Ces rapporteurs, à la fois juge et partie

Le dernier rapport en date intitulé La création et internet a été remis à Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication le 10 janvier 2010. L’un de ses auteurs est Patrick Zelnick. La légitimité et l’objectivité dans le choix d’un tel rapporteur laisse perplexe. Cela relève clairement d’une connivence entre l’autorité étatique et les intérêts des industries concernées. Petit tour d’horizon de ces rapporteurs rarement impartiaux.

Internet, Sécurité, Protection sociale, économie, environnement, médias, Sarkozy multiplie les rapports et les confie aux plus à même de défendre leurs intérêts dans ces différents secteurs. Une belle illusion de la démocratie, mais qui laisse planer le doute sur le travail des ministères et leur autonomie.

Internet, Culture

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Rapporteur : Patrick Zelnick

Le rapport Création et Internet de janvier 2010

Il s’était fixé pour but un partage équitable de la valeur entre créateurs de culture sur internet et consommateurs. Comment oser parler d’équité lorsque l’un des chargés de mission de ce rapport à un passé lourd de sens dans l’industrie culturelle, et notamment celle du disque ?
En 1973, il commence sa carrière dans l’industrie du disque sous la marque Polydor. Rapidement, il devient directeur du marketing international. En 1980, il quitte Polydor pour créer au sein du groupe Virgin, la première filiale de distribution en Europe. En 1988, il devient ensuite président de cette filiale de distribution. En 1999, il crée sa propre maison de disque indépendante. Quelqu’un m’a dit que c’est la maison de disque de Mme Carla Bruni-Sarkozy. Deux consones et trois voyelles Naïve l’ont-ils baptisé, un vrai jeu de dupes en somme. Sauf pour les deux principaux intéressés qui eux, sont loin d’être naïfs et pensent berner leur monde. Patrick Zulnick a donc une carrière totalement dédiée à l’industrie du disque, des intérêts dans l’édition (il est depuis 2006, membre du conseil de surveillance d’Actes Sud, une maison d’édition des Boches du Rhône). Son rapport est pourtant jugé impartial par le gouvernement…

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Rapporteur : Denis Olivennes

Le rapport sur la protection des oeuvres culturelles de 2007

Au moment de ce rapport, il est PDG du groupe la FNAC, et ce depuis déjà quatre ans.
Dans ce rapport, il réprouve fermement le piratage et intime des répressions dites « pragmatiques et proportionnées », allant du mail d’avertissement à la coupure de l’abonnement internet. Les mesures conseillées par ce rapport, montre tout simplement l’incompétence des industriels du disque à proposer des offres, et des solutions à la pseudo-crise qu’ils traversent. Et par là même c’est l’incompétence de Denis Olivennes à redresser la situation de la FNAC, qui se trouve « excusé et solutionné » par ce rapport. Il réprime donc la liberté des internautes, et dénonce la notion même de partage sur internet.
Pour lui, « la gratuité c’est le vol », il va même jusqu’à publier un ouvrage du même nom. Il ajoute même « internet est le tout à l’égout de la démocratie ». C’est dire la haine du Monsieur pour les libertés que propose internet. A l’université d’été du Medef en septembre 2009, il a également déclaré « Une société qui créée des interdits est une société qui progresse ». Merci patron.

Sécurité

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Rapporteur : Alain Bauer

Le rapport Bauer sur la sécurité globale de 2008

En matière de sécurité, de nombreux rapports pleuvent sous Sarkozy ministre de l’Intérieur puis président de la République. Alain Bauer demeure une référence en matière de sécurité pour Sarkozy après avoir inspiré les socialistes. Pas étonnant puisqu’il est le PDG d’une société privée de « conseil en sécurité urbaine ». Son activité : implanter des caméras de surveillance dans les « zones à risques ». AB Associates met son expertise sécuritaire au service des entreprises privées et collectivités territoriales. Pour n’en citer que quelques unes : EADS, tour SFR de paris, RATP de Paris, mais aussi le siège de la Défense. Sans oublier certaines municipalités comme Vitrolles, Lille le fief de Martine Aubry, et le royaume de Mickey, Disneyland. Le petit Nicolas a trouvé son Big Brother.

Economie

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Rapporteur : Michel Pébereau

Le rapport Pébereau sur la dette publique de 2005

Il préconise de limiter les dépenses de l’Etat sans dénoncer la diminution des impôts et taxations patronales. Pourtant le déficit est creusé par la faiblesse des recettes. Depuis 2000, il trône à la direction de la BNP Paribas, l’une des banques les plus puissantes d’Europe. Ses rapports incitent donc rarement à taxer les banques. Il préfère réduire les dépenses et dénoncer le trop grand nombre de fonctionnaires. Par ailleurs, il plastronne aux conseils d’administration des grandes sociétés du capitalisme français : Total, EADS, Lafarge, Saint-Gobain, Axa. Cet expert des finances publiques est donc le mieux placé pour conseiller l’Etat et combler ses déficits… à son avantage.

Crédit photo:
bakchich.info,challenges.fr,tempsreel,issopha.unbalog.fr,resultat.parismatch.com,lefigaro.fr

« L’année pourrie » du disque cherche un coupable

Les ventes de disques ont continué de chuter en 2007. 17% de moins que l’année précédente, une baisse suffisante pour que le Syndicat national de l’édition phonographique (SNEP) qualifie cette année de « pourrie ».

Les ventes de musique en ligne augmentent, de même que la fréquentation des salles de concert. Pourtant, le rapport rendu par l’IFPI [[International Federation of Phonographic Industry]], à l’occasion du Midem [[Le Midem est le Marché international du disque et de l’édition musicale. Il a lieu cette année du 27 au 31 janvier]] à Cannes ce lundi 28 janvier 2008 insiste lourdement sur le piratage.

Malgré les procès, les lois de plus en plus contraignantes, et les nouvelles technologies mises au point pour enrayer le phénomène, le téléchargement illégal de musique sur Internet, s’il diminue, continue d’être une réalité.

Le rapport Olivennes, commandé par le gouvernement et rendu en novembre 2007, proposait des moyens visant à compliquer le pillage, une manière de l’endiguer plus rapidement. Ce rapport, qui faisait suite à l’ouvrage du dirigeant de la Fnac, Denis Olivennes et dont il reprenait en substance la thèse, évoquait néanmoins le problème que posent les DRM [[Digital Right Management. Il s’agit de protection contre la copie appliquée aux chansons téléchargées à partir de serveurs payants. Le problème provient du fait que ces DRM empêchent certains lecteurs de lire les fichiers]] aux utilisateurs. L’IFPI botte en touche, arguant que ce faux problème est lié « au déploiement de systèmes de DRM propriétaires non compatibles par certaines entreprises de technologie ». Un moyen efficace d’oublier les soucis rencontrés par celui qui a téléchargé légalement son morceau, en le payant.

Les FAI coupables, la qualité n’est pas remise en cause

ifpi_logo.gifLe rapport de l’IFPI pointe du doigt les fournisseurs d’accès à Internet, qui détiendraient « la clé pour réduire significativement le piratage ». Il leur suffirait en effet d’interdire l’accès des internautes aux sites de téléchargement [[le FAI Free a mis un pied à l’étriller en fermant certains de ses newsgroups, groupes de partages où s’échangeaient illégalement films et musiques]].

Cette proposition, qui contrevient aux politiques nationales lancées en faveur des technologies haut débit, confirme l’état d’esprit général des industries du disque.

Les téléchargements illégaux restent perçus comme autant de chiffre d’affaire perdu, sans tenir compte du fait évident que tous les morceaux téléchargés n’auraient pas nécessairement été achetés. Le prix d’un album à sa sortie, souvent jugé excessif, semble normal, de même que la qualité des étals présentés depuis quelques années. Enfin, le support virtuel ne possède pas le cachet du disque acheté. Cela justifie les faibles augmentations des ventes en ligne.

En attendant, les véritables questions, notamment celles qui permettraient d’établir le nombre de jeunes artistes produits chaque année en dehors des circuits de télé réalité, ne sont pas soulevées. Et de fait, elles ne font pas débat.