4/4 Tout est bon dans le déchet : Déméter redonne vie à nos poubelles.

« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ». La phrase, empruntée au chimiste Lavoisier, résonne comme un leitmotiv dans la bouche d’Alex Arnal, responsable de la société SMTVD [[Société Montpelliéraine de traitement et de valorisation de déchets]] qui exploite le centre Déméter de la CAM sur l’agglomération de Montpellier.

Casque, gilet et couvre-chaussure sont de rigueur sur le site. La radio diffuse au volume maximum Anastasia et Jean-Jacques Goldman, faisant presque oublier le brouhaha incessant des machines.
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Les ouvriers, majoritairement des hommes, trient les matériaux qui arrivent en vrac sur un tapis roulant. Tous sont équipés de masques et de gants. Pourtant, l’odeur sur le site n’est en rien dérangeante, mais trier les poubelles jaunes peut s’avérer dangereux. Un ouvrier, une boîte en plastique remplie de seringues usagées entre ses mains déplore : « C’est probablement quelqu’un qui est sous assistance médicale et qui a cru bien faire en mettant cette boîte de plastique pleine de seringues à la poubelle jaune. ». Pourtant, le danger est réel. « Une à deux fois par an, il y a des cas de piqûre de nos employés par ces seringues usagées. L’ouvrier est immédiatement envoyé aux urgences et subit un suivi médical pendant trois mois.» précise Alex Arnal qui assiste, désolé, à la scène.
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Le centre reçoit parfois des déchets insolites. « 74 % des déchets qui sortent de nos locaux pour être recyclés sont du papier. Mais les gens jettent de tout dans le bac jaune. Pas plus tard que la semaine dernière, c’est une tête de sanglier que j’ai vu passer sur le tapis de tri. » s’amuse Alex Arnal.

25.% des déchets sont refusés et repartent en UIOM [[Unité d’Incinération des Ordures Ménagères]], couramment appelé incinérateurs.
« Les refus sont majoritairement dus aux erreurs de pré-tri des habitants. Mais le site a aussi du mal à recycler les petits objets comme les canettes en aluminium. » admet Alex Arnal. « L’agglomération de Montpellier qui possède Déméter et la société SMTVD [[Société Montpelliéraine de traitement et de valorisation de déchets]] qui gère le centre, travaillent sur l’amélioration du taux de refus. »

Le centre de tri Déméter a ouvert ses portes il y a 15 ans, sous l’impulsion du Districit (ex Agglo) qui anticipe alors la loi REP des producteurs d’emballages. « Dès 1992, Montpellier était la surdouée du tri sélectif, puisque Déméter était le deuxième centre de tri à s’implanter en France. » fait remarquer son responsable.
Mais si les techniques de tri évoluent à vitesse grand V, à Déméter, le tri se fait encore à la main. « Le centre qui n’a pas évolué depuis sa création doit être modernisé par l’agglomération dans les trois ans à venir. »
Cependant, innover dans le secteur du déchet est un processus complexe. Eco-emballage, premier maillon de la chaîne qui chapeaute le tri sélectif, cherche à recycler de nouvelles matières comme le plastique dur (les barquettes de jambons) ou les films plastiques. « Ce sont des expérimentations compliquées à mettre en place, car elles chamboulent toute la filière. » indique Alex Arnal. « Recycler les films plastiques, c’est habiliter tous les centres de tri à de nouvelles techniques, augmenter le volume de la poubelle jaune de 25%, donc le nombre de bacs, les passages de camion-benne, etc. Et puis il faut communiquer auprès de 60 millions de Français pour qu’une nouvelle matière entre dans le circuit. »

Chaque année, la progression en tonnage de déchets traités par Déméter est significative. En 2012, ce sont 22 000 tonnes qui doivent passer entre les mains des quarante-cinq employés du centre. C’était seulement 3.869 tonnes en 1997. « Cela peut s’expliquer par une augmentation de la consommation, une croissance démographique sur Montpellier, mais également une progression des gestes de tri. » souligne le responsable.
Une fois triées, les matières sont compactées et les balles s’alignent à l’extérieur du bâtiment, attendant d’être réinjectées dans notre quotidien. IMG_4416.jpg

3/4 « Les éco-organismes, c’est l’avenir de la filière déchets » soutient Gilles Cromière

Tout le monde le connaît, le petit logo recyclage d’éco-emballages. Et pour cause, le tout premier éco-organisme de France a vu le jour il y a 20 ans déjà. Mais au fait, c’est quoi un éco-organisme ?

Éco-emballage, pionner des éco-organismes

Encadré par la loi REP, l’éco-organisme gère des déchets qui nécessitent un recyclage spécifique et travaille en amont avec les entreprises, pour faciliter le recyclage des emballages de leurs produits.
Gilles Cromières, responsable du service bureau d’études de la région Languedoc-Roussillon à Véolia, étudie chaque appel d’offre lancé par les éco-organismes et tente d’y répondre au mieux, en respectant le cahier des charges imposé par la structure. « Notre travail à Véolia, c’est de s’assurer que la revalorisation des déchets imposée par la loi REP, fondatrice pour tout le secteur, soit effective. Nous organisons la mise en logistique du recyclage.» précise Gilles Cromières.

Zoom sur Écosystème

Ces dernières années, des éco-organismes fleurissent et révolutionnent toute la filière du tri. De l’éco-organisme spécialisé dans les ampoules usagées, à ceux qui se consacrent aux mobiliers, tous ont pour objectif de fédérer les acteurs d’un secteur autour d’une participation financière destinée au recyclage. Écosystème est le leader des éco-organismes en matière de recyclage des déchets électroniques. Il réunit autour de lui tous les producteurs d’objets électroniques, afin d’organiser le recyclage des produits en fin de vie.
Gilles Cromière explique : « Il y a quatre catégories de déchets électroniques qui répondent à quatre procédés de recyclage différents. Cela oblige le milieu du tri à innover, trouver toujours plus d’espace pour trier, catégoriser. Le problème c’est que le tri, tout le monde est pour, mais dès qu’il s’agit de créer de nouvelles structures, il y a levée de boucliers. On appelle ça dans le métier « Not in my backyard. » Stocker des frigidaires ou des machines à laver avant qu’ils soient recyclés, ça prend beaucoup de place. Par exemple, le local Véolia de Nîmes fait près de 2.300.m². »

Les éco-organismes au cœur de l’innovation

Le secteur est en processus d’industrialisation et grâce au développement du phénomène éco-organismes, les innovations sont au cœur des stratégies d’entreprises de déchets. « L’arrivée de nouvelles technologies, comme les smartphones, nous oblige à réfléchir à de nouvelles solutions de recyclage en permanence. Ça prend du temps et parfois, les contrats que l’on signe avec les éco-organismes sont trop courts pour que l’on investisse suffisamment d’argent dans nos centres de tri » souligne Gilles Cromière.

2/4 Le tri en centre-ville: manque de volonté ou manque d’information ?

En 2009, le service de ramassage des déchets recyclables via les sacs jaunes, a été étendu de l’Ecusson à toute la périphérie de celui-ci. La surface représente 66 000 Montpelliérains. Pourtant, une grande majorité des habitants de cette zone est encore mal informée. Par conséquent, beaucoup ne font pas le tri.

Simon habite dans le centre-ville de Montpellier depuis plus d’un an. Il trouve « étonnant » qu’une ville comme la nôtre, soi-disant « soucieuse de préserver la qualité de vie propre à son territoire » soit aussi peu équipée en matière de recyclage. Pourtant, le centre de la ville est pourvu, depuis 2006, d’un système de ramassage hebdomadaire des déchets recyclables. Même si les habitants qui trient leurs déchets sont de plus en plus nombreux, beaucoup ne savent toujours pas que c’est possible. Coline, par exemple, réside dans l’Ecusson et n’a « jamais entendu parler de ces sacs jaunes ».

Le dispositif géré par Montpellier Agglomération est pourtant simple : des « messagers du tri et de la prévention » distribuent chaque semestre dans les boîtes aux lettres un bon. Avec celui-ci, les habitants vont chercher chez des commerçants deux rouleaux de 25 sacs poubelles jaunes destinés à contenir les déchets ménagers recyclables. Ces sacs poubelles sont ramassés tous les jeudi matins. André Demaison, chargé de mission au programme local de la prévention des déchets, indique que cela est calculé pour que chaque foyer de la zone dispose d’un sac par semaine. Alors qu’Alexandre habite rue de l’Université depuis plus d’un an, il ne fait toujours pas le tri puisqu’il ne reçoit pas de bon pour les sacs jaunes: «si j’en avais, je le ferais », indique-t-il. Pour tout ce qui est du ramassage hebdomadaire, il y a selon lui « un manque d’information très net ». En fait, il est très probable, comme le craint André Demaison, que ces enveloppes se perdent dans le flot de publicités et finissent à la poubelle (grise !).

Par ailleurs, il arrive fréquemment que les commerçants, censés donner ces sacs, se retrouvent à court et ne puissent plus distribuer de rouleaux. Les propriétaires de la Chapellerie Alfred, rue de la loge, se sont portés volontaires dès le début de l’opération pour fournir ces sacs « parce que ça ne coûte rien de le faire ». Le couple de seniors voit de plus en plus de Montpelliérains venir sans bon car ils n’en ont pas reçu. Désormais, il est possible d’obtenir des sacs directement en se présentant à la maison de l’Agglomération munis d’un justificatif de domicile.

Dans le reste de la ville, encore nombreux sont les habitants qui n’ont pas accès à des poubelles pour le recyclage. C’est le cas de Pauline. Elle vient de quitter l’Ecusson pour emménager sur le boulevard Albert 1er. Heureusement, elle a trouvé une solution : grâce à une amie, elle s’est procuré des sacs jaunes et elle les dépose tous les mercredi soirs dans les rues de l’Ecusson pour qu’ils soient ramassés le lendemain matin à l’aube.

1/4 Le compost en ville, c’est facile

Cette année encore, l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEM) organise la semaine européenne de réduction des déchets. Une initiative suivie par l’agglomération qui proposera Place de Zeus, jusqu’à vendredi, une sensibilisation du public à travers différents stands d’informations et d’ateliers. Pourquoi est-il urgent réduire le poids de nos poubelles ? Comment ? Tout au long de la semaine, Haut-courant.com plonge dans nos bennes et vous donne quelques clés pour mieux comprendre les enjeux du problème et agir au quotidien. Aujourd’hui, le compost…même en ville.

Allez, un petit effort, remontons nos manches, bouchons-nous le nez et plongeons ! Que trouve-t-on donc dans nos poubelles ? Selon l’ADEM, on trouvera un peu plus de 20% de papier et de carton, 11,2% de plastique, 12,7% de verre, 3% de métal, 19,4 % de petits éléments divers et surtout 32,2 % de déchets dits putrescibles c’est à dire décomposables (restes de repas, jardins, cuisine….). On les appelle aussi les biodéchets. Au final, dans l’agglomération de Montpellier chacun d’entre nous génère 604 kg de déchets par an. Soit 247000 tonnes au total, de quoi remplir 230 terrains de foot sur une hauteur de 1 mètre. Alors oui : « Réduisons nos déchets, ça déborde ! » mais comment ?

Leçon une : le compostage. Il consiste à transformer nos biodéchets en fertilisants naturels. Premier avantage, il fournit un engrais 100% bio et gratuit pour le jardin ou les plantes de balcon. Deuxième avantage il permet de réduire de 40 kg par an et par personne le poids de nos déchets. C’est simple et place de Zeus on l’a tellement bien compris qu’on l’enseigne aux enfants. Olivier tient un stand pour l’association Apieu, l’Atelier permanent d’initiation à l’environnement urbain. Face à des gamins fascinés, il décortique la terre, passe des bestioles au microscope et explique les différentes phases du compostage. Et malgré les cris dégoutés que provoquent la vue des vers grouillants, le message passe bien. « Le compost ça sert à donner à manger aux vers et aux fleurs » affirme Benjamin, 8 ans, ce à quoi Salim ajoute : « Et ça fait moins de trucs dans la poubelle !» La vérité sort de la bouche des enfants.

Pourtant la grande majorité d’entre nous ne le fait pas. Pourquoi ? Parce que tous ou presque pensons que le compost est réservé à la vie rurale. Faux ! Habitants des centre-villes il existe au moins trois façons de composter en individuel ou en collectif.
En collectif tout d’abord. Certains quartiers, comme c’est le cas au square du Père Bonnet à Figuerolles, ont décidé de mettre à dispositions des riverains des composts collectifs. Quatre planches clouées, une notice d’utilisation écrite sur un panneau de bois et le tour est joué. Pour Enrique, familier de ce square qui est aussi un jardin collectif, le principe fonctionne : « Il suffisait de le faire pour que ça marche. La preuve il déborde. Tous les jours des gens passent en allant prendre le tram déposent leurs déchets et reviennent chercher du terreau quand ils ont besoin.» Deuxième solution, faire appel à l’agglomération. Sur simple demande et gratuitement elle fournit une installation en plastique, hermétique et sans odeur adaptée aux résidences et aux immeubles. Pour André Demaison, chargé de mission à l’agglomération du programme local de prévention des déchets, la demande est importante « Nous avons installé plus de 17000 composts depuis 2001, et trois projets d’équipement de grosses résidences sont en cours dans les secteurs Garosud, Mosson et Castelnau-le-lez. Les usagers prennent vite l’habitude et sont satisfaits »
Troisième solution : composter directement dans son appartement grâce au lombricompostage. Une petite boîte de quatre étages, une poignée de lombrics pour faire le travail et c’est tout. Là encore, pas de mauvaise odeurs ou de fuites désagréables. Il ne vous reste plus qu’à ouvrir le robinet situé en bas du bac pour récupérer le jus du compost qui, une fois dilué, vous procurera un engrais surpuissant. Yann, habitant de Boutonnet a installé un lombricompost dans sa cuisine il y a un an : « Au début il y avait le côté un peu bizarre : tiens je vais installer des vers dans ma cuisine. Au final y’a pas d’odeurs, on oublie vite les vers qui nous rendent bien service, ça fait marrer les gamins, les plantes sont contentes et si un jour on nous taxe en fonction du poids de déchets produits, j’aurai pris de bonnes habitudes. » Question prix, le composteur se vend entre 80 et 110 euros, auxquels il faudra ajouter entre 15 et 20 euros pour 250g de lombrics. Sur simple demande, ici encore, l’agglomération finance une partie de ces équipements pour les particuliers. Pour les plus modestes de nombreux sites expliquent comment fabriquer soi-même son composteur pour un moindre coût.

Enfin pour les plus fainéants, ne culpabilisons pas ! Il reste encore la poubelle orange, destinée à recevoir tous nos biodéchets. Ceux-là seront ensuite acheminés vers Amétyst, l’usine de méthanisation de l’agglomération. Grâce à ce procédé biologique, les matières organiques sont transformées en biogaz (producteurs d’électricité et de chaleur) et en compost.
Alors pas de quoi se décomposer, au final réduire ses déchets c’est pas si compliqué.