Rugby – L’incroyable parcours de Nemani Nadolo

Star de l’équipe de rugby de Montpellier où il est devenu rapidement la coqueluche du public, Nemani Nadolo détonne par son parcours. Des îles Fidji au Clapas, l’international montpelliérain a connu de nombreuses expériences, faisant de lui un véritable globe-trotter du monde de l’ovalie.

Un roc. C’est d’abord l’impression qui se dégage lorsque l’on rencontre le colosse fidjien Nemani Nadolo, ailier du Montpellier Hérault Rugby (MHR). Ses mensurations herculéennes (1m94, 135kg) en font une véritable terreur des défenses adverses. « Ma dernière saison était bonne mais je veux commencer celle là plus fort » déclare-t-il modestement. Il vient pourtant d’inscrire 9 essais en 8 matchs, une performance exceptionnelle.

Des racines fidjiennes

Né en 1988 dans une famille où le « rugby coule dans les veines », c’est tout naturellement que Nadolo grandit avec un ballon dans les mains : « mes oncles jouaient au rugby, mes cousins jouaient au rugby, mon père aussi… ». Une jeunesse que le jeune Ratu Nasiganiyavi, son véritable nom, passe au sein de l’archipel des Fidji perdu en plein océan Pacifique où le rugby est une religion. « Là-bas on est dans un autre monde, tout le monde est décontracté, les gens ont toujours le sourire aux lèvres, c’est très différent de tout ce que j’ai pu voir tout au long de ma carrière » observe-t-il. Les Fidji accrochées « au cœur », l’homme au plus de 25 sélections nationales y retourne dès qu’il peut. Au moins une fois par an, il effectue les 24 heures d’avion qui le sépare de sa terre natale.

Un globe-trotter hors-normes

C’est à 22 ans que Nemani Nadolo débarque en France « à la fois surexcité et terrifié » dans le club de Bourgoin (Isère). Une expérience très difficile dont l’homme a beaucoup appris « ça a été un apprentissage à la dure mais cela m’a forgé ». Arrivé dans un club au bord de l’implosion, le joueur se rappelle de 6 mois compliqués « certains joueurs n’étaient pas payés, il y avait beaucoup de tension, pour moi Bourgoin n’était pas un club professionnel ». Le jeune rugbyman quitte le club avec un goût amer « je me suis dit : je ne reviendrai plus jamais en France ». Une occasion manquée avec l’Europe puisque son expérience à Exeter « meilleure mais très frustrante car je ne jouais pas » ne lui fait pas retrouver l’amour de ce jeu.
Vient alors le « moment charnière » d’une carrière en perte de vitesse : le départ pour le Japon. « C’était soit cela se passait bien et je continuais, soit le contraire et j’arrêtais tout » révèle-t-il. Une « adaptation difficile » mais réussie qui permet au joueur de briller avec les Green Rockets de Tokyo. Une immersion de quatre années au sein de la culture japonaise où le « dépaysement » est total. « J’ai retrouvé mon rugby là-bas, sourit-il, c’était vraiment une super expérience… et puis la nourriture c’était un régal ! ». Une renaissance qui lui permet d’inscrire 55 essais en 4 ans et de partir pour le Super Rugby dans la célèbre équipe des Crusaders. Au firmament de son rugby, le fidjien reçoit alors un appel du club de Montpellier qui souhaite absolument le faire revenir en France. L’objectif est d’en faire un des joueurs majeurs de l’équipe de Jack White, ancien entraîneur du MHR. Après une courte période d’hésitation, la décision est prise : Nemani Nadolo a une revanche à prendre avec l’Europe.

L'ailier montpelliérain, auteur d'un début de saison remarquable, avoue préférer les grands espaces à la ville.

« Montpellier ? J’adore cette ville ! »

Une arrivée dans le Clapas qui fait alors grand bruit puisque le fidjien débarque en 2016 au cœur d’un recrutement cinq étoiles organisés par le club de Mohed Altrad. Contrairement à ce que son excellent début de saison dernière pouvait laisser transparaître, « l’adaptation au mode de vie européen a été un peu compliquée » après cinq années passés entre Japon, Fidji et Nouvelle-Zélande. Cela ne l’empêche pas d’être récompensé par l’Oscar Midi Olympique, rendant hommage à son excellente saison dernière. Il reconnaît que le cadre de la ville l’a beaucoup aidé  : « j’adore cette ville, l’une des choses que j’aime le plus ici, c’est que les gens sont très amicaux ». Après sa dernière expérience il profite également du climat méditerranéen de la capitale héraultaise, « ça me change vraiment de la dernière fois que je suis venu en France », s’amuse-t-il. Une atmosphère montpelliéraine que le fidjien prend aussi le temps de quitter, « je déteste deux choses ici, rigole-t-il, les bouchons et les corvées administratives ». Pour s’évader Nadolo n’hésite pas à visiter la région, « ce que j’aime beaucoup ici c’est faire des randonnées au grand air du coté du Pic Saint-Loup ou du Mont-Aigoual, relate-t-il, cela me permet de sortir de la frénésie du Top 14 et de l’enchaînement des matchs ». Un cadre de vie qui pourrait le convaincre de poser définitivement ses valises dans la métropole languedocienne. D’ailleurs il ne s’en cache pas : « je me sens vraiment bien ici alors pourquoi ne pas rester encore de nombreuses années à Montpellier ». Le MHR ne demande que ça.

Nalaga, nouvel empereur du Top 14

L’ASM Clermont Auvergne possède le nouvel empereur du rugby, il se nomme Napolioni Vonwale Nalaga. Meilleur marqueur d’essais du Top 14, le Fidjien est devenu en quelques semaines et seulement sept matchs, l’homme à abattre pour les défenses adverses. Portrait d’un joueur hors norme.

Chaque saison, la longue coupure du tournoi des six nations est un réel problème pour les grosses cylindrées du championnat qui se voient privées de leurs meilleurs éléments appelés en sélection. Cette année, les équipes françaises les plus représentées lors du tournoi étaient Clermont, Montpellier et Toulouse. Pourtant les Montferrandais n’ont pas semblé faiblir durant l’absence de leurs internationaux, parmi lesquels les ailiers Rougerie et Malzieu. Bien au contraire, le peuple auvergnat a vu éclore une pépite Fidjienne qui marque des essais comme elle enfile des perles.

« C’est le nouveau Lomu! »

En seulement sept matchs, Nalaga a frappé 11 fois, dont quatre rencontres d’affilé marquées par un doublé. Résultat, huit victoires consécutives pour l’ASM, dont sept agrémentées du point de bonus offensif et une première place en championnat. En 2006, la Coupe du Monde des moins de 21 ans est organisée en Auvergne. Les dirigeants clermontois découvrent alors le phénomène Nalaga. Jean-Marc Lhermet, le manageur du club raconte : « Nous l’avions repéré en juin 2006 lors du championnat du monde des moins de 21 ans. Nous l’avons suivi après, et nous lui avons proposé de venir faire un essai chez nous. Dès son premier entraînement, on a vu qu’il était hors-norme. Pour moi, c’est le nouveau Lomu! Son raffut est terrible, il ne donne pas l’impression d’aller vite, mais il est très difficile à prendre. »

Une force de la nature

Les défenses n'ont toujours pas résolu le casse-tête Nalaga

Chez les Nalaga, le rugby est une affaire de famille. Kavekini Nalaga, le père, faisait parti de le l’équipe des Fidji battue par la France en quart de finale de la coupe du monde 1987. « Napo » discute beaucoup avec son père et suivant ses conseils, il débarque en terre auvergnate durant l’hiver 2007. Ayant l’habitude d’évoluer au centre ou même en troisième ligne, le Fidjien est replacé à l’aile par le staff clermontois. « Je préfère tout de même évoluer à l’aile : les coéquipiers me passent le ballon et je n’ai plus qu’à foncer », avoue l’intéressé. Il débute avec les espoirs et très vite intègre l’équipe première. Malheureusement, une blessure au genou lors de son premier match contre Brive en mai 2007 le coupe dans son élan. Qu’importe ! Du haut de son mettre 87 et ses 104 kg, Napolioni est une véritable force de la nature. Les médecins lui prédisaient cinq mois d’arrêt pour son entorse du genou. Il n’en fut rien. « Physiquement, Napo est déjà hors norme. Quant au délai de retour après une telle entorse, je pense que c’est du jamais vu », dixit Jean-Marc Lhermet.

Une intégration « paradisiaque »

Il explose cette saison et permet aux Clermontois de posséder un sacré carré d’as sur les ailes avec Rougerie, Malzieu, Delasau et Nalaga. A gauche, la concurrence est ouverte avec le néo-tricolore Julien Malzieu. Un banc très fourni, c’est sans doute le petit plus qui a manqué aux jaunes et bleus en finale du championnat l’an dernier. Son intégration dans l’équipe s’est opérée d’autant plus facilement que l’équipe comptait déjà deux fidjiens dans ses rangs : Baï et Delasau. Son autre soutient, il va le chercher dans la religion. « Je veux devenir le meilleur. C’est l’un de mes objectifs. Dieu m’y aide. Comme il m’aide dans tout ce que j’entreprends ». Son doigt pointé au ciel à chacune de ses réalisations n’a rien d’un hasard. Le dimanche, il invite les autres Fidjiens qui jouent dans les alentours. « Nous entonnons des chants gospel et nous prions. C’est une façon de nous retrouver ensemble et de vivre notre religion ».
La paire d'ailliers fidjien de Clermont
Le public des jaunars est aux anges et Nalaga pourrait bien devenir l’empereur du Stade Michelin tout comme un certain Merceron en était le président en son temps. Pour l’heure, les Clermontois se déplacent ce weekend chez le dauphin Toulouse pour le match au sommet du Top 14. Une affiche à faire trembler des ailiers Toulousains pourtant très en verve cette saison.