preuves et de tenter de conquérir son lectorat.

Après la guerre

Pendant que la guerre se déroule et que les chiffres n’incitent pas à l’enthousiasme, un troisième larron doit se faire du souci en ce moment. Le 26 janvier est programmée la sortie d’un troisième quotidien sportif : Le Foot. Il sera lancé par Robert Lafont, tiré à 150000 exemplaires et vendu à hauteur de 60 centimes. Devant le triste tableau que proposent les deux quotidiens lancés en novembre, le directeur d’Entreprendre reste serein. «Il reste la place pour un journal de foot de qualité» assure-t-il. Encore faut-il parvenir à faire de la qualité pour ce prix. Chose insolite, les ventes de l’Équipe ne se sont jamais aussi bien portées depuis l’apparition des deux journaux. L’Équipe se frotte déjà les mains en attendant le 26 janvier.