La vérité sur les nouveaux rois du web

L’industrie de la musique est en pleine mutation. Les labels participatifs sur le web sont de plus en plus nombreux et ont su faire leur place. Coup d’État musical éphémère ou véritable révolution ? MyMajorCompany, l’un des nouveaux rois du web est en tout cas bien décidé à conserver son trône.

« La musique c’est ma vie. Je veux vivre de ma musique, de la scène, faire partager mes émotions et MyMajorCompany a été l’occasion de me lancer ! » Silenone, jeune artiste français en est convaincu : Internet et les plates-formes musicales communautaires online sont le moyen de se hisser en haut de l’affiche.

Symbole de ces nouveaux labels, MyMajorCompany (MMC), créée en 2007, a su s’imposer comme l’un des supports de référence au développement musical via Internet. Réunis il y a dix ans autour de la direction artistique de la major BMG (Bertelsmann Music Group), Anthony Marciano, Michaël Goldman et Sévan Barsikian ne se sont jamais quittés depuis.
Ensemble, ils ont créé leur première structure indépendante en 2004 : « Bamago ». Après une première expérience réussie sur internet et le buzz de l’humoriste Max Boublil, les jeunes entrepreneurs décident de monter MyMajorCompany avec un quatrième collaborateur, Simon Istolainen.
Aujourd’hui, les associés supervisent toute l’activité du label aidée d’une quinzaine de personnes. A leur tête Michael Goldman, fils de l’auteur-compositeur, Jean-Jacques Goldman.
10221_10.jpg

L’internaute se fait producteur

Le principe de ce label participatif est simple. Des apprentis chanteurs déposent leur candidature sur le site web de MyMajorCompany. L’équipe de directeurs artistiques fait le tri et sélectionne ensuite ceux qui, selon eux, ont le meilleur potentiel. Les artistes disposent alors d’une page personnalisée et gratuite sur laquelle ils peuvent faire découvrir leur musique aux internautes.

Cette étape franchie, le fonctionnement se déroule à la manière de courses hippiques : les internautes misent sur le meilleur cheval avec un minimum de départ de 10 €. « En théorie on a des décisions à prendre sur le marketing,
la pochette. L’influence se fait aussi au niveau de l’artiste. Nous communiquons
avec lui dans un espace semi-privé (réservé aux producteurs) où nous donnons notre avis sur les dernières maquettes, sur les flyers… Il y a une vraie relation, nous ne sommes pas des cartes bancaires »
, témoigne Senel, producteur enthousiaste sur MMC.
L’objectif est que chaque artiste réussisse à lever 70 000 euros, soit 7 000 mises de 10 €, pour produire et lancer son album. La distribution physique et numérique sur les plates-formes de téléchargement est ensuite assurée par des accords classiques avec des groupes d’éditions de disque, notamment Warner music.

En cas de réussite, les internautes producteurs se partagent 30 % du chiffre d’affaires et l’artiste reçoit 20 % du revenu net de ses ventes.
Quand à MMC, elle dispose alors de 50 % des bénéfices rapportés. Des fonds qui lui permettent en partie de financer son activité. Les autres apports viennent de la publicité sur le site web. « Le problème, c’est que le retour sur investissement n’est pas certain même si l’artiste sort un album. Allez sur le site de MMC, vous verrez des artistes inconnus qui ont pourtant été produits. Si derrière les disques ne sont pas vendus, le bénéfice sera bien mince voire nul » précise
Gilles Medioni, journaliste spécialiste musique. Un avis que partage Arianil, producteur sur le site « 80% des projets produits ne seront pas rentables et ce ne sont pas forcément les meilleurs qui réussiron ».
Quant à Bib, producteur ayant misé sur Ika, il conseille : « garde tes économies
sur ton compte en banque ou sur un livret car ce n’est pas ici que tu gagneras de l’argent »
.

Tremplin pour les artistes ?

Face à l’engouement développé pour MyMajorCompany, les artistes désireux de connaître le succès se sont pressés aux fenêtres web du label. Il s’agit, pour la plupart d’entre eux d’une première inscription sur un label participatif de ce
genre. Certains avouent même s’être décidés après le succès de Grégoire ou de Joyce Jonathan, preuve que cette alternative offrait de réelles opportunités.

« Les négociations avec les grandes maisons de disques ne donnent rien » avoue Josephina Fernandez, jeune chanteuse à l’univers latin.
Si le succès les intéresse, les artistes voient aussi en MMC un bon moyen de partager leurs créations. « Je préfère que l’on mise sur moi parce qu’on aime ma musique, plutôt que pour l’envie de se faire de l’argent » confie Zéro, déjà sollicité par 579 personnes. En attendant les 70 000 euros nécessaires à la production de leur album, les chanteurs espèrent séduire et se faire entendre. « MMC bouscule les choses en permettant à tous les chanteurs de s’exprimer de façon indépendante, explique Gilles Medioni. Les patrons de maisons de disque
n’ont plus le maître mot dans le secteur. Les internautes ont gagné une légitimité dans la sélection »
.

Un modèle imité

D’autres sites sont apparus, imitant le label participatif, à l’instar de BuzzMyBand. Une seule nuance : les artistes confirmés, tel Mademoiselle K ou Jil is Lucky (pub Kenzo), doivent participer financièrement à leur propre production.
Spidart, StationTubes, AkaMusic, All In My Music appartiennent eux aussi à cette nouvelle génération de labels internet.

Des concurrents qui présentent cependant entre eux de fortes disparités de fonctionnement. Chez StationTubes et AkaMusic, le palier de production à atteindre est ainsi cinq fois plus élevé que chez BuzzMyBand. Côté album, All in My Music et Spidart ont tous deux produit des disques pour deux fois moins d’argent que ne le fait MyMajorCompany.

Ces labels participatifs ont tous surfé sur la nouvelle vague internet, profitant du
buzz de certains de leurs artistes. Mais, si MyMajorCompany est une référence
dans la production de musique sur le web, elle ne concurrence pas vraiment les maisons de disque traditionnelles.

Ces mastodontes n’hésitent pas à s’adapter aux nouvelles technologies et à en
profiter, se servant de ces sites comme catalogues d’artistes. A l’image de Deezer,
Myspace ou MusicMe, le site MMC a su se démarquer, mais devra faire preuve d’inventivité pour conserver sa place dorée au royaume du net.

Réseaux sociaux : bonne ou mauvaise idée ?

Facebook, Myspace, Viadeo… Nombreux sont les réseaux sociaux, et nombreux sont les inscrits. Au delà de l’effet de mode, sont-ils vraiment utiles?

Plus qu’une utilité, une nécessité

Il existe une multitude de réseaux sociaux électroniques (RSE) ayant des fonctions différentes. En ce qui concerne les réseaux d’affaire, ils permettent de dénicher des partenaires, des clients, des fournisseurs, des profils de candidats à recruter ou au contraire des employeurs. D’après une enquête conduite par le moteur de recherche d’emploi Keljob.com, 70% des français considèrent les RSE comme un bon moyen de faciliter leur recherche d’emploi. Un des réseau francophone les plus important est Viadeo. Ce genre de réseau est très efficace, plus que des sites du genre Monster.

Il en est de même pour ceux du type Myspace qui sont devenus des viviers de jeunes artistes. Pour les internautes, cela permet aussi de découvrir autre chose que ce qu’on nous impose à la TV et à la radio, de s’ouvrir sur l’extérieur.
Serait-il possible d’avoir autant de contacts sans les RSE ? Vu qu’énormément de gens sont sur Facebook, ne pas y être peut même être un handicap, et des irréductibles ont fini par s’inscrire.
Il en est de même pour les RSE de rencontre, tels Meetic. Il est formidable de pouvoir rencontrer des gens qu’on aurait jamais croisé dans la vrai vie, faute de fréquenter les mêmes lieux. Les RSE sont une ouverture au monde et aux autres qui abolissent les frontières géographiques, cociales et psychologiques.

Une stratégie à risque

Cet étalement de la vie privée et professionnelle devant tous les internautes n’est pas sans risque. Alexandre Liénard, directeur de Bucephale Consulting, cabinet spécialisé en intelligence économique, renseignement d’affaire et contre-espionnage industriel, met en garde les entreprises contre les RSE d’affaire (viadeo, openbc…) et conseil des discutions en interne afin de définir des règles d’utilisation. Car avec ces réseaux, les entreprises risquent des débauchages, des pseudo-recrutements, des fausses rumeurs et de l’espionnage industriel. «Certains cabinets offensifs de renseignements privés utilisent de manière quasi-systématique les RSE afin de prendre les premiers renseignements sur des personnes pouvant parler de sujets ou entreprises qui les intéressent» explique Alexandre Liénard.

Ce monde qu’est devenu internet avec tous les RSE multiples et inimaginables, les forums, les mondes parallèles tel Second Life, finit par créer un terrain où il peut se passer beaucoup de choses, qui n’est pas encore bien contrôlé et qui prendra encore une autre dimension avec le Web 3.0. C’est le problème de la cyber-criminalité qui finit par en découler.
Pour Franck Bulingue, directeur scientifique du Master spécialisé en Intelligence économique, «au-delà du phénomène de réseaux, se pose désormais la question des nébuleuses Internet, méta-réseaux virtuels ou mondes parallèles dans lesquels pourraient se livrer, si ce n’est déjà le cas, les prochaines batailles de l’information». Il ajoute «Les enjeux sont d’importance et les risques énormes : sectes, mafia, islamistes et autres prédateurs pourront y recruter activement leur troupe».

En ce qui concerne les RSE de rencontre, type Meetic, il est souvent mis en avant le risque de tomber sur des gens peu fréquentables. Mais ce risque n’est pas différent de la vie réelle : ce n‘est pas en discutant 20 minutes avec quelqu’un rencontré à une soirée qu’on le connaît.

Comment les groupes se vendent sur Internet

Des sites communautaires servent de tremplin pour lancer la carrière de jeunes musiciens. Exemples en région…

Kamini, les Arctic Monkeys, Soko. Ces chanteurs ont été découverts après avoir créé le « buzz » (faire du bruit) sur Internet. La toile est dorénavant le nouvel outil qu’utilisent les groupes de musique pour se faire connaître… et repérer.
Leader des sites communautaires, MySpace offre aux artistes l’opportunité de se créer une carte de visite professionnelle sur le web.
Le groupe montpelliérain pop rock Koacha fait ainsi partie de la communauté du site. « La plupart des artistes qui sont sur MySpace utilisent leur profil comme une vitrine pour diffuser les dates de leurs prochains concerts, laisser des morceaux en ligne, des photos et des vidéos de leurs spectacles« , précise Jérôme, le batteur du groupe. « Pour démarcher les salles de concert, on préfère utiliser notre page MySpace. C’est très facile de la mettre à jour, alors qu’on a besoin d’un webmaster pour ajouter des infos sur le site dédié au groupe. C’est plus contraignant!« 
Accessible à tous, MySpace bénéficie d’une forte audience, ce qui permet aux membres d’élargir leur public : avec 3,3 millions de visiteurs par mois, MySpace France compte parmi ses membres quelque 200 000 artistes ou groupes musicaux. « L’attente du public est énorme. Les gens veulent découvrir de nouvelles musiques qu’ils n’entendent pas à la radio« , explique Marc Mayor, le directeur de MySpace France.
Autre avantage non négligeable: il n’y a pas de hiérarchie sur le site. Un groupe méconnu est donc sur un pied d’égalité avec des artistes vedettes, tels que la star américaine Madonna.
MySpace représente ainsi un véritable moyen d’échanges entre artistes. A Montpellier, le guitariste Emmanuel Jessua raconte comment son groupe de métal Hypno5e s’est créé de nouveaux contacts: « MySpace nous a permis de rencontrer d’autres groupes, de faire des concerts avec eux en Belgique et en Allemagne. En tant que groupe indépendant, c’était important de créer notre page pour faire connaître notre musique au grand public« .
Depuis avril 2007, le nouveau programme musical du site, Me, MySpace and My Band, organise des concerts gratuits dans la France entière afin de donner un coup de projecteur sur les artistes membres du réseau.
Les membres d'Hypno5e ont bénéficié de Myspace pour se faire connaître
Montpellier a ouvert le bal en accueillant quatre groupes locaux sur la scène du Rockstore: Koacha, Hypno5e et Trash Aka L, un duo électro rock. Ils ont d’ailleurs été sélectionnés sur la compilation numérique Me, MySpace and My Band (sortie en avril).
Fini le temps où les artistes passaient exclusivement par les maisons de disques pour faire produire leur album. Alors que la crise du disque s’accélère, les fans se procurent le CD de leurs artistes favoris sur Internet. La toile fait figure de voie royale où les succès se forgent. Mais la concurrence, elle, reste rude.

Lull, présent sur tous les blogs

Léna, montpelliéraine, et Olivier, lodévois, forment un duo attachant sur scène et dans la vie. Elle écrit, il compose, et ils chantent ensemble dans un groupe acoustique world pop, Lull. « La première chanson que j’ai interprétée est un standard du jazz : Lullaby of birdland. Le nom du groupe est tiré de cette expérience ; en anglais, ça désigne un moment d’accalmie », précise Léna d’une voix de velours.
Ces deux-là connaissent bien le système de promotion qu’offre MySpace, mais ils ne s’en contentent pas. Ils sont présents sur tous les blogs : Jamendo, plateforme de téléchargement gratuite et légale, ou My groovy pod, un site où les groupes peuvent faire des concerts retransmis en direct par une webcaméra. La chanteuse nuance pourtant l’effet promotionnel de ces blogs. « Il ne suffit pas d’avoir un profil MySpace pour démarcher les labels. Il faut présenter un communiqué de presse, une maquette, un visuel du groupe pour que la maison de production voie qu’on a un public derrière nous ». En attendant la gloire, les deux artistes s’inscriront prochainement au Tremplin Milonga de Nîmes.